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Lettre d'information - n° 134 octobre - novembre 2021

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Des oreilles pour voir et des yeux pour entendre.

Que voit-on dans le film Wochenende – Week-end – réalisé en 1930 par Walter Ruttmann (1887-1941) ? Rien. Absolument rien si ce n’est un enchainement d’images noires qui défilent sous nos yeux. L’écran reste sombre. C’est un film sans image. Pourtant ce film, d’une durée de 12 minutes environ, raconte une histoire : celle d’une fin de semaine de travail en ville, semaine d’activité récompensée par un week-end de repos à la campagne, avant que, le lundi matin, retentisse à nouveau la sonnerie du réveil, indiquant ainsi le retour au labeur. Avec Wochenende, le guide narratif n’est pas véhiculé par l’image mais par ce que l’on entend car le film est réduit à sa seule bande-son. Un film « aveugle »1, mais un film sonore.

Articles - Christophe Lambert

Detlef Heusinger, directeur artistique du Studio Expérimental de Fribourg

Articles - une interview exclusive par Huihui Cheng (traduction Jonathan Bell)
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PREMIÈRE DE "DIE HEILIGE CÄCILIA" D'ANTON URSPRUCH

Le 17 février 1850, un petit-fils nommé Anton est né au cantor de la synagogue juive de Francfort-sur-le-Main. Le cantor, qui s'appelait Sänger, n'a apparemment jamais rencontré son petit-fils, car sa fille Anna Elisabeth avait été baptisée à l’église protestante au cours de l'intégration des Juifs dans les cercles bourgeois de Francfort, et avait ainsi complètement perdu le contact avec sa famille. En 1848, elle épouse l'éditeur politique Carl Theodor Urspruch, issu d'une famille d'artistes. Son fils Anton, cependant, est "né dans le berceau" de la "tradition séculaire du chant religieux" de la synagogue, comme le dira plus tard avec justesse sa fille Theodora Kircher-Urspruch.

Articles - par Chang Tang, traduction Jonathan Bell

MUSIQUE ASSISTÉE PAR ORDINATEUR / COMPUTER MUSIC


Drawsocket, un système basé sur le navigateur pour l’affichage de partitions en réseau

Nous avons publié précédemment la traduction de la première partie d’un article sur la technologie DRAWSOCKET (Drawsocket - 1). Cet outil bas niveau a depuis permis la réalisation du remote choir concert de la conférence tenor 21, et sera encore utilisé lors de sa prochaine édition à Marseille (tenor2022@prism-cnrs).

MUSIQUE ASSISTÉE PAR ORDINATEUR / COMPUTER MUSIC - Rama Gottfried, Georg Hajdu (traduction Jonathan Bell)



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Des oreilles pour voir et des yeux pour entendre.
par Christophe Lambert


Voir ce que l’on entend avec Walter Ruttmann le temps d’un Week-end.

Que voit-on dans le film Wochenende – Week-End – réalisé en 1930 par Walter Ruttmann (1887-1941) ?
Rien. Absolument rien si ce n’est un enchainement d’images noires qui défilent sous nos yeux. L’écran reste sombre. C’est un film sans image.
Pourtant ce film, d’une durée de 12 minutes environ, raconte une histoire : celle d’une fin de semaine de travail en ville, semaine d’activité récompensée par un week-end de repos à la campagne, avant que, le lundi matin, retentisse à nouveau la sonnerie du réveil, indiquant ainsi le retour au labeur. Avec Wochenende, le guide narratif n’est pas véhiculé par l’image mais par ce que l’on entend car le film est réduit à sa seule bande-son. Un film « aveugle »1, mais un film sonore.
Pour Week-end, le cinéaste allemand imagine donc une oeuvre dont les sons seraient enregistrés sur la bande optique de la pellicule sans que les images ne soient impressionnées. Une projection sonore dans une salle de cinéma – une salle obscure donc – qui réunit toutes les conditions pour une écoute acousmatique idéale.
Si l’on ne voit rien sur l’écran lors de la première projection de Wochenende à Berlin le 15 mai 1930, alors qu’entend-on ?
Dans la première partie du film qui évoque le travail (du début à 3’30 environ), le spectateur entend des sons ayant trait à l’activité humaine : bruits d’outils (scie, enclume, machine à écrire, caisse enregistreuse, etc.), bruits urbains, bruits de machines (cloches, train, voiture, avion, foule, etc.), bruits de communication (sonnerie de téléphone, bribes de conversations, etc.). La musique n’est pas absente de cette partie, mais elle est diégétique, au sens où, et pour reprendre les mots de Michel Chion, elle est « musique d’écran […] émanant d’une source existant concrètement […] dans le présent de la scène »2 : un violon, un piano, des vocalises, un lied de Schubert. Ici, même les musiciens et apprentis musiciens travaillent. Une fillette apprend sa récitation : Le roi des Aulnes de Goethe. Tous ces sons, qui ont en commun d’être brefs, alternent entre eux, à aucun moment ne se superposent, réapparaissent, donnant à l’ensemble un sentiment d’animation propre à la ville et à l’activité. L’ensemble se déroule sur un tempo rapide, résultat sonore d’un montage resserré.
La deuxième partie s’oppose à la première en raison de sa durée (plus longue, ici : 6’30 environ) mais aussi en raison de l’origine des sons et de leurs caractères temporels respectifs, moins succincts, plus étirés. Dans cette deuxième partie du film, c’est la campagne qui est convoquée, lieu de repos pour les travailleurs. Un homme sifflote, une voiture démarre et nous voilà hors de la ville et de son agitation. Cette section bucolique donne à entendre les sonorités propres à la campagne, au cadre pastoral : les animaux et les bruits de la ferme (coq, poules, cloches de bétail, aboiements, etc.), des rires, une bouteille que l’on débouche mais aussi une fanfare, des chansons. Les cloches d’un village sonnent la fin du week-end et les sons qui lui succèdent, dont certains entendus dans la première partie (téléphone, sirène, etc.), clôturent Wochenende en une courte coda (1’05 environ) imprimant à l’ensemble une forme A-B-A’.
En 1930, le son au cinéma est encore une nouveauté – le premier film parlant, Le chanteur de jazz, date de 1927 – et cette avancée technologique divise artistes et intellectuels. Avec Wochenende, Walter Ruttmann avance une proposition radicale, visant à démontrer l’indéniable pouvoir évocateur de l’élément sonore. « En niant tout ce qui a constitué le cinéma depuis son invention, c’est-à-dire l’image, et en focalisant la perception sur le paramètre sonore, il inverse le rapport perceptif qui domine à l’époque du cinématographe silencieux »3. S’adressant ainsi aux détracteurs du cinéma sonore, il prouve que le son peut à lui seul soutenir, comme dans la musique à programme, une véritable narration et le dresse comme un complément indispensable, une valeur ajoutée à l’image du 7ème art. Telle une démonstration, il compose un paysage sonore et invite le spectateur-auditeur à voir les scènes acoustiquement perçues. La critique de cinéma Janine Bouissounouse écrit en 1931 :

[…] les images ne manquent pas. Ruttmann n’en avait pas besoin pour ce qu’il voulait faire, il a tout simplement utilisé le son, comme on avait jusqu’alors utilisé l’image […]. Des bruits, des vrais bruits ont été enregistrés et montés […] ; pas une harmonie imitative, des bruits. De cette musique naissent des images ; par exemple le crescendo et le decrescendo de la fanfare évoquent inévitablement le défilé qu’elle accompagne. On voit les enfants qui chantent en faisant la ronde, on voit les couples d’amoureux qui s’enfoncent dans les bois, on voit les hommes attablés, qui, le soir du dimanche, entonnent une chanson à boire. Week-End film aveugle, dit Ruttmann, est en réalité une symphonie sur pellicule4.

Une question se pose alors : Wochenende appartient-il au champ du cinéma ou à celui de la musique ? Nous serions tentés de lui adjuger une double appartenance et d’affirmer que Wochenende reste une oeuvre cinématographique, comme elle peut être considérée aussi comme composition musicale par la technique du montage sonore sur pellicule, qui n’est pas sans rappeler la bande magnétique et l’usage qu’en feront plus tard les compositeurs de musique acousmatique.

[…] il a créé quelque chose qui n’a pas encore de nom, qui est une musique nouvelle, une musique réalisée avec des moyens appartenant en propre au cinéma, et c’est pour cette raison qu’on a pu dire que Week-End était un film5.

Un film, certes, mais dont la deuxième diffusion sera radiophonique, le 13 juin de la même année, soit moins d’un mois après sa première projection en salle. Avec la radiodiffusion, le film n’est plus film mais devient hörspiel – une pièce radiophonique – ou plus exactement Hörfilm- Symphonie, « véritable « cinéma pour l’oreille » où la technique du montage empruntée au septième art est mise à contribution pour la conception de différents plans, de différentes scènes incitant l’auditeur à laisser libre cours à son imagination »6. De plus, son édition en CD chez Metamkine7 dans la collection « Cinéma pour l’oreille » en 1995 ou sa présence au sein d’une anthologie dédiée aux musiques électroacoustiques8, autorise à penser que Wochenende est devenu une pièce maîtresse, fondatrice et intégrée à l’histoire de l’art des sons fixés. Mais à la différence de Pierre Schaeffer ou même de Luigi Russolo, l’objectif de Walter Ruttmann n’est pas ici de créer de nouveaux objets sonores ou d’innover dans la création d’un monde sonore inouï, mais bien de projeter dans l’imagination de l’auditeur les images manquantes de son film.

Dans cette pièce, la fonction musicale du bruit est clairement énoncée comme une figuration de la réalité recomposée sur le modèle musical. En l’absence d’image, Ruttmann s’affranchit totalement de toute synchronisation visuelle, ce qui lui permet de concevoir une musique pour elle-même […]9.

Musique aussi parce qu’avec Wochenende, Ruttmann inaugure les futures phonographies des compositeurs de musique acousmatique.

Il a fallu attendre Walter Ruttmann et son film Week-end, en 1931, pour qu’un paysage acoustique totalement organisé soit offert au public. Dès l’apparition de l’enregistrement de longue durée, sur la piste optique de ce film sans image, il a montré qu’on pouvait exploiter les réalités acoustiques brutes comme Dziga Vertov exploitait les images brutes dans son « cinéma-vérité », et inventer une narration à l’aide de ces seuls éléments. Le perfectionnement des techniques d’enregistrement a permis depuis d’autres types de réalisations, selon des prémisses comparables. J’ai personnellement baptisé « phonographies » ce genre de pratique, dont j’ai relancé l’idée au début des années 60, et dont j’ai proposé plusieurs exemples10.

Dans son livre L’audio-vison. Son et image au cinéma11 , Michel Chion rappelle les différentes attitudes d’écoute : l’écoute réduite, qui consiste à écouter le son comme un objet sonore en faisant abstraction de sa provenance, l’écoute sémantique, dont le son réfère à une signification comme dans le cas du langage verbal ou de toute expression codifiée (Michel Chion prend le morse en exemple), et l’écoute causale, la plus répandue :

« […] laquelle consiste à se servir du son pour se renseigner, autant que possible, sur sa cause. Soit que cette cause soit visible et que le son puisse apporter sur celle-ci une information supplémentaire, par exemple dans le cas d’un récipient fermé : le son qu’il produit en le choquant nous dit qu’il est vide ou plein. Soit, a fortiori, qu’elle soit invisible et que le son constitue sur elle notre source d’information principale »12.

C’est l’écoute causale qui, dans Week-End, est expérimentée par Ruttmann, car en choisissant des sons clairement identifiables et connus de tous, il invite le spectateur-auditeur à réaliser les images de son propre film, un film intérieur, en creux, un film personnel. Personnel, car le son anecdotique est intrinsèquement relié non pas à une mémoire collective mais à une mémoire individuelle, une bibliothèque sonore intime construite au fil des expériences audio-visuelles vécues.

Les sons entendus, dont la source se situe hors du champ de vision, soit à la radio, soit dans les hors champs du cinéma ou plus simplement derrière nous, sont des productions de notre mémoire. […] Une « image sonore » est réveillée en nous par l’écoute. Ses caractéristiques nous sont personnelles – notre mémoire étant empreinte de nos expériences propres. […] L’écoute constitue en quelque sorte une « réactivation » des instants passés stockés profondément, et le phénomène a le plus souvent lieu inconsciemment, cette résurgence se trouvant au coeur de la sensation. Cette image sonore est donc une image vivante, que nous régénérons dans l’espace de notre mémoire13.

Ainsi, le son d’une voiture par exemple évoque pour tous, même si l’on ne la voit pas, une voiture – pour peu que le sujet ait déjà vu une voiture en marche et ait relié le bruit « moteur » à l’objet « voiture ». Mais de quelle voiture s’agit-il ? À quelle marque appartient-elle ? Quelle est sa couleur ? Est-elle décapotable ? Trois ou cinq portes ? etc. Il en va de même pour les animaux, les sons qui évoquent la nature ou la ville, les êtres humains, etc. L’écoute causale est donc une écoute qui permet la projection d’images mentales fixes ou en mouvement, mais qui ne peut à elle seule rendre compte de façon précise de la description détaillée desdites images. Il est donc indispensable, pour que l’auditeur ne se perde pas dans la narration qu’il recrée, de lui faire entendre des sons bien connus de lui, des signaux acoustiques qui ne se prêtent à aucune ambiguïté. Et si Wochenende fonctionne comme film et/ou musique c’est parce que le réalisateur de La mélodie du monde fait le choix de sons clairement identifiables qui deviennent, dans un montage qui relève de celui de l’art cinématographique, des marqueurs sonores, véritables balises acoustiques.
Le son a donc une faculté imageante, mais François Bayle rappelle que cette « […] image audible est trompeuse, d’autant plus efficace comme leurre qu’on en discerne mal la « fenêtre », l’esprit étant par économie enclin à l’illusion référentielle, moins angoissante que l’effet 13 Daniel Deshays, Entendre le cinéma, Paris, Éditions Klincksieck, 2010, p. 13. de vide où se déploient les images, dans cet espace, ce silence, ce « noir » qui leur est nécessaire »14.

« Image audible » ou « image sonore », il convient de préciser maintenant ce que le mot image, en musique et particulièrement dans le domaine des musiques acousmatiques, peut porter comme signification, et de s’interroger sur la possible faculté imageante d’un son abstrait, c’est-à-dire non-anecdotique, dont la causalité nous est inconnue. « Une image nous offre son spectacle, son scénario… Interrogeonsnous sur l’image, qu’est-ce qu’une image ? »15.

Comme le souligne Renaud Meric dans sa thèse de doctorat, chez François Bayle « le fait, peu courant, d’introduire un tel commentaire sur l’image, au sein d’une oeuvre musicale dénote déjà l’importance de ce questionnement sur la relation directe entre l’image et l’écoute, la musique » 16 . En réponse à cette interrogation – qu’est-ce qu’une image ? – le compositeur français avance que la « limpide définition de l’image – acousmatique avant la lettre – peut-être venue à Gaston Bachelard de son expérience radiophonique :

… Toute image est une opération de l’esprit humain. Elle a un principe spirituel interne, alors même qu’on la croit un simple reflet du monde extérieur. […] La tâche du poète est de pousser légèrement les images pour être sûr que l’esprit humain y opère humainement, pour être sûr que ce sont des images humaines, des images qui humanisent les forces du cosmos. Alors on est conduit à la cosmologie de l’humain. Au lieu de vivre un naïf anthropomorphisme, on rend l’homme aux forces élémentaires et profondes17.

La notion d’image de son ou I-sons est établie par François Bayle dans ses articles intitulés « écouter et comprendre » et « propositions II : l’image de son comme figure »18. Il en livre une définition plus précise dans son article publié en 1994 dans le cinquième numéro de la revue Les cahiers de l’Ircam :

Je m’aperçois que ce terme, bien souvent, sème du malentendu. On pourrait penser que j’entends par ces images une musique virtuelle. Or pour moi, l’image est encore et toujours un objet relevant de la réalité : une matière nouvelle, propre à une musique figurale. Il y a certes là quelque chose de paradoxal : lorsque l’on entend un son déterminé quant à sa causalité dans l’espace et dans le temps, on est dans la bonne vieille expérience naturelle ; mais que se passe-t-il lorsque l’on entend un son projeté, émis par un projecteur de son, terme que je préfère à celui de haut-parleur…19.

François Bayle fait ensuite le lien entre une des premières images photographiques, celle de Niepce, La table mise (ou La table servie) antérieure à 1825, avec les premiers enregistrements.


Nicéphore Niepce, La table mise, photographie.

François Bayle relève l’idée de mise en valeur du « contour » comme point commun aux deux procédés de fixation (fixation de l’image pour l’un, fixation du son pour l’autre). Comme la photographie, l’enregistrement dans ses balbutiements a « cherché à saisir d’emblée non pas des phénomènes mobiles, des ambiances, mais des objets sonores immobiles, dans leur temps de présence. Une image est avant tout contour, ligne séparatrice entre une forme et un fond »20. Concernant le son enregistré, le fond sera « ce bruit de fond sur lequel se détache une modulation, que l’on peut appeler signal […] »21. Le signal déterminera la forme détachée par son contour (les lignes séparatrices) du fond.
Les sons projetés par les haut-parleurs, François Bayle les appelle donc I-sons, car :

Le haut-parleur n’est pas un instrument, c’est un projecteur d’image, un propulseur de contour qui communique avec un programme et sa mémoire. On entend quelque chose qui ressemble à…, ou qui n’y ressemble pas, et l’on augmente ainsi la liste et l’espace des choses22.

Nous nous autorisons à penser qu’ici le haut-parleur, « projecteur d’image », est associé directement au projecteur cinématographique, et, avec ce parti pris, il semble que François Bayle ne rejoigne pas les préceptes de l’écoute réduite édictés par Pierre Schaeffer. Une prise de position qui peut paraître paradoxale puisque c’est François Bayle luimême qui proposa le terme de musique acousmatique, notion pythagoricienne favorisant justement ce type d’écoute. Jean-Christophe Thomas confirme :

... [pour Bayle] l’invisibilité sonore ne nous fait pas oublier l’extramusical, le « monde réel » autour du son : l’invisibilité des bruits stimule, excite l’herméneutique (= curiosité pour ce qui est caché) de l’auditeur – qui derrière « la tenture de Pythagore » est devant une « énigme », excité. Et l’objet de Schaeffer, que ce dernier voulait « perdu », très loin du monde et des désirs mondains, Bayle va lui préférer l’image : car une image acousmatique est « imprégnée », dit-il joliment, de réel. Un peu comme une image photographique23.

Une image acousmatique « imprégnée de réel », comme cette « fermeture d’ascenseur : succion, friction, avalement… [qui] ne s’entend pas comme une porte qui se ferme mais comme une image qui se ferme : comme avec un iris… »24, qui ne compose pas une musique d’images figurative mais laisse son auditeur dans une ambiguïté de sens et/ou de représentations perçus. Car « l’oreille est évasive ; ça n’est pas l’oeil, l’oeil « objectif » (sur quoi on a fait un outil optique et un concept) »25. Les images convoquées ici ne sont pas celles que la musique anecdotique renvoie et pourtant ne diffèrent guère, et ne sont pas moins évocatrices, car pour Bayle : « si cette musique a sur l’esprit cette emprise étonnante, […], c’est qu’elle travaille « au ras des archétypes » 26. Une notion du modèle qui n’est pas identique à celle adoptée par François-Bernard Mâche. En convoquant ses souvenirs dans son acte compositionnel, François Bayle précède l’expérience vécue de son futur auditeur, une expérience humaine commune de l’espace acoustique et sur laquelle un lien se tisse entre l’artiste et son public.

Des objets rebondissent. En offrant cette forme bien connue, j’offre un objet intermédiaire entre le caprice de l’auteur et la disponibilité de l’auditeur… qui embraye dans sa tête sur le bon programme d’écoute. On a fait appel à un réservoir de formes classées27.

Comme Walter Ruttmann, le compositeur de Son Vitesse-Lumière guide et oriente l’écoute par l’utilisation d’indices, de marqueurs sonores qui, même s’ils demeurent abstraits (contrairement à ceux utilisés dans Wochenende), se transposent dans l’imaginaire et adhèrent « à une espèce d’image, sans doute énigmatique (en tous cas équivoque : un archétype l’est forcément), mais en même temps catégorique, pourvue de vigueur persuasive »28. À un bruit correspond une image.

Vous entendez un bruit, vous recréez la scène. Vous entendez un sifflement de locomotive, vous voyez la gare. Tandis que vous voyez une locomotive, vous n’entendez pas un sifflement. Je crois que l’ouïe est beaucoup plus créatrice que l’oeil. Cependant l’oeil invente aussi, mais il n’invente pas dans le domaine des sons tandis que les sons inventent dans le domaine de l’image. Si je peux remplacer un décor par un son, je préfère prendre un son. Et alors là, ça a cet avantage de donner libre cours à l’imagination du public. Et d’arriver à cette chose si difficile : de ne pas montrer les choses mais les suggérer29.

Avec Walter Ruttmann, nous avons souligné l’importance des sons et leur faculté à produire en nous une projection mentale liée à leur causalité, une succession d’images composant ainsi la possibilité d’une narration précise mais personnelle quant à sa représentation. Le fil conducteur est commun (la narration) mais la figuration du paysage sonore proposé reste individuelle (l’image du son). Quand l’image apparaît à l’écran, la place donnée à notre imagination est amoindrie (la voiture que nous donnions en exemple devient la même pour tous les spectateurs) et, de fait, le son perd de son pouvoir au profit du visuel, comme le suggère Daniel Deshays :

[…] le problème du son est son « invisibilité ». En effet, tout s’oppose à son discernement : on ne se rend jamais compte de son existence, de la même façon que l’on ne voit pas l’autre écouter. On sort d’un film comme s’il n’y avait pas eu de son, sans comprendre que tout ce qui nous a affectés, tout ce qui a « pris » notre corps, lui revient et, surtout, que nous sommes d’autant plus affectés que notre corps a dû répondre « physiquement » à tout ce qui nous a sollicité durant toute la projection. Serait-ce parce qu’à l’âge adulte, toute perception sonore, comme toute perception tactile ou gustative, s’effectue dans une consultation de l’acquis, sans avoir besoin de réinscrire en mémoire profonde ce qui y est déjà présent, gravé depuis le plus jeune âge ?30.

Il va donc s’agir pour certains réalisateurs à l’instar de Robert Bresson de faire voir le son, quitte à détourner les rapports conventionnels qui le relient à l’image : relation entre l’objet et le bruit auquel il est associé, rapport de synchronicité, effets de distance, de perspective, etc. Avec les « bruitages off », la source visuelle est autre que le son entendu et la source des bruits qui constituent le paysage sonore n’est plus relayée par l’image. Michel Chion définit le off comme suit : « Dans un rapport audiovisuel, [off] désigne, […] un son dont la source non seulement n’est pas visible à l’écran, mais est supposée appartenir à un autre temps et un autre lieu, réel ou imaginaire, que la scène montrée à l’écran »31.
On retrouve ici le principe du « cinéma pour l’oreille » que nous évoquions avec Wochenende, c’est-à-dire une suggestion du temps et de l’espace par le sonore, un espace acoustique à imaginer, plus qu’une proposition visuelle de ce même espace.

L’exemple type est l’espace de la ville que l’on imagine dans le paysage sonore que le condamné perçoit de sa cellule dans Un condamné à mort s’est échappé (1956), et plus que l’espace d’une ville particulière, c’est tous les souvenirs, les lieux et leur traversée en homme libre que l’on imagine et revit parce que privé de l’image correspondante32.

Dissocier le son de l’image est aussi une marque des films de Jacques Tati (1907-1982), au sujet desquels, François Porcile écrit :

Aucun événement sonore […] n’est de l’ordre de l’illustration servile du contenu de l’image. Chaque son intervient comme un signal, net, vif, précis, écho ou rebond de l’action visuelle. Il est artificiel, mais signifiant. Il est modelé, retravaillé jusqu’à revêtir une singularité quasi-musicale qui le transforme souvent en « personnage rythmique » de la construction burlesque33.

Il est à noter qu’en 2008, à l’initiative de Macha Makeïeff et des Films de Mon Oncle, sont édités deux CD. Sur le premier, est gravée l’intégrale des musiques composées pour les films de Tati. Sur le second, un choix de bruitages qui composent les bandes-son de ses longs métrages, « une partition élaborée qui fait entendre la marche du monde dans toutes ses nuances, réinventée, colorée et sensuelle, avec la saveur minutieuse des moindres bruits »34. Le réalisateur de Playtime, « auteur singulier dans le domaine de la mise en scène des bruits au cinéma […] a su trouver les limites de l’utilisation des sons, et s’en servir dans des effets d’un comique aussi subtil qu’irrésistible »35. Il rejoint ainsi, dans son travail de post-production et dans une organisation sonore guidée par le choix rigoureux des bruits utilisés, le réalisateur de Wochenende mais aussi les compositeurs de musique acousmatique. Car avec le son, Jacques Tati transpose la réalité de l’espace acoustique et détourne, via l’image, la causalité attendue des sons perçus pour nous les faire percevoir dans leur hyperréalisme comme des images sonores décalées des images projetées. « […] le monde de Tati est un monde hallucinatoire, non pas dans le flou mais au contraire dans l’implacable netteté de son cadre et de sa lumière, dans la précision de ses bruitages […] »36.

À ce stade de notre réflexion, le rapprochement entre la technique musicale acousmatique et technique cinématographique apparaît comme évident et l’on ne peut s’empêcher de faire le lien entre le premier film des frères Lumières l’Arrivée du train en gare de la Ciotat (1895) et l’Étude aux chemins de fer (1948), oeuvre fondatrice de la musique concrète. Deux oeuvres qui renvoient aux « réflexions sur les « arts infirmes » : la radio aveugle et le cinéma muet qui, ici, semblent se répondre et se substituer l’un à l’autre de manière souterraine »37. La radio, média acousmatique par excellence a su très tôt tisser le lien entre la narration et l’art des sons fixés. Pouvoir du récit, de la voix, du paysage sonore qui nous fait tendre l’oreille et invite « l’écoutant » à une projection intime des événements qui se jouent.

Et entendre ce que l’on voit…

Si le son, comme nous l’avons démontré, renvoie une image mentale à celui qui le perçoit, le contraire est-il envisageable ? Autrement dit, est-ce-que par le truchement de sa mise en scène ou de son cadrage, l’image fixe (par définition muette) ou celle cinématographique avant que le septième art ne soit sonorisé, a les facultés de nous faire entendre ?
Avant 1927, le cinéma restait muet – un terme d’ailleurs remis en question. Michel Chion, par exemple, lui préférant l’appellation de cinéma sourd, expliquant dans son ouvrage Un art sonore, le cinéma38, que les premiers spectateurs étaient certes émerveillés devant l’animation des images, mais que ce trouble était également dû au fait que sur l’écran les mouvements des éléments de la nature (Michel Chion prend en exemple la mer, le vent dans les arbres, etc.) n’étaient pas associés aux sons auxquels ils étaient habituellement rattachés dans leur pleine réalité. « […] ça bougeait sans faire de bruit »39… Le spectateur était comme sourd.
Pour le critique et théoricien Jean Mitry :

[…] le cinéma d’autrefois n’était pas muet mais silencieux…les cris, les bruits, les quelques mots prononcés ici et là, lorsqu’ils faisaient partie de la description ou du comportement, étaient « entendus » par le spectateur. L’imagination accordait aux individus comme aux choses les qualités sonores qui devaient être les leurs dans la réalité sensible40.

