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Supplément Bac 2011



septembre-octobre 2010
n° 567



mai-juin 2010
n° 566


Sommaire :

1. Editorial : Haïssables virgules
2. Sommaire du n° 567
3. Informations générales
4. Varia
5. Manifestations et concerts
6. Echos du Festival de Salzbourg
7. L'indéniable attrait du Festival de Lucerne
8. Recensions de spectacles et concerts
9. L'édition musicale

10. Bibliographie
11. CDs et DVDs

12. La vie de L’éducation musicale


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Haïssables virgules


De même qu’il n’est plus guère d’émission de radio – fût-elle la plus sérieuse – qui ne soit désormais « virgulée » d’intempestives chansons (ô France Culture !), de même voit-on partout revendiquer - en toute arrogante jeunesse - le droit d’applaudir au concert entre les mouvements d’une symphonie.  Au plus parfait mépris, bien sûr, de la pensée des compositeurs…


Cependant que l’on peut entendre telle station de radio « classique » (providence des cabinets, notamment médicaux) se rengorger, à longueur d’antenne, de ses tub(u)esques tronçonnages - en lieu et place de tout lancement ou désannonce.  Utilisant ainsi, au mieux, le « temps de cerveau disponible » de ses auditeurs…


Pour douloureusement ressenti que cela puisse être parfois, il est légitime qu’à la fin de toute exécution publique, les auditeurs expriment leurs sentiments - ne serait-ce que pour conforter le tout à l’ego des artistes.  Mais que dire de ces clameurs aux entrées et sorties de scène de tel ou tel sinistre bateleur !


De truffages en caviardages, amis mélomanes, que de tourments !


Francis B. Cousté.


 




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Dossier : « Robert Schumann / Frédéric Chopin »


Robert Schumann : Symphonie n°3 en mib majeur « Rhénane » op.97

Francine Maillard


Schumann et le piano : les Études symphoniques op.13

Gérard Denizeau


Le milieu éducatif de Frédéric Chopin

Piotr Myslakowski


Des transcriptions lettre/note chez Chopin ?

David Lamaze


Chopin et la tarentelle : une rencontre inattendue ?

Juliana Pimentel


La forme libre de la Première Ballade de Chopin

Ziad Kreidy


Jean-Marc Luisada à la recherche du sang qui bat dans les veines de Chopin

Sylviane Falcinelli


Les francs-musiciens et la messe de mariage de Napoléon et de Marie-Louise

Pierre-François Pinaud


Affaires de goût : Se rendre sensible aux choses

Antoine Hennion


La grille d’Hélène Jarry


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Propos de l'Inspection générale

 

Génération

En moins de trois années, la quasi-totalité des textes qui, de l’école au lycée, encadrent l’éducation musicale des élèves ont été rénovés.  Cet important travail était rendu nécessaire par l’ancienneté des textes précédents (collège 1995, lycée 2001), la réforme des structures de formation (lycée 2010) et l’évolution des contextes sociaux comme des pratiques culturelles contemporaines.

Car, en une décennie, bien des choses ont changé, amenant de difficiles questions que l’on ne peut plus esquiver.  Où sont les repères culturels d’un espace aujourd’hui mondialisé et où la mesure du temps disparaît en proportion de la rapidité des échanges ?  Où sont les chefs-d’œuvre d’aujourd’hui, ceux que l’Histoire retiendra comme la plus parfaite expression de la pensée humaine témoignant de son époque ?  Et si l’on en vient aux « Arts du son », quels en sont aujourd’hui les instruments, le vocabulaire organologique hérité des siècles précédents étant largement débordé par l’électricité, l’électronique et l’informatique ?  Quelle est l’organisation des sons qui, érigée en système, fait langage musical ?  Que veut dire « pratiquer la musique » alors que des cheminements autodidactes atteignent des complexités inouïes, ou encore que l’écoute – souvent « augmentée » ou « instrumentée » grâce aux technologies - devient une pratique active ?  Et les couples antagonistes savant/populaire, Europe/Monde, écrit/oral, acoustique/électronique sont-ils encore pertinents pour comprendre notre époque ?

Ces questions – et beaucoup d’autres ! -, les élèves doivent apprendre à se les poser.  Car, si les réponses à y apporter se dérobent désespérément, elles éclairent incontestablement la complexité contemporaine dont l’Art - et particulièrement la musique - semble un fidèle reflet.  Et comment ne pas nourrir ces interrogations de la rencontre des musiques d’hier dont nous sommes les heureux héritiers ?  Œuvres, chefs-d’œuvre, compositeurs, interprètes, musiciens, concert, public, instruments, langages, etc., chaque période articule ces réalités pour en faire émerger une identité… qui lui échappe pour finalement se révéler bien plus tard.

Apprendre la musique, ce doit être apprendre à s’interroger sur ce qu’elle est, qu’elle nous soit imposée par l’environnement ou que nous ayons choisi d’aller vers elle.  Apprendre la musique, c’est décider d’en faire une alliée, un complice de ses bonheurs et un remède à ses peines.  Connaître la musique, c’est savoir la prendre et la donner.  Ainsi, chaque élève doit-il savoir prendre toutes les musiques qui lui arrivent, les percevoir et les écouter avec la distance critique lui permettant ensuite des enthousiasmes a priori improbables.  Ainsi chaque élève doit-il savoir donner toute la musique qu’il porte en lui, savoir produire celles que lui dicte sa propre sensibilité, servie par une culture riche et diversifiée comme par des expériences variées de musicien.

Si le devoir d’éducation musicale de l’École peut ainsi se résumer, sa mise en œuvre dépend étroitement des professeurs dont les compétences musicales et pédagogiques restent indispensables à sa réalisation.  Jamais les réformes, qu’elles touchent aux structures ou aux programmes, ne pourront tout.  Toujours elles ouvriront des portes, traceront des perspectives et fixeront des objectifs que seuls les professeurs, musiciens et professionnels de la pédagogie seront à même d’investir et de concrétiser.

Vincent Maestracci.

Inspecteur général de l'Éducation nationale

Doyen du groupe « Enseignements et éducation artistiques » de l’Inspection générale

Éditorial de septembre 2010, publié sur : www.educnet.education.fr/musique/index.htm

(site national de l'Éducation musicale, ministère de l'Éducation nationale)



 

 « Les Journées Ravel de Montfort-l’Amaury » : les 1er, 2, 3 & 7, 9, 10 octobre 2010. 

Renseignements : 3, rue Amaury, 78490 Montfort-l’Amaury.  Tél. : 01 34 86 96 10.  www.lesjourneesravel.com



Maurice Ravel, 1912 ©DR


« La pédagogie : un enjeu vital pour la musique », le 15 octobre 2010, à 15 heures, au Centre musical « Fleury Goutte d’Or-Barbara » (1, rue de Fleury, Paris XVIIIe). 

Renseignements : http://www.touspourlamusique.org ou : www.fgo-barbara.fr


 


Lénine, Staline et la musique, 1 : Ce premier chapitre d’un retour sur l’histoire musicale de la Russie communiste – lorsque l’utopie révolutionnaire rimait encore avec avant-garde – se déroulera, à la Cité de la musique, du 7 au 17 octobre 2010.  Concerts, ciné-concerts, forum. 

Renseignements : 221, avenue Jean-Jaurès, Paris XIXe.  Tél. : 01 44 84 44 84.  www.citedelamusique.fr




Patrice Ducos, professeur agrégé d’Éducation musicale, président de l’association Musiques en milieu scolaire et fondateur de Jazz-in-collège, est décédé à Pau, le 6 septembre 2010, d’un cancer foudroyant à l’âge de 44 ans.  À sa famille, ses collègues et amis, nous présentons nos plus sincères condoléances.



©Ascension Torrent


Musée Claude Debussy.  « Mouvements », saison 2010-2011 sera entièrement consacrée aux jeunes talents.  Le samedi 16 octobre, à 17h00 : Perpetuum Mobile (Florence Cioccolani dans Debussy et Boulez).  Le samedi 20 novembre, à 17h00 : Ce soir il pleuvra des étoiles (Alexandre Martin-Varroy & Rachel Pignot, chant / Romain Molist, piano.  Textes et chansons des deux Guerres). 

Renseignements : 38, rue au Pain, 78100 Saint-Germain-en-Laye.  Tél. : 01 34 51 05 12 (réservation conseillée).  www.saintgermainenlaye.fr





« Les Sales Mômes », nouvel opéra du CRÉA (le vingt-cinquième…), sera présenté à l’Espace Jacques-Prévert/Théâtre d’Aulnay-sous-Bois, les 1er, 2, 3, 5 et 7 octobre 2010.  Musique : Coralie Fayolle.  Livret : Isabelle Huchet.  Chœur de scène & ensemble instrumental, dir. Didier Grojsman. 

Renseignements : 85, rue Anatole-France, 93600 Aulnay-sous-Bois.  Tél. : 01 48 66 49 90.  www.lecrea.fr



©Le Créa, 2010


La 2e édition du festival « Notes d’automne », Rencontres musicales & littéraires en bords de Marne, se déroulera au Perreux-sur-Marne du 15 au 21 novembre 2010.  Onze représentations.  Directeur artistique : Pascal Amoyel.  Président d’honneur : Jean Piat. 

 Renseignements :2, rue de la Prairie, 94170 Le Perreux.  Tél. : 01 43 24 54 28.  www.festivalnotesdautomne.fr



©DR



« Hommage à Jean-Luc Idray », IPR-IA de l’académie de Grenoble, décédé en février 2010 à l’âge de 52 ans, sera rendu par l’Ensemble orchestral contemporain (dir. Ludovic Perez), le vendredi 26 novembre, à 20h00, en la Maison de la culture de Grenoble (MC2).  Au programme : AAA (Philippe Leroux), Kammerkonzert (György Ligeti), Zhedi pour violoncelle seul (Xu Yi), City Life (Steve Reich), Pièce pour chœur d’enfants, violoncelle & électronique (Robert Pascal).  Valérie Dulac, violoncelle. 

Renseignements : 04 72 10 90 40.  www.eoc.fr ou www.mc2grenoble.fr



Jean-Luc Idray ©DR


« Les Triomphes de Pauline ».  Parmi les nombreuses manifestations commémorant le centenaire de la mort de Pauline Viardot (1821-1910), sont organisés des Concerts littéraires piano/chant : le vendredi 1er octobre, à 20h45, au Théâtre du Grenier (7, rue du Général-Leclerc, 78380 Bougival.  Tél. : 01 39 69 03 03) ; le dimanche 3 octobre, à 15h00, à l’Hôpital Bretonneau (23, rue Joseph-de-Maistre, Paris XVIIIe.  Tél. : 01 53 11 18 05), des Concerts littéraires orchestre/chant : le jeudi 14 octobre, à 20h00, salle Rossini (6, rue Drouot, Paris IXe.  Tél. : 09 54 86 82 15) ; le samedi 16 octobre, à 20h30, Temple Pentemont (106, rue de Grenelle, Paris VIIe.  Tél. : 09 54 86 82 15), le Colloque Pauline, une voix féminine dans l’Europe des arts : le samedi 23 octobre, de 9h00 à 18h00, au Conservatoire international (8, rue Alfred-de-Vigny, Paris VIIIe. Tél. : 01 44 23 97 74).  Avec le concours, notamment, de Michèle Friang (historienne), Sayuri Araïda & Marianne Seleskovitch (sopranos), Olexandra Turyanska (mezzo-soprano), Sérénade Orchestra, Clément Mao-Takacs (piano).


Fichier:Pauline Viardot - Scheffer.jpeg

Pauline Viardot par Ary Scheffer


« Le Festival d’Automne à Paris » se poursuit jusqu’au 31 décembre 2010. 

Renseignements : 01 53 45 17 17.  www.festival-automne.com





« Never explain, never complain... » À compter du 1er octobre 2010, sont pensionnaires à l’Académie de France à Rome (Villa Médicis) : Claire Diterzi (auteur/compositeur/interprète & guitariste), Geoffroy Drouin (compositeur), Malik Mazzadri (flûtiste de jazz), Gilbert Nouno (compositeur).



©Villa Médicis


Jazzy Colors 2010, 8e édition du « Festival de Jazz des Instituts culturels étrangers à Paris », se déroulera du jeudi 11 au samedi 27 novembre 2010.  Seize pays participants : Allemagne, Autriche, Portugal, Roumanie, Hongrie, Québec, Finlande, Suéde, Estonie, Turquie, Corée, Pays-Bas, Japon, Slovaquie, Pologne et Serbie. 

Renseignements : www.jazzycolors.net




Les « Journées francophones en Éducation musicale » (JFREM) tiendront leur 10e édition en Suisse, du 11 au 13 novembre 2010.  Le colloque se déroulera à la Faculté de psychologie & des sciences de l'éducation de l’Université de Genève, sur le thème « La formation des enseignant(e)s de musique : Dynamiques de recherche, Analyses de pratiques ».  Le programme est à disposition sous : http://www.asrrem.ch/jfrem2010/Programme.html.  Si vous désirez participer, il est possible de s'inscrire, jusqu'au 10 octobre 2010, à l'adresse suivante : http://www.asrrem.ch/jfrem2010/Accueil.html.




Chanson Jeune public à l’Espace Cardin.  Du 26 novembre au 5 décembre 2010, se produiront : Jacques Haurogné, Henri Dès, Alain Schneider & Geneviève Laloy. 

Renseignements : 1, avenue Gabriel, Paris VIIIe.  Tél. : 01 49 29 55 59.  www.victorie-music.com


 



« L’apprentissage de la justesse vocale en musique », tel est le thème de la Journée d’étude qui se déroulera le jeudi 2 décembre 2010, à l’IUFM d’Aix-en-Provence.  Organisateurs Jean-Luc leroy et Pascal Terrien.  Communications à proposer avant le 15 octobre.  Cette Journée d’étude précédera le colloque sur « L’actualité des universaux en musique » qui se tiendra les 3 et 4 décembre, en le même Institut. 

Renseignements : 06 83 11 85 2.  je2010@orange.fr



Aix-en-Provence ©DR


« Le Mois des compositeurs » (10 novembre-7 décembre 2010) propose, à Marseille, un voyage au cœur de la création musicale.  Ouverture (10 novembre).  Compositrices de l’ailleurs (17 novembre), Les Pinceurs d’âme (19 novembre), Le rêve de l’homme-oiseau (26 novembre), Un siècle de musique (16, 23 novembre & 7 décembre), Ateliers pédagogiques de composition (17, 18 novembre), Rencontre autour de l’accordéon (30 novembre), Exposition de photos d’Agnès Mellon (16 novembre-7 décembre).  Ensemble Télémaque, dir.Raoul Lay. 

Renseignements : Cité de la musique – 4, rue Bernard-du-Bois, 13001 Marseille.  Tél. : 04 91 39 29 13.  www.ensemble-telemaque.com



©DR



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« Olivier Messiaen, le compositeur ornithologue ».  Présentation & analyses par François-Bernard Mâche, son confrère à l’Académie des Beaux-Arts.

À écouter sur : www.canalacademie.com/ida2774-Olivier-Messiaen-ornithologue.html



©DR


L’Ensemble 2e2m donnera, en 2010-2011, 58 concerts où figureront 15 créations françaises et 7 créations mondiales.  Il se produira en France, Autriche, Suisse & Russie et devrait toucher quelque 20 000 spectateurs.  Pas moins de 465 heures sont prévues pour sensibiliser de nouveaux publics. 