Muet, sourd ou silencieux, le récit cinématographique d’avant 1930 montre dans ses mises en scène des situations vivantes et animées dénuées de son(s) pourtant « entendus par le spectateur ». Le sonore est-il alors à imaginer, le paysage sonore à recomposer, ou serait-ce plutôt l’image qui nous l’impose car chargée du phénomène acoustique connu qui lui est associé ?
Avec Walter Ruttmann et son film Wochenende, nous avons évoqué les balises acoustiques ou marqueurs sonores utilisés par le réalisateur allemand pour projeter en nous les images absentes et nous guider de fait dans la narration du film. Le son perçu acousmatiquement, nous l’avons dit, ne nous informe que très peu finalement sur l’objet qui le produit (nous avons pris l’exemple de la voiture). En revanche, il nous indique très clairement une provenance et nous permet de nous faire une idée de sa causalité. Il en est de même pour l’image si l’on considère qu’une source sonore émanant de l’objet représenté ne se reproduit jamais à l’identique dans sa réalité acoustique. Le son d’un même verre qui se brise ne sera jamais deux fois le même. En revanche, on connaît pour l’avoir expérimenté, les caractéristiques générales du son du verre qui se brise. Pour le photographe ou le cinéaste, il s’agit donc de trouver un moyen pour évoquer le son de ou des objets et ce de la façon la plus précise possible. Par sa mise en scène, le rythme du montage, le cadrage, nous allons voir que le son peut exister dans le monde de l’insonore.

Le cinéma d’avant 1930 a toujours recherché le sonore, que ce soit par l’illustration musicale jouée en direct ou par la production de bruits eux aussi exécutés durant la projection. Luigi Russolo, dans le prolongement de ses bruiteurs invente le Rumorharmonium baptisé dans un premier temps Russolophone, clavier synthèse de ses intonarumori, conçu entre autres pour accompagner les projections cinématographiques. Le futuriste italien présente son instrument en 1927 à Paris. Cependant, l’apparition du cinéma parlant, concomitante à cette époque, met un terme à la carrière et au développement de l’instrument. Il s’agissait donc, par la musique ou l’adjonction de bruits, de combler l’espace laissé par le silence de la pellicule pour que l’oeuvre cinématographique se rapproche le plus du réalisme souhaité par les réalisateurs.

Abstrait, le muet ne l’est pas. Parce que le cinéma ne l’est pas. Pourtant, l’art du muet se nimbe d’une aura de poésie, d’une grâce naturelle, et d’un désintérêt partiel pour le réalisme. Privilège que lui donne l’absence de son. De là à déduire qu’il ne se préoccupe pas de musique, on aurait tort. Non seulement parce que le cinéma silencieux se sait incapable de vivre sans musique : il se fait projeter avec un accompagnement. Toujours. Surtout parce que sa nature d’art concret et sa puissance poétique silencieuse le placent dans une dimension intermédiaire adéquate à l’art musical, physique et abstrait lui aussi41.

La musique ne peut donc à elle seule rendre compte des bruits, des paysages sonores que contiennent implicitement les images du film. Et l’imitation du paysage par la musique ou le bruit ne pouvant suffire à transcrire le sonore de la scène plus que le son, c’était parfois l’image qui était à même de remplir cette fonction. En effet, « L’absence de son « ne signifie pas pour autant absence de relation images-sons », affirme Roger Odin ainsi que la plupart des chercheurs ayant travaillé sur la période du cinéma muet »42. L’image devient le véhicule du son et de ses paramètres hauteur, durée, intensité et timbre. Ainsi, la durée d’un son peut être évoquée par la durée du plan qui le met en scène. Thierry Millet en relève un exemple dans le film Tabou (1931) de Murnau et pointe une scène dans laquelle un « indigène lance un appel à l’aide d’une conque »43, plan d’une durée de plus de six secondes, les six secondes correspondant à la durée du son de la conque. Un temps de prise de vue relativement long au regard des autres, beaucoup plus courts, qui constituent le film. En différenciant ainsi « l’objet conque » des autres par la durée qui lui est dédiée, Murnau affirme clairement sa volonté de faire entendre cet appel. L’oeil reste accroché à l’instrument et le temps de l’image devient celui du son.
De plus le timbre de la conque est suggéré par le plan rapproché qui est fait de l’instrument, dévoilant ainsi sa forme arrondie et enveloppante :

Ici, le point d’écoute est un point de vue, il nous situe face à la béante rotondité de l’ouverture de la conque. Un seul plan rapproché – décrit comme « gros plan serré » d’après la notation de Vincent Pinel – pour une seule note tenue (six secondes au moins), que l’on imagine profonde, basse, ronde, longue… à « l’image » de la conque, et de son ouverture en forme de cor de chasse44.

La durée d’un son et sa présence tacite dans une scène cinématographique peut aussi être rendue par le retour répété sur l’image qui en est la source, retour qui en outre structure la scène et prend le rôle d’un refrain comme dans une chanson.

Ainsi, dans La Grève, 1925, d’Eisenstein, une séquence de révolte ouvrière est structurée visuellement par la répétition obsédante d’un gros plan de sirène en action. Ce retour à l’insert a une double fonction : d’une part, il rappelle que le son est toujours là […], et d’autre part, l’image de cette source devient un refrain visuel qui va conférer son unité à cette séquence très chaotique et déferlante45. Concernant la dynamique d’un son, c’est le plus souvent par l’utilisation du gros plan sur l’objet que l’intensité du signal acoustique est signifiée. Nous pensons ici à Dziga Vertov (1896-1954) et aux différentes images d’objets « sonores » fixées en gros plan pour son dernier film muet L’homme à la caméra (1929) : cloche, klaxon, train en mouvement, etc. Vertov, qui, dès 1916, fonde son « Laboratoire de l’ouïe » et entreprend d’enregistrer et d’orchestrer les bruits de la ville à l’aide d’un gramophone. Dans un texte intitulé « Naissance du cinéoeil », il écrit :

Et voici qu’un jour de printemps 1918, je rentre de la gare. J’ai encore aux oreilles les soupirs, le bruit du train qui s’éloigne… quelqu’un jure… un baiser… quelqu’un s’exclame… rire, sifflet, voix, coups de la cloche de la gare, halètement de la locomotive… Murmures, appels, adieux… Je pense chemin faisant : il faut que je finisse par dégotter un appareil qui ne décrive pas mais inscrive, photographie ces sons. Sinon, impossible de les organiser, de les monter. Ils s’enfuient comme fuit le temps (…)46.

Faute de moyen d’enregistrement sonore technologiquement avancé – il utilisait un gramophone, ce qui ne l’autorisait à aucun montage –, c’est par la caméra qu’il parvient le mieux à fixer ses impressions acoustiques et paradoxalement dans un art qui se veut encore muet. Parce que le montage, la durée des plans et leur cadrage, l’angle de prise de vue des images sont « autant d’éléments qui participent à l’illusion auditive à partir de stimuli uniquement visuels »47, les paysages sonores de Vertov sont silencieux mais prennent vie dans l’imaginaire auditif de son spectateur. Là aussi, c’est le champ de la mémoire individuelle et l’expérience vécue du son qui sont convoqués et nous pourrions penser avec Roger Odin que « toute représentation d’un espace est déjà, en soi, l’indice de la présence d’un univers sonore »48.
Toutes images seraient paysage sonore. Qu’elles soient animées par l’effet de leur succession rapide, ou inanimées car fixées sur un support : la toile ou le papier qu’il soit photographique ou non.
Les exemples d’une présence implicite du sonore dans des productions par définition muettes comme la peinture sont nombreux. Jean- Noël von der Weid commence son ouvrage Le flux et le fixe49 par ces mots :

On peut entendre la couleur d’un sourire : l’oreille voit, pense dans la peinture. On peut voir un grincement d’angoisse : l’oeil entend, pense dans la musique. Un son peut suggérer une couleur, pendant qu’une couleur peut suggérer un son. Le temps musical est visible, l’espace pictural audible : c’est en ce qui les désaccorde que musique et peinture s’interpénètrent50.

Autrement dit, et de façon moins poétique, nos sens se relaient. La complémentarité habituelle du couple oeil/ouïe est dissociable, comme interchangeable, l’un pouvant pallier l’absence de l’autre : l’oreille peut voir comme l’oeil peut entendre.
Dans un article pour un numéro de Artpress251 consacré à l’art des sons, le compositeur David Toop (1949) s’exprime ainsi à propos de la peinture :

Ma contemplation des peintures hollandaises du début de l’ère moderne m’a fait prendre conscience de ce que bon nombre de ces peintres s’appliquaient à explorer des intérieurs possédant une composante auditive significative : la musique, les conversations et les cris avinés, certes, mais aussi les surfaces, les échos, les étoffes, les parquets, les extérieurs entraperçus, les pièces qui en révèlent d’autres, le tremblotement de la flamme d’une bougie, les pages lentement tournées d’une bible, le cliquetis des clés, les chats, les chiens, un balais, le grattement d’un couteau sur des légumes, le crissement d’une plume sur le papier, une respiration paisible52.

Très tôt donc dans l’histoire de la peinture, les artistes s’attachent à relier le sonore et sa représentation sur la toile. De là à penser que ces peintures deviennent des témoignages précieux nous éclairant sur les paysages sonores de leur époque au même titre certains textes littéraires descriptifs, il n’y a qu’un pas. Il suffit de savoir observer pour pouvoir entendre le « monde sonore qui habite et émane de certains tableaux »53. Entendre le son d’un toton tournoyant par exemple, une toupie de bois, jouet maintenant oublié et peint par Chardin en 1738. Un enfant silencieux, comme pris sur le vif, observe le mouvement de sa toupie, seul élément dynamique du tableau. L’objet fixé sur la toile devient mobile et résonne depuis sur le bois du plateau du bureau dans le silence et la quiétude de cette scène de genre.


Jean-Siméon Chardin, L’enfant au toton, 1738, Musée du Louvre, Paris.

De la même manière donc que le son anecdotique, par sa faculté imageante, nous fait voir et convoque de fait notre mémoire audiovisuelle, la mise en scène du son suggéré par l’image nous fait entendre.
Mais soulignons ici que voir n’est pas observer et entendre n’est pas écouter. Comme sentir n’est pas flairer, goûter déguster ou toucher palper, nuances verbales qui permettent d’affirmer que « Chaque ordre sensoriel comporte ainsi sa nature simple et son état tendu, attentif ou anxieux […] »54. Pour l’image fixe, c’est la possibilité infinie de revenir sur elle qui autorise son observation. Un examen qui nous est offert car, contrairement au son qui reste un phénomène fugitif et dépendant du temps, l’image est figée dans le temps qu’elle représente. Pour la musique, c’est la possibilité d’une réécoute de l’objet qui autorise son analyse et par conséquent l’obligation pour celui qui veut en déceler finement sa structure ou sa morphologie de l’encapsuler dans sa forme enregistrée.

1 La formule est empruntée à Jean Lenauer, « Walter Ruttmann et son film sans images » in Pour vous – L’hebdomadaire du cinéma n° 88 du 24 juillet 1930, p. 3.
2 Michel Chion, Un art sonore, le cinéma, Paris, Éditions Cahiers du cinéma, 2003, p. 420.
3 Philippe Langlois, Les cloches d’Atlantis – Musique électroacoustique et cinéma. Archéologie et histoire d’un art sonore, Paris, Éditions MF, 2012, p. 89
4 Janine Bouissounouse, « Critique de Week-end par Walter Ruttmann », in La revue du cinéma, numéro de janvier 1931, p. 58.
5 Janine Bouissounouse, op.cit., p. 58.
6 Philippe Baudoin, Du hörspiel, disponible via URL : synton.fr/du-horspiel/, consulté le 21 mars 2016.
7 Wochenende, paru chez Metamkine, Grenoble, 1995.
8 Wochenende, in « An anthology of noise & electronic music », Sub Rosa, Bruxelles, 2002.
9 Philippe Langlois, op. cit., p. 91-92.
10 François-Bernard Mâche, « Paysage et musique » (1988) in Un demi-siècle de musique… et toujours contemporaine, Paris, Éditions L’Harmattan, 2000, p. 335-336.
11 Michel Chion, L’audio-vision. Son et image au cinéma, (1990), Paris, Éditions Armand Colin Cinéma, 2005.
12 Michel Chion, op.cit., p. 25.
13 Daniel Deshays, Entendre le cinéma, Paris, Éditions Klincksieck, 2010, p. 13.
14 François Bayle, Musique acousmatique – propositions… …positions, Paris, Éditions Buchet-Chastel, 1993, p. 83.
15 François Bayle, texte enregistré pour Paysage, personnage, nuage, composition acousmatique extrait du cycle Son Vitesse-Lumière, CD Magison Cycle Bayle volume 9/10, Paris, Magison/ina-Grm, 1997.
16 Renaud Meric, L’appréhension spatiale de l’écoute : un mouvement entre imagination et perception. L’exemple de la musique électroacoustique. Thèse de doctorat, Université Montpellier III – Paul Valéry, sous la direction de Makis Solomos, soutenue le 1er décembre 2009, p. 446.
17 Gaston Bachelard, L’air des songes, cité par François Bayle, op. cit., 1993, p. 242.
18 François Bayle, op.cit., p. 79 et p. 91.
19 François Bayle, « L’espace (post-scriptum…) » in Les cahiers de l’Ircam n°5 : Espaces, Paris, Ircam, 1er trimestre 1994, p. 116.
20 François Bayle, op. cit., 1994, p.116.
21 François Bayle, op.cit., p.116.
22 François Bayle, op.cit., p.117.
23 Jean-Christophe Thomas, « Fragments pour Bayle, en 53 thèmes… », in François Bayle, Jean-Christophe Thomas, Diabolus in musica, livre et DVD-Rom, Paris, Magison/Ina, 2008, p. 31.
24 Jean-Christophe Thomas, « vu de l’image » in François Bayle, op.cit., 1993, p. 172.
25 François Bayle, op. cit., 1993, p. 169.
26 Jean-Christophe Thomas, op. cit., 1993., p. 169.
27 François Bayle et Jean-Christophe Thomas, Entretiens – Bibliothèque d’inédits de recherche, 1982-84, op.cit., p. 171.
28 Jean-Christophe Thomas, op.cit., p. 170.
29 Robert Bresson, Notes sur le cinématographe (1975) in Philippe Langlois, op. cit., 2012, p. 217.
30 Daniel Deshays, op. cit., 2010, p. 48.
31 Michel Chion, op. cit., 2003, p. 427.
32 Thierry Millet, Bruit et cinéma, Aix-en-Provence, Publications de l’Université de Provence, 2007, p. 126.
33 François Porcile, « Le monde sonore de Jacques Tati », texte extrait du livret du CD Tati sonorama ! Éditions Les films de Mon Oncle, Naïve, 2008, p. 14.
34 Macha Makeïeff, « Tati tout ouïe ! », texte extrait du livret du CD, op. cit., 2008, p. 6.
35 Thierry Millet, op.cit., p. 127.
36 Michel Chion, op. cit., 2003, p. 172.
37 Philippe Langlois, op. cit., 2012, p. 451.
38 Michel Chion, op. cit., 2003.
39 Michel Chion, op.cit., p. 11.
40 Jean Mitry, Esthétique et psychologie du cinéma, 1965 in Thierry Millet, op. cit., 2007, p. 32.
41 Pierre Berthomieu, La musique de film, Paris, Éditions Klincksieck, 2004, p. 146.
42 Thierry Millet, op. cit., 2007, p. 32.
43 Vincent Pinel cité par Thierry Millet in op.cit., p. 36.
44 Thierry Millet, op. cit., 2207, p. 36-37.
45 Michel Chion, op. cit., 2003, p. 13.
46 Dziga Vertov cité par Philippe Langlois in op. cit., 2012, p. 67.
47 Philippe Langlois, op. cit., 2012, p. 53.
48 Roger Odin, « Le carré sémiotique du son filmique » (1985) cité par Thierry Millet in op. cit., 2007, p. 34.
49 Jean-Noël von der Weid, Le flux et le fixe, Paris, Édition Fayard, 2012.
50 Jean-Noël von der Weid, op.cit., p. 9.
51 Artpress2, L’art des sons, n°15, 2010.
52 David Toop, « Notes préliminaires à une histoire de l’écoute » in Artpress2, op. cit., 2012.
53 David Toop, op.cit., p. 16.
54 Jean-Luc Nancy, « Être à l’écoute » in L’écoute, textes réunis par Peter Szendy, Paris, Éditions L’Harmattan, Ircam-Centre Georges Pompidou, 2000, p. 278.

Christophe Lambert

© L'ÉDUCATION MUSICALE 2021

Detlef Heusinger, directeur artistique du Studio Expérimental de Fribourg,
une interview exclusive par Huihui Cheng (traduction Jonathan Bell)



SWR Experimentalstudio se lance dans l'opéra avec son directeur artistique, qui est cette fois-ci également compositeur et réalisateur ! Le voyage des jeunes dans le temps commence par le juke-box.

Huihui Cheng : Cher Detlef, merci pour cette interview, vous êtes le Directeur du SWR Expérimentalstudio , où Luigi Nono et Brian Ferneyhough, parmi tant d'autres, ont composé certaines de leurs œuvres les plus remarquable. Mais aujourd'hui je voulais parler de votre production de compositeur, et de votre opéra Jukeboxopera en particulier. Peut-être pourriez-vous développer ce point, ainsi que ce qui a trait au chœur d'enfants qui m'a semblé être un aspect essentiel de ce travail ?
Detlef Heusinger : Je pense qu'il est très important que nous trouvions un lien avec la jeune génération pour le théâtre musical. C'est notre avenir, et, s'il n'y a aucune chance de les faire entrer dans le théâtre, nous ne pouvons pas survivre. De plus, travailler avec eux a eu un fort impact sur moi en tant que compositeur, car ils n'ont pas d'idée préconçue sur ce qu'est ou devrait être le théâtre musical. Cela les rend totalement imprévisibles. Je les ai trouvés extrêmement ouverts d'esprit, et j'ai senti qu'ils comprenaient ma musique beaucoup mieux que beaucoup de gens de l'ancienne génération, simplement parce qu'ils étaient tellement habitués à sauter d'une idée musicale à l'autre ! Pour eux, c'était assez proche de cette idée de jukebox ou de zapping, dans laquelle on fait ces coupes dures. Et ils sont habitués à sauter constamment d'une histoire à l'autre, et à ces « décalages temporels »... Pour eux, c'était une pratique quotidienne, ce qu'ils font tout le temps, sur leurs téléphones portables ou autres... Ils sont immergés maintenant dans des jeux vidéo comme Anno, dans lesquels vous pouvez également entrer dans d'autres temps, et dans lesquels vous pouvez découvrir ce qui a eu lieu dans notre passé.
H.C. : En effet, j'ai trouvé cette idée de « machine à remonter le temps » très originale dans votre opéra, et la scénographie l'a bien véhiculée. J'ai trouvé particulièrement inspirante la confrontation de différents styles musicaux, ou encore les intermezzi de musique électronique. Comment l'idée vous est-elle venue?
D.H. : J'ai toujours été intéressé par l'histoire de la musique. Aussi, je me sens souvent un peu frustré quand je vois les productions d'opéra d'aujourd'hui - Mozart par exemple -, je ne les vois jamais mises en scène ou situées à l'époque où elles ont été écrites. Les réalisateurs les mettent le plus souvent dans notre époque, juste pour rendre l'œuvre contemporaine. Mais parfois, cela n'a pas de sens de jouer Le Nozze Di Figaro dans un restaurant de burgers... Cela me semble très désespéré d'essayer de présenter cela comme contemporain alors que la musique vient d'un autre siècle. Je pense que nous devons l'accepter.
Donc, ce que j'essaie de faire, c'est de transmettre ce décalage temporel à travers 900 ans d'histoire, et de mettre le design à chaque fois dans son contexte approprié. Alors quand je suis au temps de Gluck ou de Mozart, la scénographie est aussi à cette époque, ou quand je suis au temps de Lulu, d'Alban Berg, ça se passe dans les années 1920 et ainsi de suite... Les éléments remis dans leur contexte nous permettent de bien mieux les comprendre. Je trouve cela plus intéressant que de mettre des vêtements de notre temps, dans des circonstances inappropriées.
H.C : Oui, je pense que cela a très bien fonctionné grâce à cette forte intrication entre les costumes, la musique et la vidéo. Et comme vous l'avez dit, cela a aidé le spectateur à comprendre à chaque fois à quelle période de l'Histoire l'action se déroule. Votre approche de la scénographie allait également dans le même sens ?
D. H. : Oui, j'ai presque tout fait... J'ai eu un peu d'aide pour les vidéos, mais les idées initiales concernant la vidéo étaient toujours liées à la musique et à la scénographie, donc tout se rejoignait. Par exemple, il y avait cette scène de l'Olympia représentant l'époque où le métronome a été inventé, comme une véritable technologie de l'époque. Il était donc logique d'utiliser ce métronome à la fois dans la vidéo et sur scène. Il s'agit souvent de faire le rapprochement entre le niveau visuel et le niveau musical. Ainsi, par exemple, j'ai utilisé des citations de la musique d'Offenbach, qui, comme Lulu, n'a pas été achevée avant la mort du compositeur. J'ai donc utilisé ma propre instrumentation - des micros ou d'autres instruments qui existaient à l'époque, mais qui n'ont pas été utilisés - pour transmettre ce sentiment d'une sorte de machine pourrie, qui ne fonctionne pas très bien.
H.C : En effet, je me suis souvent demandé : est-ce que ce sont des citations, ou des compositions écrites dans un style donné ?
D.H. : Oui, ce sont des compositions dans des styles donnés d'une certaine manière. Mon idée de l'instrumentation était de combiner les idées et les possibilités d'aujourd'hui avec la musique ancienne. Par exemple, dans le passage de Haendel, j'ai utilisé la réverbération sur les cordes et le cembalo pour obtenir une résonance particulière et caractéristique de cette époque, ce qui, je pense, la rend encore plus vivante car elle contraste vivement avec la musique de notre temps.
H.C : Oui, cela donne aussi au public une idée des possibilités d'interprétation de la musique ancienne...
D.H. : Cela me rappelle une anecdote intéressante avec de jeunes acteurs : ils m'ont dit qu'ils se sentaient plus à l'aise avec ma musique qu'avec Haendel, Gluck, Mozart qui représentaient pour eux des territoires inexplorés.
H.C. : On peut dire qu'ils ont eu beaucoup de plaisir à faire cela...
D.H. : Oui, je pense que la collaboration a été fructueuse et qu'ils se sont sentis heureux, car ils peuvent jouer beaucoup et passer d'un rôle à l'autre. En particulier Gan-ya Ben-gur Akselrod, la chanteuse principale. Au début, elle chante à moitié endormie, puis elle fait Donna Anna, puis Olympia, puis Lulu, et enfin Barbarella... Tant et tant de personnages différents. Elle représente aussi une dame qui se battait pour ses droits à l'époque baroque, se défendant contre des hommes dangereux, et qu'au final, elle est une dame puissante comme Barbarella, un sex symbol d'un côté, mais aussi une mathématicienne et un cerveau à la NASA, donc essentiellement une dame très puissante.
H.C. : C'est l'aspect politique de cette déclaration sur la machine à remonter le temps ?
D.H. : Oui, absolument. Donc parfois il n'y a que des traces de ce qui reste d'il y a 400 ou 500 ans, contrairement à maintenant où nous avons des personnages totalement différents. J'essaie donc de montrer cette évolution, d'abord avec une femme qui a été violée, vers, à la fin, ce génie de la NASA qui danse avec Mr CHiba (une référence à une célèbre émission de télévision américaine des années 60).
Je veux transmettre cette idée utopique que nous évoluons continuellement vers un monde meilleur, c'est pourquoi l'opéra se termine par "hello world", comme une tentative de sensibiliser les gens au risque que nous encourons en détruisant notre environnement et de montrer ce que nous pourrions faire mieux.
H.C. : Oui, je me souviens de la scène finale dans laquelle les enfants défilent pour ainsi dire sur scène pour les questions environnementales.
D.H. : Oui, c'était juste un extrait des nouvelles : car nous avons eu des manifestations ici à Fribourg qui ont eu beaucoup de succès. Le mouvement "Friday for Future" est très puissant ici, donc vous pouvez imaginer ici le genre de choses où la prochaine génération pourrait faire mieux.
Ainsi, dans cette pièce, les enfants ne font pas seulement partie de la conception. Si vous pensez à Zauberflote par exemple où ils chantent juste un peu et s'en vont. Ici, je voulais vraiment qu'ils soient au premier plan, ils mènent l'histoire.
H.C. : Il y avait même un garçon volant à plusieurs mètres du sol, cela a-t-il posé des problèmes de sécurité ?
D.H. : Rien n'était facile, surtout en période de pandémie. Mais finalement, pour cette dernière représentation, tout s'est mis en place, et j'étais vraiment content. Je dois dire que la machinerie utilisée pour cette scène était très ambitieuse, mais j'ai eu une équipe formidable au théâtre qui m'a aidé à la monter. Le plus important, c'est qu'il n'y avait aucun sens de la hiérarchie entre les techniciens travaillant sur la scène, ceux qui faisaient la dramaturgie ou ceux du département des costumes : c'était juste une collaboration de tous les membres de l'équipe du théâtre, ce qui a beaucoup aidé, un peu comme ce qui se passe dans les festivals, malgré les limitations dues à Corona.
Je ne voulais pas me mettre en avant. C'était uniquement pour le coût du produit. Parce que je sais qu'à l'époque de Corona, une certaine forme de collaboration n'est pas possible, parce que vous ne pouvez pas entrer dans la salle de répétition. Il y a tellement de gens. Donc je n'étais que six personnes. Une seule personne pouvait tout organiser. Et si je le faisais avec la conception des costumes et tout le reste, ce qui n’aurait pas été possible parce que nous étions limités tout le temps.
H.C. : Je peux imaginer que c'était un défi de monter cette production avec tant de forces impliquées. Vous avez une formation en théâtre, c'est exact ?
D.H. : Avant de commencer ma carrière ici au SWR Experimental-studio, je travaillais aussi assez souvent comme metteur en scène. Ainsi, avec mes trois professions de chef d'orchestre, compositeur et metteur en scène, j'ai souvent été confronté aux défis de l'interdisciplinarité. J'ai également travaillé comme chorégraphe, costumier, sur une vingtaine d'opéras jusqu'à aujourd'hui... J'aime ça parce que je ne pense pas seulement comme un compositeur, je pense comme un artiste. Et un jour, il vaut mieux faire de la scénographie, le lendemain, il vaut mieux composer, car il est très fructueux de penser aux autres départements. Et peut-être que pour quelques compositeurs, il pourrait être utile de penser davantage à ce qui se passe dans le théâtre. Parce que pas mal de nos compositeurs de ma génération ont fait un opéra, mais souvent sans la connaissance de ce qu'on peut faire au théâtre.
H.C. : Vous avez également fait de la composition instrumentale, mais peut-on dire que l'opéra est votre principal médium ?
D.H. : Absolument, je suis un créateur de théâtre.
H.C. : Comment voyez-vous l'avenir de l'opéra ? Quel est le rôle de la technologie dans vos productions ?
D.H. : Je pense que l'opéra pourrait être mieux connecté avec le monde numérique. Bien que cela soit parfois plus difficile pour les générations plus âgées, les natifs du numérique trouvent cette intrusion du numérique dans le théâtre parfaitement naturelle, car ils sont habitués à la coexistence de ces différentes couches de médias, qu'il s'agisse de vidéo, d'éclairages ou de jeux, avec le jeu sur scène.
H.C. : Oui, par exemple je vois tant de compositeurs vivants, mais les grands festivals d'opéra comme Aix-en-Provence privilégient toujours l'opéra classique.
D.H. : Oui, et comme mentionné précédemment, ils le mettent en scène dans notre monde contemporain, comme si ce n'était pas des pièces de musée... Mais vous avez aussi des musées d'art contemporain !
H.C. : J'avais une dernière question concernant la présence d'appareils électroniques sur scène ?
D.H. : Eh bien, je n'avais pas beaucoup d'argent pour la conception de la scène. Donc j'ai juste utilisé ce que je pouvais obtenir. Et donc le génie (technique) a été utilisé en remplacement d'un vaisseau spatial de la NASA. C'est de la triche, mais on a toujours affaire à des illusions au théâtre. Je joue souvent avec des croisements possibles entre ces idées iconiques (King Kong, Hieronymus Bosch, comme vous le voyez dans d'autres sections de l'opéra). Et combiner ces croisements avec les possibilités électroniques de notre studio en termes de son est également utile, car je peux tout transposer, ce qui renvoie à nouveau à cette idée de décalage temporel, comme lorsque je mets la citation à l'envers dans l'électronique par exemple.
H.C. : Je vois qu'il y a tellement de détails à découvrir dans cet opéra...
D.H. : C'est peut-être trop d'informations, je me sens coupable de cela. Mais d'un autre côté, je m'ennuie trop souvent avec le théâtre. Alors je donne peut-être trop d'informations (rire)... Après cette longue période de Corona et tout ce qui nous a manqué pendant un an, je le donne en un seul morceau.

Freiburg, September 2021
traduction-transcription: Jonathan Bell

© L'ÉDUCATION MUSICALE 2021

Detlef Heusinger, artistic director of the Freiburg Experimental Studio
an exclusive interview by Huihui Cheng (translation Jonathan Bell)



SWR Experimentalstudio goes opera with its artistic director, who this time is also a composer and director! The young people's journey through time begins with the jukebox.

Huihui Cheng : Dear Detlef, thank you for this interview, you’re the director of the SWR Experimental-studio, where Luigo Nono and Brian Ferneyhough, among many others, composed some of their most remarkable works. But today I wanted to talk about your output as a composer, and your Jukeboxopera in particular. Perhaps you could elaborate on this, as well as on the children choir, which struck me as an essential aspect of the work?
Detlef Heusinger : I think that it's very important that we find connection to the younger generation for music theatre. This is our future, if there is no chance to get them in the theatre, we cannot survive. Also, working with them had a strong impact on me as a composer, because they don’t have a preconceived idea about what music theatre is or should be. This makes them totally unforeseeable. I found them extremely open minded, and I felt that they actually understand my music much better than lots of people from the older generation, just because they were so used to skipping from one musical idea to the next. For them, this was pretty close to this jukebox or zapping idea, in which you constantly make these hard cuts. And they're just used to constantly jumping from one history to the next, these “time shifts”... For them, it was just daily practice, what they're doing all the time, on their mobile phones, or whatever... They're just immersed now in -Anno-like video games, in which you can also step in other times, and in which you can discover what was happening in our past.
H.C. : Indeed I found this “time machine” idea really original in your opera, and the set design conveyed it appropriately. I found particularly inspiring the confrontation of different musical styles of music with electronic music Intermezzi. How did you come up with this idea?
D. H. : I was always interested in the history of music. Also, I often feel a bit frustrated when I see today’s opera productions - Mozart for insurance -, I never see them staged or situated as in the time when it was written. Directors most often put these in our time, just to make it contemporary. But sometimes it doesn't make sense to play Le Nozze Di Figaro in a burger restaurant... This seems to me just very desperate to try and present this as contemporary while the music is just from another century. I think we need to accept that.
So what I try to do is to convey this time shift throughout 900 years of History, and just put the design each time in its appropriate context. So when I am in the time of Gluck or Mozart, the set design is also in that time, or when I'm in the time of Lulu, Alban Berg, it takes place in the 1920s and so on... Just presenting elements in their context allows us to understand them much better. I find this more interesting than putting clothes of our times, in wrong circumstances.
H.C : Yes, I think it worked very well because of this strong intricacy between costumes, music and video. And like you said, it helped the spectator understand what period in History the action is taking place each time. Your approach to set design also went in the same direction?
D. H. : Yes, I’ve done nearly everything... I've had a little help for the videos, but the initial ideas concerning the video were always connected to the music and set design, so everything came together. So for example, there was this Olympia scene depicting the time when the metronome was invented, as real technology of that time. So it made sense to this metronome both in the video and live on stage. It is often about bringing it together on the visual and musical level. So for example, I used quotations of music by Offenbach, which, like Lulu, was not finished before the death of the composer. I therefore used my own instrumentation - microphones or other instruments which existed at that time, but they were not used - to convey this feeling of a sort of rotten machine, which doesn't work that well.
H.C : Indeed I was often wondering : are these quotations, or compositions written in a given style?
D.H. : Yes, this is composition in given styles in a certain way. My idea of instrumentation was to combine the ideas and possibilities of today with ancient music. For instance in the Haendel passage, I’ve used reverb on strings and cembalo to get a peculiar resonance characteristic of that time, which I think makes it even more lively as it vividly contrasts with the music of our time.
H.C : Yes, it also gives the audience a sense of the possibilities of interpretation of early music…
D.H. : This reminds me of an interesting anecdote with young actors : they told me they felt more comfortable with my music than with Haendel, Gluck, Mozart which for them presented unexplored territories.
H.C. : We could tell they've had a lot of fun doing this...
D.H. : Yes, I think it was a fruitful collaboration and they felt happy, because they can act so much and jump from one role to the next. So especially Gan-ya Ben-gur Akselrod, the main singer. At the beginning, she is singing in half asleep, then she is doing Donna Anna, then Olympia, then Lulu, and finally Barbarella... So, so many different characters. It also represents a lady who was fighting for her rights in the baroque era, defending herself against dangerous men, and that in the end, she is a powerful lady as Barbarella, a sex symbol on one hand, but also a mathematician and brain at the NASA, so essentially a very powerful lady.
H.C. : This is the political aspect of this time-machine statement?
D.H. : Yes absolutely. So sometimes there are only trace elements from what remains from 400 or 500 years ago, in contrast with now where we have totally other characters. So, I try to show this development, first with a woman who was raped, towards, at the end, this genius of NASA dancing with Mr CHiba (a reference to a famous American TV show of the 60s.
I want to convey this utopian idea that we just continuously evolve towards a better world, which is why the opera ends with “hello world”, as an attempt to make people more aware of the risk we endure destroying our environment and to show what we could do better.
H.C. : Yes I remember the final scene in which the kids are so to speak marching on stage for environmental issues.
D.H. : Yes, this was just taken from the news. We have had demonstrations here in Freiburg which have proved very successful. The Friday for Future movement is very powerful here so you can imagine here the kind of things the next generation could do better.
So in this piece the children are not just part of the design. If you think of Zauberflote for instance where they just sing a little bit and leave… Here I really wanted them in the foreground, they lead the story.
H.C. : There was even a boy flying several meters off the ground, did this cause any security issues ?
D.H. : Nothing was easy, particularly in times of pandemic. But in the end, for this last performance, everything fit, and I was really happy. I must say the machinery used for this scene was very ambitious, but I have had a wonderful crew in the theatre that helped me put it together. Most importantly there was no sense of hierarchy between technicians working on the stage, those doing the dramaturgy or those of the costume department : it was just a collaboration of all the team members of the theatre, which helped a lot, a bit like what happens in festivals, in spite of the limitations due to Corona.
I didn't want to put myself at the forefront, but I had to be everywhere because of the cost of the production, in Corona times where physical tutti rehearsals were impossible. So we had to constrain it to six people. One person could arrange everything. And when I would do it together with all my costume design and all the whole stuff, it wouldn't be possible because we were limited all the time.
H.C. : I can imagine it was a challenge to bring together this production with so many forces involved. Your background is in theatre, is that correct?
D.H. : Before I started my career here in the SWR Experimentalstudio, I was working quite often as a stage director too. So with my three professions of conductor, composer, and stage director, I’ve often been confronted with the challenges of interdisciplinarity. I have also worked as a choreographer, costume designer, on about 20 operas until now. I love it because I'm not only thinking as a composer, I'm thinking as an artist. And for one day, it's better to do stage design, for the next it's better to compose, because it's very fruitful to think for the other departments. And maybe for a few composers, it could be helpful to think more about what's going on in the theatre. Because quite a lot of our composers of my generation have done an opera, but often without the knowledge of what you can do in the theatre.
H.C. : You also have instrumental composition, but could we say that opera is your main medium?
D.H. : Absolutely, I am a theatre maker.
H.C. : So where do you see opera going next, what’s the role of technology in your productions?
D.H. : I think opera could be better connected with the digital world. Although it is sometimes harder for older generations, digital natives find this intrusion of digital in theatre perfectly natural, because they are used to the co-existence of those different layers of media, whether video, lightings or games together with acting on stage.
H.C. : Yes, for instance I see so many living composers, but major opera festivals such as Aix-en-Provence always favour classical opera.
D.H. : Yes, and as mentioned earlier, they stage it in our contemporary world, as if they were not museum pieces. But you also have museums for contemporary art!
H.C. : I had a last question about the presence of electronic devices on stage?
D.H. : Well, I didn't have so much money for the stage design. So I just used what I could get. And so the genie was used as a replacement for a NASA spaceship. This is cheating, but we’re always dealing with illusions in theatre. I often play with possible crossovers between those iconic ideas (King Kong, Hieronymous Boesch, as you see in other sections of the opera). And combining these crossovers with the electronic possibilities of our studio in terms of sound is also helpful, because I can transpose everything, which again relates to this time shift idea, like when I put quotation backwards in the electronics for instance.
H.C. : I can see there are so many details to discover in this opera...
D.H. : Maybe it's too much information, I feel guilty for that. But on the other hand, I'm too often bored with theatre. So I just give too much, maybe (laughter)... After this long Corona time where we have had nothing. So everything we missed for one year, I give it in one piece.

Freiburg, September 2021
transcription: Jonathan Bell

© L'ÉDUCATION MUSICALE 2021

PREMIÈRE DE "DIE HEILIGE CÄCILIA" D'ANTON URSPRUCH,
par Chang Tang, traduction Jonathan Bell



L'opéra inachevé “Die heilige Cäcilia" du compositeur juif Anton Urspruch (1850 - 1907) a été terminé par Ulrich Leykam l'année dernière. La première - en tant que contribution significative à la rédemption tardive d'un compositeur ostracisé par la politique culturelle nazie - renforce la prise de conscience de la participation juive à la culture européenne.

Sur l’argument:
Le 17 février 1850, un petit-fils nommé Anton est né au cantor de la synagogue juive de Francfort-sur-le-Main. Le cantor, qui s'appelait Sänger, n'a apparemment jamais rencontré son petit-fils, car sa fille Anna Elisabeth avait été baptisée à l’église protestante au cours de l'intégration des Juifs dans les cercles bourgeois de Francfort, et avait ainsi complètement perdu le contact avec sa famille. En 1848, elle épouse l'éditeur politique Carl Theodor Urspruch, issu d'une famille d'artistes. Son fils Anton, cependant, est "né dans le berceau" de la "tradition séculaire du chant religieux" de la synagogue, comme le dira plus tard avec justesse sa fille Theodora Kircher-Urspruch.
Dans la vie du compositeur, ses racines juives et allemandes ont créé un champ de tension créatif à l'origine d'une riche production artistique. La genèse et le thème de l'opéra sont étroitement liés à la vie du compositeur et à ses racines juives, qui - malgré son éducation dans un foyer protestant - sont toujours restées conscientes pour lui.
Vers la fin de sa vie, le compositeur a retrouvé ses racines dans la musique juive grâce à plusieurs années d'étude intensive du chant grégorien. Le point focal du compositeur Anton Urspruch a ensuite trouvé sa voie à travers l'art - et maintenant, quoique tardivement, la confrontation publique voulue par le compositeur avec son opéra. Le livret, écrit par Anton Urspruch lui-même, traite de la conversion de sa mère bien-aimée, Anna Elisabeth.
Le garçon a apparemment absorbé ses conflits enfouis dès son plus jeune âge et les a gardés silencieusement en lui pendant des décennies. Le poète-compositeur projette cette contradiction humaine d’une femme ( extérieurement coupée de ses racines familiales, qui

vit entièrement pour l'amour de son mari et de son enfant) dans son interprétation idiosyncrasique de la légende bien connue de Cecilia, la patronne de la musique d'église (cf. Kleist) : dans le livret d'Urspruch, le public rencontre Cécilia comme une vestale dévote dans la Rome antique. Dans l'esprit de sa religion, elle prend soin des chrétiens condamnés à mort - et se convertit secrètement au christianisme. Contre la loi, elle enterre les martyrs dans sa villa. Elle est découverte, condamnée et exécutée. Mais son exemple d'action désintéressée crée un précédent.
Le fait qu'Anton Urspruch ait enterré son conflit en tant que sans-abri dans son propre pays est psychologiquement significatif. Selon Veronica Kircher, il n'a jamais parlé de sa mère. Un sans-abri dans son propre pays - cela n'est pas sans rappeler le compositeur Arnold Schönberg, plus jeune d’une génération, qui s'est converti de la foi juive au protestantisme à Vienne en 1898 et s'est reconverti à la foi de ses ancêtres à Paris en 1933.

A propos de la composition
Le culte juif remonte également à des origines pré-israélites, son contenu nourrit aussi bien le judaïsme que le christianisme. De même, la musique du judaïsme est à l'origine de la musique de l'église catholique. Et à partir du chant synagogal, le chant antiphonique a également été adopté par le christianisme. La puissante partition d'opéra d'Anton Urspruch est basée sur cette constellation comme une sorte de formation circulaire.
Le lien de Cécilia avec la musique est inhabituel dans l'interprétation de la légende, et ingénieux du point de vue dramaturgique, ce qui est original pour Urspruch : il fait de Cécilia, en bref, une Vierge Vestale jouant de la harpe dans le groupe des Vierges de Vesta.
Comme on le sait, lorsque le christianisme est devenu la religion d'État romaine, il a adopté de nombreux éléments de religions et de cultes enracinés dans le peuple, comme le culte de Mithra et d'Isis. Et bien sûr, comme Urspruch l'a clairement reconnu et réalisé avec audace, les Vierges vestales et les Vierges mariales sont des phénomènes tout à fait apparentés.
Culminant dans le message de paix du final de son opéra, Anton Urspruch a transféré les beautés du chant du temple juif à la harpe de Cécilia, un instrument de foi antique transformé dans l'intrigue. La harpe de Cécilia transpose la tradition du chant vénusien dans la pureté de la diatonique : notée tonalement, mais comme une structure sonore infinie, sphérique, qui évoque la jubilation et des harmonies inimaginables, même quand d'autres éclateraient en deuil et en lamentation. Confrontée aux corps ensanglantés de son mari et de son beau-frère, défigurés par la torture, Cécilia chante un hymne démesurément jubilatoire et inhabituel en sauts et harmonies, un ravissement avec un choix de mots para- érotiques dans le langage tonal inhabituel d'Urspruch - situé entre le romantisme tardif et le modernisme. Chargé d'émotion, le langage musical obsédant d'Anton Ursprung renforce l'expérience de l'histoire judéo-allemande.
Le compositeur réduit la complexité orchestrale de cet opéra - trois bois, huit cors, trois cornets à piston, trois trombones, quatre tubas plus un tuba basse, des cordes divisées en quatre parties et des percussions - à la voix non accompagnée de la fin ; au XXe siècle, les mélismes traditionnels juifs et le chant grégorien se donnent la main : Urspruch crée ainsi musicalement une synthèse du chant synagogal et du chant grégorien, enveloppés orchestralement dans un vêtement de grande couleur rappelant la tradition musicale française : une image sonore de l'hétérogénéité des religions et de leur métissage au début du XXe siècle.
La mise en scène multimédia de la partition ouvre de nouvelles perspectives sur l'interpénétration de la culture juive avec les influences occidentales dans l'histoire de l'Europe. À l'aide de vidéos en direct et de documentaires, le triple saut historique est effectué du mythe, du XIXe siècle et du passé politique plus récent, à un XXIe siècle traitant les expériences du XXe siècle.
Le premier acte achevé de l'opéra devait être créé sous forme d'oratorio à Berlin du vivant du compositeur, mais il a été annulé en raison de l'antisémitisme de plus en plus répandu. L'achèvement et la création de l'opéra "Die heilige Cäcilia" en tant qu'œuvre majeure posthume d'Anton Urspruch doit donc être compris comme une contribution significative à la rédemption tardive du compositeur Anton Urspruch, qui a été ostracisé par la politique culturelle nazie.
En 2009, la petite-fille du compositeur, Veronica Kircher, professeur qui vit et travaille à Münster, a fondé avec un certain nombre de mélomanes, la Anton Urspruch-Gesellschaft e.
V., une association à but non lucratif. Leur objectif de rendre le compositeur oublié à nouveau accessible au monde de la musique a rapidement porté ses fruits : depuis lors, l'intérêt pour les compositions d'Anton Urspruch n'a cessé de croître. Des concerts ont eu lieu dans toute l'Allemagne, plusieurs enregistrements CD de symphonies, de musique de chambre et de chansons sont désormais disponibles sur le marché international, tout comme l'enregistrement complet de l'opéra "Das Unmöglichste von Allem" (Naxos 8.660333-35).
La première posthume est entre les mains du professeur Peter P. Pachl, qui a maintes fois déniché des trésors cachés de la littérature du théâtre musical et les a présentés - également en coproduction avec la radio, sur CD et DVD - principalement en Rhénanie-du- Nord-Westphalie.
Fidèle à l'idée d'Urspruch d'un théâtre parfois odorant dans certaines scènes, les moyens olfactifs sont intégrés dans la performance d'Urspruch. La réalisation musico-théâtrale de l'opéra d'Urspruch propose donc une véritable "fête des sens", et livre par un ton ludique son contenu sous une nouvelle forme.

Informations :
Anton Urspruch (1850 - 1907) : Die heilige Cäcilia (1907/2019) Opéra en 4 Actes
basé sur le Particell (Actes 2 - 4) complété par Ulrich Leykam
Première complète le 21 novembre 2021 dans la Gebläsehalle du Musée de l'industrie LWL,
Werksstraße 31-33, D-45527 Hattingen(Ruhr), Allemagne.
Avant-première : 19 novembre 2021
Représentation festive le jour de la Sainte-Cécile : 22 novembre 2021 (17h00 chaque jour).

Avec : Ulrich Leykam (direction musicale), Peter P. Pachl (production, coréalisation : Chang Tang), Robert Pflanz (scénographie), Christian Bruns (costumes), Achim Bahr (dramaturgie), Günther Neumann (éclairagiste), Lars Preiss (éclairagiste).
Rebecca Broberg (Cäcilia), Hans-Georg Priese (Valerian), Reuben Scott (Tiburtius) Uli Bützer (Almachius), Axel Wolloscheck (Maximus), Robert Fendl (Ein Greis), Alexander Geiger (Ein Jüngling/später Ein Bote ), Rafaela Fernandes/Marie-Luise Reinhard (Eine Witwe) , Anna Ihring/Marie-Luise Reinhard(Eine Jungfrau/Cäcilias Engel), Guan Di (Ein Christ) et, Pianopianissimo Musiktheater München, Tänner:Innen, chœurs et grand orchestre
Contact : M. Chang Tang, Schwetzingerstr. 20 D-68165 Mannheim, Allemagne E-mail :
jiangxiaoyoucz@gmail.com, Tel : 00491622678821

Freiburg, September 2021
transcription: Jonathan Bell

© L'ÉDUCATION MUSICALE 2021

MUSIQUE ASSISTÉE PAR ORDINATEUR / COMPUTER MUSIC

Drawsocket, un système basé sur le navigateur pour l’affichage de partitions en réseau
Rama Gottfried, Georg Hajdu (traduction Jonathan Bell)



Nous avons publié précédemment la traduction de la première partie d’un article sur la technologie DRAWSOCKET (Drawsocket - 1). Cet outil bas niveau a depuis permis la réalisation du remote choir concert de la conférence tenor 21, et sera encore utilisé lors de sa prochaine édition à Marseille (tenor2022@prism-cnrs).

3.2 API orientée objet
Bien que l'approche orientée liste fournisse une syntaxe compacte, ce format liste est également limité, dans la mesure où la liste nécessite un schéma prédéfini sur la façon dont la liste peut être interprétée et sur les types d'opérations que les valeurs de la liste peuvent adresser. L'approche par liste est donc moins facilement extensible, puisque l'ajout d'une nouvelle valeur à la liste nécessite d'ajouter une nouvelle étape dans le script d'interprétation. L’API orientée liste est efficace pour le prototypage rapide, cependant l'approche orientée objet peut être plus facilement étendue, comme nous le montrerons plus loin. De plus, l'approche orientée objet est auto-descriptive, et met l'accent sur la lisibilité en associant un nom de paramètre à chaque valeur.

Par exemple, on dessine un rectangle avec une liste:
/violin/foo/draw/rect : [100, 100, 25, 25]

Le même rectangle pourrait être dessiné avec l'API basée sur l'objet en utilisant la clé "svg" et une val contenant un ou plusieurs objets à traiter. Le mot-clé "new" notifie au client qu'il doit créer un nouvel élément SVG :

/violin : {
    /key : ''svg'',
    /val : {
        /new : ''rect'',
        /id : ''foo'',
        /x : 100,
        /y : 100,
        /largeur : 25,
        /hauteur : 25
        }
    }

Dans l'approche par objets, chaque variable a maintenant un nom associé à sa valeur, qui nous indique ce que la variable représente. L'approche par liste est plus concise et nécessite moins de saisie. Si l'on considère ce que les messages représentent dans le contexte du système DRAWSOCKET, l'avantage de l'approche objet devient plus clair. SVG est basé sur le format Extensible Markup Language (XML) , et est conçu comme un arbre de nœuds, chacun avec un ensemble d'attributs qui sont définis comme des paires clé-valeur. En utilisant les mêmes noms d'attributs dans l'API d'objets DRAWSOCKET, le script client peut alors simplement insérer autant d'attributs qu'il le souhaite, plutôt que de prédéfinir un ensemble spécifique et fini d'attribut, comme c'est le cas avec l'approche par liste. En restant proche de l'API SVG originale, l'utilisateur peut donc se référer à la spécification SVG directement pour connaître les attributs qu'il peut utiliser, plutôt que de devoir limiter ses paramètres de contrôle à ceux configurés dans le schéma d'analyse des de la liste. Par exemple, en prolongeant l'exemple précédent, nous créons ici deux nouveaux objets, un rectangle et un cercle, en les définissant dans un tableau, et nous attribuons en outre une référence de classe CSS pour chacun :

/violin : {
    /key : ''svg'',
            /val : [{
        /new : ''rect'',
        /id : ''foo'',
        /x : 100,
        /y : 100,
        /largeur : 25,
        /hauteur : 25,
        /classe : ''pièce''.
        },
        {
        /new : ''circle'',
        /id : ''bar'',
        /cx : 112,
        /cy : 112,
        /r : 5,
        /class : ''source''.
        }]
    }

Mots-clés. Il existe actuellement quatre mots-clés réservés utilisés avec les objets svg : new, style, parent et child.
À la réception d'un objet svg (ou d'un tableau d'objets), le script côté client itère sur chaque élément du tableau et vérifie s'il existe déjà un objet avec cette balise id ; si tel est le cas, il sélectionne cet élément dans la table de consultation du DOM. Ensuite, le script vérifie s'il y a un nouveau message dans l'objet ; si c'est le cas, il crée un nouveau noeud, soit en remplaçant l'élément à l'id existant, soit en créant un nouveau nœud s'il n'existe pas déjà, puis il traite le reste des messages de l'objet.
Si l'objet existe déjà, et qu'aucun nouveau message n'est trouvé, DRAWSOCKET utilise les valeurs de l'objet pour mettre à jour les attributs de l'objet. Par exemple :

/violin : {
    /key : ''svg'',
    /val : {
        /id : ''foo'',
        /largeur : 100}
    }

changera l'attribut largeur du noeud "foo" sans modifier les autres attributs déjà définis.

3.3 Éléments parent et enfant
L'ajout de nœuds enfants à l'élément SVG parent peut être réalisé à l'aide des mots-clés parent et child.
Le mot-clé child est une fonction d'aide de haut niveau de l'API qui aide l'utilisateur à spécifier un ou plusieurs nœuds enfants dans une syntaxe arborescente. La valeur attachée à cette adresse sera insérée en tant qu'enfant du nœud parent, par exemple l’intérieur d'un élément < text >, ou un nouveau nœud dans une balise < g > la la balise d'élément de regroupement SVG. Voici un exemple d'un cercle et d'une ligne contenus dans un nouveau groupe SVG, appelé "noteline" :

/violon : {
    /key : ''svg'',
    /val : {
        /new : ''g'',
        /id : ''noteline'',
        /x : 100,
        /y : 100,
        /child : [{
        /new : ''ligne'',
    /id : ''liney'',
    /x1 : 10,
    /y1 : 5,
    /x2 : 100,
    /y2 : 5,
    /style : {
    /stroke-width : 1
    }
    }, {
        /new : ''circle'',
        /id : ''circley'',
        /cx : 5,
        /cy : 5,
        /r : 5,
        /style : {
        /stroke-width: 2,
        /fill : ''none'',
        /stroke : ''black''
        }
        }]
        }
    }

Les nœuds avec un attribut parent sont insérés en tant qu'enfants du le nœud avec l'id spécifié par le parent, à condition que l'élément parent existe déjà dans le DOM. Si aucun élément parent n'est spécifié, le nœud est inséré dans le groupe SVG par défaut : "main-svg".
Par exemple, la syntaxe de l'arbre ci-dessus pourrait également être écrite de cette façon : 

/violin : {
    /key : ''svg'',
    /val : [{
        /new : ''g'',
        /id : ''noteline'',
        /x : 100,
        /y : 100
        }, {
        /new : ''ligne'',
        /id : ''liney'',
        /parent : ''noteline'',
        /x1 : 10,
        /y1 : 5,
        /x2 : 100,
        /y2 : 5,
        /style : {
        /stroke-width : 1}
        }, {
        /new : ''circle'',
        /id : ''circley'',
        /parent : ''noteline'',
/cx : 5,
        /cy : 5,
        /r : 5,
        /style : {
        /stroke-width : 2,
        /fill : ''none'',
        /stroke : ''black''
        }
        }]
    }

3.4 Contextes de dessin des couches SVG
Dans un fichier SVG, chaque élément d'objet est dessiné dans le même ordre qu'il est écrit dans le fichier, de haut en bas, le dernier élément étant dessiné en dernier, "au-dessus" de tous les objets objets qui ont pu être dessinés au même endroit.
Dans le système DRAWSOCKET, l'ordre de dessin est déterminé par l'ordre de création de l'objet (à l'aide du mot-clé new).
En utilisant les mots-clés parent et child, de nouveaux noeuds peuvent être créés et insérés comme enfants de noeuds existants. L'ordre dans lequel les nœuds enfants sont créés définit l'ordre de dessin des nœuds. Il est important de noter que l'édition des nœuds (c'est-à-dire la définition de valeurs sans l'utilisation du mot-clé new) ne modifie pas l'ordre de dessin. De même, l'insertion de nœuds ne modifie pas l'ordre de dessin des nœuds parents. Cette règle permet d'utiliser des groupes SVG comme contextes de couches de dessin, qui maintiennent l'ordre d'empilement les uns par rapport aux autres.
A titre d'illustration, disons que vous souhaitez avoir trois couches de dessin, un arrière-plan, un milieu et un premier plan. Vous pourriez créer trois nouveaux groupes au sein du nœud SVG principal, appelés "back", "main", et "overlay", dans un ordre de dessin spécifique, comme ceci :

/violin : {
    /key : ''svg'',
    /val : [{
        /new : ''g'',
        /id : ''back''
        }, {
        /new : ''g'',
        /id : " main
        } , {
        /new : ''g'',
        /id : " overlay "
        }]
    }

Vous pouvez ensuite utiliser le mot-clé parent pour ajouter des nœuds aux groupes nouvellement créés. Les nouveaux nœuds sont dessinés au-dessus des anciens, mais comme les groupes conservent leur ordre d’apparition, vous pouvez les utiliser comme des couches. Dans cet exemple, "overlay", sera toujours dessinée après les groupes de couches "back" et "principal".