Renseignements : 01 47 06 17 76.  www.ensemble2e2m.fr




Musiques des territoires d’Auvergne : http://lafeuilleamta.fr



Martial Ceppe ©A. Ricros


Une ville qui sonne !  À Toulouse, 2010 sera l’année des carillons, cloches & horloges astronomiques.  Ainsi, du carillon de Saint-Sernin à l’énorme bourdon de la cathédrale Saint-Étienne, les 300 cloches de la ville sonneront au même instant pour marquer l’ouverture de la 15e édition de « Toulouse les Orgues », festival international, qui se déroulera du 7 au 17 octobre 2010. 

Renseignements : 05 61 33 76 87.  www.toulouse-les-orgues.org




« Mignonne, allons voir si la rose… », poème de Ronsard, musique de Martial Caillebotte (frère du peintre impressionniste) et... la Panhard 24 CT. 

Consulter : www.youtube.com/watch?v=8elyAI-fKxg



Gustave Caillebotte, Nu au divan


Esperamos su visita en : http://www.todotango.com




« Fryderyk Chopin.  Korzenie » (Frédéric Chopin.  Les racines).  Tel est le titre de l’ouvrage que viennent de publier, à Varsovie, Andrzej Sikorski & notre éminent collaborateur Piotr Myslakowski (cf. son article « Le milieu éducatif de Frédéric Chopin », in L’EM n°567).  Leurs recherches ont porté sur quelque 150 000 documents manuscrits en provenance de Pologne, France ou Russie.  La version anglaise du livre devrait paraître sous peu. 

 Renseignements : http://en.chopin.nifc.pl/institute/publications/other/id/1146




Musée d’ethnographie de Genève (MEG).  Archives internationales de musique populaire (AIMP) : plus de 16 000 heures de musiques.

Renseignements : bd Carl-Vogt 65, CH-1205 Genève.  www.ville-ge.ch/meg/bd.php.



MEG ©Architron, Zurich


Que (re)vive la chanson poétique ! 

 http://mondeenpoesie.blogspot.com / www.myspace.com/brigittemaillard



Brigitte Maillard ©DR


Voix enchantées : « Chœurs & solistes de Lyon/Bernard Tétu » vont se produire un peu partout en France, cette saison.  Renseignements : 21, rue d’Algérie, 69001 Lyon.  Tél. : 04 72 98 25 30.  www.solisteslyontetu.com




« Forte », logiciel de notation musicale (www.forte-notation.eu), est gratuitement téléchargeable (pour une durée de 30 jours) sur : www.listesso.com


                 


« D’une Rive à l’Autre » offre au public parisien, dans Ménage à trois (Musique classique / Chanson / Jazz), des rencontres tous les jeudis du 7 octobre 2010 au 26 mai 2011, dans deux

lieux mythiques : Petit Palais (12h30), Les Trois Baudets (20h30).  Renseignements : www.concertsdunerivealautre.com




Hervé Désarbre, organiste du ministère de la Défense, titulaire de l’orgue historique du Val-de-Grâce et directeur artistique du Chant du Monde Publishing House, illustre à son tour l’« Année de la France en Russie ».  Le 6 octobre, au Conservatoire Tchaïkovsky de Moscou : duo orgue & piano (Caroline Lupovici, piano).  Les 8 et 9 octobre, membre du jury du Concours international Edison-Denisov.  Le 10 octobre, récital dans la salle d’orgue du Musée Glinka, à Moscou.  Avant d’entreprendre une tournée dans toute la Russie, sur le thème : « Quatre siècles de musique française ».  Renseignements : www.valdegrace.org



Val-de-Grâce ©DR


Salon de la musique (3e édition) : du 19 au 22 novembre 2010, en la Grande Halle de La Villette, Paris XIXeRenseignements : 01 47 56 21 34.  www.salon-musique.com

 



Le festival Mino 2010, « musique Jeune Public », se déroulera du 26 novembre au 7 décembre 2010, à Paris, Espace Cardin.  Renseignements : 1, avenue Gabriel, Paris VIIIe.  Tél. : 01 44 61 86 93.  www.mino.fr




« Radical Musicology », journal online (en anglais) produit par l’« International Centre for Music », publie un volume chaque année.  Il fait aujourd’hui appel à contributions.  Renseignements : http://www.radical-musicology.org.uk/notes.htm




« EastBound » publie un numéro spécial : Popular Music Studies in Eastern EuropeRenseignements : http://eastbound.eu


   



Le 65e Concours de Genève (Geneva International Music Competition) est consacré au piano (président du jury : Jacques Rouvier) & au hautbois (président du jury : Maurice Bourgue).  Il se déroulera du 4 au 18 novembre 2010. 

 Renseignements : www.concoursgeneve.ch




« International Association for the Study of Popular Music ».  Cette association organise à Grahamstown (Afrique du Sud), du 27 juin au 1er juillet 2011, la « ASPM 2011 17th Biennial International Conference »Renseignements : www.iaspm.net



     


« Musicalame » est la plus grande librairie musicale lyonnaise.  Renseignements : 16, rue Pizay, 69001 Lyon.  Tél. : 04 78 29 01 34.  http://musicalame.over-blog.fr




Orchestre français des Jeunes (baroque).  Session 2010 : du 26 octobre au 4 novembre, au Grand Théâtre de Provence d’Aix-en-Provence.  Puis, en concert exceptionnel, à l’Opéra Comique de Paris, le 6 novembre.  Pour la troisième année consécutive, les jeunes musiciens seront placés sous la direction du chef d’orchestre & ténor Paul Agnew [notre photo]Renseignements : 01 56 40 49 45.  www.ofj.fr



©DR


« Playing for change » : http://vimeo.com/moogaloop..swf?clip_id=2539741




Abbaye aux Dames, saison 2010-2011.  Renseignements : 11, place de l’Abbaye, 17100 Saintes.  Tél. : 05 46 97 48 48.  www.abbayeauxdames.org



©DR


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 « Mathis der Maler » à l’Opéra Bastille.

Après Cardillac, l'Opéra de Paris va créer Mathis le peintre, autre œuvre scénique d'envergure de Paul Hindemith.  S'inspirant de la vie du peintre Matthias Grünewald, auteur du célèbre Retable d'Issenheim, celle-ci traite du thème de la condition de l'artiste face à l'incompréhension de la multitude.  Cette grande fresque revivra à l'Opéra Bastille dans la mise en scène d’Olivier Py et sous la direction de Christoph Eschenbach.  À noter qu'elle sera mise en perspective à travers une série de concerts présentant notamment des Lieder, les sonates pour alto et des quatuors à cordes de l'auteur.



Paul Hindemith, 1923 ©DR


À l’Opéra Bastille : les 16, 19, 22, 25 novembre, 1er, 3, 6 décembre 2010 à 19h00, et 28 novembre à 14h30.  Concerts : les 24 octobre (18h00), 23 et 30 novembre 2010 (20h00) à l'Amphithéâtre Bastille. 

Renseignements : 120, rue de Lyon, Paris XIIe.  Tél. : 08 92 89 90 90. www.operadeparis.fr


Jean-Pierre Robert.


42e Festival international Heinrich Schütz.

Nous vous recommandons vivement, pour vos prochaines vacances, une virée à Kassel, haut-lieu de la musique, à l’occasion des « Journées musicales de Kassel » du 42e Festival international Heinrich Schütz (du jeudi 28 au dimanche soir 31 octobre 2010) sur le thème : Heinrich Schütz et l’Europe et du « Colloque » (du dimanche soir 31 octobre au mercredi 3 novembre 2010 au matin) à l’Académie de Hofgeismar (à proximité, transport assuré), sur le même thème.  En plus, un « Chorseminar » (deux œuvres de Schütz…) est organisé, les 29 et 30 ; les chanteurs peuvent s’inscrire pour y participer et obtenir les partitions : occasions à ne pas manquer, tant sur le plan artistique que musicologique. 

Renseignements : www.kasseler-musiktage.de ou : info@schuetzgesellschaft.de



Heinrich Schütz ©DR


Édith Weber

(responsable de la Section française)


« Les Automnales du Palais impérial de Compiègne ».  Le samedi 16 octobre 2010, à 17h30, Dame Felicity Lott (soprano) & Maciej Pikulski (piano) interpréteront Schumann, Duparc et Mahler. 

Renseignements : 03 44 38 47 35.  www.musee-chateau-compiegne.fr




« Le Tango, phénomène culturel international ».  Projection de vidéos & débat, le jeudi 28 octobre 2010, de 18h30 à 20h30, en la Maison de l’Amérique latine (217, bd Saint-Germain, Paris VIIe).  Avec Claude Nama, directeur du Festival « Paris Banlieues Tango », et ses invités. 

Renseignements : 01 49 54 75 00.  www.mal217.org ou : www.festival-paris-banlieues-tango.fr




Opéra de Paris, Jeune public 2010-2011.

Opéras : L’Italienne à Alger, Le Triptyque, Les Noces de Figaro, La Fiancée vendue, Madame Butterfly, Siegfried, Luisa Miller, Kátia Kabanová, ToscaBallets : Roland Petit, Paquita, Le Lac des cygnes, Balanchine/Brown/Bausch, Caligula, Coppélia, Roméo et Juliette, Mats Ek, Rain de Keersmaeker.  Concerts : récitals, musique de chambre, Chœur de l’Opéra national de Paris. 

Renseignements : 01 40 01 19 88.  www.operadeparis.fr / jeunepublic@operadeparis.fr



Palais Garnier, le Foyer ©DR


Auditorium du Musée d’Orsay, saison 2010-2011.

L’académisme en musique (14 octobre-4 novembre 2010), Gusta  Mahler (14 janvier-31 mars 2011), Les préraphaélites (10 février-16 juin 2011), Les salons musicaux (17 mars-26 mai 2011), Les concerts de Midi Trente (5 octobre 2010-14 juin 2011), Concours avant-scène (20-21 novembre 2010), Soirées exceptionnelles (7 décembre 2010-21 juin 2011), Colloque Chopin (26-27 novembre 2010).  Sans préjudice de : Musique en famille, Activités Jeune public, Ciné-concerts, Conférences, Histoire de l’art… 

Renseignements : M’O’ - 1, rue de la Légion-d’honneur, Paris VIIe.  Tél. : 01 40 49 49 66.  www.musee-orsay.fr/fr/manifestations/musique.html




Ensemble intercontemporain.

Ouverture de la saison à la Cité de la musique, salle des concerts, le mardi 5 octobre 2010 : Mappe de Johannes Boris Borowski, Concerto pour piano & ensemble de Hanspeter Kyburz, Music for a while et La Chambre aux échos de Michael Jarrell.  Hidéki Nagano (piano) Ensemble intercontemporain, dir. Susanna Mälkki [notre photo]. 

Renseignements : 01 44 84 44 53.  www.ensembleinter.com



©DR


Les Folies-Bergère.

Soirée flamenco/jazz manouche, le samedi 9 octobre 2010, à 20h.  Avec le pianiste-chanteur Diego Amador, le guitariste Bireli Lagrène & la « bailaora » Farruca. 

Renseignements : 06 13 22 02 40.  www.lesproductionsdelessentiel.com ou www.foliesbergere.com


 


Orchestre du Gewandhaus de Leipzig.

À l’Auditorium-Orchestre national de Lyon le 13 octobre 2010 à 20h30.  Arabella Steinbacher, violon.  Herbert Blomstedt, direction.  4e Concerto pour violon, K. 218 de Mozart, 4e Symphonie (version Nowak 1878-1880) de Bruckner. 

Renseignements : 04 78 95 95 95.  www.auditorium-lyon.com



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Association « Prima la Musica ! »

Le vendredi 15 octobre 2010, à 20h30, en l’auditorium « Cœur de ville » (98, rue de Fontenay, 94300 Vincennes), un concert réunira Bruno Fontaine (piano) & Jean-Philippe Audin (violoncelle).  Sonate Arpeggione D 821 de Schubert, Sonate op.5 n°2 de Beethoven, Sonate op.6 de Barber, Le Grand Tango de Piazzolla. 

Renseignements : 01 43 98 68 33.  www.primalamusica.fr




Orchestre philharmonique de Strasbourg.

Les 28 et 29 octobre 2010 à 20h30, salle Érasme, Palais de la Musique et des Congrès, seront donnés : Élégie pour violoncelle & orchestre de Fauré, 1er Concerto pour violoncelle de Saint-Saëns, Musique funèbre pour cordes « In memoriam Béla Bartók » de Lutoslawski, Symphonie n°98 de Haydn.  Heinrich Schiff, direction & violoncelle [notre photo]. 

Renseignements : PMC - place de Bordeaux, 67000 Strasbourg.  Tél. : 03 69 06 37 00.  www.philharmonique-strasbourg.com



©Uta Süsse-Krause


Le pianiste Chick Corea à Boulogne-Billancourt.

Le mercredi 3 novembre à 20h30, au « Carré Belle-Feuille ». 

Renseignements : 60, rue de la Belle-Feuille, 92100 Boulogne-Billancourt.  Tél. : 01 55 18 54 00.  www.boulognebillancourt.com



©DR


« Obsidienne »

Cet ensemble vocal & instrumental consacrera deux concerts à Guillaume Dufay, au Musée de Cluny (5, place Paul-Painlevé, Paris Ve), les vendredi 5 et dimanche 7 novembre 2010, 19h. 

Renseignements : 03 86 66 36 94.  www.obsidienne.fr



Joueur de vièle ©DR


« Le Parvis », scène nationale Tarbes-Pyrénées.

Présentation, le mercredi 10 novembre 2010 à 20h30, du quintette du pianiste cubain Roberto Fonseca [notre photo]. 

Renseignements : 05 62 90 08 55.  www.parvis.net


   


Duo « Flammes & Co » Les guitaristes Arnaud Dumond & Vincent Le Gall se produiront, le vendredi 5 novembre 2010, à 19h30 et 21h00, au Foyer du Théâtre du Châtelet, dans des œuvres d’Albéniz, Falla, Sanz et Piazzolla. 

 Renseignements : 01 40 28 28 40.  www.savarez.com




« Voyages de vives voix » est une rencontre entre artistes professionnels, chanteurs autistes & leurs éducateurs.  Salle Gaveau, le lundi 11 octobre 2010, à 20h00.  Avec Laurent Naouri (baryton-basse), l’Ensemble vocal « À fleur de voix », la Chorale d’Al (chanteurs autistes), Catherine Boni (mezzo-soprano & chef de chœur), Stéphane Leach (pianiste), l’Ensemble Calliopée (dir. Karine Lethiec).  Extraits du film La vie d’autistes d’Olivier Segard.  Musique de Bizet, Dvořák, Leach, Mahler, Offenbach, Verdi. 

Renseignements : 01 45 43 77 58.  mgaussiat@sequenza-comprod.com




Saison Blüthner.  Le lundi 22 novembre à 20h, en l’Athénée Théâtre Louis-Jouvet (square de l’Opéra - 7, rue Boudreau, Paris IXe), la pianiste Juliana Steinbach interprètera : Gaspard de la nuit (Ravel), Études (Scriabine), Tableaux d’une exposition (Moussorgski). 

Renseignements : 01 53 05 19 19.  www.saisonbluthner.fr




©Balazs Böröcz/Pilovax Studio


« Didon et Énée », opéra d’Henry Purcell, sera donné au Théâtre Mouffetard (73, rue Mouffetard, Paris Ve), du 10 novembre 2010 au 8 janvier 2011. 

Renseignements : 01 43 31 11 99.  www.theatremouffetard.com




Francis Cousté.


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Haut


L'édition 2010 du festival de Salzbourg qui marquait le 90e anniversaire de sa création, aura brillé par son éclectisme dans le domaine de l'opéra - Mozart n'y figurant que par la reprise de Don Giovanni.  La vitalité du répertoire représenté se mesure à l'aune de sa variété, de Gounod à Berg, de Gluck à Strauss, pour l'essentiel enluminé par la sonorité unique de l'Orchestre philharmonique de Vienne, décidément un élément fédérateur du festival, et honoré de mises en scène au demeurant moins aventureuses cette fois qu'à Aix ou Bayreuth.  Côté concerts, l'originalité de la programmation demeure une caractéristique majeure.  Pour preuve une exécution enthousiasmante de Jeanne d'Arc au bûcher d’Honegger et une série de récitals vocaux consacrés aux trois grands cycles de Lieder de Schubert.



©Salzburger Festspiele/Silvia Lelli


Orfeo ed Euridice sublimé par la direction de Riccardo Muti

Riccardo Muti, qui se tourne volontiers ces temps vers le répertoire du XVIIIe, a choisi de diriger Orfeo ed Euridice de Gluck dans sa version italienne, créée à Vienne en 1762, et au demeurant pas représentée scéniquement au festival depuis 1959.  Sa battue nerveuse et suprêmement articulée met en valeur une musique à l'harmonie expressive et, en même temps, instable dans son processus dynamique.  L'acuité qu'il obtient des musiciens d'élite des Wiener Philharmoniker n'a d'égale que le raffinement sonore.  La mise en scène de Dieter Dorn fait choix d'une action qui se déroule comme un rêve, le fantasme de la perte de l'être aimé et de l'impossible réunion.  Vision onirique, d'un bel esthétisme, privilégiant une gestuelle libérée et naturelle chez les trois protagonistes et le chœur.  Des images originales enrichissent une dramaturgie claire et dépourvue d'outrance, sobrement modernisée, telles l'apparition de l'Amour parmi ses pairs, les dieux de l'Olympe, ou la démultiplication des porteurs de lyre.  Elle ménage surtout de saisissants contrastes entre la scène des Enfers, confinée, où le fourmillement des furies rageuses et autres spectres infernaux est obtenu par un effet de miroir, et le tableau des Champs Élysées, d'une clarté d'épure, offrant le vaste espace de quelque paysage idéalisé.  Un dispositif en entonnoir, outre ses vertus proprement acoustiques, permet de séparer deux univers, au premier plan l'action proprement dite, alors que dans le lointain des personnages évoluent paisiblement, comme détachés du monde réel, les Ombres heureuses.  La partie de ballet n'est pas dansée de manière académique, mais chorégraphiée en forme de pantomime, notamment au final qui présente une sorte de scène de ménage ; fin pessimiste sans doute conforme à la tradition du mythe antique, plus qu'au dénouement heureux exigé par l'esthétique de l'opéra français.



©S.F./Hermann & Clärchen Baus


Muti s'est entouré d'une distribution jeune, parfaitement aboutie.  Elisabeth Kulman, lauréate récente du prix du festival de l'Académie internationale d'été, est un Orfeo au timbre de mezzo clair, d'une sobre éloquence dans l'expression de la douleur.  Genia Kühmeier, il y a peu Pamina sous le direction du même chef, possède une voix justement corsée qui donne à Eurydice un poids que son intervention tardive dans l'action ne rend pas moindre.  L'Amour, Christiane Karg, elle aussi lauréate du Mozarteum de Salzburg, complète un trio sans faille.  Enfin les chœurs de l'Opéra de Vienne apportent une contribution aussi essentielle que vivante à cette « azione teatrale per musica ».



©S.F./Hermann & Clärchen Baus


Une bien intéressante Lulu

La nouvelle production de Lulu de Berg était présentée dans la Felsenreitschule (salle du Manège des Rochers).  Encore qu'elle commette la prouesse de ne pas utiliser les potentialités qu'offre ce lieu scénique exceptionnel de semi-plein air.  En effet, les trois rangées de loges creusées à même la roche sont dissimulées par une sorte de cyclorama noir, tandis qu'un rideau délimite une ouverture de scène à la manière conventionnelle ; dispositif qui, s'il se prive d'un environnement unique, offre au moins l'avantage d'améliorer l'acoustique d'un endroit pas toujours aisé pour les voix.  Son principal attrait réside dans la décoration créée par Daniel Richter, jeune artiste plasticien très en vue outre-Rhin, dont on pouvait d'ailleurs voir une exposition des œuvres récentes dans une galerie de la ville.  De vastes panneaux de toile peinte semi-figuratifs forment l'écrin dans lequel s'inscrit une action vécue comme un parcours initiatique.  Vera Nemirova dit s'inspirer pour sa régie d'une des deux tragédies de Wedekind, La Boîte de Pandore, qui forment sa pièce Lulu, et voit dans le personnage éponyme une figure mythique qui se situe au-delà de la morale et du cliché habituel de la femme fatale.  Sa mise en scène, un peu confuse, n'est pas toujours immédiatement lisible.  Ainsi des diverses gesticulations qui agitent l'entourage de l'héroïne au IIe acte, ou du traitement de la première scène du IIIe, qui censée se passer dans une salle de jeu, se déroule parmi les spectateurs et capte l'attention de manière factice, peu signifiante.  De même, le film muet décrivant l'arrestation, le procès et l'emprisonnement de Lulu, qui forme le centre névralgique de la pièce, est-il supprimé au profit d'une animation plus banale qu'explicative.



©S.F./Hermann & Clärchen Baus


La distribution vocale aura rarement été aussi brillante.  Patricia Petibon aurait-elle trouvé en Lulu son rôle ?  Ses dons innés pour la scène sont là exploités à leur meilleur dans un personnage aux multiples facettes.  Elle est une Lulu sensuelle, détachée, même rusée, avant d'atteindre le pathétique à l'ultime scène, dans cette étroite tanière en forme de tente, dernière étape du chemin de déchéance.  Voilà un portrait mémorable que complètent une diction irréprochable et une caractérisation vocale frôlant la perfection.  La galerie de ses soupirants est de classe : un Dr. Schön, Michael Volle, d'une formidable envergure et vocalement superbe ; deux ténors, Pavol Breslik, le peintre, et Thomas Piffka, Alwa, rivalisant d'assurance ; enfin un Schigolch, Franz Grundheber, qui contrairement à bien de ses confrères sur le retour, chante et n'ânonne pas le rôle du vieil homme à la fois père et confident.  La comtesse Geschwitz de Tanja, Ariane Baumgartner, est aussi attirante que vocalement accomplie.  Jusqu'à cette magistrale double composition du vétéran Heinz Zednik, naguère fabuleux Mime du Ring de Chéreau à Bayreuth, dans le prince et le majordome.  La direction de Marc Albrecht, à défaut d'être mémorable, tire du moins des sonorités envoûtantes des Viennois, souvent chambristes, ce qui ne messied pas en l'occurrence et rend à la musique de Berg toute sa formidable intensité.



©S.F./Hermann & Clärchen Baus


Elektra gâtée par une direction envahissante

On se demande ce qui a conduit le chef Daniele Gatti a faire choix d'une direction si bruyante dans Elektra de Richard Strauss.  Avec un orchestre d'une telle patine que les Wiener Philharmoniker est-il besoin de souligner le trait à ce point ?  Depuis le premier accord, cataclysmique fortissimo, jusqu'à l'ultime cluster ce ne sont que martèlement sonore et déluge de décibels, des cuivres en particulier ; ce que l'acoustique problématique de la grande salle du Palais des festivals amplifie à l'envi.  Les moments de lyrisme sont escamotés, telle la scène de la reconnaissance entre Elektra et Orest, jusqu'à leur faire perdre tout pouvoir d'émotion.  Plus grave, un tel traitement affaiblit le discours qu'il prive paradoxalement de relief, en gommant les nuances.  De quoi alimenter le moulin de ceux qui déplorent la pauvreté de l'inspiration du musicien et fustigent les excès et boursouflures de cette tragédie en musique.  Contre un tel mur, les voix doivent lutter.  Elles le font vaillamment.  Ainsi de Waltraud Meier, Klytämnestra, qui brûle les planches dès sa première apparition et, pour sa prise de rôle, livre une grandiose incarnation, celle d'une tragédienne confirmée tout comme dans ses portraits wagnériens.  Mais Eva-Maria Westbroek, Chrysothemis, une chanteuse pourtant habituée des tessitures exposées, n'est pas à l'aise ici.  Avec Elektra le problème est autre : Janice Baird, qui s'est fait une spécialité des emplois lourds dans Strauss et Wagner - et remplaçant à la onzième heure la titulaire - assure, certes, un rôle écrasant par sa tension constamment soutenue, mais sans panache.  Le portrait manque d'épaisseur et de charisme, donnant l'impression de banaliser une partie hors norme.  En comparaison, dans le rôle pourtant épisodique d'Orest, René Pape est autrement convaincant de présence et d'aisance vocale.



©S.F./Hermann & Clärchen Baus


La mise en scène de Nikolaus Lehnhoff, qui s'inscrit dans le dispositif décoratif d'une sorte de bunker percé de nombreux orifices et d'une immense porte figurant l'entrée du palais royal de Mycène, fuit l'artifice de la relecture.  Au-delà de la peinture de caractères bien trempés, elle s'attache à sonder ce qui les lie ou les conduit à s'affronter.  C'est chez Elektra, le désir effréné de vengeance du meurtre du père, pour Chrysothemis l'aspiration au bonheur de la femme mue par le désir de maternité et de vraie tendresse, et en Klytämnestra la fragilité qui perce chez un être de pouvoir un moment submergé par le doute.  Cette relation triangulaire entre une mère et ses deux filles, ossature d'une pièce articulée de manière symétrique autour du noyau central que constitue la confrontation entre Clytemnestre et Électre, est unique à l'opéra.  Elle est explicitée avec justesse, sans pathos inutile.  Le spectacle en acquiert une indéniable cohérence.  Le résultat aurait été davantage convaincant si un orchestre envahissant n'avait à ce point accaparé l'attention.



©S.F./Hermann & Clärchen Baus


Roméo et Juliette ou le grand spectacle

La reprise de Roméo et Juliette de Gounod, monté en 2008, confirme les qualités d'un spectacle fastueux destiné à attirer un large public, de plus alléché par la présence d'une star russe assoluta, Anna Netrebko.  Le hic est que la dame n'assurait pas toutes les représentations au grand dam de ses admirateurs, tel ce couple qui, ouvrant le programme, découvrait stupéfait le nom de sa remplaçante.  Mais cela n'était pas de nature à amoindrir la qualité musicale de la soirée qui réside essentiellement dans la direction flamboyante de Yannick Nézet-Séguin.  Le jeune Canadien, avec lequel il faut compter désormais, à la tête d'un Orchestre du Mozarteum transfiguré, offre une lecture d'une vraie justesse expressive et intensément dramatique.  Dès la formidable entrée en matière du prélude, on est happé par l'opulence sonore orchestrale qui ne se départira plus ensuite, notamment à l'heure des grands ensembles concertants.  Les pages lyriques brillent tout autant par leur gracile poésie comme la scène du balcon ou le prélude du Ve acte, évocation du sommeil de Juliette.  Partout opère la séduction émanant d'une partition riche en trouvailles d'écriture et débordant d'invention mélodique.  La mise en scène de Bartlett Sher est sans surprise et ne se perd pas dans quelque ré-interprétation.  Elle use judicieusement, bien que modestement, des possibilités du vaste plateau de la Felsenreitschule et utilise un décor minimaliste où le chatoiement des costumes apporte l'essentiel de la couleur médiévale et de subtils éclairages, la variété des climats.  Sa direction d'acteurs est sobre mais efficace et ne manque pas d'animation dans les courses-poursuites haletantes et les combats épiques dignes des romans de cape et d'épée.  Quelle belle idée aussi d'avoir paré le centre du plateau, lors de la scène de la chambre, d'un immense drap blanc dans lequel, après avoir bu le breuvage narcotique, Juliette s'enveloppe, à la fois robe de mariée et linceul, pour affronter les noces redoutées.



©S.F./Hermann & Clärchen Baus


De celle-ci, Nino Machaidze propose une figure à l'insouciance un brin forcée et d'une vraie fausse ingénuité.  Le lyrisme passionné de ce rôle exigeant, elle l'assume de sa voix ample et lumineuse qu'agrémente une quinte aiguë assurée.  Elle entraîne dans son sillage le jeune ténor Stephen Costello qui, pour ses débuts au festival, campe un Roméo chaleureux plus que fougueux.  Un peu sur la réserve dans son premier air, il libèrera ensuite un timbre tout en finesse.  Leurs duos ont la force de la conviction, celle qu'ont les amants de Vérone d'affirmer leur indestructible fidélité mutuelle et finalement leur volonté de vivre malgré leur double suicide.  De sa solide voix de basse chantante, le Frère Laurent de Mikhail Petrenko se détache aisément du reste d'une distribution somme toute banale, qui rencontre quelques difficultés avec la langue de Molière - obstacle contre lequel les chœurs de l'Opéra de Vienne savent ne pas buter.



©S.F./Hermann & Clärchen Baus


Une exécution flamboyante de Jeanne d'Arc au bûcher

Dans ce même lieu magnifique de la Felsenreitschule, était donnée en version de concert Jeanne d'Arc au bûcher qui scella la collaboration entre le compositeur Arthur Honegger et le dramaturge Paul Claudel.  Dans cet « oratorio dramatique », créé en 1938, les auteurs ont voulu non pas tracer une chronique de la vie de la sainte, mais bien mettre l'accent sur un certain nombre d’événements qui lui ont donné sa signification.  Sur le bûcher, Jeanne se remémore sa vie en remontant peu à peu dans le passé par une sorte de phénomène de dilatation de la pensée.  À ses côtés, Frère Dominique est l'accoucheur de sa conscience.  Le cheminement intérieur, Jeanne le vit au fil de ces courtes scènes où se mêlent le pittoresque et le burlesque, voire même le grotesque : le procès, mené par des animaux fantasques, la capture à Compiègne ou comme aux cartes on joue à qui perd gagne ; mais aussi une infinie tendresse : le souvenir des deux cloches, Catherine et Marguerite, qui ont rythmé sa vie de croyante, l'évocation de l'enfance au son d'une chanson triste.  La musique d’Honegger épouse soigneusement le dire claudélien pour en libérer le souffle profond, se coulant exactement dans sa remarquable architecture.  Au point que le musicien soulignera dans ses Écrits avoir agi auprès de l'écrivain « comme un simple collaborateur ».



©S.F./Silvia Lelli


Le rôle de Jeanne est confié à une actrice, et c'est Ida Rubinstein, une personnalité marquante de l’entre-deux-guerres, qui le créa.  De sa voix aux couleurs mystérieuses, Fanny Ardant le fait sien.  Elle présente une jeune fille à la fois fragile et forte, souriante et angoissée, exaltée et interrogatrice.  D'abord précautionneuse, elle s'enhardit progressivement jusqu'à atteindre l'incandescence lors de la délivrance libératrice.  Elle possède la juste intuition de cette belle déclamation en musique.  Tout comme Jean-Philippe Lafont, Frère Dominique, et parce qu'il est lui-même chanteur (tout comme le créateur du rôle, Jean Périer ; alors qu'il est souvent dévolu à un acteur) ; un rôle grandi par de sobres et nobles accents.  Auprès d'eux, une pléiade de chanteurs de valeur, comme le ténor Gilles Ragon ou l'alto Marie-Claude Chappuis, assume les diverses parties chantées, souvent épisodiques.  Avec son Orchestre symphonique de la Radio autrichienne, Bertrand de Billy fait rayonner ces pages géniales que parcourt une vraie émotion, distillant les traits d'une orchestration originale à la petite harmonie, auxquels un instrument comme les Ondes Martenot apporte un supplément d'espace.  Les chœurs du Wiener Singverein, augmentés du chœur d'enfants du festival, montrent une réelle habileté à manier la belle langue de Claudel.