/∗ : {
    /key : ''svg'',
    /val : [{
        /parent : ''main'',
        /id : ''clef'',
        /new : ''text'',
        /child : '''',
        /class : ''bravura text'',
        /x : 40,
        /y : 50
        }, {
        /parent : ''back'',
        /new : ''rect'',
        /id : ''rect'',
        /x : 5,
        /y : 5,
        /largeur : 100,
        /hauteur : 100,
        /fill : ''red'' (rouge)
        }, {
        /parent : ''overlay'',
        /new : ''circle'',
        /id : ''cercle'',
        /cx : 50,
        /cy : 50,
        /r : 10,
        /fill : ''blue'' (bleu)
        }]
    }

En utilisant cette approche, plusieurs couches d'éléments SVG peuvent être regroupées et manipulées (avec certaines limitations décrites dans la spécification SVG).

3.5 Stylisation CSS SVG.
La possibilité d'appliquer dynamiquement des opérations de style CSS sur les éléments éléments SVG fournit à l'utilisateur un mécanisme extrêmement souple pour composer et manipuler la mise en page graphique. Pour les utilisations les plus courantes de DRAWSOCKET, un ensemble de propriétés de mise en page par défaut est défini dans le fichier de l'utilisateur default.css, qui est chargé avec le fichier HTML par défaut (drawsocket-page.html). La feuille de style liée définit quelques états initiaux pour les types d'éléments SVG, par exemple les lignes ont une valeur de largeur de trait par défaut pour que les lignes soient visibles par défaut . DRAWSOCKET fournit également un accès dynamique aux règles CSS, pour lesquelles il est utile de comprendre la hiérarchie des propriétés de style SVG.
Il y a trois niveaux d'héritage avec le style CSS SVG :
(1) les attributs de présentation, définis au sein de l'élément, par ex :
< rect fill="red" > ;
(2) les définitions de feuilles de style, chargées via un document CSS jointe, ou dans un élément < style > dans le document document HTML ; et (3) le style en ligne, un extrait de CSS enveloppé dans une chaîne de caractères et défini dans l'attribut de style d'un élément, par ex :
.

Chacune est remplacée par la suivante : les feuilles de style remplacent les attributs de présentation et les styles en ligne remplacent tous les autres . L'utilisation de la syntaxe des sélecteurs de classe CSS ouvre de nombreuses possibilités. Voici par exemple un exemple utilisant la syntaxe du tableau d'objets pour créer deux classes CSS : (1) ".notehead" qui définit des valeurs par défaut pour les propriétés de remplissage et de trait, ainsi que la valeur de rayon r ; et (2) ".notehead.open", une sous-classe de ".notehead" qui remplace la propriété fill. En suivant les définitions css, un nouvel objet cercle SVG est créé et configuré avec la classe ".notehead.open".

/violin : [{
    /key : ''css'',
    /val : [{
        /selector : ''.notehead'',
        /props : {
        /stroke : ''black'',
        /stroke-width : 2,
        /fill : ''black'',
        /r : 5
        }
        }, {
        /selector : ''.notehead.open'',
        /props : {
        /fill : "'none'
        }
        }],
        }, {
        /key : ''svg'',
        /val : {
        /new : ''circle'',
        /id : ''foo'',
        /class : ''notehead open'',
        /cx : 20,
        /cy : 20
        }
    }]

3.6 Importation SVG et définitions de bibliothèques
DRAWSOCKET donne accès à plusieurs méthodes pour importer et réutiliser des fragments de SVG. Il s'agit d'une approche utile pour réduire la quantité de données qui doivent être envoyées sur le réseau, et peut grandement simplifier la construction de situations de notation de situations de notation plus complexes.
Référencement des définitions SVG. Il y a deux types de nœuds dans la spécification SVG qui permettent à l'utilisateur de créer des prototypes d'éléments graphiques, defs et symbol, qui peuvent être appliqués comme un tampon via la balise use.
Dans l'élément SVG principal DRAWSOCKET, il y a un groupe d'éléments appelé defs qui n'est pas directement dessiné sur l'écran, mais qui est visible en utilisant l'outil de visualisation des éléments HTML du navigateur. DRAWSOCKET utilise la même syntaxe de contexte de dessin pour le nœud defs, que pour les autres couches de dessin.
Par exemple, l'extrait suivant crée un nouvel objet groupe SVG dans le defs, appelé "noteline", qui contient une ligne et un cercle :

/violin : {
    /key : ''svg'',
    /val : {
        /parent : ''defs'',
        /new : ''g'',
        /id : ''noteline'',
        /child : [{
        /new : ''ligne'',
        /x1 : 10,
        /y1 : 10,
        /x2 : 100,
        /y2 : 10
        }, {
        /new : ''cercle'',
        /cx : 5,
        /cy : 5,
        /r : 5
        }]
        }
    }

En général, l'utilisateur envoie une bibliothèque de définitions au début de la pièce, puis fait référence à l'ensemble des définitions selon les besoins via l'élément SVG use et son attribut href, en créant une référence interne à une définition donnée, sélectionnée via son attribut id.
Par exemple, le nouvel objet SVG "foo" suivant, fait référence à la définition "noteline" ci-dessus, décalée en position x, y {100, 100} :

/violin : {
    /key : ''svg'',
    /val : {
        /new : ''use'',
        /id : ''foo'',
        /href : ''#noteline'',
        /x : 100,
        /y : 100
        }
    }

Importation de fragments. L'approche de la syntaxe use-href peut également être utilisée pour importer des éléments depuis des fichiers SVG externes stockés dans le dossier HTML public, en ajoutant l'identifiant de l'objet cible au chemin du fichier externe. Par exemple, pour référencer un objet avec l'ID "boo" dans un fichier externe appelé "other.svg" qui se trouve dans le sous-dossier public appelé "media", vous pouvez utiliser l'extrait suivant :

/violin : {
    /key : ''svg'',
    /val : {
        /new : ''use'',
        /id : ''foo'',
        /href : ''/media/other.svg#boo''.
        }
    }
Si les attributs x ou y sont définis dans le noeud use, l'objet référencé sera décalé de la quantité spécifiée dans le noeud use.
DRAWSOCKET fournit également une option supplémentaire avec l'attribut href. Si la valeur href est une liste, que la deuxième valeur est différente de zéro, le script trouvera la boîte de délimitation de l'objet original et le décalera de manière à ce qu'il se trouve à l'emplacement de l'objet original et le décale de façon à ce qu'il se trouve à l'origine {0, 0}, puis applique les valeurs x, y comme deuxième opération. L'avantage de cette fonctionnalité est qu'elle permet de coordonner des objets sans avoir à connaître leur position originale dans le fichier de référence.

3.7 Importation de PDF
Les fichiers PDF peuvent être importés dans DRAWSOCKET. Par exemple, pour charger un PDF, le stocker à l'ID DRAWSOCKET "foo", en définissant sa position x, sa largeur et en le paramétrant pour afficher la page 2 :

/∗ : {
    /key : ''pdf'',
    /val : {
        /id : ''newpdf'',
        /href : ''/media/flint piccolo excerpt.pdf'',
        /largeur : 600,
        /x : 100,
        /page : 2
        }
    }

3.8 Animation
Bien que les objets DRAWSOCKET puissent être animés à l'aide de transitions et d'images clés CSS natives, les bibliothèques GSAP TweenMax et TimlineMax de GSAP ont été introduites pour fournir une méthode méthode beaucoup plus pratique et compatible avec tous les navigateurs. Avec la bibliothèque TweenMax, les utilisateurs peuvent créer une transition "tween" entre la position actuelle de l'objet et les valeurs actuelles des propriétés CSS actuelles de l'objet, à un autre ensemble de valeurs pendant un temps donné, en utilisant la fonction TweenMax.to via la clef DRAWSOCKET tween. Par exemple :

/violin : {
    /key : ''tween'',
    /val : {
        /id : ''aaa'',
        /target : ''#note'',
        /dur : 10,
        /vars : {
        /x : 100,
        /y : 100,
        /opacité : 0
        }
        }
    }

déplace l'objet SVG "note" à la position xy {100, 100}, et fait passer l'opacité à zéro sur une période de 10 secondes. Le tween est stocké en tant qu'objet dans le script DRAWSOCKET à l'ID donné (ici "aaa"), et peut être rappelé à volonté (voir la documentation en ligne pour plus de détails). Les sélecteur CSS cible, dur et vars sont directement insérés dans les champs d'arguments de la méthode TweenMax. Des animations plus complexes peuvent être mises en œuvre avec la fonction TimelineMax, via la commande DRAWSOCKET timeline, qui est composée d'un tableau de tweens (qui peuvent également avoir des cibles différentes). Comme pour la fonction TweenMax.to un effort a été fait pour rendre la syntaxe d'encodage aussi proche que possible de la fonction Timeline native de GSAP, afin que les utilisateurs puissent se référer à la documentation GSAP pour une référence complète.

  /violin : {
    /key : ''timeline'',
    /val : {
        /id : ''foo line'',
        /init : {
        /paused : ''true'',
        /yoyo : ''true'',
        /repeat : 20
        },
        /tweens : [{
        /target : ''#bar'',
        /dur : 1,
        /vars : {
        /y : 270,
        /x : 100,
        /scaleX : ''200%'',
        /opacité : 1,
        /ease : ''linear''
        }
        }, {
        /target : ''#bar'',
        /dur : 2,
        /vars : {
        /y : 10,
        /x : 0,
        /scale : ''100%'',
        /opacité : 1,
        /ease : ''linear''
        }
        }]
        }
    }

DRAWSOCKET fournit le mot-clé cmd pour les tweens (et les lignes de temps de tweens) pour démarrer, arrêter, réinitialiser, inverser, etc.
Synchronisation. Toutes les commandes envoyées par le serveur sont horodatées, ce qui fournit à DRAWSOCKET un mécanisme pour synchroniser les animations. En utilisant la bibliothèque Timesync.js le client demande périodiquement au serveur l'heure actuelle de son horloge et enregistre une valeur de décalage entre les deux horloges.
horloges . Ensuite, à chaque fois qu'une nouvelle demande de démarrage d'animation est reçue, le client vérifie l'horodatage du message par rapport à l'heure actuelle de l'horloge du client moins la différence enregistrée par rapport à l'heure du serveur pour obtenir l'heure corrigée du début de l'animation par rapport à l'horloge du serveur. Ensuite, le client vérifie la durée de l'animation (tween ou timeline) pour s'assurer qu'il n'a pas déjà manqué l'heure de fin de l'animation.
Si ce n'est pas le cas, le script client démarre l'animation, en avançant rapidement si nécessaire pour compenser le décalage du réseau.

3.9 Son
En plus de donner accès à des outils de dessin basés sur un navigateur DRAWSOCKET utilise également le cadre Tone.js , environnement WebAudio pour la production de sons sur navigateur. La bibliothèque de support Tone ajoute également un nouveau mot-clé, call qui attend un objet contenant une méthode et des arguments facultatifs (args). En outre, l'objet call peut également contenir un objet ‘then’ qui peut être utilisé comme un appel séquentiel, appliqué à la valeur de retour de l'appel de méthode parent.
Par exemple, si nous créons un nouveau Tone.Player, chargeons un fichier mp3, nous lui demandons de commencer la lecture en boucle et nous appelons la méthode Tone.Player toMaster() :

/∗ : {
    /key : ‘‘sound’’,
    /val : {
        /new : ‘‘Player’’,
        /id : ‘‘kick’’,
        /vars : {
        /url : ‘‘/media/808 mp3/kick1.mp3’’,
        /autostart : ‘‘true’’,
        /loop : ‘‘true’’ },
        /call : {
        /method : ‘‘toMaster’’ }
        }
    }

3.10 HTML5
DRAWSOCKET permet d'accéder aux noeuds HTML via la balise html. Par exemple, ceci charge une vidéo :

  /∗ : {
    /key : ''html'',
    /val : {
        /new : ''video'',
        /id : ''foo'',
        /child : {
        /new : ''source'',
        /type : ''video/mp4'',
        /src : ''somerandommovie.mp4'' }
        }
        }
    }

Certains objets HTML5 JS prennent également en charge le mot-clé call. Par exemple, ceci lance la lecture de la vidéo ci-dessus :

/∗ : {
    /key : ''html'',
    /val : {
        /id : ''foo'',
        /call : {
        /method : ''play' }
        }
        }
    }

3.11 Interaction utilisateur
Enfin, DRAWSOCKET renvoie également les informations relatives à l'interaction de l'utilisateur au serveur, en envoyant les données dans Max où elles peuvent être utilisées pour contrôler d'autres processus, par le biais d'écouteurs d'événements de souris et de multi-touch, ou par le biais de formulaires de saisie de champs de texte HTML. Lorsque la souris ou les doigts de l'utilisateur se déplacent sur l'écran, DRAWSOCKET rapporte la position x, y et l'objet graphique le plus haut sous les doigts ou le curseur, et lié avec l'adresse URL . DRAWSOCKET donne également accès à des champs de saisie de texte HTML. Pour créer un champ de texte, les utilisateurs créent d'abord un formulaire (form) avec une incise de texte par défaut, puis positionnent le formulaire en appliquant une transformation CSS, ou tween. Lorsqu'un client saisit du texte dans le champ de saisie et appuie sur la touche Entrée ou clique en dehors du formulaire, le texte est renvoyé au serveur et affiché dans Max de la même manière que les données de la souris et du toucher multiple.
Rappels d'événements définis par l'utilisateur.
L'interaction de l'utilisateur est exposé à l'espace de noms JS global sous le nom de drawsocket.input. Par exemple, le snippet suivant, qui crée un objet chemin SVG, et assigne une fonction de rappel onclick qui déclenche un échantillon de lecture lorsque l'utilisateur client clique sur l'objet chemin :

/∗ : {
    /key : ''svg'',
    /val : {
        /new : ''path'',
        /id : ''wow'',
        /style : {
        /fill : ''red'' },
        /d : ''M100,100a30,30,0,0,0,0-60a30,30,0,0,0,60'',
        /onclick : ''drawsocket. input({
        key : 'sound',
        val : {
        id : 'kick',
        call : {
        method : 'restart'
        }
        }
        })"'
        }
    }

4. TRAVAUX FUTURS
DRAWSOCKET est actuellement encore considéré comme "en développement", ceci dit, le système a déjà été utilisé dans plusieurs performances live, et semble être assez robuste. En préparant l'extension à grande échelle du système à l'Elbtunnel de Saint-Pauli , nous aurons l'occasion de tester pleinement le système. Le système de mise en cache constitue un problème potentiel que nous imaginons. Actuellement, la routine de mise en cache est traitée dans la fonction de rappel qui est appelée lorsqu'un nouveau dictionnaire arrive de Max. À la réception d'un nouveau dictionnaire, le serveur achemine les données, en envoyant des paquets aux clients appropriés, puis envoie les paquets au système de cache qui unit les données avec tous les nœuds ayant un identifiant (ou un sélecteur dans le cas de CSS) correspondant. La question de l'évolutivité de cette approche se pose. Node.js, comme vanilla JS, utilise un modèle de boucle événementielle à fil unique, qui utilise une file d'attente de rappels d'événements qui doivent être traités de manière asynchrone. Il est toutefois possible de bloquer la boucle événementielle à l'intérieur d'une fonction de rappel, si l'exécution prend trop de temps. En particulier, les opérations JSON.parse et JSON.stringify sont potentiellement coûteuses, avec une complexité de O(n) ; ainsi, en fonction de la taille du dictionnaire entrant, cela pourrait ralentir considérablement la réponse du serveur. Dans nos tests jusqu'à présent, nous avons déjà remarqué quelques problèmes avec le traitement de très grands dictionnaires arrivant de Max, mais nous devons approfondir nos recherches. Il est possible que, puisque les données sont diffusées avant d'être envoyées au système de mise en cache, le blocage de la boucle d'événements soit moins perceptible du côté client, mais la réactivité du serveur sera réduite, ce qui affectera probablement la routine de synchronisation des horloges et pourrait aussi, dans des cas extrêmes, entraîner une hausse du nombre d'événements à traiter dans la file d'attente. Pour résoudre ce problème, nous pourrions envisager de stocker les états des URL dans une base de données distincte, qui s'exécute comme un processus distinct.

Remerciements:
Les auteurs tiennent à remercier Jacob Sello pour les tests détaillés qu'il a effectués sur le système, qui ont poussé le développement de nombreuses nouvelles fonctionnalités et considérations de conception. Nous souhaitons également remercier le ministère fédéral allemand de l'Éducation et de la recherche en Allemagne (BMBF), pour son soutien à cette recherche par le biais de l'initiative Innovative Hochschule.

Rama Gottfried, Georg Hajdu (traduction Jonathan Bell)

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RECENSIONS


PARTITIONS

CLARINETTE

Pascal Enzo RABATTI, Valse pour Émilie, pour clarinette et piano, Pierre Lafitan, P.L.3853


Niveau : 1er cycle

Une petite valse simple relativement facile (ambitus la grave-sol aigu). Elle est destinée aux élèves de premier cycle deuxième année au moins, elle demande une bonne endurance puisque c’est un morceau de deux pages. L’écriture rythmique ne comporte aucune difficulté, la mélodie est un peu trop simple et assez répétitive. Cette valse est en sol majeur, avec quelques modulation en sib majeur très courtes.
Alice CAUBIT
© L'ÉDUCATION MUSICALE 2021


Jacky THÉROND, Sonate, pour clarinette seule, Pierre Lafitan, P.L.3761


Niveau : fin de 2e – début de 3e cycle

Une pièce solo fin de cycle 2 début cycle 3. Cette sonate monte jusqu'au la sur-aigu. La pièce a des accents swings assez sympathiques à certain endroit. Le compositeur a fait le choix d'une écriture relativement complexe au niveau métrique : une introduction en 3/2, suivi de plusieurs changements de tempi soudain : 60 à la blanche puis une mesure Presto à 176 avant de revenir à un 132, enfin une alternance de 6/8 et 4/4 pour le final. Elle représente une vraie difficulté de lecture autant au niveau de sa construction que pour ses mélodies où l'on trouve beaucoup d'altérations ! Un vrai défi pour un rendu attrayant.
Alice CAUBIT
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Erik SATIE, Clarinet Album (arrangements pour clarinette de piano de James RAE), pour clarinette et piano, Universal Edition, UE 21 775.


Niveau : 2e cycle

Les arrangements de James RAE sont à acheter les yeux fermés ! Et ce recueil est encore une réussite. Il permet de faire découvrir les pièces délicieuses d'Erik Satie aux clarinettistes, allant des gymnopédies à des pièces pour piano moins connus par les instrumentistes à vent (sonatine bureaucratique, Jack in the box). Un répertoire riche en couleurs et en poésie musicale, qui permet un réel travail sur le son. Ce recueil de niveau cycle 2 s'ouvre par une belle préface présentant le compositeur, et conviendra parfaitement aux adultes de par ses choix de morceaux. Une mention spéciale pour la valse croustillante "Je te veux" superbement transcrite !
Alice CAUBIT
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Max MÉREAUX, Interlude, pour clarinette et piano, Pierre Lafitan, P.L.3795.


Niveau : début de 1er cycle

Petite pièce ternaire charmante et très simple pour les élèves de début de 1er cycle qui commencent à maîtriser les aigus jusqu’au sol. Sa forme et son écriture rythmique simple (presque qu’uniquement des blanches pointées) permet de proposer un travail harmonique d’écoute avec le piano. En majeur elle demande une bonne maîtrise des petits doigts pour le passage de registre.
Alice CAUBIT
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Michel CHEBROU, Benjamin blues, pour clarinette et piano, Pierre Lafitan, P.L.3698.

Niveau : fin de 1e – début de 2e cycle

Petite pièce « jazzy » pour clarinette (pour reprendre l’indication de tempo inscrite par l’auteur) d’un niveau fin de 1er cycle, début 2ème . Elle propose un travail rythmique spécifique d’interprétation ternaire des croches et un travail sur les modes d’attaques qui sont vraiment multiples dans cette pièce. Elle demande de bons acquis et une bonne maîtrise de l’instrument pour être à l’aise dans le tempo relativement rapide indiqué par l’auteur.
Alice CAUBIT
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Claude-Henry JOUBERT, Les carottes sont qu’8 : variations végétariennes pour clarinette avec accompagnement de piano, pour clarinette et piano, Pierre Lafitan, P.L.3704.


Niveau : fin de 1e cycle

On retrouve dans cette pièce tout l’humour et l’écriture imagée si caractéristique de l’univers de Claude-Henry Joubert. La pièce commence par un petit texte qui à la manière d’un dialogue de théâtre nous plonge dans le monde du jeu. D’ailleurs chaque variation sera annotée d’une courte didascalie exposant les règles de jeu ou le ton à donner. Une pièce fantaisiste, espiègle et très vocale. Elle est d’un niveau fin de premier cycle et est même inscrite dans la Liste nationale des œuvres instrumentales de fins de cycles proposées aux conservatoires et école de musique de la FFEA de cette année 2021. La pièce s’ouvre par une introduction humoristique où le pianiste compte les notes de la clarinette, suit la première variation : un grand thème chanté. Ensuite les variations 2, 3 et 4 sont plus rythmiques, voire même un peu techniques. Les variations 5 et 6 sont des jeux chantés/joués. Les deux dernières variations sont de nouveau techniques, et la variation 8 termine le morceau dans un tempo de « gigue aimable » ternaire.
Alice CAUBIT
© L'ÉDUCATION MUSICALE 2021


COR

Alexandre CARLIN, Le retour du héros pour cor d’harmonie et piano, Pierre Lafitan, P.L.3584


Niveau : Débutant

Trois parties accompagnent et décrivent ce retour du héros. Une première partie plutôt triomphale, ce qui n’empêche pas la délicatesse des harmonies, suggère un retour plutôt triomphant. Puis intervient une deuxième partie meno mosso, au rythme berceur et à la mélodie un peu nostalgique. On pourra suggérer différentes interprétations de ce passage. Souvenir des épreuves ? Nostalgie du retour ? Bref, les interprètes pourront donner ici libre cours à leur imagination et à leur sensibilité. Mais la troisième partie reprend le thème du début et se termine en demi-teinte. Le héros est triomphant, certes, mais sans triomphalisme ! L’ensemble est donc particulièrement séduisant et l’ambiance créée par les harmonies délicates pleine de charme.
Daniel BLACKSTONE
© L'ÉDUCATION MUSICALE 2021


FLÛTE

Henrik WIESE, The Piccolo and Alto Flute audition, Universal Edition, UE 38080


Après The Flute Audition paru en 2018, Henrik Wiese nous propose aujourd’hui pas moins de 180 des traits d’orchestre les plus demandés aux quatre coins du monde lors des concours d’orchestre de piccolo. Conçu à l’attention de ses élèves de la Hoschule für Künste de Brême, Henrik Wiese nous explique dans la préface (en allemand, anglais et français) qu’il s’est basé en partie sur les listes actualisées de répertoire que ces derniers lui ont fourni. Dans The Piccolo and Alto Flute audition, nous trouverons également 26 traits parmi les plus emblématiques demandés à la flûte alto. Le format de 85 pages est, avouons-le, bien plus pratique que l’indispensable A Piccolo Practice Book de Trevor Wye et Patricia Morris paru en 1988 chez Novello, et plus complet que l’Orchester Probespiel für flöte und piccolo des éditions Peters. Classés alphabétiquement par compositeurs, nous pourrons donc y découvrir les traits de piccolo du Pierrot lunaire de Schönberg, ceux de Eight Russian Folksongs op.48 de Lyadov ou encore Variations on a theme by Haydn de Brahms (liste complète ici) Bien entendu nous y retrouvons les « tubes » tels que différentes symphonies de Schostakovitch, la 4ème Symphonie de Tchaïkovsky, les ouvertures de Rossini, le Boléro de Ravel, etc.… A la fin du recueil Henrik Wiese a répertorié toutes ces œuvres dans une liste chronologique. Il nous propose également la liste des pièces du répertoire les plus couramment imposées, et une page de doigtés alternatifs. Il est plus rare de devoir jouer de la flûte en sol lors d’auditions d’orchestre, mais si cela devait arriver, grâce à ce recueil, vous auriez déjà travaillé Les Planètes de Holst, Le Sacre du Printemps de Stravinsky et surtout Daphnis et Chloé de Ravel qui n’apparaît pas, si vous le possédez, dans The Alto Flute Practice Book des mêmes Trevor Wye et Patricia Morris publié en 1995 chez Novello, la reproduction par Durand & cie n’ayant pas été accordée à cette époque. La mise en pages est agréable, les extraits sont complets, les chiffres de mesures sont indiqués et des tempi approximatifs sont proposés dans ce volume très pratique. À vos piccolos et vos flûtes en sol, et bon courage pour les auditions !
Yua Souverbie
© L'ÉDUCATION MUSICALE 2021


Dimitri TCHESNOKOV, Ethéria op.24c, pour flûte et piano, Delatour France, DLT2889


Après Ethéria op.24a pour violon et piano puis Ethéria op.24b pour clarinette et piano, le pianiste et compositeur franco-ukrainien Dimitri Tchesnokov nous propose une version flûte et piano dans cet opus 24c.
Cette pièce en 3 parties « doit être jouée très librement avec beaucoup d’élégance » comme nous l’indique le compositeur. Dans la première puis troisième partie larghetto, elle explore toutes les tessitures de la flûte dans de grandes phrases lyriques legato où s’entremêlent des traits aériens accompagnés d’arabesques au piano. La partie centrale d’Ethéria est un rythmique giocoso contrastant par son énergie rythmique, ponctuée d’accents syncopés et de staccato. « Le timbre du son et la flexibilité rythmique doivent être dirigés par la sensibilité harmonique » : les jeux de timbre, la liberté d’expression mais aussi la rigueur de la mise en place de la seconde partie dynamique font d’Ethéria une pièce de travail de musique de chambre idéale pour des élèves de 3ème cycle.
Vous trouverez sur Youtube cette œuvre interprétée par Alina Pronina et Anna Wierer :
https://www.youtube.com/watch?v=geB36ql7_C0
Yua Souverbie
© L'ÉDUCATION MUSICALE 2021