Des concerts adornés par de grandes voix

La Mozart Matinée est un type de concert incontournable à Salzbourg.  Un public de connaisseurs s'y presse.  Celle du 14 août était dirigée par le jeune chef français Jérémie Rhorer, formé à l'école de William Christie et de Marc Minkowski, et déjà nanti d'une flatteuse réputation.  Le programme comprenait la suite de ballet tiré de l’opéra Idomeneo, la symphonie KV 385, dite Haffner, et des airs d'opéras.  Prise dans des tempos nerveux, la suite de ballet a fière allure, brillante et volubile.  Mais la manière manque de couleurs dans les passages assagis, la gavotte par exemple.  L'impression se confirme dans la symphonie où on eût aimé plus souple impulsion.  Si les mouvements extrêmes, l'agressif allegro initial en particulier, offrent une rythmique volontariste, le nécessaire apaisement fait défaut à l'andante avant un menuetto un brin trop vigoureux.  Dommage que ces débuts n'aient pas connu plus d'aura.  Sans doute le chef, habitué à diriger des formations jouant sur instruments anciens, caractérisées par leur extrême flexibilité, dont le sien, « Le Cercle de l'Harmonie », a-t-il été surpris par la manière quelque peu rigide et neutre du Mozarteumorchester.  La partie du concert consacrée aux arias réservait d'autres félicités et Jérémie Rohrer s'y montrait d'ailleurs plus à l'aise dans le discours orchestral soutenant une chanteuse avec laquelle il a déjà collaboré, au disque notamment.  La soprano allemande Diana Damrau s'est acquis une enviable notoriété dans Mozart, mais aussi ailleurs - une merveilleuse Sophie dans Le Chevalier à la Rose à Baden-Baden.  Elle aborde avec aisance les airs légers et brillants de rôles comme Rosina de La Finta Semplice, Aspasia de Mitridate ou Ilia d'Idomeneo.  Elle démontre aussi qu'elle peut passer, au concert du moins, à des emplois autrement plus lourds comme celui d'Elettra du même opéra, dont le spectaculaire air final laisse éclater une fureur non contenue.  En bis, le grand air de Donna Anna au IIe acte de Don Giovanni, qui se situe dans une veine aussi tendue, confirme un talent dramatique avéré, même en l'absence de la scène.



©S.F./Silvia Lelli


Dans cette même salle du Mozarteum, le célèbre baryton allemand Matthias Goerne interprétait La Belle Meunière de Schubert, premier d'une série de trois concerts consacrés aux grands cycles de lieder de son auteur, et accompagnés par Christoph Eschenbach.  Il faut saluer le choix de ce lieu, et non de l'un des grands vaisseaux du Palais des festivals, et, pour le chanteur, le fait d'avoir ainsi renoncé à une plus avantageuse capacité d'auditeurs.  La proximité de l'interprète avec le public est, eu égard aux dimensions relativement modestes de l'auditorium, un atout considérable.  Dans ce cycle où Schubert a mis tant de lui-même et où fleurissent les thèmes chers à son cœur, de la fuite du temps, de l'errance, de l'amour refusé, ou encore du recours bienfaisant à la nature, le drame affleure constamment sous un texte d'allure souvent anodine.  Car la vingtaine de pièces qui le composent, de forme strophique, dans l'esprit du Volkslied, sont autant de petites scénettes que caractérisent la simplicité du vocabulaire et la spontanéité des sentiments exprimés : la tendresse, la colère, la douleur, la joie.  Il s'en dégage un sentiment d'improvisation qui est une caractéristique foncière de la poésie de Wilhelm Müller dans laquelle s'inscrit idéalement la musique de Schubert.  L'unité profonde de l'ensemble n'est aucunement affectée par la diversité des mélodies.  Bien au contraire.  Et souvent le climat d'un lied en vient à se prolonger dans le lied suivant.  La manière de Matthias Goerne est sincère et généreuse.  C'est celle d'un conteur qui, comme peu, fait corps avec la musique et le poème pour s'identifier au « Je » romantique.  L'étendue de la voix tient du phénomène : un timbre de baryton corsé qui batifole dans le registre de ténor - celui-là même prévu par le compositeur - ou s'appesantit dans le grave le plus affirmé.  L'art de modeler l'intensité est tout autant remarquable, du pianissimo le plus éthéré au forte viril dont l'éclat emplit l'auditorium.



©S.F./Silvia Lelli


L'accompagnement de Christoph Eschenbach, qui faisait un retour remarqué dans un festival où il se produisit il y a bien longtemps comme pianiste, est plus que cela.  Car la partie de piano, comme toujours chez Schubert, dépasse le rôle de simple suiveur.  Elle fait un tout avec le chant, de sa rythmique soutenue, celle de la marche, ou de sa fluidité pour imiter la course limpide de l'eau.  Sensible et paré d'infinies nuances, le jeu du pianiste s'imbrique idéalement dans le chant.  Le public, rapidement tombé sous le charme, réserve aux interprètes une standing ovation amplement méritée.


Jean-Pierre Robert.

 


Fermant le ban des grands festivals d'été, après Aix, Munich, Bayreuth et Salzbourg, le Festival de Lucerne « Im sommer » n'est pas de moindre intérêt.  Sur les bords riants du lac des Quatre Cantons, il a même un attrait supplémentaire, d'ordre touristique.  La proximité de celui-ci n'est pas un vain mot puisque le vaste et bel auditorium, conçu par Jean Nouvel, y est situé immédiatement au bord.  La manifestation suisse est depuis toujours centrée sur la musique symphonique et le récital, dont il attire les plus grandes figures.



©Lucerne Festival


Claudio Abbado dirige Mahler : une immense expérience musicale

Les concerts du Lucerne Festival Orchestra sous la direction de Claudio Abbado sont une sorte de référence car ils réunissent deux atouts majeurs.  L'orchestre d'abord, composé de musiciens d'élite d'autres phalanges européennes (Berliner Philharmoniker, Concertgebouw Amsterdam, Tonhalle Zürich...) et de solistes réputés (la clarinettiste Sabine Meyer, la celliste Natalia Gutman...), réunis autour du noyau central du Mahler Chamber Orchestra.  Malgré leur nombre impressionnant, leur sonorité reste d'une étonnante limpidité.  Le chef ensuite, considéré à ce stade de sa carrière comme une icône, qui reconnaît qu’« à travers la maladie sa vie a gagné une nouvelle légèreté et en intensité ».  Ce qui conduit ses interprétations vers une vision toujours plus épurée.  Pour son second programme, le chef italien avait choisi la IXe Symphonie de Mahler, poursuivant en cela un cycle entamé en 2003.  La Neuvième, achevée en 1909, mais créée en 1912 par Bruno Walter, après la mort du compositeur, est un peu à part des autres car elle sonne comme un adieu.  Trois parties composent cette formidable composition en forme d'arche : le vaste premier mouvement, les deux morceaux centraux et l'adagio conclusif.  Dans l'andante comodo, dont un Alban Berg admiratif souligne que tout ici « repose sur le pressentiment de la mort », la lutte entre réminiscence d'un passé heureux et certitude de l'accomplissement du destin domine une matière en fusion : fièvre, exaltation en des mélodies haletantes, alternent avec des passages d'atmosphère lugubre, à la coulée mystérieuse.  Le scherzo qui sonne comme un retour sur terre, marqué « dans le tempo d'un landler nonchalant, un peu pataud et très vigoureux », manie l'humour comme Mahler aime à le faire.  La danse en est au cœur avec une manière de valse presque moqueuse qui vire au grotesque.  Le rondo-burleske prolonge ce climat de son frénétique fugato d'une écriture virtuose, comme tourbillonnante.  La lecture de Claudio Abbado est proprement révélatrice.  Ainsi en est-il de tel détail original d'orchestration, qui est proprement démasqué, de tel passage d'une redoutable complexité, rendu totalement lisible, ou encore de la rupture a priori insaisissable de la transition entre deux phrases, qui retrouve une manière d'évidence.  Et combien sont saisissants les contrastes entre forte surpuissants et passages chambristes !



©Lucerne Festival/Peter Fischli


L'adagio final se place sur un autre plan.  Non pas parce que ce mouvement lent intervient en dernière position, ce qui n'est pas nouveau, mais bien parce que Mahler nous fait ici pénétrer dans un monde différent, musical et métaphysique.  La matière sonore se désagrège progressivement, devient plus ténue sur un rythme de plus en plus lent, comme s'épuisant.  Claudio Abbado le souligne avec emphase, demandant à ses musiciens de jouer à la limite de l'audible et accentuant les silences entre les ultimes séquences.  Le discours acquiert une dimension quasi mystique, au-delà de l'expression, comme transfiguré.  On a rarement entendu ce passage sonner de la sorte, pour traduire ce que Jean Matter appelle « l'arrachement d'un adieu qui se prolonge et ne peut pas finir ».  Un long moment de silence prolonge cette exécution considérable, jusqu'à ce que la main gauche ouverte du chef se referme lentement.  L'ovation debout d'une salle entière salue l'événement ; décidément une « expérience musicale » hors du commun.



©Lucerne Festival/Priska Ketterer


Chopin et Ravel sous les doigts inspirés de Jean-Yves Thibaudet

Le récital de piano qui devait voir se produire Hélène Grimaud, « artiste étoile» de l'édition 2010 - mais empêchée ce soir-là, eu égard à un calendrier trop chargé - était donné par son confrère Jean-Yves Thibaudet.  Ce pianiste français, si étrangement absent des salles parisiennes, est un habitué de Lucerne.  Connu pour son éclectisme, atypique parmi ses pairs puisqu'aussi à l'aise dans le classique que le jazz, il fait indéniablement partie des grands.  Le programme réunissait Chopin, Liszt et Ravel.  Les deux Nocturnes op.9 (1 et 2) de Chopin introduisent d'emblée ce qui caractérise sa manière : une élégance aristocrate, une vraie clarté, un refus du pathos et de la virtuosité d'estrade.  L'impression se confirme dans les deux Études op.25 (1 et 3), au jeu limpide et naturel, ou avec la Valse brillante op.34 dont le célèbre lento, auquel se sont essayés bien des amateurs, est joué avec la simplicité du découvreur.  Non que le romantisme soit absent.  Témoin l'exécution prestissimo de la Grande Valse brillante op.34 dont le vivo offre quelque chose de presque théâtral.  Au milieu de ce parcours Chopin, la longue Ballade n°2 de Liszt installe un climat on ne peut mieux opposé.  Car est-il musique plus dissemblable que cette course épique, emplie de visions extravagantes, bardée de traits dans le grave sonnant comme des raclements, qui tient en haleine malgré ses brusques ruptures ?



©Lucerne Festival/Priska Keterrer


Le bonheur est plus encore complet en seconde partie avec Ravel.  Thibaudet est ici chez lui.  La musique française est son jardin secret.  La Pavane pour une infante défunte possède exactement cette « sonorité large » exigée par Ravel.  Miroirs, fruit des recherches du maître sur la sonorité, le rythme et l'harmonie, comme pour « transposer le réel dans une autre matière et une autre lumière » (Marcel Marnat), propose une succession de tableaux contrastés : le lyrisme ésotérique, quasi moderne de Noctuelles, la vision marine plus vraie que nature de Une Barque sur l'Océan, le grotesque sec et saccadé de Alborada del gracioso, aubade d'un vieux beau à quelque égérie espagnole, le climat de désolation qui pare Oiseaux tristes, ou encore l'atmosphère lugubre qui perce dans La Vallée des Cloches, annonciatrice de Gaspard de la nuit.  La maitrise de l'atmosphère est chez Thibaudet étonnante.  En bis, il n’offre pas moins que le vaste Intermezzo op.118 de Brahms, un compositeur vers lequel il aime à revenir, le Prélude pathétique, mais virtuose en diable, du pianiste russe Shura Cherkassky, enfin la première Gnossienne de Satie, un musicien dont il s'est fait une spécialité de l'atmosphère nonchalante mais si suggestive.


Jean-Pierre Robert.


 




 

Échos de jardins et forêts

C’est dans un décor agreste que s’achevait la saison des festivals, aux Serres d’Auteuil.  Grâce à la politique de commandes pratiquée par Anne-Marie Réby, les vertes pousses d’œuvres nouvelles viennent s’épanouir chaque année sous les chaudes verrières ; l’intégration systématique d’une pièce contemporaine aux programmes les plus éclectiques constitue la marque distinctive de ce festival à dominante pianistique, et devrait être chaleureusement soutenue par les bailleurs de fonds au lieu de se voir exposée aux restrictions budgétaires, comme il est à craindre pour les prochaines saisons.  En ce 29 août 2010, la flûtiste Juliette Hurel et la pianiste Hélène Couvert parcouraient la musique française du XXe siècle, avec une incursion dans le suivant, grâce à une création de Christian Lauba.  Une sincère chaleur humaine colore la sensibilité des deux partenaires, et incite à passer sur des choix contestables (la réduction par Gustave Samazeuilh du Prélude à l’après-midi d’un faune) pour s’attacher au pimpant de leur interprétation dans la Sonate de Poulenc (même si l’on a maintes fois entendu celle-ci modelée avec des contours plus pénétrants) ou à l’exubérance du Chant de Linos d’André Jolivet.  Râgatala de Christian Lauba masque, sous ce composé de facteurs mélodiques et rythmiques venus d’Orient, une obsession que d’autres pièces du même compositeur (pour violoncelle, pour saxophone) cultivaient également : retrouver la malléabilité de diction musicale que réussissait J. S. Bach sous couvert d’une pulsation apparemment et imperturbablement univoque.  Une extrême virtuosité s’ensuit, qui entraîne les duettistes à de folles courses selon un unisson que l’on n’entendit qu’approximativement, de même que l’on n’entendit guère les multiphoniques et les subtones de la flûte qui doit se fondre subtilement dans la « registration » ainsi composée avec les timbres du piano.  Toute une dimension d’invention coloristique au service d’une chatoyante poésie, inscrite dans l’art du compositeur, reste ainsi à découvrir lorsque l’interprétation aura été plus longuement travaillée, et l’on touche là au problème de ces accostages entre instrumentistes aux vies internationalement dispersées, sacrifiant l’approfondissement qu’exige une partition nouvelle très élaborée.




Au pôle opposé du répertoire, l’Orchestre philharmonique de Radio France se montrait pleinement réceptif à l’expérience des esthétiques germaniques que lui insufflait Eliahu Inbal (17 septembre 2010).  Quelques pages de Schumann (extraites de la musique conçue pour accompagner une récitation du poème de Byron, Manfred) introduisaient le concert dont la deuxième partie était réservée à Richard Strauss, pour une exaltante interprétation de Eine Alpensinfonie : on sait combien cette partition de 50’00 peut s’avérer roborative si on la dirige à traits épais ; ce soir-là, le pinceau de l’artiste éclaira de scintillements cascadant, d’éclats de soleil, d’ombres sylvestres, de violents orages, la fresque née d’une romantique contemplation de la nature alpestre.  Richard Strauss la composa en ne reniant rien de son savoir dramatique ni de son héritage wagnérien, ce qui ressortait de cette interprétation avec une somptuosité sonore que l’on n’aurait guère attendue de l’Orchestre philharmonique, ne serait-ce qu’il y a quelques années.



Eliahu Inbal ©DR


Ces piliers du répertoire allemand encadraient Marc Monnet, dont on découvrait la première du vaste Concerto pour violoncelle « Sans mouvement, sans monde ».  Les premières pages de l’œuvre font jaillir un univers de timbres fascinant, qui témoigne d’une maîtrise affirmée du maniement de l’espace dans la palette orchestrale.  L’attention s’éveille, persuadés que nous sommes d’entrer dans une partition qui nous emmènera au Pays des Merveilles de l’imagination sonore.  Malheureusement, le souffle s’épuise vite, et le compositeur ne persévère guère dans cette voie.  Attardons-nous sur cette phrase profonde du compositeur expliquant son titre : « Sans monde vient plutôt de l’idée d’absence.  Quoi projeter (un mouvement ?) dans un monde qui ne l’écoute pas.  Je sens ce monde comme en « absence » de l’homme ».  Mais cette suggestion de l’absence se traduit par une partie de soliste (volontairement) inintéressante, réduite à un anonymat frustrant pour le soliste (Marc Coppey), au point que la cadence dévolue à celui-ci, sans aucun ressort la personnalisant, achève de déconnecter l’intérêt qui était déjà retombé depuis un moment.  Quelques instants inspirés du dernier mouvement ravivent le regret des attentes entrevues lors des premières pages.  Nous envahit alors le sentiment que le compositeur soit passé à côté d’une grande œuvre.


Retour à l’esprit français pour le concert inaugural de la saison de l’Ensemble orchestral de Paris (21 septembre 2010), qui ne présentait pas un déroulement très… orchestral : en effet, un plateau de stars nous promenait à travers diverses combinaisons instrumentales.  L’éclatant duo pianistique Brigitte Engerer/ Boris Berezovsky apportait son étoffe… orchestrale à la version non-orchestrale de La Valse de Ravel.  Puis nous pénétrions d’une oreille indiscrète dans le Jardin des Plantes rendu au Carnaval des Animaux, sous la conduite du texte jubilatoire de Francis Blanche savoureusement distillé par une Catherine Frot passée maître(sse) dans l’art de glisser avec un air de fausse naïveté les jeux de mots dignes de l’Almanach Vermot dont le comique a parsemé ses commentaires.  Les deux pianistes surent jouer la comédie pédante qui valut à leur corporation d’être intégrée au zoo de Camille Saint-Saëns, Henri Demarquette fut un cygne de la plus noble élégance, le longiligne Eckhard Rudolph, un pachyderme aux évolutions chorégraphiques, mais tous les solistes de l’EOP ne sont pas à même de parader sans chef.  Celui-ci, Joseph Swensen [notre photo] apparaissait après l’entracte pour diriger avec une fraîcheur d’aurore la Pastorale d’été d’Arthur Honegger (il s’agit encore des Alpes, mais vues d’un autre œil que par Richard Strauss, et en 7’00 !).


Joseph Swensen

©Éric Richmond


L’actuel conseiller artistique de l’EOP (on souhaite qu’il en devienne le directeur musical de plein droit) sut marier avec souplesse et énergie les qualités de grâce et de puissance rythmique qui se conjuguent dans le Concerto n°1 pour violoncelle et la Symphonie en la mineur de Saint-Saëns.  Henri Demarquette, qui aime se sentir libre de chanter d’un archet spontané, pouvait ainsi s’exprimer dans un esprit de complicité quasiment « chambriste ».  Nous reparlerons du disque qui accompagne cette ouverture de saison, avec les mêmes interprètes.

Sylviane Falcinelli.



Journée du Patrimoine à l’Oratoire du Louvre.  Création de Mosaïque pour flûte & orgue de Jean-Dominique Pasquet.

L’Oratoire a ouvert ses portes, le samedi 18 septembre 2010, et les visiteurs ont bénéficié de visites guidées, de brèves conférences par les pasteurs Marc Pernot et James Woody, ainsi que d’interventions à l’orgue.

À 11h00, Jean-Dominique Pasquet, organiste titulaire de l’Oratoire du Louvre, en présence de Jacqueline Cellier, a rendu un vibrant hommage au regretté Alexandre Cellier (1883-1968) - organiste de l’Église réformée de l’Étoile de 1910 à 1967 -, en interprétant des extraits de : Églises et Paysages (1943), dont Mystique, avec un coloris spécifique ; Noël provençal, très allant et de caractère populaire ; Vendredi Saint, plus nostalgique et impressionnant ; Ascension, pièce très expressive, et Carillon, page de virtuosité faisant appel à la puissance de l’instrument.

À 15h00, la deuxième partie a fait honneur aux mélodies de Psaumes multiséculaires, issues de la Réforme et exploitées par des compositeurs contemporains : M.-L. Girod (Ps. 69), avec des accords puissants. Jean-Dominique Pasquet a interprété, en connaissance de cause, son Psaume 92, bien construit, avec un mouvement central plus calme, plus doux, et surtout, son Psaume 130, Au fort de ma détresse…, si profondément ressenti, si lourd d’émotion, où tristesse et angoisse rejoignent spiritualité et intériorité.  Henri Gagnebin (1886-1977) était représenté par son Psaume 23 et Pierre Segond (1913-2000) par son Psaume 68, avec des accords plaqués massifs, terminant cette séquence en apothéose.

À 16h00 et 17h00, les deux dernières parties ont été assurées avec le concours de l’excellente flûtiste Isabelle Hureau qui, avec le talent qu’on lui sait, a d’abord interprété des pages classiques de Chr. W. Gluck, J. S. Bach, entre autres.  Elle s’est imposée par sa belle ligne mélodique, son beau phrasé, sa musicalité et a bénéficié de l’accompagnement discret et sensible à l’orgue.  Enfin, la création de Mosaïque (cf. L’ÉM, Lettre d’information n°20, juin 2008) de J.-D. Pasquet, en sa version pour flûte & orgue, a été un événement très remarqué.  Cette œuvre comprend six pièces brèves : Légende, où la flûte dialogue avec l’orgue ; Arabesque, où la flûte volubile s’élance ; Plainte, de caractère sombre, avec un ostinato à l’orgue, puis une musique décorative sur laquelle plane la mélodie ; Thème varié ; Canzonetta, sur un thème mélodique quelque peu modal se déroulant dans le calme et contrastant avec les accords incisifs alla bravura du Final, où les deux instrumentistes ont associé leur solide technique pour aboutir à un point d’orgue massif et percutant.  Cette audition exceptionnelle a conclu la participation oratorienne à cette Journée du Patrimoine : devoir de mémoire oblige.



Jean-Dominique Pasquet ©DR

Édith Weber


Reprise de L’Italienne à Alger au Palais Garnier.  Gioacchino ROSSINI : L'Italiana in Algeri.  « Dramma giocoso » en deux actes.  Livret d'Angelo Anelli.  Marco Vinco, Vivica Genaux, Lawrence Brownlee, Alessandro Corbelli, Jaël Azzaretti, Cornelia Onciou, Riccardo Novaro.  Orchestre et Chœur de l'Opéra national de Paris, dir. Maurizio Benini.  Mise en scène : Andrei Serban.



©OnP/E. Mahoudeau


Le Palais Garnier ouvre sa saison avec L'Italienne à Alger, dans la mise en scène conçue par Andrei Serban en 1998.  Rossini a qualifié de « dramma giocoso » cette turquerie qui vire à la farce débridée.  Il y développe une verve inépuisable, un sens du comique que rien ne semble devoir arrêter, basés sur des archétypes éprouvés : une belle et coquette manipulatrice, italienne de surcroit, un barbon infidèle et finalement berné, un prétendant ardent sous les traits du jeune esclave niais, un maître-Jacques malgré lui qui sait maîtriser le cours des événements.  La production est brillante, clinquante même, avec ses changements de décor à vue et ses éclairages suggestifs.  On y voit le hammam du Bey Mustafà - empruntant ici les traits d'un Cheikh cousu d'or - peuplé de sa suite masculine ventripotente, la salle capitonnée de son palais, pourvue d'objets hétéroclites, le naufrage du navire des Italiens, gigantesque paquebot façon Titanic, dont les rescapés sont livrés à des corsaires patibulaires, etc.  Mais la régie, bavarde de mille gadgets, n'a plus l'acuité qui doit donner son débit irrésistible à la comédie, tout comme son charme.  Ainsi de la cérémonie d'intronisation en « Pappataci », sorte de Mamamouchi péninsulaire, par cette formule irrévocable « Mange et tais-toi !», qui compose un final un peu terne, n'étaient les roulements de mécaniques des corsaires alentour.



©OnP/Mirco Magliocca


Même sentiment quant à la direction d'orchestre de Maurizio Benini qui se borne à assurer.  On reste sur sa faim quant aux effets de surprise qui doivent parer les grands ensembles, tel le septuor des onomatopées concluant le premier acte.  Quelques décalages aussi laissent perplexes.  La distribution est inégale.  Si Alessandro Corbelli, qui connaît toutes les ficelles du métier, se tire aisément d'affaire dans la figure bouffonne de Taddeo, et son jeune collègue Riccardo Novaro prête au factotum Haly un beau flair vocal, le Mustafà de Mario Vinco manque d'épaisseur comme de puissance.  Les péripéties truculentes que vit notre potentat oriental paraissent bien falotes, et la performance plutôt fade dans le grave ou dans le haut du registre.  Lawrence Brownlee possède, certes, le vrai timbre du ténor rossinien, mais semble plus préoccupé de la réussite des morceaux de bravoure que concerné par la caractérisation de l'amoureux Lindoro.  Vivica Genaux campe une Isabella tout en malice, d'une pétulance un brin retenue ; ce qui  n'affecte nullement une prestation vocale impressionnante : beau timbre moiré de contralto, fluidité de la ligne de chant et vocalises irréprochables.

Jean-Pierre Robert.


Trilogie Mozart-Da Ponte au Théâtre des Champs-Élysées : un Cosi fan tutte bien décevant.  Dramma giocoso en deux actes, K. 588.

Idée originale et économique que de redonner, à quelques années d’intervalle (la précédente prestation datant de 1995, au Théâtre municipal de Tourcoing), la célèbre trilogie de Mozart, fruit de sa collaboration avec le librettiste Da Ponte.  L’Atelier lyrique de Tourcoing et le Théâtre des Champs-Élysées (Jeanine Roze Production) redonnaient les trois opéras : Les Noces de Figaro (1786), Così fan tutte (1790) et Don Giovanni (1787) avec le même directeur musical (Jean-Claude Malgoire), le même orchestre (la Grande Écurie & la Chambre du Roy), le même metteur en scène (Pierre Constant), le même décorateur (Roberto Platé), les mêmes interprètes comme l’excellent et talentueux Nicolas Rivenq dans le rôle de Don Alfonso.



Personnages féminins avec Guglielmo ©DR


Così fut indéniablement la reprise la moins réussie de cette coproduction distillant plus l’ennui que l’amour : une direction musicale souvent absente, poussive, manquant de cantabile, un manque de précision des ensembles vocaux, un décalage fréquent entre orchestre et chanteurs, une distribution très hétérogène en qualité, une mise en scène morose et sans intérêt, une scénographie indigente, malgré les beaux éclairages de Jacques Rouveyrollis, en furent assurément la cause.  Dans cette ronde de couples qui se font et se séparent au gré des circonstances, les personnages féminins, Fiordiligi (Rachel Nicholls) et Dorabella (Lina Markeby), sont apparues bien décevantes, mal adaptées aux rôles, à l’exception de la remarquable Despina (Anne-Catherine Gillet) tout en finesse vocale et espièglerie scénique.  Les personnages masculins furent plus convaincants, le ténor Robert Getchell (Ferrando) et le baryton Joan Martin Royo (Guglielmo) tant dans la voix que dans le jeu.  Après des Noces en demi-teinte, souhaitons tout le bonheur possible à Don Giovanni qui s’annonce très prometteur avec une somptueuse distribution.  À suivre…



Despina et Dorabella ©DR


Gustav Mahler : Symphonie n°8 dite « des Mille ».  Salle Pleyel.  Orchestre, chœur & solistes du Théâtre Mariinsky, Choir of Eltham College, dir. Valery Gergiev.

La Huitième Symphonie de Gustav Mahler, dite « des Mille », constituait la première étape de l’intégrale que propose, cette saison, Salle Pleyel, le chef Valery Gergiev à la tête de l’Orchestre du Théâtre Mariinsky de Saint-Pétersbourg (Symphonies n°1, 2, 4, 5, 6, les 11, 12, 13 décembre) et du London Symphony Orchestra (Symphonies n°3, 7, 9, 10, les 26, 27, 28 mars 2011). 



©Fred Toulet/Pleyel


Composée en 1906, créée en 1910 par le compositeur lui-même, véritable « Messe », atypique par son organisation, monumentale par ses dimensions, organisée en deux grands mouvements essentiellement vocaux, rappelant l’oratorio, la Huitième Symphonie réalise une impossible et suprême fusion entre foi et humanisme, sacré et profane, marquant une fois de plus la quête unificatrice de l’œuvre mahlérienne.  Quête qu’il poursuivra dans la fièvre de la création artistique, l’ouvrage entier prenant forme en quelques éclairs fulgurants : Veni Creator et hymne à la création par Éros.  Pour le premier mouvement, c’est l’hymne latine Veni Creator Spiritus de Hrabanus Maurus, archevêque de Mayence au IXe siècle, qui s’impose à lui, œuvre chorale dans la tradition des grands oratorios.  Le second mouvement, plus romantique, reprend la scène finale du Deuxième Faust de Goethe : amour rédempteur et culte marial.  La Huitième Symphonie constitue un ensemble parfaitement cohérent, bien que constituée de deux parties aussi dissemblables que possible, de par les textes, de par les langues, de par les cultures, de par les époques très éloignées.  L’unité découle de la similitude des matériaux thématiques (Goethe avait d’ailleurs traduit le Veni Creator en allemand) mais aussi du fait que l’œuvre entière exprime une seule et même pensée, symphonie dispensatrice de joie, perçue par Mahler comme une œuvre récapitulative : « les autres symphonies étant des préludes à celle-ci ».



©Fred Toulet/Pleyel


Œuvre très ambitieuse qui propose une nouvelle cosmogonie : « Il ne s’agit plus de voix humaines mais de planètes et de soleils qui tournent », la dimension cosmique de l’œuvre et l’espoir qu’elle offre à l’humanité lui confèrent une allure quasi messianique, unique dans le cycle des symphonies.  Après le monumental Veni Creator, saisissant de puissance dans le déploiement des chœurs et de l’orchestre, Valery Gergiev sut faire montre de toute l’intelligence de son interprétation, par une gestique minimale et précise, préservant à tous moments la cohésion de l’ensemble, sachant mettre en évidence toute la subtilité de l’œuvre, celle d’une quête rédemptrice oscillant entre joie et douleur, certitude et doute, recueillement et exaltation.  Évitant l’effet de masse, soulignant tour à tour les sonorités des différents pupitres de l’orchestre, ainsi que l’excellence des chœurs et la qualité vocale des solistes du Mariinsky, il a réussi à nous donner une version étonnamment claire et convaincante de cette symphonie rarement donnée en concert.  Un début remarquable…



©Fred Toulet/Pleyel


« Les Journées romantiques » : un festival au bord de l’eau.