Claude-Henry JOUBERT, Fleur de courgette, Concerto végétarien, pour flûte avec accompagnement de piano, Pierre Lafitan, P.L.3691


Niveau : début de 2nd cycle

Voici l’opus pour flûte (de 3’30’’) d’une série de « concertos végétariens » que Claude-Henry Joubert a concocté pour une dizaine d’instruments, destinés à des élèves de fin de 1er cycle. Toutefois cette page s’adresserait plutôt à des élèves de début de 2nd cycle. Cette pièce est un très bon outil pédagogique, comme sait si bien le faire Claude-Henry Joubert, et parfaite pour développer l’imaginaire. Comme dans chacun des concertos, un texte évocateur est proposé pour servir au mieux la musique. Nous suivrons les péripéties d’une belle danseuse, Fleur de courgette, au détour d’une élégante valse en sol majeur, d’une polka endiablée en do majeur, d’une partie plus technique avec un « tempo de bagarre » en sol mineur. Nous resterons en sol mineur dans une 4 ème partie pour pleurer un doux thème expressif avant la consolation, avec le retour de la valse, où comme dans tout joli conte, tout est bien qui finit bien !
Yua Souverbie
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Claire RICATEAU, Mes premiers exercices journaliers, Henry Lemoine, HL29591


Niveau : Niveau : 1er cycle

Riche de son expérience de professeur de flûte traversière au CRR de Boulogne, Claire Ricateau nous propose Mes premiers exercices journaliers, en préambule à notre livre de chevet préféré, les Exercices Journaliers de Taffanel et Gaubert, ou encore ceux de Moyse ou Reichert.
Conçu pour faire suite aux méthodes de débutants, ce recueil s’adresse aux élèves de 1er cycle et offre rigueur et discipline dans un travail de sonorité, de vélocité, de justesse et d’articulations.
Toutes les tonalités majeures et mineures sont abordées (jusqu’à 6 bémols et 6 dièses), chacune présentée sur 2 pages. Sur celle de gauche sont présentés différents exercices de sonorité, d’intervalles et de nuances tandis que la page de droite se concentre sur la vélocité de la gamme sur 2 octaves, en binaire puis en ternaire, d’arpèges de 3 sons sur 2 octaves, et d’exercices de détaché (simple coup de langue, puis double et triple coup de langue). Au début du cahier, vous trouverez des consignes (également en anglais) afin de pouvoir éprouver au mieux chaque exercice, mais surtout une double page cartonnée d’articulations binaire et ternaire.
Il existe de nombreux ouvrages consacrés aux exercices destinés au 1er cycle ; celui-ci va droit au but et est très efficace.
Yua Souverbie
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Guillaume PROD’HOMME, Un ticket de manège, pour flûte et piano, Pierre Lafitan, P.L.3842


Niveau : fin de 1er cycle

C’est avec une douce mélancolie que tourne le manège, sans doute vide, dans la 1ère partie à ¾ en fa mineur d’Un ticket de manège. Guillaume Prod’homme nous invite finalement à y monter à bord dans une joyeuse et dynamique seconde partie en do majeur. L’accompagnement sous forme d’ostinato de croches régulières viendra soutenir le jeune flûtiste de fin de 1er cycle dans ses valeurs rajoutées et ses accents syncopés, bien content d’avoir enfin échappé aux bémols grâce à son ticket de manège ! Cette pièce allant du fa♭ grave au sol aigu dure 3 minutes.
Yua Souverbie
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André DELCAMBRE, Berceuse et burlesque, pour flûte et piano, Pierre Lafitan, P.L.3696


Niveau : Niveau : 2e cycle

Après Burlesque, pièce pour flûte et piano destinée à des élèves de 3ème année de 1er cycle, André Delcambre nous propose aujourd’hui Berceuse et burlesque, cette fois-ci pour des élèves de milieu de second cycle. La douce berceuse explore dans un premier temps le médium de la flûte, avant de s’envoler dans les aigus dans des phrases de plus en plus longues, en arc, et de plus en plus actives. Après une phrase rythmique à écriture cadentielle, la berceuse fait place à une seconde partie plus vive. On pourra y travailler la régularité des doigts dans de nombreux motifs conjoints ponctués de croches piquées ou de l’entreprenant croche deux doubles. Flûte et piano dialoguent avec enthousiasme et énergie dans ce burlesque.
Yua Souverbie
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Tilmann DEHNHARD, Basilica deserta, pour flûte basse (ou flûte) et piano, Universal Edition, UE 38102


Alors qu’il compose, Tilman Dehnard aime imaginer les interprètes en train de jouer, la plupart du temps dans des situations de concerts. Et c’est dans une grande église vide et abandonnée qu’il a imaginé Klaus Spors, le commanditaire de cette pièce, jouer avec sa flûte basse. Voilà d’où vient le titre de cette œuvre à caractère minimaliste, non sans rappeler Façades de Philip Glass. Par dessus l’accompagnement répétitif, un ostinato rythmique met en avant les 1er et 3ème temps de chaque mesure. Par dessus cette assise, la flûte vient chanter de longues tenues teintées de bisbigliando. Prise par la transe du piano, elle va ensuite s’exciter en montant dans les aigus et se rythmer avec un phrasé accentué non sans rappeler le jazz cher à Dehnhard. On quitte l’église par une coda presque solo de la flûte en sons éoliens. Il est possible de jouer cette pièce à la flûte en ut, tous les doigtés de bisbigliando proposés à la flûte basse étant identiques. En revanche, on perdrait sans doute le charme de la chaleur du timbre de la flûte basse, alors si vous en avez une, rajoutez Basilica deserta à votre répertoire ! Vous pouvez écouter cette pièce de 4’08’’ sur le site du compositeur : www.dehnhard.com.
Yua Souverbie
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Estelle HUET, Des oreilles magiques, Jeux d’oreille pour le cours de flûte, Henry Lemoine, HL29576


Niveau : 1er cycle

Nous avions dit dans la lettre 128 de novembre décembre 2019 tout le bien que nous pensions de cette méthode écrite pour le violoncelle. Nous ne pouvons que redire pour ce volume adapté à la flûte traversière ce que nous avions écrit alors.
« L’originalité de ces jeux, c’est qu’ils se font entièrement « à l’oreille ». L’élève ne voit jamais la « méthode », mais c’est par l’audition pure que se fait la transmission et l’exercice.
C’est après avoir longuement testé pendant les cinq premières minutes de chaque leçon ce type d’exercices que l’auteur les a mis à la disposition de tous les professeurs. Le lien est ainsi fait entre le cours d’instrument et le cours de Formation Musicale. L’ensemble des jeux est décliné selon cinq niveaux progressifs. Mais ils sont potentiellement illimités. Et surtout, cette méthode utilise le chant comme un outil central du travail de l’oreille. Tout au long des jeux, l’élève est incité à chanter pour développer son « chant » (ou audition) intérieur. Bref, c’est toujours à la musique, à l’imitation puis à l’improvisation que nous invite ce remarquable travail. » Un grand bravo pour cette démarche et cette adaptation parfaitement réussie. Souhaitons que des adaptations pour d’autres instruments suivent !
Daniel BLACKSTONE
© L'ÉDUCATION MUSICALE 2021


René POTRAT, Promenade et danse pour flûte et piano, Pierre Lafitan, P.L.3469


Niveau : Fin de 1er cycle

Après une courte introduction au piano, le thème de la promenade se développe à la flûte. Intervient alors un ré mineur plus rythmé et plus rapide qui suggère que la promenade s’anime. La danse intervient avec un ré Majeur sautillant puis revient un ré mineur mais qui n’en sautille pas moins. La pièce se conclut sur un forte énergique dans l’aigu. On voit que cette œuvre nous fait parcourir différents paysages, différentes ambiances et demande donc aux interprètes de savoir créer divers climats musicaux. L’ensemble est de bonne facture et devrait satisfaire instrumentistes et auditeurs.
Daniel BLACKSTONE
© L'ÉDUCATION MUSICALE 2021


PERCUSSIONS

Rémi TAMAI et Paul MINDY, Image d’un jardin zen, pour piano 4 mains, percussions traditionnelles et corporelles, Henry Lemoine, 29569 H.L.


Cet ouvrage constitué de quatre pièces est le fruit de la rencontre de deux musiciens : Rémi Tamai, pianiste concertiste et Paul Mindy, percussionniste traditionnel.
Ils proposent avec ces pièces de travailler autrement, par exemple en réunissant de jeunes musiciens issus de pratiques différentes (pianistes, percussionnistes, élèves en formation musicale...) en leur faisant aborder des musiques inspirées d’ailleurs, Japon mais aussi rythmes venus d’Afrique, Brésil, ou de Cuba.
Un piano, quatre interprètes ou plus et quelques accessoires (shime, triangle, agogo, maracas...) suffisent à s’ouvrir à un nouveau type de répertoire de concert et expérimenter de nouveaux sons, de nouvelles coordinations corporelles, tout cela dans la détente et l’écoute de chacun.
Un beau voyage en perspective !

Voici un lien YouTube où Paul Mindy fait une démonstration des percussions corporelles pour ces pièces.
https://www.youtube.com/watch?v=e2gMqc1CayY&list=PLUp_sT24M6fp1gQ8euh_5gMdv_F4kfFcR&index=3
Thierry LE CACHEUX
© L'ÉDUCATION MUSICALE 2021


PIANO

Alexandre FONTAINES, 4 Préludes pour piano op.32, Delatour France, DLT1769


Cette suite de 4 préludes pour pianiste expérimenté se joue d’un trait. Elle forme une sorte de boucle dans son ensemble et dure approximativement 8 minutes 45. Le premier mouvement se déploie peu à peu, allant d’une note à l’unisson en octave, à des accords de plus en plus nombreux et étalés sur le clavier, jusqu’à des agrégats de sons. Le deuxième se veut mélancolique et plein d’espoir, avec des arpèges aux deux mains en doubles, tout du long. Il va de la nuance pp au fff. On a ensuite comme un climax au niveau durée et intensité sur le thème du Dies Irae dans le troisième mouvement. Le quatrième et dernier mouvement reprend l’arpégé en doubles du deuxième mouvement et termine sur trois longs accords, rappelant les trois notes longues du début du premier mouvement. Vous pouvez écouter l’œuvre sur YouTube, interprétée par Olivier Cangelosi : https://www.youtube.com/watch?v=DWM5Hn8rq3A
Marie FRASCHINI
© L'ÉDUCATION MUSICALE 2021


Chantal MULLER, Piano Color, la suite de la méthode arc-en-ciel, Combre, CO 6835


Niveau : débutant

En 49 pages, Chantal Muller, professeur de piano, psycho-sociologue, compositeur et spécialiste dans l’enseignement aux enfants, propose aux débutants ou quasi-débutants une méthode ludique et attrayante. Chaque note est associée à une couleur. Le système de « cases à rythme » permet de mieux matérialiser la durée des sons et des silenceéés. Un clavier vertical est associé à la portée pour faire le lien entre les notes écrites et leur position sur le clavier (tous les registres sont explorés, notamment grâce aux notes de repère do, fa et sol). Des conseils méthodologiques judicieux sont distillés régulièrement tout au long du parcours afin d’aider les parents dans l’accompagnement pédagogique de leur enfant. Les 16 morceaux choisis par Chantal Muller sont des comptines et musiques traditionnelles célèbres de tous les continents (Amérique, Europe, Moyen Orient, Asie…). Très plaisants et variés, ils introduisent rapidement de nombreuses notions : accords de deux sons, tonalités, déplacements sur le clavier, nuances, variations de tempi, pédale, chiffrages américains pour un éventuel accompagnement par le professeur ou le parent… À ceci s’ajoutent des propositions d’exercices techniques, destinés à développer la vélocité et accompagnés, une fois de plus, de conseils méthodologiques pour rendre leur pratique plus ludique. L’improvisation est également abordée. Le tout est expliqué avec beaucoup de pédagogie, en mettant la notion de plaisir au centre de l’apprentissage.
Hélène RUSQUET
© L'ÉDUCATION MUSICALE 2021


Jean-Charles GANDRILLE, Le pianiste poète, 14 pièces lentes et expressives pour les premières années, Delatour France, DLT2156


Niveau : 1er cycle

Ce recueil de 14 pièces pour piano de Jean-Charles Gandrille a été créé le 9 octobre 2019. On y trouve : Un soir d’automne, dans lequel on emploie une pédale et un ostinato à la main gauche, pendant que la main droite chante. Puis Murmures de la forêt dans un tempo lent et nostalgique nous plonge dans des couleurs à la fois sombres et lumineuses ! Devant l’immensité se joue lent et Intense ; La résonance intérieure est Rêveur avec plusieurs motifs joués en échos. Cantilène se joue calme ; Prière onirique est infiniment nostalgique. Les expirations et inspirations de l’interprète sont indiquées dans ce mouvement. Hymne continue tendrement avec la souplesse du chant grégorien, utilisant l’Una Corda (la pédale douce). Barcarolle avec ses couleurs très chaudes se joue chaloupé. Dans Vision extatique, on rentre dans un tout autre monde, galactique et lumineux ; puis Nostalgie du temps qui passe se joue : lent, très tendre et extrêmement délicat avec d’abord un continuo de noires pointées puis de doubles à la main gauche. Cela donne des effets d’échos intérieurs. Enfin Douce rêverie et Oraison terminent ce recueil de manière lumineuse, recherchant des couleurs claires et délicates. Toutes ces pièces aident le pianiste étudiant à rechercher les différentes palettes de couleurs et de timbres qui existent dans ce recueil de manière agréable et nonchalante.
Marie FRASCHINI
© L'ÉDUCATION MUSICALE 2021


Pierre SANPÉRÉ, Impressions celtes, dix pièces pour piano solo, Les Éditions Buissonnières, EB-2-489


Ces dix pièces pour piano solo sont inspirées de mélodies traditionnelles de Bretagne, transmises par un ancien directeur de cercle celtique. Chaque pièce a une histoire poétique, un message à faire passer. La première : Lavar din koumoulenn veut dire « dis-moi nuage ». Elle est à 6/8, avec un accord ou une basse posée à la main gauche sur chaque premier temps, et une mélodie à la main droite de caractère doux et songeur. Gwerzenn el labourer : le premier poème du laboureur, est de caractère dansant et dynamique. Le deuxième fait référence au rapport entre l’homme et la nature. C’est une musique classée comme religieuse. An erminig : l’hermine, symbole de la Bretagne, représente la pureté et l’honnêteté des intentions, ainsi que la souplesse face au changement. On le sent dans la musique avec son ostinato de croches égales et liées à la main gauche, ainsi que l’impression de non mesuré, de plénitude, donné par le 15/8. Torr e benn : « Casser la tête », se joue avec force dans un équilibre de l’importance des deux voix assez constant. Dans Evit mont d’an iliz : « pour aller à l’église », il est demandé d’improviser une mélodie à la main droite dans la partie du milieu, pendant que la main gauche pose des accords. Kan eured : chant de mariage, représente l’union entre l’homme et la nature et se joue avec douceur. Ne bran meit hirvoudein: Je ne fais que rêver, est un thème et variation avec coda. Bro Goz ma zadou : Vieux pays de mes pères, est l’hymne breton. On y trouve la partie chantée avec les couplets, (en plus de la partie piano) dans une traduction de Henry Thibault de la Guichardière, poète du fin 19 ème siècle, début 20 ème siècle. Ton kenavo : chant « d’au revoir », est encadré par une introduction et une coda. Ce recueil nous remplit le cœur de l’esprit breton à chaque air souvent dansant. Vous pouvez l’écouter sur Youtube : https://www.youtube.com/watch?v=IvKTq8ttf9M&list=PLWxOAdyVnlVIjTohKpxg4hCt92Wla
Marie FRASCHINI
© L'ÉDUCATION MUSICALE 2021


Hervé LESVENAN, Clin d’œil à…, pour piano solo, Les Editions Buissonnières, EB-2-470


Niveau : 1er cycle

Ce recueil parcourt l’histoire de la musique européenne de Mozart à Nino Rota en passant par Bartók, Satie Ravel, et bien d’autres. Ses 17 pièces brèves témoignent du talent de mélodiste et des qualités pédagogiques de l’auteur. Grâce à Monsieur Lesvenan, Messiaen peut désormais être abordé dès le 1 er cycle ! Doigtés et pédales sont judicieusement indiqués. Saluons cette initiative qui tout en familiarisant au langage de nos grands compositeurs, offre aussi, dans certaines pièces, un espace pour l’improvisation guidée, à l’aide de réservoirs de notes sur ostinato harmonique. Belle réussite pour ces miniatures à la fois techniquement accessibles et musicalement réjouissantes !

Clins d’œil à…

Wolfgang Amadeus Mozart
Richard Strauss
Jacques Offenbach
Dmitri Chostakovitch
Aram Khachaturian
Dimitri Kabalevski
Béla Bartok
Béla Bartok - bis
Béla Bartok - ter
Jehan Alain
Erik Satie
Maurice Ravel
Olivier Messiaen
Enrique Granados
Isaac Albeniz
Joaquim Rodrigo
Nina Rota
Carmen OLIVEIRA
© L'ÉDUCATION MUSICALE 2021


Gabriel FAURÉ, 5 Impromptus, pour piano, Bärenreiter, BA11851


Dirigée par le musicologue Jean-Pierre Bartoli, professeur à la Sorbonne, cette édition offre une préface trilingue (français, anglais, allemand) richement documentée avec multi détails sur les caractéristiques du jeu pianiste de Fauré ainsi que sur chaque impromptu. Mais quid du 6e impromptu ? On apprend qu’il ne figure pas dans le recueil car composé pour la harpe, c’est à Alfred Cortot que l’on doit sa transcription pour piano. Deux pages de notes critiques en anglais apportent un éclairage précieux à l’interprète pour ses choix de tempi, nuances, pédales et font de cet ouvrage une magnifique édition de travail.
Carmen OLIVEIRA
© L'ÉDUCATION MUSICALE 2021


Jakub METELKA, Little virtuoso (Petit virtuose), pour piano, Bärenreiter Praha, BA 11569


Niveau : 1er - 2e cycle

Cet ouvrage trilingue tchèque, anglais allemand propose 15 pièces originales de Jakub Metelka, compositeur tchèque né en 1986. Le recueil s’ouvre sur une illustration d’Andrea Tachezy, qui évoque la magie du monde de l’enfance. Ces miniatures aux titres évocateurs « l’ancien royaume, l’océan calme, le vieux marin », s’adressent à des pianistes de 1 et 2e cycle ne craignant pas les armures chargées ! Ces pièces courtes (de 1 à 2 pages), permettront de développer un jeu expressif pour certaines et pour d’autres favoriseront un début de virtuosité avec une main droite volubile et une main gauche assurant l’harmonie. Les audio sont disponibles gracieusement à l’écoute sur le site de l’éditeur.
Carmen OLIVEIRA
© L'ÉDUCATION MUSICALE 2021


Frédéric CHOPIN, The easiest Chopin (Le plus facile Chopin), pour piano, Polskie Wydawnictwo Muzyczne (PWM Edition), PWM 9995


Ce recueil présente une sélection des pièces les plus accessibles du compositeur polonais. Il s’adresse globalement à des pianistes de 2e cycle mais la Polonaise en sol mineur ou les Préludes en la majeur et mi mineur peuvent être joués dès la fin de 1 er cycle. Cet ouvrage permet d’aborder l’univers musical de Chopin à travers un répertoire varié allant des Polonaises aux nocturnes sans oublier les mazurkas et bien sur les valses ! A ces pièces très connues s’ajoutent plusieurs pièces posthumes moins jouées, notamment le feuillet d’album en mi majeur à découvrir !
Vous pouvez trouver ici la table des matières complète, ainsi qu’un tuto (en français !) de la Polonaise en sol mineur par Ernestine Bluteau.
https://pwm.com.pl/en/sklep/publikacja/najlatwiejszy-chopin,fryderyk-chopin,726,ksiegarnia.htm
Carmen OLIVEIRA
© L'ÉDUCATION MUSICALE 2021


Carsten GERLITZ, Happy Birthday Schott Music ! 10 arrangements en style piano bar d’œuvres bien connues, Schott, ED 23321


Bien sûr, on peut considérer ces arrangements comme infréquentables pour un musicien digne de ce nom. Mais ce peut être aussi une manière distrayante d’évoquer dans une soirée un peu arrosée (avec modération…) des thèmes d’airs bien connus de compositeurs célèbres allant de Bach à Orff et Théodorakis. Zorba le grec voisine donc avec Gounod et son inusable Ave Maria (Bach-Gounod, comme l’on sait) et d’autres… Quoi qu’il en soit, les arrangements, assez simples, sont faits avec goût. Bon anniversaire aux éditions Schott fondées en 1770 par Bernhard Schott à Mayence. La Covid a retardé d’un an cette recension. Ajoutons pour terminer qu’on peut écouter ces arrangements sur le site de l’éditeur grâce au QR code figurant dans la partition et que la présence des chiffrages des accords permettra toutes les combinaisons instrumentales pour l’interprétation.
Daniel BLACKSTONE
© L'ÉDUCATION MUSICALE 2021


Joy of Music, tirées des archives de la maison Schott, Pièces virtuoses et divertissantes pour piano, Découvertes des archives des éditions Schott, Schott, ED 23307


Que voilà un curieux et passionnant album ! A l’occasion du 250° anniversaire de la fondation de la maison Schott à Mayence par Bernhard Schott (1770), Wilhelm Ohnen et Robert Schäfer ont exploré les archives de la maison pour nous proposer un florilège de 15 pièces d’auteurs connus ou moins connus, mais rarement rééditées tirées de ces archives. Beaucoup de ces pièces ont été composées par des pianistes tels que Beethoven, Czerny, Liszt et Thalberg. Beaucoup sont difficiles comme La danza. Tarantella Napoetana de Franz Liszt, Le chemin de fer, étude de Charles-Valentin Alkan ou Le banjo. Esquisse américaine de Louis Moreau Gottschalk. Mais d’autres sont plus abordables. Si les auteurs sont connus, les pièces ne le sont pas forcément et méritent d’être redécouvertes.
Daniel BLACKSTONE
© L'ÉDUCATION MUSICALE 2021


Hans-Günter HEUMANN, Mini Maestro 1 (très facile) et 2 (facile), Schott, ED 23198 et 23199


Niveau : 1er cycle

Nous avons déjà recensé le volume 3 dans une Lettre précédente. Mais ces deux premiers volumes méritent aussi une recension. Voilà bien des années que Hans-Günter Heumann compose ou arrange des œuvres pour les jeunes pianistes, toujours avec le même bonheur. Chaque volume contient 50 petites pièces allant de l’époque baroque à l’époque moderne pour tous usages (concerts, auditions, leçons…).
Le premier volume (très facile) est divisé en trois parties. La première contient des œuvres écrites sur cinq notes, la deuxième des pièces sur une octave. La troisième est consacrée à des pièces à quatre mains. Toutes sont des pièces originales allant de Praetorius à… Hans-Güneter Heumann.
Le deuxième volume, facile, contient également des pièces de toutes époques et trois quatre- mains. L’intérêt musical des pièces choisies est grand et permet au jeune pianiste ou à l’adulte débutant de se familiariser avec les styles des différentes époques. On ne peut que recommander ces remarquables volumes.
Daniel BLACKSTONE
© L'ÉDUCATION MUSICALE 2021


VIOLON

The Most Beautiful Wieniawski (Le plus beau Wieniawski), Polskie Wydawnictwo Muzyczne (PWM Edition), PWM 9997


Ce recueil de 12 pièces du célèbre compositeur et violoniste Henryk Wieniawsky inclus des tubes pour les violonistes comme la Légende et la Polonaise brillante. On y trouve également Kujawiak, Souvenir de Moscou, Idyll op.12 n.1, Polish Song op.12 n.2, Deux Masurkas caractéristiques op. 19 (Obertas et Dudziarz Obertas), Gigue op.23 no.1, Prélude op.18 no.5, La Vélocité op.10 no.2, Le chant du Bivouac op.10 no.8. On peut dire que cette grande maison d’édition en Pologne met tout en œuvre pour promouvoir le répertoire polonais à travers le monde. Et elle le fait admirablement ! Ces différentes pièces sont reprises au travers de différentes éditions de PWM déjà existantes. Elles sont très bien annotées et tout est très précis avec beaucoup d’indications pour l’interprète. De quoi pleinement savourer le charme et la virtuosité de Wieniawski pour tous les violonistes aguerris.
Marie FRASCHINI
© L'ÉDUCATION MUSICALE 2021


Clara SCHUMANN, Drei Romanzen (Trois Romances) pour violon et piano op. 22, Bärenreiter, BA10947


Les trois pièces ont toutes un caractère d’intimité, et sont exécutées de manière tendre et aérienne. Les mélodies du violon sont certes en soi simples, mais enrichies d’un accompagnement harmoniquement très intéressant, ainsi que d’un contrepoint, sans aucun débordement.
Le ton particulièrement charmant de chacune des trois nous rend très difficile la tâche de donner la préférence à l'une d'elles.
Avec une interprétation artistiquement bien menée, ce qui est la condition première pour chacune des compositions, ces romances devraient être toujours assurées du meilleur succès1
.
Voici comment le Neue Berliner Musikzeitung rapporte le 22 novembre 1855 les éloges sur les Trois Romances de Clara Schumann, exprimées par le roi George V de Hanovre, après son concert avec le violoniste Jospeh Joachim. Ce texte reste encore aujourd’hui une excellente description de ces pièces composées en 1854.
La jeune compositrice, femme de Robert Schumann a reçu de son père Friedrich Wieck une solide éducation musicale. L’apprentissage du violon et de la composition en faisaient partie.
Ceci explique certainement son aisance d’écriture pour violon.
La toute nouvelle édition de Bärenreiter est basée sur l’analyse comparative de manuscrits que Clara Schumann a offerts à deux violonistes : Wilhelm Joseph von Wasilewski, un bon ami du couple Schumann et Joseph Joachim, dédicataire de l’œuvre, ainsi que sur la première édition de Breitkopf & Härtel. Cette impression, comprenant de nombreuses fautes signalées par la compositrice dans une lettre à l’éditeur, a dû être corrigée avec le plus grand soin.
Nous avons donc entre les mains une belle parution contenant un conducteur et deux parties de violon : une préparée selon les sources citées et une annotée et révisée par Jacqueline Ross l’éditrice de la récente version.
Le conducteur est doté d’une préface avec des informations sur la genèse et l’histoire de la forme ainsi que sur l’œuvre elle-même, d’un rapport critique et d’un commentaire sur les pratiques d’exécutions (rédigés en anglais et en allemand).
Nous ne pouvons que recommander cette édition remarquable.