David Selig, pianiste et directeur artistique des « Journées romantiques » a su créer autour de son festival (musiques de chambre et vocale), un climat particulier : un lieu original, la péniche Anako, amarrée quai de Seine, au bord du canal de l’Ourcq, une ambiance décontractée de festival d’été, une programmation ambitieuse associant des musiciens confirmés et de jeunes talents à découvrir, une qualité artistique sans faille, enfin, une proximité et une disponibilité des musiciens assez inhabituelles, tous éléments expliquant largement le succès de ces Journées.  Pour une des dernières soirées, David Selig (piano) et Gary Hoffman (violoncelle) étaient associés dans un programme regroupant les Variations concertantes et la Sonate n°1 de Mendelssohn, l’Introduction & Polonaise brillante et la Sonate pour violoncelle & piano de Chopin.  La sonate de Mendelssohn écrite pour son frère Paul, de style classique, celle de Chopin dédiée au violoncelliste Auguste Franchomme, plus audacieuse et complexe, des œuvres au climat bien différent, parfaitement interprétées, avec nuance et virtuosité, riches en couleurs et émotions, laissaient transparaître un évident plaisir de jouer ensemble.  Bref, une belle soirée et un beau festival à reconduire l’an prochain.



Gary Hoffman ©DR


L’Orchestre de Paris et Paavo Jarvi : un début prometteur.

Paavo Järvi, nouveau directeur musical de l’Orchestre de Paris, succédant à la tête de cette phalange parisienne à Charles Munch, Karajan, Solti, Barenboim, Bychkov, Dohnanyi, Eschenbach, avait choisi pour le concert inaugural de la saison, un programme audacieux, voire ambitieux, qui sonne déjà comme un manifeste et annonce clairement le changement d’orientation, du moins en ce qui concerne la programmation, ce qui ne manquera pas de nous réjouir.  La Péri de Paul Dukas (1865-1935), composée en 1911, créée en 1912 au Théâtre du Châtelet sous la direction du compositeur, Kullervo de Jean Sibelius (1865-1957) composée en 1890, créée en 1892 à Helsinki sous la direction du compositeur, deux œuvres au climat fort différent, ayant pour points communs de s’appuyer toutes deux sur des légendes et d’avoir été « mal aimées » par leur auteur.  Dukas menaça de brûler sa partition et Sibelius refusa toute exécution publique de cette œuvre avant sa mort.  Deux œuvres difficiles, rarement jouées, exigeantes, nécessitant un parfait accord et une cohésion sans faille entre l’orchestre et son chef.  Paavo Järvi, droit dans son maintien, voire un peu rigide, sobre dans sa direction, avec sa gestique ample et précise a su réussir cet audacieux pari, nous gratifiant de bout en bout d’une remarquable interprétation, claire, sensible et intelligente, sachant mettre en avant toutes les nuances, les couleurs et la très belle sonorité de l’orchestre.


Paavo Järvi ©Sasha Gusov


La Péri fut un moment d’intense poésie, de sensualité et de charme, alors que Kullervo faisait déferler sur la Salle Pleyel le souffle de l’épopée fantastique, du mystère et du drame, culminant avec l’intense dramaturgie des 3e et 5e mouvements où retentissaient les voix des excellents solistes (Soile Isokoski et Juha Uusitalo) ainsi que celles des magnifiques chœurs d’hommes (Chœur national d’Estonie et Chœur de l’Orchestre de Paris), sombres et inquiétantes comme la légende elle-même.  Un programme qui reçut l’adhésion totale des musiciens et du public.  Un succès plein de promesses.


Éblouissante reprise d’Eugène Onéguine à l’Opéra Bastille.  Scènes lyriques en trois actes et sept tableaux (1879).  Musique de Piotr Ilyitch Tchaikovski.  Livret de Constantin S. Chilovski d’après un poème de Pouchkine.  Orchestre et Chœur de l’Opéra national de Paris, dir. Vasily Petrenko.  Mise en scène de Willy Decker.  Olga Gurykova (Tatiana), Ludovic Tézier (Onéguine), Joseph Kaiser (Lenski), Nadine Denize (Madame Larina), Alisa Kolosova (Olga), Nona Javakhidze (Filpievna), Gleb Nikolski (Grémine), Jean-Paul Fouchécourt (Monsieur Triquet).



©OnP/Charles Duprat


Reprise à l’Opéra Bastille de l’ancienne production de 1995, déjà reprise en 2003, dans la désormais célèbre et efficace mise en scène de Willy Decker.  Une nouvelle reprise dont le succès repose sur l’intelligence de la mise en scène, la qualité de la direction d’orchestre et un casting vocal sans faille, à l’exception du très attendu Ludovic Tézier dans le rôle-titre.  La mise en scène minimaliste de Willy Decker s’avéra toujours aussi efficace faisant appel à une scénographie extrêmement limitée, à des éclairages raffinés, peuplée de symboles, libérant un espace imaginaire où peuvent s’exprimer toutes les émotions et tout l’aspect psychologique des personnages de ce drame intimiste.  La direction d’orchestre de Vasily Petrenko participa, elle aussi, grandement au succès de cette nouvelle production, claire, ardente, déroulant une lecture particulièrement intelligente de l’œuvre, toujours à l’écoute des chanteurs, faisant souffler, tour à tour, la glace et le feu sur le plateau de l’Opéra Bastille, sachant utiliser les qualités de l’orchestre pour magnifier tout le lyrisme de la partition.



©OnP/Charles Duprat


En ce qui concerne les voix, Olga Guryakova, habituée du rôle de Tatiana, ainsi que Joseph Kaiser dans le rôle de Lenski furent, indéniablement, les grands triomphateurs de la soirée, par leur voix magnifiques et leur jeu convaincant.  Ludovic Tézier, à l’inverse, campa un Onéguine décevant manquant de charisme et de passion, par une attitude statique, voire empruntée, chantant, heureusement, mieux qu’il ne joue.  Le reste de la distribution ne souffrait aucun reproche, un trio féminin remarquable, un facétieux Monsieur Triquet et un émouvant Grémine, plein de compassion et d’amour.  Une très belle soirée et une ovation du public bien méritée.


Patrice Imbaud.



Noces à Saint-Léon…

Bonheur d’avoir pu assister, le dimanche 26 septembre 2010, dans la salle archi-comble du Théâtre Saint-Léon (Paris XVe) à aussi décoiffante représentation du chef-d’œuvre de Mozart !  Avec une parfaite économie de moyens, Rémi Gousseau conduisait sa phalange de virtuoses, auxquels s’accordaient - pour les ensembles de jeunes paysans et paysannes – de joyeux membres de l’excellente maîtrise du lycée Franklin/Saint-Louis de Gonzague.  Mais aussi et surtout – surprise dans un si modeste théâtre ! - une distribution de rêve, et ce jusque dans les rôles secondaires.  Avec, notamment, Fabienne Conrad (sublime Comtesse dans la cavatine Porgi, amor…), Marie Planinsek (adorable et mutine Suzanne), Nicolas Brooymans (altier mais profondément émouvant Almaviva), Guillaume Vicaire (délicieux contre-ténor dans Chérubin) et, last but not least, l’époustouflant Philippe Brocard [notre photo], le plus extraordinaire Figaro que nous ayons entendu – voix d’une beauté et d’une puissance exceptionnelles, alliée à une truculence scénique qui mit le public en joie.  Voilà un chanteur que devraient bientôt s’arracher les plus grandes maisons d’opéra !  Mise en scène et costumes étaient également remarquables.  L’enchantement des spectateurs - fort jeunes pour la plupart - faisait plaisir à voir.



©DR

Francis Cousté.


 




Nos vieilles chansons.  Illustrations de Jean-Adrien Mercier.  Arrangement musical de Charles Dumont.  Strasbourg, Éditions du Signe (alex@editionsdusigne.fr).  Vol. I.  2009, 60 p. 18,50 €.  Vol. II. 2010, 55 p. 18,50 €.

Dans sa Préface, Jean de La Varende rappelle l’impact de la chanson d’autrefois.  Cette édition, associée à des illustrations dans des couleurs pastel typiques du siècle passé, est accompagnée d’arrangements avec accompagnements de piano faciles, et de quelques commentaires explicatifs.  C’est tout un passé révolu qui revit à travers ces chansons qui ont fait leurs preuves à travers les siècles : Au clair de la lune, La Mère Michel, Le Roi Dagobert, Le furet du bois joli, Alouette, Il était un petit navire… et tant d’autres.  Les deux volumes sont un modèle du genre.  Ils s’imposent par leur excellente gravure musicale, leur lisibilité et leurs illustrations attrayantes.  Ces vieilles chansons, sans ambage, chantées par tant de générations, faciles à mémoriser, ne pourraient-elles retrouver une place dans l’enseignement musical actuel, par respect envers notre patrimoine musical populaire ?


     

Édith Weber.


MUSIQUE VOCALE

Valéry AUBERTIN : Es kommt der neue Tag… poème de Friedrich Hölderlin, pour chœur à 4 voix mixtes a cappella (extrait des Madrigali op.9).  « Musique vocale », éditions Europart-Music (www.europart-diffusion.com).  7 p.  6,50 €.

Organiste et compositeur, Valéry Aubertin (°1970) nous livre ici - sur un poème d’Hölderlin, Der Frühling (Le printemps) - un chœur éminemment mélodique, volontiers homorythmique, dans des tessitures moyennes.  Sans grande difficulté.


Valéry AUBERTIN : Hälfte des Lebens (Moitié de la vie), poème de Friedrich Hölderlin, pour une voix seule (extrait des Madrigali op.9).  « Musique vocale », éditions Europart-Music (www.europart-diffusion.com).  2 p.  4,50 €.

Sans accompagnement, ce solo de quelque 3 minutes (s’étendant sur quasiment deux octaves) comporte de constantes modifications agogiques et sauts de tessiture.  Pour interprètes aguerris.

       


PIANO

David PEARL & Marc ROZENBAUM : Exercices de piano pour les NulsFirst Editions (www.editionsfirst.fr).  1 livre + 1 CD.  23 x 27,5 cm, 256 p. avec reliure spirale  19,90 €.

Conçu par David Pearl (de l’université de Denver, pianiste, compositeur & arrangeur), voilà le très complet et judicieux complément au Piano pour les nuls.  Cahier excellemment traduit et adapté par Marc Rozenbaum.  En cinq parties (18 chapitres) : Comment faire travailler les doigts / Pour avoir des mains puissantes, souples et rapides / La participation des bras et du corps / Intégration et indépendance / La partie des Dix (10 danses pour le piano, 10 grands compositeurs et les exercices qu’ils nous ont laissés).  Le CD-Rom comporte les fichiers audio nécessaires à la réalisation des exercices du livre.  Un tout nouvel « in-dis-pen-sable » !




PIANO À 4 MAINS

Hermann REGNER : Teddy Music, 10 pièces faciles pour piano à 4 mains.  23,1 x 30,3 cm, 24 p.  ill. n&b.  Schott (www.schott-music.com) : ED 20832.  12,95 € (H.T.)

Élève de Carl Orff, Hermann Regner (1928-2008) fut un professeur réputé.  Le présent album comporte 10 joyeuses pièces écrites pour, à la fois, l’élève (de 1re ou 2e année) et son professeur.  Teddy, le nounours conducteur, fait aussi de la balançoire, danse, rêve, raconte des histoires… Délicieux !




Julia SUSLIN (Compilées par) : Pièces pour piano à quatre mains, vol. 1.  23,1 x 30,3 cm, 132 p.  Belaieff (www.belaieff-music.com) : BEL 752.10.  22,95 € (H.T.)

De difficultés progressives (facile à avancé), cette anthologie de 81 morceaux à 4 mains (avec indications de doigtés) sera un utile complément à toute méthode de piano.  Elle comprend des chansons populaires, des pièces originales aussi bien que des arrangements de pièces de compositeurs d’époques et styles variés (Mozart, Haydn, Beethoven, Schubert, Moussorgski, Tchaïkovski…).  Une remarquable sélection.




VIOLON

Pete COOPER : American Old Time Fiddle Tunes98 pièces traditionnelles pour le violon.  23,1 x 30,3 cm, 24 p.  CD inclus (TT : 78’39).  Schott (www.schott-music.com) : ED 13236.  17,95 € (H.T.)

La plupart des tunes originaires des Appalaches (Kentucky, Virginie, Caroline du Nord, Géorgie, Mississipi, Texas…) sont ici notés sur portée, avec leurs chiffrages.  Répertoire initié par les esclaves afro-américains avant la guerre de Sécession et adopté par les musiciens blancs dans leurs minstrel shows (déguisés en musiciens noirs).  Comme dans les « sessions », les airs sont ici regroupés en fonction de leur tonalité ; sont en outre indiqués chiffrages d’accords et coups d’archet.  Le CD a été enregistré par Pete Cooper soi-même.  Une formidable anthologie !



Francis Cousté.


CHANT

Franz SCHUBERT : Die schöne Müllerin op.25. Édité par Walther Dürr.  Urtext des Neuen Schubert-Ausgabe.  Bärenreiter : BA 9117.

On ne peut que se réjouir de posséder une édition aussi remarquable de ce cycle si représentatif de l’art de Schubert.  Le recueil comporte une copieuse préface retraçant la genèse de l’œuvre, donnant également toutes les indications concernant cette nouvelle édition. Le texte de chaque lied est donné en allemand et en anglais à la suite de cette même préface.  Enfin suivent les pièces elles-mêmes, d’une parfaite lisibilité. Voilà manifestement une édition de référence.




Franz SCHUBERT : Winterreise op.89.  Édité par Walther Dürr. Urtext des Neuen Schubert-Ausgabe.  Bärenreiter : BA 9118.

On retrouve la même présentation et les mêmes qualités dans cette édition du Voyage d’Hiver publiée selon un principe identique : à la fois une édition critique, mais une parfaite lisibilité pour l’exécution. Ajoutons qu’autant pour ce recueil que pour le précédent, le prix est particulièrement attractif.




PIANO

Gérard MEUNIER : Jeux de doigts – Playing fingers.  Petites études faciles pour le piano.  Lemoine : 28879 HL.

Deux partis pris tout à fait intéressants : faire découvrir au jeune pianiste toute l’étendue du clavier, et l’initier dès le début à une utilisation méthodique et raisonnée de la pédale forte.  On connaît par ailleurs les qualités de compositeur de l’auteur : de la musique avant toute chose !




Richard PHILLIPS : Trois fois deux, pour piano à 6 mains.  Combre : C06659.

Les œuvres originales pour piano à six mains ne sont pas légion.  On peut citer deux pièces de Rachmaninov… Sinon, il faut avoir recours aux transcriptions.  Voilà pourquoi on ne peut que se réjouir de voir enfin écrites, pour cette formation, sept petites pièces progressives, sans grande difficulté et abordables très tôt par nos jeunes pianistes, mais fort intéressantes musicalement.  Souhaitons que l’auteur ne s’arrête pas en si bon chemin…




Germain COGNITO : Exercices de style pour piano.  Delatour : DLT1722.

Présenté par l’auteur même comme une récréation dans son travail de compositeur, ces Exercices de style, courts pastiches de dix-neuf auteurs allant de Domenico Scarlatti à André Riotte, ont été écrits pour la petite-fille du compositeur, étudiante disposant de peu de temps pour jouer de son instrument, afin de lui donner le goût de découvrir des auteurs et des styles qu’elle ne connaissait pas forcément.  Le niveau de ces pièces s’échelonne d’assez facile à moyen.  Souhaitons qu’elles donnent à tous les pianistes l’envie et le goût de faire de même…




ORGUE

Pierre COGEN : Laetare Jerusalem.  Ouverture pour le dimanche de mi-carême.  Pour grand-orgue.  Combre : C06661.