1 Neue Berliner Musikzeitung, Jg. 10, n° 28 (9.7.1856), p. 218, traduit de l’allemand par Régine Bloch
Anna Maria BARBARA
© L'ÉDUCATION MUSICALE 2021


Jakob DONT, 24 Vorûbungen zu den Etüden von Kreutzer und Rode für Violine solo (24 Exercices préparatoires aux Études de Kreutzer et Rode pour violon solo), op. 37, G. Henle Verlag, Urtext, HN 1176


Niveau : fin du 2e – 3e cycle

Quel violoniste n’a pas suivi le chemin obligatoire des études de Jakob Dont, Rodolph Kreutzer, des Caprices de Pierre Rode, avant d’arriver au Graal que sont les 24 Caprices de Nicolo Paganini, ou encore ceux de Wieniawski ?
Mais saviez-vous, en travaillant assidûment ses études, que Jakob Dont (1815-88) comptait parmi les plus grands et les plus doués pédagogues du XIX e siècle ? Parmi ses élèves, le plus illustre est certainement Léopold Auer, violoniste hongrois, qui enseigna pendant de nombreuses années au conservatoire de Saint-Pétersbourg et est considéré aujourd’hui comme le fondateur de l’école moderne de violon en Russie. Ainsi l’enseignement de Jakob Dont a non seulement contribué à consolider le niveau des violonistes viennois, mais à travers son élève, il a participé à l’essor d’une des écoles de violon les plus réputées au monde.
Ses 24 Exercices préparatoires, publiés pour la première fois en 1852 à Vienne par la maison d’édition d’Adolf Othmar Wizendorf, ne font pas référence à des morceaux précis de Rode ou Kreutzer, mais constituent une progression logique vers ces dernières. Par ailleurs, nous pouvons commencer certaines études de Kreutzer en parallèle du travail sur le recueil de Dont.
L’opus 37 était déjà tombé dans le domaine public le 1 er janvier 1919 et a été édité et réédité de nombreuses fois, révisé à travers les années par des grands violonistes-pédagogues qui, en adaptant les doigtés et les coups d’archets aux goûts du moment, se sont petit à petit, malheureusement, éloignés des intentions techniques du compositeur.
Cette édition de Henle, sortie au printemps 2019, cent ans après les premières parutions libres de droits, devrait susciter un grand intérêt auprès de tous les professeurs et des jeunes violonistes. En effet, elle revient à la source, en présentant les doigtés, les coups d’archet ainsi que les commentaires du compositeur (présentés en italique et en trois langues : allemand, anglais et français) provenant de la toute première édition viennoise de A.O. Witzendorf (1852), ainsi que de celles de F.E.C. Leuckart de Leipzig (1875, 1878 et 1884 – édition d’accompagnement de piano, réalisé par Dont en 1884, sans toucher au texte de violon).
Paul Roczek qui l’a soigneusement préparée nous fournit des conseils de travail et d’exécutions succincts mais très pertinents, ainsi que des options de doigtés dans certains passages où ceux de Dont pourraient s’avérer injouables par des « petites mains ». Toutes ces remarques sont imprimées en gris, en les distinguant du texte original.
Certaines pages se déplient, de façon à ne jamais devoir tourner une page en travaillant un exercice – un vrai atout pour chaque musicien !
Une édition exceptionnelle que je vous recommande, en espérant vous avoir donné assez d’arguments pour la chercher auprès de votre libraire, ou directement chez l’éditeur, à l’ère où nous pouvons facilement nous procurer une partition en la téléchargeant gratuitement sur internet.
Anna Maria BARBARA
© L'ÉDUCATION MUSICALE 2021


Rodolphe KREUTZER, 42 Etüdenfür Violine solo (42 Études pour violon solo), G. HenleVerlag, Urtext, HN 1177


Niveau : fin du 2e – 3e cycle

Le nom de Rodolphe Kreutzer est connu des mélomanes surtout grâce à la dédicace de Beethoven de sa Sonate pour violon et piano n°9, op. 47, communément appelée Sonate à Kreutzer. Pour les violonistes, outre ces concertos pédagogiques, il est surtout l’auteur du recueil de 42 Études qui, depuis sa première parution en 1805 chez Magasin de Musique à Paris, constitue encore aujourd’hui une « bible », une étape pratiquement indispensable vers l’acquisition de la haute virtuosité. C’est bien à Paris, que les étudiants ont commencé à travailler ses pièces, car ce violoniste et pédagogue a occupé, depuis 1793 le poste de professeur à l’Institut national de musique, devenu deux ans plus tard le Conservatoire de musique. Il avait comme collègues, entre autres, Pierre Baillot et Pierre Rode. La préface de Norbert Gertsch nous explique en allemand, en français et en anglais les différentes étapes de la création et de l’évolution des études. Nous apprenons notamment qu’initialement elles étaient éditées au nombre de 40. Les études nos 13 et 25 ont remplacé, dans une réédition révisée par l’auteur, les nos 1 et 12. L’étude 23 a été réécrite et sa dernière version est tellement différente que l’éditeur nous présente la première en appendice. Cette nouvelle parution de Henle - sortie à l’automne 2019 - est basée surtout sur la première édition et le manuscrit contenant 25 études et 3 esquisses. Elle présente les coups d’archet et les doigtés originaux de Kreutzer. Des doigtés alternatifs et des courtes explications de travail, préparés par Ingolf Truban, conformes aux habitudes de jeu actuels, sont imprimés en gris pour les distinguer des annotations de l’auteur. Grâce aux pages pliantes aucune tourne est nécessaire. Un vrai bonheur dans le travail ! Il ne reste plus, chers élèves, qu’à plonger dans le contenu et grimper les marches vers l’excellence !
Anna Maria BARBARA
© L'ÉDUCATION MUSICALE 2021


VIOLONCELLE

Claude-Henry JOUBERT, Concerto « Les fiançailles » Comédie pour violoncelle avec accompagnement de piano, Pierre Lafitan, P.L.3537


Niveau : Fin du 1er cycle

Dédiée à Sylvie Mariage (ça ne s’invente pas…), cette pièce qui demande déjà une bonne maîtrise de l’instrument, peut être jouée très sérieusement, ou avec tout l’humour qu’affectionne l’auteur. « La pièce se passe au XVIIIé siècle, ou au XIXé, ou maintenant… va savoir ! » précise (si l’on peut dire) l’auteur. Et c’est toute une histoire qui se déroule tout au long de pages souvent lyriques même si l’humour n’est jamais absent. Un texte, dont on pourra faire ce qu’on voudra, y compris le chanter, raconte l’histoire d’un amour contrarié mais, bien sûr, tout finira très bien grâce à l’intervention du notaire, maître Grandin. Et la dernière note jouée, le texte précise : « Qu’a donc dit Maître Grandin à Géronte ? On l’ignore. Mais un ami d’Émilie, Honoré B. ne parlait du notaire qu’en l’appelant « LE GÉNIE GRANDIN ». Que toutes ces notes d’humour n’empêchent pas de savourer cette excellente musique !
Daniel BLACKSTONE
© L'ÉDUCATION MUSICALE 2021


MUSIQUE DE CHAMBRE

Johannes BRAHMS, Streichsextett Nr. 2 G-dur Op. 36 (Sextuor à cordes n°2 en sol Majeur op.36), G.HenleVerlag, Urtext, HN 1083


Le Sextuor à cordes n° 2 a été composé entre 1864 et 1865 pendant une période particulièrement productive dans le domaine de la musique de chambre (Sonate pour violoncelle n° 1 op. 38, Quintette pour piano et cordes Op. 34 ont notamment pris leurs formes définitives en ce temps-là). Arrivée cinq ans après le Sextuor n° 1, op. 18, l’œuvre n’a pas rencontré tout de suite un accueil favorable, ni chez les critiques, ni chez l’éditeur Peter Joseph Simrock qui rejette la demande éditoriale du compositeur. Elle connaît le même sort chez Breitkopf & Härtel à qui Brahms s’adresse ensuite. Très dépité, Brahms réussi finalement à convaincre Simrock et le Sextuor est édité pour la première fois en avril 1866. En dépit des critiques, ses amis, dont Clara Schumann, ont une haute estime pour cette composition dont la première exécution publique a eu lieu probablement le 20 novembre 1866 à Zürich.
Bien que le 1er Sextuor reste encore de nos jours plus joué, celui-ci mérite pleinement le même intérêt.
La présente édition d’étude est basée sur Neue AusgabesämtlicherWerke (Nouvelle édition des œuvres complètes) de Johannes Brahms, éditée par Katrin Eich en 2017 et disponible sous la référence : HN 6031. Elle contient six parties séparées avec une préface et des commentaires sur les sources dans la partie du violon I. Des petites notes facilitant l’interprétation sont situées dans chaque partie. Les tournes de pages sont, comme d’habitude chez cet éditeur, placées d’une manière optimale.
Notez que le conducteur est également disponible séparément, sous la référence HN 7083, ainsi que l’arrangement pour piano à quatre mains, fait par le compositeur en 1865 (HN 6031).
Anna Maria BARBARA
© L'ÉDUCATION MUSICALE 2021


Alexandre FONTAINES, Sunt lacrimae rerum op.55, quatuor pour violon, alto, violoncelle et piano, DELATOUR France, DLT2462


Sunt lacrimae rerum : « il y a des larmes dans les choses mêmes ». Ce quatuor pour violon, alto, violoncelle et piano d’Alexandre Fontaines, commence par un mouvement appelé Levewohl sur une voix, comme venant de loin, puis deux, puis les trois cordes jusqu’à un forte. Et alors qu’ils s’éloignent, le piano rentre en imitant une sorte de carillon forte jusqu’à la fin du mouvement, pendant que les trois cordes font un crescendo jusqu’à un climax forte sur des noires, puis diminuendo ritardendo. Le deuxième mouvement commence attaca Scherzo delirando. Des voix très rapides se suivent et s’entrecroisent, parsemées d’agréga et de cluster au piano fortissimo. Puis une espèce de marche délirante en imitation fait son entrée jusqu’à un accord tutti laissant place à une cadence au piano fortissimo revenant à une sorte de A’ terminant sur des clusters graves au piano. Le troisième mouvement Recitativo e Fuga commence sur des tenues en harmoniques aux cordes pendant que le piano annonce un thème fort rappelant le plein chant grégorien. Puis les cordes jouent à l’unisson fortissimo ce thème, pendant que le piano pose des basses et rempli les mesures d’arpèges grandiloquentes, jusqu’à une longue tenue sur un ré toujours aux cordes que le piano et le violoncelle enjolivent d’ornementations. La fugue fait ensuite son entrée d’abord à l’alto, puis au violon et au violoncelle sur un thème mélancolique, allant jusqu’à son climax fortissimo et decrescendo jusqu’à une harmonique tenue pianissimo. Le dernier mouvement intitulé Une fillette est un thème et variation, clôturant cette œuvre avec vitalité et folie.
Vous pouvez écouter l’œuvre dans sa globalité sur Youtube :
https://www.youtube.com/watch?v=zn8xKIfP_uY
Marie FRASCHINI
© L'ÉDUCATION MUSICALE 2021


Grazyna BACEWICZ, String quartet [youthful work], (Quatuor à cordes [pièce de jeunesse]), Polskie Wydawnictwo Muzyczne c PWM 12 637


Grazyna Bacewicz réalisa très tôt qu’elle voulait être compositeur. Cette œuvre de jeunesse écrite dans les années 1929-30 n’est pas comprise dans son catalogue officiel de compositions. Dans le premier mouvement Allegro moderato, on peut distinguer deux thèmes principaux. Le second mouvement Molto Adagio, ressemble également à une mini fugue avec un sujet joué une seule fois et seulement dans 3 parties (violoncelle, alto et 1 er violon), faisant lieu d’Intermezzo. Le troisième et dernier mouvement Fuga, commence par un Allegro molto moderato. C’est une double fugue avec des thèmes très contrastants. Le premier thème est dans la forme d’un continuum mélodique et chromatique. Le second thème (energico) est façonné par un motif en levée de trois doubles, composées de quintes parfaites puis d’octaves, combinées avec des motifs en trémolos-staccato. Ceci aboutit à une Cadenza se terminant fff sur des accords répétés jusqu’à la fin de façon strictement identiques rythmiquement.
Marie FRASCHINI
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Grazyna BACEWICZ, Quatuor [à cordes], Polskie Wydawnictwo Muzyczne (PWM Edition), PWM 12 636


Le catalogue complet des œuvres de Grazyna Bacewicz se trouve à la Bibliothèque nationale de Varsovie. Le manuscrit de ce quatuor en quatre mouvements a été laissé sans date apparente. Mais l’analyse de l’œuvre nous permet de la dater dans les années 60. Le premier mouvement Allegro s’ouvre avec trois accords de trois sons en tritons saltando gettato joués par le violoncelle, le second violon puis le premier violon. Le premier thème est une série d’épisodes de textures changeantes comprenant des passages en accords et en glissandi saltando, variant dans différentes dynamiques puis de moins en moins fortes. Le deuxième thème meno mosso affiche une forme imitative qui se déploie. On a ensuite une reprise inversée du premier thème. Le second mouvement, Grave joué con sordino au début et à la fin dans la même dynamique, se constitue également de deux thèmes formés en ABA. Il varie également en textures, comprenant des glissandi, des trilles, du spiccato et des variations de dynamiques frappantes comme un subito più mosso impetuosamente situé au milieu comme un climax formé par des glissandi forte. On a également un motif incluant des contretemps, joué du début à la fin de multiples manières. Le troisième mouvement Cappriccioso, est de forme rondo dont le refrain est fondé sur des notes éparses avec appoggiatures. Le quatrième mouvement Maestoso est constitué d’une introduction puis un poco più mosso incluant différents segments dominés par des ostinatos de différentes sortes. Un sostenuto et un poco sostenuto s’ensuivent ensuite, amenant une pâte plus massive, se fondant dans des vagues de triolets. Il se termine par un poco meno mosso où l’on entend de nouveau le motif d’harmoniques et de contretemps du deuxième mouvement, des gammes se déversent ensuite sur des accords rythmiquement inégalement répartis, contenant toujours des harmoniques naturelles, explosant sur un più mosso final fortissimo.
Marie FRASCHINI
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René MAILLARD, Duos champêtres pour hautbois et basson, Delatour : DLT2151


Niveau : 2e – 3e cycle

René Maillard, né en 1831 et mort en 2012 est un compositeur peu connu mais qui gagne à l’être. Ses œuvres, publiées aux éditions « Le Chant du Monde » mais surtout aux éditions Delatour sont écrites dans un langage très personnel et bien séduisant. Ce Prix de Rome (second Grand Prix en 1955) qui a mené par ailleurs une carrière de directeur artistique puis a œuvré dans l’industrie pharmaceutique laisse une œuvre passionnante mais qui a connu une éclipse de près de quarante ans. C’est à sa retraite professionnelle qu’il reprend la composition à partir des années 2000. Ces duos, au nombre de cinq et aux titres évocateurs sont bien réjouissants. Nous commençons par une Gavotine au rythme bien dansant et à la tonalité incertaine même si un sentiment de sol mineur s’insinue progressivement. Suit une Berceline, adagio comme il se doit. Voici maintenant une Baladine puis une Limousine qui fait référence non à la voiture mais à la bourrée mais avec une mesure à 11/8 qui lui donne un air un peu déjanté. La Toccatine qui termine le recueil est la pièce la plus développée. L’ensemble fait preuve d’un humour bien réjouissant qui devrait beaucoup plaire.
Daniel BLACKSTONE
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ONDE MARTENOT

Bernard de VIENNE, ESSE pour soprano et ondes Martenot (Ondéa), Delatour, DLT 0700


Laissons la parole à l’auteur :
« Cette pièce a été écrite sur un haïku d’Yves Sarda et dédiée à Beja Tjeerdsma, artiste/résidente à la Maison-Atelier Theo van Doesburg de 2014 à 2016 La première audition a eu lieu le 10/09/2016 à la Maison-Atelier van Doesburg de Meudon (France) et la création aux Voûtes - Frigos de Paris le 13/09/2016 par Nathalie Pannier, voix et Augustin Viard, ondes.
Plusieurs idées poétiques sont à la source de cette œuvre :
- Un unique « haïku contemporain » écrit par le traducteur et scénariste Yves Sarda, ami de longue date : silence souffle son sens soupir silence, où le retour constant de la consonne S a donné le titre de l’œuvre.
- Esse, le verbe être en latin, fait référence à la « trajectoire » de ce haïku « ontologique » : « Nous naissons du silence dans un souffle qui s'affine en son, lequel se précise et s'obstine jusqu'à prendre sens et s'y enraciner. Mais la tension requise, à plus ou moins brève échéance intenable, se dissout en soupir pour retourner au silence initial, qui en devient final » La forme musicale reproduit cette forme en arche.
- L’esse, dans l’art celtique, est la figure centrale des entrelacs, dont la particularité est de créer des formes complexes à l’aide de figures simples.
- Le lieu de la première audition : la maison-atelier de l’architecte néerlandais Theo van Doesburg à Meudon (France). Fondateur du mouvement artistique et de la revue - auxquels Piet Mondrian a participé activement -, van Doesburg aura infléchi comme théoricien l’enseignement du Bauhaus. Ses réflexions conceptuelles ont marqué profondément l’art international du 20ème siècle : « Ce que je revendique, c’est la forme contrôlable pour la peinture, la sculpture et l’architecture ». Son besoin d’abstraction et de simplification, son rejet de l’impressionnisme (assimilé au baroque) l’ont conduit, par le truchement des mathématiques, à l’élaboration de formes pures, en équilibre dynamique et comme en expansion, légères comme en apesanteur.
- Enfin, peu d’œuvres pour voix et ondes ont été écrites. J’ai assisté à la création du Triptyque pour voix et ondes de Francis Bayer, grand universitaire, musicologue et compositeur avec lequel j’ai eu la chance de travailler à la Faculté de Vincennes. Celui-ci est devenu avec le temps un ami cher trop tôt disparu. En guise d’hommage, j’ai voulu évoquer son œuvre en terminant la mienne comme il termine la sienne.
Musicalement, les figures simples, le contrepoint de la voix et des ondes, sont à l’image des formes épurées du mouvement De Stijl. « Seul l’aspect pur des éléments, dans des proportions équilibrées, peut atténuer le tragique dans la vie et dans l’art » (Piet Mondrian).»
J’ai eu moi-même la chance d’assister le 16 décembre 1977 à la création du Tryptique de Francis Bayer à Saint Julien le Pauvre avec Mireille Alcantara, chanteuse, et Francesca Paderni, ondiste récemment disparue qui a également enregistré cette œuvre en 1996 avec la chanteuse Donatienne Michel-Dansac, disque distribué par Audivis.
L’œuvre de Bernard de Vienne peut être écoutée intégralement sur le site du compositeur
https://www.bernarddevienne.com/nouvelle-pagesse
Ajoutons un dernier mot sur la mention « Ondea » : il s’agit en fait d’un instrument en tout point similaire aux Ondes Martenot.
Daniel BLACKSTONE
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ORCHESTRE/PIANO

Louis Ferdinand HÉROLD, Concerto pour piano et orchestre n°2 en Mi♭ majeur, Symétrie n°1811 (deux cahiers)


Ce concerto est l’œuvre d'un jeune homme de vingt ans qui un an auparavant, avait remporté le premier prix du conservatoire avec une pièce qu'il avait lui-même composée et qui deux ans plus tard remportera le prestigieux Prix de Rome! La seconde partie de la carrière de Hérold le verra se tourner vers les compositions lyriques et c'est son opéra Zampa, qui aujourd’hui encore assure sa renommée. Au moment où il compose ce deuxième concerto pour piano, il quitte le conservatoire où il fut -entre autres- élève de Méhul et Kreutzer. L’œuvre est à (re) découvrir et éclairera une programmation d'un jour original, énergique et brillant. Le final, très mozartien, est un beau moment de musique concertante. Reçue dans son format A4, cette édition est également disponible dans d'autres formats dont un conducteur A3, une réduction pour deux pianos ainsi qu'un piano Solo. Soulignons que le matériel complet est disponible auprès du même éditeur. La mise en page, très aérée et la belle qualité d'impression en font un outil remarquablement clair et agréable à consulter et travailler. La note historique est à la fois précise et instructive, elle est particulièrement bienvenue. Dans le format A4, l'édition se présente en deux cahiers : l'un pour le premier mouvement, l'autre pour les deux suivants. Ce choix permet, probablement en raison de la reliure agrafée, de constituer deux cahiers de taille équivalente, mais attention à bien demander les deux volumes au moment de l'achat (la référence est la même pour les deux) et ... de ne pas oublier l'un des deux en répétition ou concert...
Jean-Michel DESPIN
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Joseph HAYDN, Sinfonie in B, Hob. I :77, Urtext Bärenreiter, BA 10986

Cette édition est le fruit d’une collaboration entre les éditions Henle et les éditions Bärenreiter. Cette symphonie a été composée en même temps que les symphonies 76 et 78. On lira avec intérêt la préface écrite par Andreas Friesenhagen. L’édition a été réalisée par Sonja Gerlach qui, de 1965 à 1999, a été associée de recherche et éditrice au Joseph Haydn- Institut de Cologne. et Sterling Murray, titulaire d’un doctorat en musicologie à l'Université du Michigan et qui a notamment enseigné à l'Université de Southampton à Southampton, en Angleterre.
Cette édition, réalisée à partir de l’édition Urtext complète des œuvres de Joseph Haydn, comporte toutes les qualités habituelles de ces éditions : clarté, lisibilité. En plus du conducteur, les parties séparées sont également disponibles à la vente.
Daniel BLACKSTONE
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LIVRES

Michel FANO : Lulu et après ? Château-Gontier, AEDAM MUSICAE ( www.musicae.fr ), 2020, 180 p. – 27 €


Michel Fano (né à Paris en 1929) est un compositeur de musique sérielle, de films, concepteur de la notion de partition sonore (dans le sillage du « continuum sonore » d’Edgar Varèse).
Coauteur avec Pierre-Jean Jouve de Wozzeck ou le nouvel Opéra (Plon, 1953) puis de Wozzeck d’Alban Berg (Édition 10/18, 1964), le lien intime et existentiel qu’il entretient avec le compositeur viennois ne s’est guère démenti au long de sa vie, car il vient de publier cette étude sur Lulu, opéra dodécaphonique (presque achevé) en 3 actes d’Alban Berg (Vienne 1885-Vienne 1935) entre 1929 et sa mort, sur un livret inspiré au musicien par Die Büchse der Pandora (La boîte de Pandore, 1902) et Erdgeist (L’esprit de la terre, 1895) de Frank Wedekind (Hanovre 1864-Munich 1918), créé en 1937 à l’Opéra de Zurich. Il sera complété par Friedrich Cerha et lancé sous cette forme, le 24 février 1979, à Paris, dans une mise en scène de Patrice Chéreau (direction : Pierre Boulez).
Pour Michel Fano, Wagner avait « transgressé les lois de l’opéra classique, Berg va les refonder ». Wozzeck (composé entre 1912 et 1922, d’après la pièce fragmentaire Woyzeck (1836) de l’écrivain dramaturge révolutionnaire Georg Büchner (1813-1837), créé le 14 décembre 1925 au Staatsoper de Berlin sous la direction de Erich Kleiber) d’abord, puis donc Lulu qui en radicalisera « les données pour mieux les enfreindre », notamment en réglant l’opposition tonal/atonal par une thématisation de la série, ainsi qu’en employant les consonances à des temps forts de la narration pour choquer le dissonant en vigueur et provoquer ainsi une puissante émotion. L’auteur invite le lecteur à visiter avec lui la « complétude du projet » bergien, car il s’agit d’un art plus total que celui de Wagner, proche du film avec (citant le philosophe Pierre Souvtchinsky) « rhétorisation du récit par la musique », dans lequel joue une au moins triple unicité. Unicité où son, mot et image sont en permanence corrélés ; unicité du discours musical (régi par une seule série de douze sons génératrice), unicité des décors, mises en scène et gestes minutieusement indiqués. Lieu unique dans lequel — à l’instar de Proust ou de l’Ulysse de Joyce — les moments musicaux s’associent à des situations nouvelles. Puis l’auteur aborde les autres spécificités de l’œuvre de référence sous les angles de son espace-temps dans la vie du compositeur viennois, du récit (avec l’interlude central, « point-miroir » et pivot de l’ensemble), de la forme (en arche, circulaire), des personnages (chacun signés, étiquetés par une série — leur corps — organisant leur thème — leur vêtement —), des structures et du temps, et enfin du matériau.
Michel Fano analyse très finement chaque articulation de cette « œuvre en territoire sériel », à l’écriture plus symphonique qu’opératique, radiographiant avec soin l’ensemble de sa lecture experte. La Postface énonce les diverses représentations ayant eu lieu depuis 1996 (Festival de Glyndebourne), 2002 (Opéra de Zurich), 2009 (Covent Garden), 2010 (Salzbourg ; Barcelone), 2012 (Berlin ; Bruxelles), 2015 (Munich, New York). À ne pas manquer.
Édith WEBER
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Narratologie musicale. Topiques, théories, stratégies analytiques Sous la direction de Márta GRABÓCZ Editions Hermann /Collection Labex GREAM. Sortie : septembre 2021


Faisant retour sur ses travaux en musicologie - notamment son ouvrage sur le "sens et signification de la musique" et sur les congrès internationaux de 2007, Márta Grabócz se propose de regrouper et de traduire ici les conférences élaborées dans des pays et des contextes scientifiques différents avec leur vocabulaire spécialisé - un long travail qui vise à se pencher en profondeur sur l'explication des phénomènes musicaux qui, depuis l'antiquité, se divise en deux camps : une approche qui depuis Pythagore, s'intéresse aux données techniques et scientifiques, et une autre approche, celle de Platon et d'Aristote, qui met l'accent sur la valeur expressive de la musique, - et donc sa "fonction sociale" transmise par le compositeur à ses contemporains. Elle note qu'au 21ème siècle, ces deux courants sont toujours vivement à l'oeuvre, et continuent de s'affronter avec une spécificité française dans laquelle la sémiologie musicale de type structuraliste (cf. travaux de J. J. Nattiez) fait face à une autre sémiotique musicale d'ampleur internationale qui met l'accent sur "la signification, le sens du discours musical et la narratologie en musique".
Le travail de Márta Grabócz se propose de dresser un état des lieux de ce courant dans les années 1990 à 2010, représenté par le narratologue Werner Wolf , ainsi que par Stacho, Karbuscisky, Kagawu et Nicholas Mc Kay, ainsi que Tarasti et Klein. Ces derniers s’appuient sur les travaux de Greimas (sémiotique narrative en France) et Paul Ricoeur, notamment sur approche de la temporalité du récit et sur le caractère opérant de la mise en intrigue.
Le conflit soulevé par Nicholas Mc Kay où les musicologues formalistes - accusés d'autisme, aveugles aux significations sociales - et par Kofi Agawu ("entendre c'est croire") nous confronte à la recherche de l'interprétation de la signification : débat ouvert entre croyants et sceptiques sur le problème de la narration et de la signification en musique.
Les propositions pour solutionner le problème supposent une double démarche qui intègre l'analyse formelle et structurelle à la méthode sémiotique, narrative, et intertextuelle. En émergent la question des signifiés (condition préalable à l'approche narrative), la théorie de l'information et la théorie des topiques, et un débat s'engage sur la narratologie musicale contre les adversaires de la narratologie (dont J.J. Nattiez, pour qui les récits musicaux sont produits par l'interprétation des auditeurs, et non par le texte musical). Klein, analysant la 4eme ballade de Chopin, avance pourtant que le temps passé existe en musique grâce au narrateur survivant. Wolf pose le débat avec sa "narratologie transmédiale”.
Pour "réduire" le conflit, diverses solutions sont proposées concernant la narrativité :
a/ la double compétence (narratologie et musicologie) avec le modèle "dramatique": l'idée de récit (Michel Klein) répond par l'archétype de “l'intrigue": s'y dégage une logique expressive au sein de la composition et de son contexte (D. Seaton propose "la forme sonate comme intrigue"). J. Rink pense que cette narrativité est immanente à la structure musicale, une sorte de "drame métaphorique des sons", et souligne le rôle de l'interprète dans l'exécution (l’acte de recréation au-delà de l'acte de création).
b/ la parenté narrativité-musique ou les changements d'état parallèles à l'évolution d'un récit - qu'on retrouve dans la forme sonate. Todorov parle de séquences sur le modèle ternaire du récit idéal (état donné - perturbation-résolution)
c/ le paramètre de la temporalité semble venir à l'appui de ce lien entre musique et récit. Pistone questionne la temporalité, ainsi que Monelle, pour qui "la musique est un art du temps"
d/ la voix narrative : “l'idée du narrateur survivant" (Klein sur Chopin) ; "narratologie existentielle" (E. Tarasti) qui cherche à comprendre le ich-ton mozartien; l'idée de l'interprète conteur (J. Rink)
e/ le rôle de l'auditeur (ou du destinataire) qui active le cadre narratif (Wolf). La musique instrumentale est une "forme creuse" où les destinataires peuvent faire entrer leurs contenus narratifs, “l'homo narrans" qui devient “homo fabulator" quand l'auditeur endosse la forme narrative du temps lui-même (Paul Ricoeur). Pour Pistone, le narratif musical, suite d'événements sonores, provoque chez l'auditeur un effet de récit. Rink parle de la " réponse narrativisée" de l'auditeur. Pour Rink encore, la réponse “narrativisée” de l'auditeur donne lieu à deux types de récits: un récit construit par l'interprète (fonction poïétique) et un récit construit par l'auditeur, de type esthésique.
Cet ouvrage réunit vingt-trois textes de musicologues parmi les plus grands spécialistes de renommée internationale (de plusieurs pays aussi bien que français), dans le domaine de l’examen des signes musicaux (voir : théorie des topiques ou théorie de l’intonation), comme dans celui de l’organisation des éléments expressifs à l’intérieur d’une forme musicale instrumentale (voir : narratologie musicale). Une première partie aborde les questions théoriques soulevées par ces approches contemporaines, tandis que la deuxième partie de l’ouvrage se consacre aux analyses des œuvres – allant de Mozart jusqu’à la musique contemporaine de Carter, Henze, Harvey, en passant par Schubert, Chopin, Mahler – appliquant ces méthodes nouvelles. La confrontation avec le formalisme est omniprésente, permettant d’aboutir aux dépassements dialectiques.
Jonathan Bell
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CDs

J.S. BACH Solo violin Sonatas, Linus ROTH – violon, Evin Penguin Classic, (www.evilpenguin.eu), EPRC 0039, TT 68’15


Linus Roth est indéniablement l’un des plus accomplis et des plus intéressants violonistes parmi ces contemporains. Ses interprétations se caractérisent, non seulement par une parfaite maitrise instrumentale, mais surtout par une profonde compréhension de l’œuvre qui lui permet de trouver une cohésion extrême entre les intentions du compositeur et l’expression de ses propres sentiments et cela dans des répertoires très éclectiques.
Nous avons déjà commenté le premier de quatre disques enregistrés entre juin et décembre 2020 dédié aux danses virtuoses (voir notre lettre n° 132 ici).
Cette fois-ci Linus nous amène dans le monde mystique et spirituel des Sonates pour violon seul de Johann Sebastian Bach, probablement le plus grand monument de la musique classique jamais écrit pour violon, et certainement l’un des plus importants dans toute l’histoire de la musique.
Même si tous les violonistes travaillent et jouent cette œuvre au cours de leurs carrières, son enregistrement n’est pas à la portée de tout le monde. Nous connaissons tous quelques noms d’artistes dont l’interprétation reste encore aujourd’hui une référence, tel Henryk Szeryng ou Nathan Milstein.
Il ne sera pas exagéré de souhaiter à Linus Roth que son nouveau disque rentre dans ce rang de références.
Notre violoniste montre ici une très grande maturité artistique, tant dans la sonorité, dans la recherche d’une liberté, dans la rigueur du texte original que dans la mise en valeur du caractère unique de chaque mouvement des trois Sonates.
Nous pourrions être tentés de dire que l’artiste revient, avec cette réalisation, à la source, dans tous les sens du terme. D’abord, de par la dédicace : « For my parents, with gratitude » (« Pour mes parents, avec gratitude »), mais aussi du fait que Linus a commencé à se familiariser avec les compositions de Bach dès l’âge de 9 ans, en travaillant la Gigue de la Partita en mi majeur. Il a appris l’œuvre dans son intégralité à l’âge de 17 ans ! Il revient à la source aussi dans les choix des coups d’archet, sans pour autant ressentir la nécessité d’utiliser un archet d’époque. Il nous prouve non seulement qu’une interprétation historiquement informée est tout à fait possible sans le recours à un instrument monté baroque, mais il est capable de nous faire redécouvrir l’œuvre de Bach sans exagérations inutile. Bien au contraire, avec son incroyable richesse du timbre - soutenue par l’acoustique remarquable de La bibliothèque de l’ancien monastère Ohsenhausen en Allemagne – et la profondeur des phrases, il illustre bien ce dont il parle dans le livret du disque (rédigé en anglais et en allemand) : « Bach n’a pas écrit ʺ Six Sonates ʺ sur la couverture de la partition, mais l’a remplacé par ʺ Sei Solo ʺ en italien, ce qui a deux significations : le mot ʺ Sei ʺ peut être traduit en tant que numéro, mais aussi comme ʺ Tu es ʺ. ʺ Tu es tout seul ʺ - Il est peu probable que Bach ait laissé une chose aussi importante au hasard ou qu'il ait fait à un simple jeu de mots. » 1
Il ne nous reste plus que de vous recommander très chaleureusement cette nouvelle parution, en attendant, avec impatience, la sortie des trois Partitas que l’artiste nous a déjà annoncée.
Pour compléter cette recension, voici une information qui sera certainement intéressante pour les violonistes « connectés » : vous pouvez trouver le Sei Solo doigté par Linus Roth dans l’application de la célèbre maison éditoriale G.Henle Verlag.
Linus Roth joue sur le violon Stradivarius "Dancla" de 1703 – aimablement prêté par la fondation musicale de la L-Bank Baden-Württemberg.

1 Extrait du texte de Linus Roth dans le livret du disque. Traduit par nos soins
Anna Maria BARBARA
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INCANDESCENCE, Stéphanie MORALY – violon, Romain DAVID – piano, Brahms, Dohnány, Respighi, Szymanowski, APARTE, (www.apartemusic.com), AP250, TT : 71’49


Nous pourrions nous poser la question : quel est le point commun entre l’un des compositeurs les plus connus dans le monde de la musique – Brahms - et ceux qui le sont peu ou beaucoup moins : Dohnány, Respighi et Szymanowski.
Stéphanie Moraly au violon et Romain David au piano ont réuni sous le titre Incandescence à décrire musicalement l’état d’un corps qui, soumis à une très forte chaleur, émet un rayonnement lumineux. En effet, les quatre œuvres interprétées sur ce disque débordent d’émotions au point de transcender aussi bien les interprètes que le public, tantôt dans la plus profonde intimité - comme c’est le cas, par exemple, dans le deuxième mouvement de la Sonate d’Ottorino Respighi – tantôt d’une manière exubérante et désinhibée, notamment dans le Presto agitato de la 3e Sonate de Brahms qui clôt ce disque.
Les deux musiciens ont à leur compte de très nombreux concerts et enregistrements réalisés ensemble, ce qui explique certainement une grande entente et homogénéité de leurs discours musicaux. Mais inversement, si cette entente est si évidente, elle est due aussi aux mêmes valeurs artistiques et humaines que ces artistes représentent.
En effet, dans le texte du livret, en forme de dialogue, Romain et Stéphanie mettent l’accent sur l’importance de l'élément de sincérité dans une œuvre musicale. Elle est unie ici aussi bien dans les compositions que dans la magnifique interprétation de celles-ci. La sonorité chaleureuse et intense de Stéphanie Moraly s’accorde parfaitement au touché doux et chantant, mais dramatique si nécessaire, du piano de Romain David.
La Sonate en si mineur, P110 d’Ottorino Respighi, la Sonate en do♯ mineur, op. 21 d’Ernő Dohnány et la Romance en ré majeur, op. 23 de Karol Szymanowski ont encore un point en commun : elles ont toutes été écrites dans la première vingtaine du XXe siècle. Ces œuvres illustrent bien le penchant de nos interprètes vers un répertoire injustement négligé ou pas suffisamment mis en valeur. Les programmer à côté de la Sonate en ré mineur de Johannes Brahms, op. 108 est un choix courageux, pour ne pas dire audacieux, mais ô combien justifié. De par son expressivité, probablement la plus extériorisée des trois Sonates, elle semble inviter à s’inscrire dans son élan, ce que ne manqueront pas de faire les compositeurs de la génération suivante.
J’ai eu le privilège d’assister au concert du lancement de ce disque et je tiens à témoigner que les intentions artistiques y ont été presque palpables. N’hésitez pas à vous procurer cet enregistrement, mais aussi à suivre la carrière de ces artistes de grand talent.
Anna Maria BARBARA
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Brieuc VOURCH, Guillaume VINCENT - Richard Strauss/César Franck, Sonates, Farao Classics, (www.farao-classics.de), B 108112, TT : 53’24


La sortie d’un nouveau disque pour un jeune artiste est toujours un évènement important. Nous sommes alors très heureux de pouvoir vous présenter cet enregistrement qui est une première discographique pour le violoniste Brieuc Vourch. Avec Guillaume Vincent au piano, ils nous livrent ensemble un récital remarquable.
Les deux musiciens français qui vivent respectivement en Allemagne et en Autriche, se sont réunis dans un projet qui a pour fondement une grande amitié, une maitrise instrumentale et une vision commune de deux pages monumentales dans la littérature pour violon et piano : la Sonate en mi♭ majeur op. 18 de Richard Strauss et la Sonate en la majeur de César Franck.
Écrites à deux années d’intervalle (en 1886 la Sonate de Franck et en 1888 celle de Strauss) ce sont des œuvres romantiques dont la première est sortie de la plume d’un compositeur dans toute sa maturité artistique - Franck a alors 64 ans – tandis que la seconde est une pièce d’un Strauss âgé seulement de 24 ans, et dont la richesse du discours annonce déjà l’arrivée de compositions qui marqueront un tournant dans l’histoire de la musique.
Dans cette Sonate de jeunesse Brieuc, qui a pratiquement le même âge que le compositeur à l’époque, nous expose une riche palette de timbres, soutenue par Guillaume dans la partie piano pleine de couleurs. C’est une interprétation très construite, vivante, d’une grande homogénéité entre ces artistes dans la conduite de la ligne mélodique.
La Sonate de Franck, sous les doigts de Brieuc et Guillaume, respire aussi la jeunesse, avec toutes ses émotions, réflexions, et son intelligence, enveloppées d’une bonne dose de passion.
Notez que les musiciens, malgré leur jeune âge, comptent déjà un nombre important de succès.
Brieuc Vourch est né à Paris en 1995. À l'âge de treize ans, il entre à la Juilliard School of Music de New York, dans la classe d'Itzhak Perlman. Il a poursuivi sa formation avec Boris Kuschnir à Vienne et Daniel Gaede à Nuremberg.
Il suit actuellement le programme du Concertmaster Artist Diploma de l'Accademia Stauffer à Crémone, en Italie.
Il a participé, en tant que soliste, à la Verbier Festival Academy en Suisse, ainsi qu'à la Schleswig- Holstein Musik Festival Academy en Allemagne, et a acquis une expérience orchestrale dans l'International Orchestra Institute Attergau de l'Orchestre philharmonique de Vienne sous la direction de Christoph Koncz. Il a reçu des conseils de Thomas Brandis, Milan Šetena, Frank-Peter Zimmermann et Leonidas Kavakos.
Il a collaboré avec des artistes et des ensembles tels que le Philharmonische Orchester Heidelberg, l'Orchestre philharmonique de Copenhague, Frans Helmerson, Nobuko Imai, Mihaela Martin, Tanja Tetzlaff ou Mojca Erdmann.
Lauréat de plusieurs concours internationaux, il se produit régulièrement dans les salles de concert les plus prestigieuses telles que St Martin-in-the-fields à Londres, le Grand Théâtre de Shanghai, ou le Alice Tully Hall à New York.
Brieuc joue sur un violon Francesco Ruggeri de 1690.
Guillaume Vincent nait en octobre 1991 à Annecy. ll intègre à 13 ans le Conservatoire National de Paris dans la classe de Jacques Rouvier et Prisca Benoit. Il y obtient à 18 ans son Prix de piano à l’unanimité du jury et son diplôme de Formation Supérieure. Il y poursuit ensuite sa formation auprès de Jean-François Heisser et Marie-Josèphe Jude en piano et avec Yves Henry en harmonie, qui aboutit le au Diplôme de 3e Cycle d’Artiste Interprète.
Depuis septembre 2018, Guillaume est élève à la Chapelle Musicale Reine Elisabeth de Belgique dans la classe de Louis Lortie.
Lauréat de plusieurs prix, il se produit en soliste sur les scènes internationales les plus prestigieuses, comme le Suntory Hall de Tokyo, le Barbican Centre de Londres ou le Carnegie Hall de New York. Il collabore avec des orchestras tels que l’Orchestre symphonique de la radio de Francfort, l’Orchestre symphonique de la BBC ou l’Orchestra Sinfónica Simón Bolivar. Il a travaillé avec des chefs d’orchestre tels que Marc Minkowski, Tugan Skohiev, Joshua Dos Santos ou Joshua Weilerstein. Il est également artiste en résidence à la Fondation Singer-Polignac à Paris. Nous souhaitons une belle et riche poursuite de carrière à ce duo et serons heureux de vous présenter leurs enregistrements à venir.
Vous pouvez visualiser et écouter le teaser du disque en suivant ce lien :
https://www.youtube.com/watch?v=N3HZ-GQwXf4
Anna Maria BARBARA
© L'ÉDUCATION MUSICALE 2021


(RE)Discovering Gabriela Moyseowicz, Piotr Grelowski – piano, Agnieszka Tobik – violon, Jan Jakub Bokun – direction d’orchestre, Koszalin Philharmonic Orchestra, JBRecords ( www.jbrecords.com.pl ), TT : 64’05

Cette rétrospective de la compositrice polonaise a été enregistrée par l’Orchestre philharmonique de Koszalin entre avril et juin dernier. Gabriela Moyseowicz, née en 1944 a étudié piano et composition à l’Académie de Musique de Cracovie, puis à celle de Katowice. Depuis 1974 elle vit à Berlin.
Passionnée par la création musicale, Gabriela Moyseowicz commence à composer dès son plus jeune âge. Son Concerto en majeur pour 2 pianos, dont le premier mouvement se trouve sur ce disque, lui a valu le surnom de « petit Mozart ». Bien qu’inspiré par le Concerto en majeur K.537 du grand classique viennois, il dévoile déjà une compositrice dotée d’une personnalité.
La Symphonie n°2 « Leopolis » [Lvov] qui ouvre l’album est construite sur un motif tiré d’une chanson patriotique - chantée souvent par la mère de notre compositrice – qui est transformé, mais omniprésent tout au long de cette pièce quasi atonale, écrite en 2010.
Media vita est une composition de musique de chambre pour un récitant, soprano, deux violons et violoncelle, datant de 1961-62. Ella a fait partie de l’examen d’entrée de Gabriela Moysewicz à l’Académie de musique de Cracovie. Le texte en latin vient d’une antienne écrite par Notker Balbulus (840-912), un moine suisse. Il faut souligner la qualité vocale et instrumentale de tous les musiciens qui expriment parfaitement l’esprit quasi mystique de cette partition.
Sonate pour piano n°4 a vue le jour en 1963, une œuvre d’un mouvement d’environ 9’ à l’harmonie foisonnante et une grande dramaturgie. L’œuvre est brillamment interprétée ici par la compositrice- même.
Hommage à la Pologne pour violon solo et l’orchestre de chambre composée en 2015 est une commande du chef d’orchestre Szymon Kawalla dans le cadre de 70e anniversaire de l’Association londonienne des écrivains en exil. Un dialogue tonal entre la soliste et l’orchestre qui, d’une manière très expressive, illustre des différentes émotions, en liaison probablement avec l’histoire du pays.
L’interprétation de la soliste, Agnieszka Tobik, (qui est aussi violon solo de l’Orchestre philharmonique de Koszalin), possède un sens de la structure du morceau, une grande sensibilité sans maniérisme inutile et une sonorité riche.
Concerto pour piano et orchestre n°4 clos ce disque. Encore une fois, l’artiste fait preuve d’une importante dramaturgie, d’une écriture très illustrative. Piort Grelowski, pianiste, a merveilleusement su fondre le timbre de son instrument avec celui de l’orchestre, tout en gardant son discours de soliste.
L’orchestre placé sous la baguette de Jan Jakub Bokun joue avec une très grande précision, un souci du détail et une belle palette de couleurs.
Nous saluons ce projet qui permet de découvrir des différents styles et l’évolution artistique de Gabriela Moysevicz, dont la musique pourra ravir les plus exigeants des mélomanes !
Anna Maria BARBARA
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Trois siècles de chefs-d’œuvre : une flûte et son Poète, VDE GALLO (www.vdegallo.ch ), 2021, CD 1664, TT : 78’ 30


Gabriel Fumet (né en 1937), flûtiste de réputation internationale, entraîne l’auditeur à sa suite dans un cheminement de J. S. Bach (Allemande de la Partita pour flûte seule) à son père Raphaël FUMET (1898-1979, Intermède romantique), avec 8 autres jalons du répertoire convenant à la flûte : 4 germaniques, 3 français et 1 italien. La Sonate est à l’honneur : représentée par Frédéric II de Prusse, TELEMANN, MOZART et DONIZETTI. Le flûtiste hors pair a également retenu un mouvement de Concerto (Jean-Marie LECLAIR), la Scène des Champs-Élysées de l’opéra Orphée et Eurydice (GLUCK), l’introduction et Variations sur « La Belle Meunière » (SCHUBERT) et une Fantaisie (Fauré), chaque page étant accompagnée au piano ou à l’orgue. Un ravissement.
Édith WEBER
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Anthony GIRARD : Éloge de la candeur. Œuvres pour hautbois et piano, CIAR (ciar@free.fr), CC004, TT : 60’


Élève de Gérard Perreau (Saint-Etienne) puis de Pierre Pierlot au CNSMDP où Jean-Pierre Arnaud (hautboïste, cornettiste) a croisé son condisciple Anthony GIRARD (né en 1959 près de New York de parents français), il l’a dès lors accompagné dans la mise en œuvre de la part du vaste corpus écrit depuis 1982 par le compositeur autour du hautbois et du cor anglais, soit une quinzaine de morceaux de chambre, dont 4 ont été enregistrés en première mondiale en 2017. Les deux premiers, de la dernière manière d’Anthony Girard : la Sonate pour hautbois et piano (2017), intitulée « Éloge de la candeur », en 3 mouvements contrastants et l’Apothéose de la mélancolie pour cor anglais et piano (2016), en 2 mouvements très évocateurs, s’inscrivent dans la mouvance mélodiste française. Geneviève Girard (piano) et Jean-Pierre Arnaud, manifestement très à l’aise dans ce répertoire nécessitant une écoute réciproque attentive, transmettent leur dilection commune. Puis figurent deux pièces de jeunesse. Comme pour en souligner la parenté, l’Épilogue en trio (flûte -Patrice Kirchhoff enrichit encore de sa belle sonorité le dialogue-, hautbois et piano, 1984) virevoltant, hoquetant, incisif, toujours en mouvement est suivi des Onze pièces brèves pour hautbois et piano (1982) constituant comme des bribes de matériaux compositionnels que l’on retrouve dans l’Épilogue. Un pas de plus dans la découverte de l’œuvre si attachante d’Anthony Girard.
Édith WEBER
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Parfums d’Escales. Danses et airs Slaves au piano, GALLO (vdegallo.com), CD1622, 2021


Le Duo Ludmilla Guilmault - Jean-Noël Dubois, tous deux ayant bénéficié de l’enseignement du pianiste virtuose hongrois György Cziffra (1921-1994, naturalisé français en 1968), a vu le jour en 2007, leur permettant de combiner talents et fougue qu’ils ont en partage, Ludmilla ayant multiplié les récitals notamment humanitaires alors que Jean-Noël avait plutôt développé son penchant pédagogique. Ce CD invite au voyage en pays slaves, en passant en revue des pages célèbres de compositeurs russes (P. I. TCHAIKOVSKI, D. CHOSTAKOVITCH, S. RACHMANINOV, l’arménien Aram KHATCHATURIAN, M. GLINKA) ainsi que des transcriptions de chansons traditionnelles (Les yeux noirs, Le Rocher de la Volga, Kalinka…), mais également une Polonaise et une Mazurka (Fr. CHOPIN), 2 Danses norvégiennes (E. GRIEG). 2 pièces de J. BRAHMS (dont une Danse hongroise qui conclut le CD), un Moment musical de Fr. SCHUBERT et Au bord d’une source (Fr. LISZT), jusqu’à la danse hongroise Czardas (1904) de l’italien Vittorio MONTI (Naples, 1868-Naples, 1922). Sur les 20 pièces, J.-N. Dubois en exécute 9 ; L. Guilmault 3, les 8 restantes l’étant par le Duo. Autant d’atmosphères favorisant le transport, rendues avec une large palette expressive et une incontestable adaptation aux multiples exigences pianistiques. Une nouvelle production GALLO ouverte sur l’Europe.
Édith WEBER
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Sefika Kutluer Plays Solo, GALLO (vdegallo.com), CD1611, 2021, TT : 58’ 45


La remarquable flûtiste turque Sefika Kutluer (née en 1961) ouvre son récital en mémoire de sa mère par la famille BACH, d’abord le fils : Carl Philipp Emanuel, avec sa Sonate en la mineur (H 562), puis le père : Johann Sebastian, avec sa Partita en la mineur (BWV 1013, comportant les 4 danses : Allemande, Corrente, Sarabande et Bourrée anglaise), deux grandes pièces pour son instrument entre lesquelles la revigorante Image (op. 38) du chef et compositeur français moins connu, Eugène BOZZA (Nice, 1905-Valenciennes, 1991) vient s’intercaler avec bonheur. Puis Le vol du bourdon dispense, sous ses doigts experts et sa respiration si maîtrisée, sa joyeuse fulgurance, contrastant avec Il fauno d’Arrigo Tassinari (le flûtiste de Toscanini), alors que Syrinx (Claude DEBUSSY) pointe son caractère unique. Cette nouvelle production GALLO s’achève par deux pages de la flûtiste elle-même : Going Day and Night et son Requiem pour mon Ange Mère (qui exploite le registre grave de la flûte). Magnifique hommage maternel de la grande flûtiste.
Édith WEBER
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Henri MARTEAU : 24 Capricen op. 25 für Violine und Klavier. SOLO MUSICA (www.solo-musica.de ). SM 348. 2 CD


5e volet de la Série HausMARTEAU, le violoniste Ingolf Turban et ses élèves mettent en valeur l’op. 25 du compositeur et violoniste virtuose Henri MARTEAU, né à Reims en 1874 et mort Outre-Rhin, à Lichtenberg en 1934. De mère allemande (ancienne élève de Clara Schumann), sa culture binationale lui jouera même des tours, suspecté de traitrise par les deux camps pendant la Grande Guerre. Malgré tout, il donnera de nombreux récitals en Europe, composera (sa musique de chambre lui vaudra le Prix Chartier 1912) et enseignera en Suède, à Genève, Berlin et Leipzig. Depuis 1999, un Concours international Henri Marteau se déroule en Bavière tous les 3 ans. Le professeur Ingolf Turban (né en 1946 à Munich) nous relate comment il a fait connaissance avec l’op. 25. Étudiant à l’Université de Munich, il s’est vu remettre en 1983 un feuillet de copies des pages manuscrites des 24 Caprices (pour violon et piano) par le Prof. Dr Günther Weiss, et devait sous peu apprendre deux Caprices de son choix afin de participer à l’enregistrement de l’intégrale de l’opus. Et le jeune violoniste de les apprendre tous, « pages fabuleuses » très diversifiées, puis de découvrir la carrière mouvementée du grand virtuose, citoyen du monde, enseignant à l’esprit libre dont certains élèves l’auront suivi dans la demeure qu’il se fera construire à Lichtenberg (en Franconie), en 1912/13. I. Turban, ayant donné plus de 1000 concerts à travers le monde et enregistré une cinquantaine de CD, devenu professeur (à Stuttgart, à Munich depuis 2006), a transmis son amour pour ces pages à ses élèves. L’idée initiale est reprise dans ce coffret avec 12 étudiants, nés entre 1989 et 2005, d’origine diverse (allemande, suisse, ukrainienne, japonaise) qui restituent avec brio et musicalité cette somme résumant les différents aspects de la geste violonistique (doubles cordes, suraigus, chromatisme, fulgurance, pizzicati ; travail rythmique, dynamique…). Ils sont somptueusement accompagnés par Tomoko Nishikawa, pianiste japonaise. Une vraie découverte qui enrichira le répertoire.
Édith WEBER
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Mysteries. MIASKOVSKY, BACRI. ARS PRODUCTION (www.ars-produktion.de), ARS 38 313, 2021.