Que voilà une pièce réjouissante, et pas seulement pour Jérusalem.  Écrite dans la grande tradition de la musique liturgique, elle peut constituer une remarquable ouverture pour ce quatrième dimanche de carême.  Construite à la fois sur le début de l’introït de la messe grégorienne et sur le ton du psaume de ce même introït, elle déploie ces thèmes en variations plus éclatantes les unes que les autres.  À la fois savante, sans concession, mais profondément lisible, elle transmet à la fois toute la tradition liturgique ainsi que la modernité de ce compositeur et organiste, toujours jeune malgré ses bientôt quatre-vingts ans.





Michel ESTELLET-BRUN : L’œuvre d’orgue, vol. 1.  Avec CD.  Delatour : DLT1800.

Ces quatre courtes pièces, souvent issues d’improvisations, sont bien dans la lignée des maîtres de l’auteur, Jean Langlais, Gaston Litaize et Pierre Cochereau.  Elles raviront l’organiste liturgique, mais surtout l’organiste tout court.  Elles sont techniquement abordables et d’une grande beauté.  Pour s’en convaincre, il suffira d’écouter le CD enregistré par l’auteur sur l’orgue Stoltz-Dargassies de Saint-Joseph des Nations, à Paris.




GUITARE

Patrice JANIA : Westernity.  Pièce pour guitare.  Lafitan : P.L.2043.

Cette pièce qui synthétise l’ensemble des acquis de fin de Premier cycle est présentée par son auteur comme « un voyage au pays de la musique country, un hymne au berceau de la guitare picking ».  Pleine d’entrain et de bonne humeur, elle ne peut que séduire le jeune guitariste.




Patrice JANIA : De terre et de toile.  Pièce pour guitare.  Lafitan : P.L.2092.

Là encore, le compositeur, guitariste bien connu, nous présente lui-même son œuvre.  « De terre et de toile, comme son nom l’indique, est un hommage à un couple d’amis – elle sculpteur, lui peintre – évoquant avec fougue et passion l’univers puissant et poétique qui émane de leur œuvre ».  On ne serait mieux dire pour caractériser cette œuvre forte mais relativement difficile (niveau Deuxième cycle).




TOUS INSTRUMENTS MÉLODIQUES

Jeff GARDNER : Shapes.  10 études intervalliques pour instrument seul.  HL Music : 28856 H.L.

Il nous a fallu créer une rubrique spéciale pour ce recueil destiné à « tous instruments mélodiques ».  On peut y inclure le piano…  Les pièces sont basées sur une libre variation de motifs.  Elles sont destinées à développer une grande variété dans le traitement du son, la dynamique, l’articulation et le phrasé, bref à susciter autant la maîtrise instrumentale que la créativité.  Ces formules ne sont pas « tonales » ou « atonales » mais ouvertes à tous les styles, du baroque à aujourd’hui.




ALTO

Charlotte LAPEYRE : Les Animaux malades de l’alto.  20 pièces pour alto & piano pour le 1er cycle en 4 volumes. Vol. 1. Combre : C06671.

Nous avons présenté le deuxième volume de cette collection le mois dernier.  Destiné au Premier cycle, on ne s’étonnera pas que ce volume commence par nous présenter « Thibault l’escargot ». On y trouve les mêmes qualités de musicalité et d’humour que dans le volume déjà présenté. L’auteur dédicace ce volume « à mes élèves qui se reconnaîtront » !




VIOLONCELLE

Frédéric BORSARELLO : Pas de vacances, Monsieur l’Archet.  Fresque instrumentale pour violoncelle & bras droit solo.  Delrieu : GD 40 020.

Attention, il ne s’agit pas d’un recueil d’exercices mais d’une œuvre véritable mettant en jeu, sur les cordes à vide, toutes les possibilités de jeu traditionnelles ou contemporaines avec l’archet et/ou la main droite.  Deux parties dans cette fresque : « Marche » et « Au temple ». Malgré l’absence de main gauche, cette pièce demande un violoncelliste déjà averti.




Lucien GUERINEL : Suite en quatre pour deux violoncelles.  Combre : C06684.

Cette suite comporte quatre mouvements, trois dans un tempo plutôt calme, et un quatrième aux rythmes endiablés.  Né en 1930, ce compositeur, à la fois autodidacte par certains aspects mais doté d’une solide formation, nous propose une œuvre résolument contemporaine par son écriture et son discours.




CONTREBASSE

Florian GODARD : Question de style… pour contrebasse & piano.  « Dans le style de Maurice Ravel ».  Combre : C06665.

Cette œuvre en deux mouvements, destinée au début du Troisième cycle, fait explicitement référence au Quatuor de Ravel et à son premier thème.  Très poétique, elle met particulièrement en valeur le sens musical des deux interprètes, la partie de piano ayant une place importante.  On pourrait parler de petite sonate.  L’auteur écrit : « dans le style de Ravel », on pourrait dire également : dans l’esprit de ce compositeur.




FLÛTE TRAVERSIÈRE

Isabelle ORY : TE KE, TE KE TE.  Méthode de double et triple coup de langue à la flûte traversière.  Van de Velde : VV287.

L’auteur conseille d’utiliser cette méthode dès la fin du Premier cycle ou au début du Second, de façon à donner à l’élève les outils techniques pour interpréter les pièces abordées à ce niveau.  La préface donne les conseils nécessaires pour que le travail de cette technique soit d’abord au service de la musique.




CLARINETTE

Hyacinthe KLOSÉ : 2e Solo op. 10, pour clarinette & piano.  Révision : Sylvie Hue.  Combre : C06670.

Disons d’abord un mot d’Hyacinthe Klosé, qui succéda à son maître au Conservatoire en 1838 et qui contribua, avec le facteur Louis Auguste Buffet, à l’adaptation du système Boehm à anneaux mobiles à la clarinette.  Auteur d’une méthode qui rencontre encore un certain succès, il l’est aussi de pièces de genre pour la clarinette dont fait partie ce Deuxième Solo.  Cette pièce de bravoure, qui ne manque ni de charme ni de panache, a été révisée par Sylvie Hue sur l’édition originale.  Musicalité et vélocité de l’instrumentiste sont mises à l’épreuve pour un résultat certes un peu « rétro » mais bien réjouissant.




Jean-Marc MORIN : Deux pièces en son-relief… pour clarinette sib & piano.  Delatour : DLT0843.

Ces deux pièces, de niveau moyen à supérieur, sont d’une écriture résolument contemporaine.  Elles demanderont une grande complicité d’écoute et de compréhension entre le pianiste, partenaire à part entière, et le clarinettiste, notamment dans les séquences rythmiques libres (semi-aléatoires).  Ce ne sont pas seulement des pièces pédagogiques, mais aussi de concert.




SAXOPHONE

Richard PHILLIPS : Sérénade pour un duo.  Saxophone alto & piano.  Combre : C06677.

Écrite pour le Troisième cycle, niveau supérieur, cette Sérénade comporte cinq mouvements.  Après un « Prélude » calme et chantant, arrive un « Dancing » au rythme de samba.  Lui succède un « Nocturne » lent et méditatif au moins pour le saxophone, car le piano l’accompagne d’arabesques chatoyantes.  Suit une « Soirée tropicale » au rythme chaloupé.  Puis c’est un « Final » presto avec de nombreux changements de mesure qui se termine dans fortissimo tout à fait tonique.  Cette Sérénade pleine de charme et de vie constitue une œuvre à part entière qu’on espère entendre souvent ailleurs que dans les conservatoires, même supérieurs.




Timothy HAYWARD : 10 petites pièces d’écriture contemporaine pour saxophone alto solo.  Delatour : DLT0806.

Ce jeune auteur, à la fois saxophoniste classique et de jazz, en même temps que redevable d’une double culture française et américaine, nous propose ici des pièces elles aussi à mi-chemin de ces deux sensibilités sur les plans harmonique, rythmique et structurel.  La difficulté va de moyen à assez difficile.  On appréciera le charme et la beauté qui se dégagent de cet ensemble.




SAXHORN, EUPHONIUM, TUBA

Christian MANEN : Pavane et Saltarelle pour euphonium & piano.  Combre : C06688.

Présentée avec les parties pour euphonium en ut et sib, cette pièce de niveau moyen enchaîne une Pavane où piano et euphonium dialoguent dans un discours contrapunctique et une Saltarelle endiablée.  On connaît assez les qualités d’écriture de Christian Manen pour qu’il ne soit pas besoin de souligner la valeur musicale et pédagogique de cette pièce.




André GUIGOU : Tubamania pour saxhorn basse/euphonium/tuba & piano.  Lafitan : P.L.1963.

André Guigou a écrit de nombreuses pièces pour petits ensembles et orchestres d’harmonie ainsi que des pièces à vocation pédagogique.  Celle-ci a beaucoup de charme et d’entrain et permettra à l’instrumentiste déjà expérimenté de donner toute la mesure de sa musicalité et de sa vélocité.




Rémi MAUPETIT : Entr’acte pour saxhorn basse/euphonium/tuba & piano.  Lafitan : P.L.2079.

Bien sûr, ce titre fait penser à Erik Satie…  Telle quelle, cette pièce aux accents parfois faussement tragiques est loin d’être facile, mais l’instrumentiste (niveau fin de 2e cycle) sera récompensé de ses efforts par la richesse expressive de cette courte pièce et l’humour qui s’en dégage.




PERCUSSIONS

Sébastien CALCOEN, Michel NIERENBERGER : Timbali’stick pour 3 ou 4 timbales & piano.  Lafitan : P.L.2013.

Cette pièce, qu’on jouera de préférence à quatre timbales, est à la fois mélodique et rythmique, pleine de contrastes : elle met à l’épreuve toutes les possibilités du jeune timbalier, notamment dans la coda laissée à un solo de timbale.  La partie de piano est également intéressante et sans grande difficulté.




Thierry DELERUYELLE : Dadouf pour timbales & piano. Lafitan : P.L.1950.

Destinée à deux timbales, cette pièce, plus facile que la précédente, voit se succéder un allegro très tonique et un peu sombre, un adagio plus apaisé et se termine par un retour au tempo primo.  Elle possède un intérêt musical certain.




MUSIQUE DE CHAMBRE

Ivan BELLOCQ : Le tombeau d’Olivier Greif pour piano, violon, alto & violoncelle.  Delatour : DLT1202.

Écrite en hommage à son maître, Olivier Greif, mort à cinquante ans, cette pièce atypique est une commande du Théâtre du Châtelet, dédiée au Quatuor Kandinsky.  On ne peut résumer ici la préface qu’Ivan Bellocq donne lui-même à son œuvre.  Mais il est indispensable de s’en pénétrer si l’on veut interpréter cette pièce.  L’une de ses particularités est qu’à la fin du second mouvement, le pianiste ferme le couvercle de son instrument pour signifier la mort prématurée d’Olivier Greif et ne fait ensuite que quelques interventions sur les cordes seules.



Daniel Blackstone.


 

 





Michelle BIGET-MAINFROY : La Musique à l’épreuve des mots.  Écrits croisés de France et d’Allemagne à l’époque romantique.  Symétrie, 2010, 17 x 23,8 cm, 236 p., ill. n&b.  32 €.

Voici un ouvrage appelé à conquérir une audience bien au-delà du champ musicologique.  En effet, au fil d’une chronologie minutieusement comparée entre écrits de tous ordres, Michelle Biget construit une véritable histoire des mentalités aboutissant à dégager les mutations d’une pensée esthétique depuis le XVIIIe siècle jusqu’au cœur du XIXe.  On voit la conquête du véhicule sensible le disputer à l’observation scientifique, et le discours sur la musique, d’une décennie à l’autre, nous enseigne l’esprit qui met en branle l’acte créateur autant que sa réception.  L’étude de certains écrivains ou critiques s’avère fondamentale (E.T.A. Hoffmann, Berlioz, Schumann, Wilhelm von Lenz, Delphine de Girardin, etc.), mais l’élaboration d’un livret d’opéra ou les regards sur la musique de plasticiens éclairent aussi la place dévolue à notre art dans l’expression de phénomènes historiques.  L’enseignement de la musique ouvre sur la conception de l’éducation, donc sur le débat concernant les dangers de l’émotion libérée, avec les connotations sexuelles (donc dangereuses pour la morale bien-pensante) que cela sous-entend.

Connaissant l’importance des racines et de la « bifurcation » - si l’on ose écrire – imprimée aux mots composés en allemand pour étayer tout concept philosophique ou esthétique, on apprécie hautement que les textes d’auteurs germaniques soient donnés, parallèlement à leur traduction française, dans leur langue originale et commentés avec les mots-clés de celle-ci.  De rigoureuses références bibliographiques accompagnent ce travail majeur, que l’on relira souvent.





Jacques BONNAURE : Saint-Saëns. Préface de Jean-François Heisser.  « Classica », Actes Sud, 2010.  10 x 19 cm, 200 p.  18 €.

Il n’est guère facile, en peu de chapitres, de raconter une si longue vie, de décrire un si lourd catalogue.  L’esprit de synthèse, doublé d’un style fluide, grâce auquel Jacques Bonnaure réussit son pari impose ce petit volume comme la plus sage introduction à la personnalité complexe de Saint-Saëns.  L’objectivité de l’auteur emprunte les voies d’un humour de bon aloi, prenant ainsi une distance pertinente avec les polémiques et pointant tous les arguments qui campent judicieusement le personnage dans le contexte de son époque.  Les descriptions des œuvres dégagent quelques traits essentiels, la discographie oriente efficacement le mélomane, la préface de Jean-François Heisser, au ton personnel, apporte une touche émue.

Paru l’année précédente, le livre de Philippe Majorelle, au titre prétentieux et jamais justifié, Saint-Saëns, le Beethoven français (Séguier/Atlantica, 15 x 21 cm, 157 p., 18 €), aux phrases sommairement construites (sans parler des trop nombreuses négligences éditoriales !), apportait certes quelques notations musicales supplémentaires (encore qu’émaillées d’erreurs), mais sans la mise en perspective critique ni l’ordonnancement biographique qu’accomplit Jacques Bonnaure.

On aurait juste souhaité qu’un aspect méconnu, et si révélateur des replis secrets de Saint-Saëns, soit mis en relief de part ou d’autre : l’écrivain, promenant son esprit à travers les thèmes et les genres les plus divers.  Par ailleurs, on s’étonne qu’aucun de ces livres, non plus que celui, plus conséquent et plus fouillé, de Jean Gallois (Mardaga, 2004), ne fasse état de la liaison par laquelle Saint-Saëns, après la mort de ses deux enfants et la rupture avec sa femme, avait, sinon reconstruit un semblant de vie affective, du moins donné le jour au fils qui devint le célèbre magistrat Nussy Saint-Saëns.  Attendons maintenant la somme monumentale que nous promet, chez Fayard, le plus éminent spécialiste de Saint-Saëns, Yves Gérard.





Messiaen, the theologian.  Ouvrage collectif (Yves Balmer, Peter Bannister, Sander van Maas, Karin Heller, Douglas Shadle, Vincent P. Benitez, Robert Fallon, Andrew Shenton, Stephen Schloesser, Nigel Simeone, Robert Sholl, Luke Berryman, Cheong Wai Ling).  Ashgate (www.ashgate.com), 2010, 16 x 24,5 cm, 290 p., ill. n&b, ex. mus.  £60.