La pianiste luxembourgeoise Sabine Weyer (née en 1988), qui mène de front une carrière internationale de soliste, de chambriste et d’enseignante (au Conservatoire de Luxembourg, aussi en intervenant en Europe et en Chine), après avoir enregistré des CD consacrés à Rameau et Debussy, Bach et Mendelssohn, les transcriptions de Bach, des œuvres concertantes de Chostakovitch, propose avec son label attitré une intéressante mise en regard de pièces de deux compositeurs différant par leur pays et leur époque : N. I. MIASKOVSKI et N. BACRI, ayant en commun non seulement un vaste corpus dans de nombreux domaines de l’écriture musicale mais encore une profonde sensibilité soutenue par une expressivité à fleur de peau.
Le compositeur russe Nikolaï Iakovlevitch MIASKOVSKI (né près de Varsovie en 1881- mort à Moscou en 1950), professeur de composition (de 1921 à sa mort) respecté au Conservatoire de Moscou, put, à l’instar d’autres musiciens soviétiques emblématiques, conserver une certaine latitude compositionnelle malgré l’injonction à l’optimisme et au réalisme socialiste par le régime totalitaire. Le compositeur français Nicolas BACRI (né en 1961), qui a su rapidement s’émanciper du carcan esthétique contemporaine dominante pour écrire une musique sensible non rétive à la tonalité, enthousiasmant interprètes et auditeurs, a découvert MIASKOVSKI par sa 21e Symphonie dont l’audition a été un choc. Plus tard, c’est la 3e Sonate du compositeur russe (à l’œuvre longtemps inaccessible en Occident) qui suscitera son admiration.
Sabine Weyer fait d’abord alterner les Sonates pour piano n°2 et n°3 de chaque compositeur, toutes en un mouvement (héritage de Liszt (1853) et de la conception cyclique de C. Franck) : la Sonate n°2 op. 13, en fa # mineur (1912), généralement massive et sombre, qui fait intervenir dans son dernier tiers le thème du Dies irae qui irrigue la fin de l’œuvre ; la Sonate n°2 op. 105 (2007, révisée en 2008/10, dédiée au pianiste Julien Quentin) de N. Bacri qui enchaîne à un Adagio particulièrement douloureux un Scherzo martelé qu’interrompt le Trio, lent et désolé, avant le retour du Scherzo menant à une déferlante noyant l’ensemble pour faire émerger une fugue belliqueuse : une œuvre présentant tour à tour les deux faces opposées de l’existence. La Sonate n°3 op. 19, en do mineur (1920, révisée en 1939 par Miaskovski), repousse de plusieurs crans les limites du paroxysme pianistique : violence, colère alternent avec des épisodes de désolation et de supplication ; la Sonate n°3 (Sonata impetuosa) op. 122 (2011, dédiée par le compositeur français à la pianiste belge Éliane Reyes ­— ici en premier enregistrement mondial) semble faire écho à celle du musicien russe et plonge l’auditeur dans un sentiment oppressant de « catastrophe imminente » qui contraste avec une partie comme suspendue véhiculant une sourde complainte. Une fugue, encore, vient naturellement compléter ce tableau qui retournera vers une pluie de notes assénée sur l’ensemble du clavier. Le programme se poursuit par la mise en parallèle des Excentricities op. 25 (1917-18, rév. 1923) de MIASKOVSKI nourries d’idées musicales notées au fil des ans, avec la Fantaisie op. 134 (2014/2016, dédiée également à Éliane Reyes) de BACRI, dont l’écoute à la suite fait surgir les éléments apparentés.
Sur le piano Bösendorfer, la pianiste fait oublier sa médiation impeccable pour nous introduire au cœur-même du déploiement de chacune des œuvres magistrales qu’elle interprète magistralement. CD marquant : une référence.
Édith WEBER
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SAINTE-HÉLÈNE. La légende napoléonienne, MUSO (www.muso.mu ), mu 044, 2021. TT : 62’ 28.


L’ensemble Les Lunaisiens (5 chanteurs : 1 soprano, 1 ténor, 2 barytons — dont Arnaud Marzorati, directeur artistique — et 1 basse ; piano, serpent, orgue de barbarie) et Les Cuivres Romantiques s’épaulent depuis des années. Soutenue par la Philharmonie de Paris qui multiplie depuis son ouverture (2015) les actions pédagogiques et de vulgarisation grâce notamment à son Musée de la musique (comportant quelque 7000 instruments), ils font brillamment revivre un répertoire lié à l’époque napoléonienne, en passant en revue des chansons et hymnes mettant en exergue la légende de celui qui deviendra Empereur des Français, depuis sa proximité avec ses hussards (Les Français au Général Bonaparte, Les Pommes de terre), la vie militaire (Le conscrit), ses faits d’armes en tant que Général, Premier Consul, son sacre, l’épopée guerrière jusqu’à son exil à Sainte-Hélène (et son décès, le 5 mai 1821). Si la veine patriotique est à l’honneur (La victoire est à nous, La bataille de Waterloo), l’histoire est mise en scène (Sur le tombeau de Joséphine interprété avec beaucoup de délicatesse par S. Devieilhe), le caractère critique est plus ou moins affirmé (La Campagne de Russie, version -royaliste- pour voix et serpent d’Il était un p’tit homme, et surtout Le Roi d’Yvetot,). Certaines chansons traduisent la réminiscence impériale (Les souvenirs du peuple de Béranger, Te souviens-tu ? d’Émile Debraux…). Manifestement, aucun des musiciens ne boude ni son plaisir ni son humour et met ses talents au service de cette vaste évocation (irrésistible : Le Roi d’Yvetot, truculent et gouailleur). La mise en bouche des voix masculines ou de la soprano Sabine Devieilhe dans cette musique souvent légère et très évocatrice est gouleyante ; la diction est parfaite, et l’accompagnement (au pianoforte avec Daniel Isoir, au serpent (Patrick Wibart) ou plus étoffé), ciselé et extrêmement dynamique. Evidemment, la part belle est donnée aux cuivres (ici : trompettes, cors, buccins d’alors) avec des pages instrumentales (Fanfare, Sonnerie, Pas redoublé, Adagio et Polonaise, Marche) du meilleur effet. Le CD s’achève avec Sainte-Hélène, évocation poignante de la fin du grand homme. Une restitution à la vivacité communicative : CD ébouriffant, plein de sève et d’esprit.
Édith WEBER
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Dreams and Tales. MUSSORGSKY - SCRIABIN, ODRADEK (www.odradek-records.com), ODRCD395, 2021. TT : 58’ 04.


Les affinités électives gœthiennes peuvent-elles dissoudre les barrières ? Un napolitain peut-il parler le langage artistique russe ? Michele Campanella (né en 1947, Lauréat du Prix Alfredo Casella à 19 ans, pianiste concertiste de renommée internationale) porte en lui depuis un demi-siècle les Tableaux d’une Exposition (1874) de Modeste MOUSSORGSKY (1839-1881) et la Sonate n°3 en fa # mineur, op. 23 (1897-98) d’Alexandre SCRIABINE (1871-1915) qui font l’objet du CD. Les Tableaux d’une Exposition, description musicale de dessins et d’aquarelles de son ami Viktor Hartmann provenant de voyages en Pologne, France et Italie, en 10 volets évocateurs diversifiés, accompagnés de plusieurs « Promenades » guidant la visite virtuelle et imaginaire que le pianiste maîtrise in extenso, transmettant autant l’atmosphère de chaque élément présenté qu’une vue d’ensemble d’une grande cohérence musicale, où la russité la plus profonde s’affirme dans toute l’authenticité de la partition originale. La même haute maîtrise mène l’exécution de la séduisante Sonate n°3 en fa # mineur, en 4 mouvements, d’A. Scriabine dont l’approche synesthésique de la musique (et celle du piano en particulier) le fera bientôt frayer une voie toute personnelle s’éloignant toujours plus du cadre tonal. Une élégante et lumineuse Valse op. 38, un peu plus tardive (1904) — alors que la forme est déjà tombée en désuétude —, complète la programmation. Par son interprétation magistrale, Michele Campanella a répondu à ses propres interrogations existentielles, convaincant définitivement l’auditeur.
Édith WEBER
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12 Shades of the Viola, ACTE PRÉALABLE (www.acteprealable.com ), AP0499, 2021. TT : 73’09.


Démarche audacieuse : un CD consacré à l’alto seul… Douze pièces (allant de 4’ à 8’ 30) de 6 jeunes compositrices polonaises, interprétées par 9 altistes polonais (4 hommes et 5 femmes) — en premier enregistrement mondial — : voici le défi lancé par cette publication du Label polonais habitué aux exercices extrêmes. Douze nuances liées aux mois de l’année pour cette variation sur le même instrument. D’emblée : dès Janvier (d’Agnieszka Zdrojek-Suchodolska) exécuté par Kamil Babka, l’écoute est captive de cette immersion dans la chair du son. La pâte sonore, évolutive au gré de l’écriture de la pièce, nourrit l’imaginaire avide de l’auditeur et cette expérience bien que rassasiante, en appelle une autre, et ainsi de suite : les nuances mensuelles défilent, renouvellement radical des Saisons, traduisant l’approche personnalisée de chaque compositeur. Du cœur (du concepteur) au cœur (de l’auditeur) en passant par le cœur (de l’interprète), l’intimité musicale intrinsèque est profonde, grâce à une excellente prise de son. La succession d’affects générés par les inflexions des interprètes font bientôt perdre le fil du temps et, si l’on y cède (délaissant délibérément le référencement des plages), le programme atteint à la musique pure. Or chaque pièce a été pensée selon son emblème chronologique. Au moins une seconde écoute sera donc indispensable pour commencer à capter toute la richesse et l’enjeu de l’entreprise singulière. L’information sonore propre à l’instrument est si prégnante qu’elle procure une excitation sensorielle projetant l’écoutant dans un lieu musical à mi-chemin entre l’atelier et l’intérieur-même de l’alto ou quelque part à fleur de cordes… Une expérience sonore palpitante à vivre, à l’aune de la radicalité du projet.
Édith WEBER
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Johann Wilhelm GABRIELSKI : Flute Works 1, ACTE PRÉALABLE (www.acteprealable.com ), AP0495, 2021. TT : 79’ 08.


Dans ce premier CD, Johann Wilhelm GABRIELSKI (né à Berlin, en 1791, d’ancêtre polonais-1846), notamment musicien de chambre à la Cour de Prusse, est à l’honneur avec 6 de ses pièces pour flûte. Maria Peradzynska-Filip ouvre ce récital avec la vaste Fantaisie en majeur (op. 64). Pour les trois Duos concertants pour deux flûtes (op. 85) : n°1 en mineur, n°2 en Si b majeur, n°3 en La majeur, elle est rejointe par Marcin Adamski qui conjuguent agréablement leurs talents. Deux autres flûtistes se joignent à eux pour composer cette formation peu commune et interpréter son Quatuor pour 4 flûtes en mi mineur (op. 95 n°2). La même formation met en œuvre sa Variation sur un thème de l’opéra Othello (op.70). Musique coulant de source.
Édith WEBER
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Przemyslaw SCHELLER : Dead Grain. ACTE PRÉALABLE (www.acteprealable.com ), AP0494, 2021. TT : 50’ 44.

Le tout jeune Przemyslaw SCHELLER (né en 1990), Docteur en Art de l’Académie de musique de Katowice et du CNSMD de Lyon, entre autres professeur associé au Département de composition, théorie de la musique et multimédia, est à juste titre à l’honneur avec 4 de ses pièces. Imaginary Landscape (2015) interprété par l’Orkiestra Muzyki Nowej dirigé par Szymon Bywalec dresse un décor angoissant : le monde plongé dans une obscurité sporadiquement éclairée, cantonné au rouge, dans lequel les sons sont jugulés et tout est au ralenti. Enfin, alors que l’on s’accommodait à ce curieux univers, l’illusion sécuritaire tombe, le paysage imaginaire laissant place à la brutale réalité.
Dans The Little Match Girl (La petite fille aux allumettes, 2019), interprété par l’ensemble des Silesian Chamber Players dirigé par le jeune Wojciech Wantulok (qui accompagne aussi les deux pièces suivantes), le lien avec le conte d’Andersen n’est pas explicité. La pièce fourmille d’inventions compositionnelles, attitude pionnière qu’il entretient dans A Road Marked With Dead Grain (2020) où se crée comme un organisme vivant, respirant, au sein duquel le jeune clarinettiste Andrzej Cieplinski s’illustre. La même démarche se retrouve dans son Concerto pour harpe et orchestre de cordes, en 2 mouvements (2020), avec la jeune Anna Scheller (harpe). Les musiciens se scindent en 2 groupes, l’un autour de la soliste, l’autre placé dans le public. La deuxième partie laisse finalement l’auditeur abasourdi par les puissants assauts orchestraux.
Un compositeur polonais précoce d’une inventivité enthousiasmante et déjà d’une grande profondeur. L’avant-garde polonaise chez Acte Préalable. Une révélation.
Édith WEBER
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Joseph Christoph KESSLER : Piano Works, ACTE PRÉALABLE (www.acteprealable.com ), AP0498, 2021. TT : 48’ 03.


Le compositeur pianiste allemand, Joseph Christoph KESSLER (1800-1872), a passé une partie de son existence en Pologne et en Galice. Entre 1820 et 1826, il est professeur de musique auprès du Comte Potocki à Lvov et donnera des concerts à Cracovie et Varsovie, où il enseignera et organisera des concerts de chambre accueillant parfois Frédéric Chopin. Après un séjour à Lvov, il s’installe à Vienne, où il sera reconnu. Multiculturel, ami de Chopin et de Liszt, il s’emploiera à promouvoir les musiciens étrangers. Magdalena Brzozowska, qui avait déjà fait connaître ses Préludes (op. 31) et ses 24 Études (op. 20) dans un enregistrement précédent (AP0319), restitue une nouvelle sélection de ses pages de piano : quatre Pensées fugitives (op. 72) : Le Lutin, Le Sylphe, Chant du Savoyard et Gigue et trois Mazury (en Ut majeur, la mineur et majeur), toutes marquées par leur écriture ramassée. Sa sérieuse Chansonnette à la russe sans paroles (op. 61 B) contraste avec le Nocturne en Ré b Majeur (op. 48 n°2), plus éthéré. Pour finir : deux pièces plus développées : Scherzo (op. 45) — jouant notamment sur l’ambivalence rythmique et l’exploitation d’arpèges enchassés — et Souvenir de Grätz (op. 60), hommage à Beethoven et à la 3e partie de sa Sonate Pathétique que KESSLER aborde de bien des manières au fil de l’œuvre. Un florilège de la diversité technique du pianiste compositeur.
Édith WEBER
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René de BOISDEFFRE : Songs 1, ACTE PRÉALABLE (www.acteprealable.com ), AP0481, 2020. TT : 65’ 51.


C’est au René de BOISDEFFRE (1838-1906) mélodiste que ce premier CD s’intéresse avec 21 Mélodies d’auteurs plus ou moins connus : six de l’op. 30 (2e Recueil) dont Berceuse (V. Hugo) et Chanson (Armand Silvestre), cinq de l’op. 39 (sur des textes d’Edouard Guinand (strict contemporain du compositeur, poète et auteur dramatique), six de op. 79 (poèmes de Paul Collin (1843-1915), avocat poète)… Les thèmes abordés touchent à la nature, à l’amour, aux états d’âme. La mezzo-soprano Dominika Paczkowska-Gajdzis, à la voix puissante et à la diction impeccable, accompagnée par un Jakub Tchorzewski attentif, leur rendent justice, passant aisément d’une atmosphère à l’autre. Belle illustration de l’esthétique de la musique de salon dans la France de la seconde moitié du XIXe siècle.
Édith WEBER
© L'ÉDUCATION MUSICALE 2021


BIBLIOTHÈQUE DE L'ÉDUCATION MUSICALE

VIENT DE PARAÎTRE


JEAN GUILLOU. BRÈVE BIOGRAPHIE INTIME
Suzanne GUILLOU-VARGA
ISBN : 9782701023328,
188 pages, 2021, 24 €

Objet rare dans l’histoire musicale que la biographie d’un grand maître écrite par son épouse.
Événement peu ordinaire que ce JEAN GUILLOU de Suzanne Guillou-Varga : bref essai biographique intime que les éditions Beauchesne publient le 1er septembre 2021.
Plus de quarante années de vie partagée, invitent à s’interroger sur le mystère que fut, et que reste, le Maître de l’orgue, le compositeur, le poète, l’homme. Rien de linéaire dans ces dix chapitres qui rappellent les moments, les épisodes déterminants et les événements marquants permettant de mieux connaître un homme dont la stature se dérobe à toute limite et échappe à quiconque croit le saisir.

Dix-huit photographies et dix-neuf documents inédits

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LA MÉTAPHORE MUSICALE DE L’HARMONIE DU MONDE À LA RENAISSANCE
Myriam JACQUEMIER
ISBN : 978270102291,
560 pages, 2020, 56 €

Comment dire le sacré ? Comment résoudre l’attrait irrésistible pour le principe de l’Unité alors que tout spectacle du réel renvoie à l’évidence troublante de l’altérité ? La musique par la magie des accords, la complexité des sons, la richesse de l’inventivité humaine, ne pouvait-elle pas, à bon droit, espérer rendre possible un tel espoir ? Ne pouvait-elle pas aller jusqu’à exercer un réel pouvoir de régénération de la nature entière, élevant les âmes, fédérant corps et esprits en un même idéal, jusqu’à ce que le mystère opère et que l’esprit de concorde des premiers commencements rejoue la symphonie initiale désaccordée par les colères humaines ? Lire la suite

lire l'introduction


VOIX HÉBRAÏQUES
Hector SABO
ISBN : 9791091890359,
352 pages, 2020, 26.00 €

L’association du peuple hébreu à la musique remonte aux temps de la Bible. Or, « la composante musicale de la tradition juive est déterminée à la fois par l’espace et le temps ; par les modes artistiques de ses lieux d’exécution, et par les contextes culturels propres à son histoire », écrit Paul B. Fenton dans sa préface à ces Voix hébraïques. Espace et temps, c’est à un voyage historique, mais surtout musical, qu’invite ce livre, en quête de la « musique juive », si difficile à définir dans sa diversité, ancrée dans la permanence de la langue hébraïque. Lire la suite

Lire le chapitre 2, La Renaissance et le Baroque

Interview d'Hector SABO par AKADEM


Hector SABO et Marc-Alain OUAKNIN dans Talmudiques
La leçon de musique 1/2 Quand Jean de Dreux rencontre Mozart à la synagogue.
La leçon de musique 2/2 De la synagogue à Broadway

Les Polyphonies Hébraïques de Strasbourg

La Musique Juive (oui, encore) par Leo SABO


LES AVATARS DU PIANO
Ziad KREIDY
ISBN : 9782701016252, 75 pages, 14.50€

Mozart aurait-il été heureux de disposer d’un Steinway de 2010 ? L’aurait-il préféré à ses pianofortes ? Et Chopin, entre un piano romantique et un piano moderne, qu’aurait-il choisi ?
Entre la puissance du piano d’aujourd’hui et les nuances perdues des pianos d’hier, où irait le cœur des uns et des autres ?
Personne ne le saura jamais. Mais une chose est sûre : ni Mozart, ni les autres compositeurs du passé n’auraient composé leurs œuvres de la même façon si leur instrument avait été différent, s’il avait été celui d’aujourd’hui. Lire la suite


KARLHEINZ STOCKHAUSEN JE SUIS LES SONS ...
Ivanka STOIANOVA
ISBN :9782701020273, 356 pages, 2014, 34.00€

Ce livre, que le compositeur souhaitait publier dans sa maison d’édition à Kürten, se propose de présenter les orientations principales de la recherche de Karlheinz Stockhausen (1928-2007) à travers ses œuvres, couvrant sa vie et ouvrant un accès direct à ses écrits. Divers domaines investis par le plus grand inventeur de musique de la seconde moitié du xxe siècle sont abordés : composition de soi à travers les matériaux nouveaux Lire la suite


ANALYSES MUSICALES XVIIIè SIECLE. VOLUME 1
Daniel BLACKSTONE, C. et Gérard DENIZEAU (sous la direction de)
ISBN : 9782701020280, 224 pages, 2014, 19.00€

En 2010, L’Éducation musicale a fêté son soixante-cinquième anniversaire. Dans l’histoire de la presse spécialisée, ce record de durée ne laisse pas d’impressionner, surtout en un temps où tant de menaces pèsent sur les exigences de la vie culturelle. sans doute le secret de cette longévité est-il à découvrir dans la constante capacité de renouvellement d’une publication réservée, lors de sa création, à la corporation – jeune et enthousiaste – de professeurs de musique jouissant d’un nouveau statut au sein de l’Éducation nationale. Lire la suite


MAURICE MARTENOT, LUTHIER DE L’ÉLECTRONIQUE
Jean LAURENDEAU
ISBN : 9782701022376, 386 pages, 2017, 59.00€

« Connaissez-vous beaucoup d'inventeurs d'instruments de musique ? Ceux dont l'histoire a retenu les noms se comptent sur les doigts d'une main. Jean- Christophe Denner a inventé la clarinette, Adolphe Sax le saxophone. Et puis ? On connaît des facteurs d'instruments, Stradivarius, par exemple. Mais il n'a pas inventé le violon. Alors qui ? Qui le piano ? Qui a inventé le tambour, la flûte, la harpe ? Autant demander qui étaient Adam et Ève ! » Lire la suite


LES PRINCIPES FONDAMENTAUX DE LA MUSIQUE OCCIDENTALE
Serge GUT
ISBN : 9782701022383, 432 pages, 2018, 46.00€

Disparu en mars 2014 à l’âge de 86 ans, Serge Gut compte au nombre des figures majeures de la musicologie française des dernières décennies. Spécialiste de Franz Liszt, auquel il consacra deux grands ouvrages et de nombreux articles, il fut également un analyste réputé. Après une première formation de compositeur, il avait commencé sa carrière musicologique, dans les années 1960-1970, par des publications traitant surtout de questions de langage musical – un domaine qui, bien que parfois négligé par les milieux universitaires, constitue le pont naturel entre composition et théorie. Lire la suite



ESPRIT DE SUITE. Pour une lecture avisée et pratique des œuvres du répertoire organistique
Jean GUILLOU
ISBN : 9782701022888,
24.00 €

Une application minutieuse inspirée par un répertoire organistique allant de Frescobaldi jusqu'aux œuvres de l'auteur lui-même est le mot d'ordre de cet ouvrage qui veut faire suite à celui de La Musique et le Geste, aussi confié aux éditions Beauchesne.
Remarques porteuses d'expériences pratiques, libres présentations esthétiques accompagnant des lustres de concerts et d'enregistrements et qui permettent d'aller d'emblée à l'essentiel, de toucher ce noyau central qui libère les forces devant présider à l'interprétation. Rencontre entre l'esprit et le monde, comme la rencontre entre La Musique et le Geste, dans ce désir de céder dans l'aura musical au pouvoir de l'écriture. Lire la suite


LA MUSIQUE ET LE GESTE
Jean GUILLOU
ISBN : 9782701019994,
352 pages, 2012, 29.00 €

Cet ouvrage illustre l’activité protéiforme de Jean Guillou et célèbre l’indissociable alliance de sa musique avec la littérature et les autres formes d’art qui s’y trouvent comme entretissées. À l’encontre de tout académisme, ces écrits, attachés à diverses circonstances, manifestent une inlassable projection dans l’avenir. De même nature prospective que ses œuvres musicales – plus de quatre-vingts opus aujourd’hui – qui font de lui l’un des compositeurs majeurs de notre temps, ces textes sont vifs et variés comme ses improvisations fulgurantes. Théoricien novateur, Jean Guillou est l’auteur de L’Orgue, Souvenir et Avenir (quatrième édition chez Symétrie) et on lui doit, dans la facture d’orgues, la conception de nombreux instruments construits à Zurich, Rome, Naples, Bruxelles, Tenerife, León et en France. Lire la suite


CHARLES DICKENS, la musique et la vie artistique à Londres à l’époque victorienne Suivi d’un Dictionnaire biographique et d’un
 Dictionnaire des personnages cités
James LYON
ISBN : 9782701020341,
268 pages, 2015, 29.00 €

Au travers du récit que James Lyon nous fait de l’existence de Dickens, il apparaît bien vite que l’écrivain se doublait d’un précieux défenseur des arts et de la musique. Rares sont pourtant ses écrits musicographiques ; c’est au travers des références musicales qui entrent dans ses livres que l’on constate la grande culture musicale de l’écrivain. Il se profilera d’ailleurs de plus en plus comme le défenseur d’une musique authentiquement anglaise, forte de cette tradition évoquée plus haut. Lire la suite

LEOŠ JANÁČEK, JEAN SIBELIUS ET RALPH VAUGHAN WILLIAMS. UN CHEMINEMENT COMMUN VERS LES SOURCES
James LYON
ISBN : 9782701015958,
720 pages, 79.00 €

Pour la première fois, le Tchèque Leoš Janáček (1854-1928), le Finlandais Jean Sibelius (1865-1957) et l’Anglais Ralph Vaughan Williams (1872-1958) sont mis en perspective dans le même ouvrage. En effet, ces trois compositeurs - chacun avec sa personnalité bien affirmée - ont tissé des liens avec les sources orales du chant entonné par le peuple. L’étude commune et conjointe de leurs itinéraires s’est avérée stimulante tant les répertoires mélodiques de leurs mondes sonores est d’une richesse émouvante. Les trois hommes ont vécu pratiquement à la même époque. Lire la suite

JOHANN SEBASTIAN BACH : CHORALS
James LYON
ISBN : 9782701014937,
336 pages, 2005, 49.00 €

Ce guide s’adresse aux musicologues, hymnologues, organistes, chefs de chœur, discophiles, mélomanes ainsi qu’aux théologiens et aux prédicateurs, soucieux de retourner aux sources des textes poétiques et des mélodies de chorals, si largement exploités par Jean-Sébastien Bach, afin de les situer dans leurs divers contextes historique, psychologique, religieux, sociologique et surtout théologique. Lire la suite


CONNAÎTRE SA VOIX POUR MIEUX LA PRÉSERVER
Élisabeth PÉRI-FONTAA
ISBN : 9782853853651,
240 pages, 2020, 28.00 €

Préserver ses capacités vocales est un objectif majeur chez ceux qui utilisent leur voix pour exercer leur profession, les professionnels de la voix. Mais de nos jours, ne sommes-nous pas tous des professionnels de la voix ? Et parmi les rares d’entre nous qui ne le sont pas, la qualité de la voix est essentielle pour certaines activités extra- professionnelles : que ce soient les loisirs, engagements associatifs et vie familiale. Lire la suite


LE VERBE ET LA VOIX. LA MANIFESTATION VOCALE DANS LE CULTE EN FRANCE AU 17ÈME SIÈCLE
>Monique BRULIN
ISBN : 9782701013756,
506 pages, 1998, 48.00 €

Notre époque qui s'interroge sur le renouveau des chemins de l'esprit et du cœur porte une attention marquée aux supports et aux conditions de l'expérience religieuse.
La France du XVIe siècle qui constitue le cadre de cette étude est le lieu d'un débat permanent entre l'avènement de l'homme intérieur et la nécessité de donner à cette expérience individuelle et collective une manifestation extérieure et sensible. Lire la suite


EN PRÉPARATION


LA MUSIQUE ARABE DANS LE MAGHREB
Jules ROUANET
ISBN : 9791091890397,

La musique arabe dans le Maghreb, de Jules Rouanet, est un chapitre du tome V de l’Encyclopédie de la musique, dirigée par Albert Lavignac et Lionel de La Laurencie, publiée chez Delagrave de 1913 à 1922, d’abord en fascicules, puis en volumes reliés : «monument littéraire », « ouvrage considérable, conçu sur un plan absolument nouveau et sans aucun parti pris d’école », dont le but était «de fixer l’état des connaissances musicales au début du vingtième siècle ». C’était l’époque des grandes machines éditoriales, des mobilisations, des bilans, de l’Histoire de la langue et de la littérature française, en huit tomes, sous la direction de Louis Petit de Julleville, ou de l’Histoire de la langue française, en onze tomes, dirigée par Ferdinand Brunot qui partait en automobile sur les routes, vers 1911, avec de drôles d’appareils pour enregistrer les façons de parler de notre pays. Lire la suite

LA PENSÉE SYMPHONIQUE DANS LES FORMES LIBRES
Ivanka STOIANOVA
ISBN : 9782701023090, En préparation

Cet ouvrage didactique, troisième volume du Manuel d’analyse musicale d’Ivanka Stoianova qui fait suite à Manuel d’analyse musicale 1 /Les formes classiques simples et complexes, Minerve, 1996 et Analyse musicale 2 /Variations, sonate, formes cycliques, Minerve, 2000, se propose d’élucider les principes de la pensée symphonique dans les formes dites libres de la tradition classique et romantique. Lire la suite



BAC 2021. LE LIVRET DU CANDIDAT


BAC 2021. LE LIVRET DU CANDIDAT
> ISBN : 9782701023243,
24.50 €

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