L’éditeur britannique Ashgate a entrepris de sectionner en sujets dominants une série de livres sur Messiaen : on avait eu ainsi Oiseaux exotiques, après Music, Art and Literature (2007), System of signs (2008), et nous recevons maintenant le versant religieux.  La compétence de chacun des contributeurs permet de resituer le très catholique compositeur dans les débats théologiques de son temps, d’étudier ses lectures (et le Thomisme auquel adhérait Messiaen), le choc des cultures que représenta son « avant-gardisme » au sein de milieux plus prédisposés au conservatisme, la « sainte naïveté » qui imprégnait son tempérament aussi bien que son mysticisme.  Des parallèles avec divers écrivains (T.S. Eliot, Maritain, Claudel) approfondissent la conception esthétique résultant de l’expression de la foi.  L’accueil critique des œuvres d’inspiration religieuse produites par Messiaen est aussi examiné.  La Messe de la Pentecôte et les Sept Haïkaï font l’objet de développements analytiques auxquels on se référera sans réserve.  Ainsi se construit, investigation après investigation, une manière très polymorphe de cerner le cheminement de Messiaen parmi les évolutions artistiques et philosophiques du siècle.




Guy SELVA : Une artiste incomparable, Blanche Selva, pianiste, pédagogue, musicienne. Association Blanche Selva (www.blanche-selva.com / associationblselv@wanadoo.fr), 2010, 16 x 24 cm, 272 p. ill.  CD de Blanche Selva jouant Franck, Bach, Déodat de Séverac.  30 €.

Après les Actes de colloque publiés par Symétrie, qui cernaient les relations entre la pianiste et les grandes figures musicales qu’elle fréquenta, voici une biographie très complète, richement documentée, nourrie de références, de notes, d’annexes soigneusement établis, et luxueusement imprimée.  Contrairement à ce que pourrait laisser craindre le titre un peu ronflant (un grand artiste se doit – par définition – d’être incomparable, et bien d’autres « incomparables » peuplent – par bonheur – l’histoire des arts), le portrait établi par un petit cousin de l’artiste ne manque pas d’objectivité, et les opinions de Blanche, lorsque cette fidèle de Vincent d’Indy, d’Albéniz et de tant d’autres, manque de discernement sur Ravel ou R. Strauss, ne sont point masquées.  Le portrait psychologique de cette femme enthousiaste, animée d’une foi profonde en Dieu et en son art, se dessine au fil des nombreux écrits et lettres qu’elle a laissés.  N’étant point pianiste de profession (il ne s’aventure guère à une étude des principes techniques de sa pédagogie), Guy Selva laisse le soin aux témoins du temps d’esquisser le jeu d’une musicienne que l’on peut entendre grâce aux émouvants documents joints au livre : traversant la vétusté des sources (des 78 tours Columbia de 1929), la fascinante musicalité des interprétations de Blanche Selva (en rien datées, même dans Bach !) nous atteint, et la rondeur subtilement modulée de sa sonorité charnue nous conduit à nous rallier –allons, allons, ne rechignons pas ! - au qualificatif d’« incomparable ».




Sylviane Falcinelli.


Viviane NIAUX (Ouvrage coordonné par) : George Onslow.  Un « romantique » entre France et Allemagne.  Éditions Symétrie, en collaboration avec le Palazzetto Bru Zane, Centre de musique romantique française.  408 p.  75 €.

Comme son nom ne l'indique guère, George Onslow (1784-1853) est un compositeur français, d'ascendance anglaise par son père.  S'il a côtoyé aussi bien Mendelssohn que Berlioz, il « semble avoir traversé son siècle sur la pointe des pieds ».  Car il était homme discret et aimait plus travailler au calme de ses terres auvergnates que briller dans les salons parisiens.  L'aisance matérielle le tenait à l'abri du besoin.  C'est peut-être outre-Rhin qu'il fut le plus prisé, annexé très tôt comme compositeur allemand par la critique.  Sa « prédilection pour les thèmes simples, francs et vigoureux » y rencontrait sans doute un écho favorable.  Sa production, immense, fait une large part à la musique de chambre - quatuors, quintettes, trios, sonates pour violon & piano - mais ne néglige ni le piano ni la symphonie, et encore moins l'opéra.  Le présent ouvrage, fort documenté, comble une lacune.  Il propose, comme de coutume dans cette collection éditoriale, une diversité de points de vue pour faire revivre une figure méconnue.  Sa première partie retrace les repères biographiques, à travers les écrits de son premier biographe, Joseph d'Ortigue, et le journal des frères Müller, chambristes renommés.  Berlioz, le chroniqueur, voit en lui « l'un des plus grands harmonistes de l'époque » ; quoique le compositeur tempérera son jugement sur ce collègue qui lui aura ravi, en 1842, le fauteuil de l'Académie.  L'analyse de la production, qui forme la seconde partie de cette étude, livre de perspicaces analyses sur le langage musical qui s'épanouit dans sa musique de chambre, sur ses pièces pour piano, totalement négligées, dont cette forme particulière que constitue la toccata, ou encore à propos de ses symphonies qui le feront qualifier de « Beethoven français » ; encore que ces pages se situent plutôt dans la lignée de celles de Haydn.  Mais c'est peut-être dans le domaine de la musique lyrique, objet de son dernier volet, que le livre est le plus original.  Ce genre tant apprécié par Onslow qui le découvrit à l'écoute du Stratonice de Méhul - plus admiré que la trilogie Da Ponte de Mozart ! - lui a pourtant causé bien des déconvenues : ses trois opéras feront fiasco.  Sans doute, l'éloignement de la capitale et des contacts utiles pour être bien joué devait le lui faire payer cher.  Le dernier, Guise ou Les États de Blois, est bien oublié aujourd'hui.  Peut-être plus pour longtemps.  Pour s'être de longue date pris de passion pour le musicien, René Koering dit brûler d'envie de le donner au Festival de Montpellier.






Hommage à Régine CRESPIN.  Préface d'Hubert Nyssen, texte d'André Tubeuf, sous la direction de Christophe Ghristi.  Actes Sud/Opéra national de Paris.  Relié, 23 x 29 cm.  138 p.  29 €.

En écho à la magnifique exposition organisée au Palais Garnier au début de l'été par l'Opéra de Paris et la BnF, et ce qui en constitue le catalogue, voici un somptueux hommage à la mémoire de Régine Crespin, une des grandes figures du chant du XXe siècle (1927-2007).  L'ouvrage trace le parcours en images de cette immense interprète qui illumina de son chant inextinguible et de sa formidable présence la scène lyrique internationale.  Car, après ses débuts nîmois et une prometteuse première partie de carrière dans l'hexagone, elle se produira très vite à l'étranger, outre-Atlantique notamment, où elle sera adulée à Buenos Aires, Chicago, New York.  Les premiers rôles, ce seront aussi bien Marguerite que Desdemona.  La wagnérienne, ensuite et bien sûr : d’Elsa (à Mulhouse, en 1951) à Brünnhilde (Salzburg, 1967), voulue par Karajan qui la fascinait, en passant par Sieglinde et pour ses débuts à Bayreuth, à 31 ans, Kundry, de par la volonté d'allègement des gabarits vocaux d'un Wieland Wagner.  Sans oublier une rayonnante Elisabeth de Tannhäuser au Palais Garnier, en 1963.  Mais elle refusera Isolde, par humilité.  Une des qualités de notre diva, au même titre que la générosité, tout comme cet « incomparable don de sympathie » que voit en elle André Tubeuf qui loue une voix de lumière au « frémissement vivant, palpable ».  Ambassadrice du chant français, elle immortalisera Iphigénie, Didon, et bientôt Charlotte et Carmen lorsque la blondeur du timbre aura laissé place à une palette plus sombre ; jusqu'à cette Grande Duchesse de Gérolstein où sa verve naturelle trouvait à s'exprimer sans crainte.  Son nom reste associé aussi à Francis Poulenc et ses Dialogues des Carmélites : de la Seconde Prieure, à la création en 1957, bouleversante d'humanité, à la Première, en 1977, combien déchirante dans la scène de l'adieu.  Au titre des grands rôles, des grands personnages, sur les scènes du monde, elle incarnera aussi bien Amélia que Tosca, et surtout La Maréchale, une de ses figures préférées.  Une suite de portraits complète cette monographie, révélant une autre facette de la personnalité de Régine Crespin, « plus Régine que Crespin » : son humour, teinté d'une exubérance toute méridionale.  Car conteuse-née elle savait mettre en scène comme personne de féroces anecdotes.  L'ouvrage enrichi de documents inédits, comporte une liste exhaustive de ses apparitions scéniques.




Jean-Pierre Robert.


Eugène de MONTALEMBERT & Claude ABROMONT : Guide des genres de la musique occidentale.  « Les indispensables de la musique », Fayard/Henry Lemoine.  1 310 p.  42 €.

Accompagné d’une imposante bibliographie signalant des ouvrages spécialisés, ce Guide remplit parfaitement sa mission : préciser le sens exact, l’histoire, le répertoire allant de la musique médiévale au jazz et à la musique électroacoustique (à partir de 1960), de la musique vocale à la musique instrumentale, de la musique religieuse à la musique profane et à la danse.  Il rendra de distingués services aux enseignants comme aux amateurs et discophiles soucieux de mieux comprendre les nombreux genres de la musique occidentale (mots latins, français, allemands, anglais, italiens, russes…), avec de nombreux renvois pratiques.  Ils y trouveront également des textes liturgiques avec leur traduction française.  Il ne s’agit pas de simples notices de dictionnaire, mais d’articles bien plus développés, par exemple pour les Passions et Les sept Paroles, aussi bien catholiques que luthériennes, depuis le Litterae significativae du IXe siècle jusqu’à l’œuvre de Dominique Vellard (1999).  Depuis 1986, l’utilité des Guides Fayard n’est plus à démontrer.  E. de Montalembert souhaiterait que « ce livre soit dédié à des foules, des foules et des foules, de tous les âges, de toutes origines, de toute latitude. »  À juste titre, cet ouvrage est d’ores et déjà incontournable.




Claude ABROMONT : Petit précis du commentaire d’écoute.  Fayard, 2010, 195 p.

Voici un excellent ouvrage abordant le répertoire de la musique savante occidentale, du Moyen Âge à nos jours. Il sera consulté avec grand profit par les habitués des salles de concerts, les discophiles, mais aussi par les enseignants, les commentateurs et les présentateurs.  Tout en s’ajoutant à d’autres guides, il s’impose d’emblée par ses qualités méthodologiques.  Après avoir défini « l’art d’écouter » et ses divers critères, l’auteur précise « l’ordre de présentation des fondamentaux », au nombre de sept : « Déterminer l’effectif - Situer le langage - Retranscrire le caractère - Trouver le genre - Relever le matériau - Identifier le compositeur ».  De judicieux conseils portent sur l’art de rédiger et l’importance du plan, avec quelques mises en garde et « astuces ».  De nombreuses questions posées avec pertinence orienteront les amateurs à travers les trois écoutes recommandées.  Ils apprécieront également les excellents tableaux chronologiques et synoptiques.  À figurer dans toute bibliothèque d’étudiants et d’enseignants.




Philippe PESEUX : VivaldiBDMusic (bdmusic@bdmusic.fr) : BDCL 388.  Distr. : Harmonia Mundi.  31 p.  2CDs.  TT : 60’04 + 68’20.

Toujours à l’affût de dessins originaux accompagnés de commentaires percutants, la dynamique collection « BDClassique » a confié à Philippe Peseux, spécialiste des croquis rapides et du mouvement, le soin de transporter les lecteurs dans la Venise contemporaine d’Antonio Vivaldi (1678-1741), avec ses musiciens, ses divertissements, mais aussi sa vie d’église, sa célèbre Pieta, ses gondoliers…  Les illustrations évoquent la vie quotidienne à Venise jusqu’en 1739, deux ans avant la mort du maestro - selon la formule : 2 CDs encartés, (interprétations légendaires).  Ils comprennent des Concertos pour divers instruments et son Stabat Mater réalisés par des interprètes qui ont fait leurs preuves.




Eduard MÖRIKE : Poèmes-Gedichte.  Texte & traduction : Nicole Taubes.  « Bibliothèque allemande », Les Belles Lettres, 2010.  582 p.  45 €.

E. Mörike (1804-1875), bien connu par son Mozart auf der Reise nach Prag, est l’auteur de remarquables poèmes ayant inspiré des compositeurs de Lieder comme Hugo Wolff (1860-1903) qui appréciait tant les Gedichte (première édition allemande, 1838), au point « qu’il ne pouvait même pas s’en séparer une heure ».  En 1888, il en a composé plus de 50 pour voix et accompagnement de piano : Denk’es, o Seele ; Jägerlied ; Das verlassene Mägdlein…  Au XXe siècle, Hugo Distler (1908-1942) a, en 1938, réalisé 48 pièces pour chœur mixte, chœurs de femmes et d’hommes.  Les compositeurs ont apprécié la force rythmique du texte, l’objectivation du contenu poétique proche des vieux chants populaires allemands, le mélange de confidence et d’intimité.  Leurs Mélodies traduisent de nombreux états d’âme : amour, sentiment religieux, nature, humour…  Les chanteurs apprécieront à sa très juste valeur la finesse de la traduction française si élégante et proche des intentions de Mörike.  N. Taubes n’a pas ménagé sa peine pour rendre sensible à tous l’atmosphère romantique et sentimentale spécifiquement allemande.  Elle permettra aux interprètes de mieux comprendre et restituer ces petits chefs-d’œuvre.




Marcel THOMANN : Le monde mystérieux de l’orgue.  Strasbourg.  Éditions du Signe (alex@éditionsdusigne.fr), 3e éd. revue et corrigée.  96 p.  23 €.

M. Thomann, éminent juriste (Université de Strasbourg), est, de longue date, passionné par l’orgue, son histoire, sa facture, sa technique.  Il privilégie autant le passé que l’avenir de l’instrument.  Excellemment illustré - avec le concours de B. Weiss -, cet ouvrage présente d’abord les parties constitutives de l’orgue, du buffet et des claviers jusqu’aux nombreux jeux.  Il aborde ensuite l’orgue à travers les siècles, depuis l’orgue hydraulique romain jusqu’à la facture du XVIe au XIXe siècle (des Couperin, Silbermann…) tributaire de la conception de l’orgue liturgique, non seulement en Europe, mais aussi en Amérique latine.  Un autre chapitre porte sur la facture des XIXe et XXe siècles, avec l’apparition de l’orgue symphonique et post-symphonique, jusqu’à sa présence même au Japon.  Enfin, de nos jours, de nombreuses tendances coexistent : orgues de synthèse, néo-classique, néo-baroque, électronique…  Dès 1954, à propos de l’orgue d’Andreas Silbermann à Marmoutiers, de nombreuses manifestations y ont été organisées et en Alsace, « pays des orgues », l’auteur est à l’origine du Centre européen de l’orgue (CEO), avec un Centre d’interprétation du patrimoine (CIP).  Une Bibliographie sommaire et un abondant Index des termes techniques seront très utiles.  Conclusion : l’orgue n’a pas fini de révéler son « monde mystérieux »…




Frédéric PLATZER : Le Top 100 du Jazz.  Ellipses (contact@editions-ellipses.fr), 2010, 208 p.

Pour initier le grand public au monde du jazz, Fr. Platzer prend pour point de départ 100 « tubes » interprétés par les meilleurs jazzmen : L. Armstrong, C. Basie, J. Coltrane, M. Davis, D. Ellington… et des morceaux archi-connus : Take five, Autumn Leaves, In the Mood, My funny Valentine…  Pour chaque auteur et chaque œuvre, il précise judicieusement et systématiquement différents paramètres, dont le contexte, les points-clés, l’album, le plan… et y joint quelques remarques spécifiques.  La méthodologie systématique, la concision extrême et pourtant le maximum de données essentielles font de cet ouvrage un modèle du genre qui intéressera autant les néophytes qui apprendront à écouter et les spécialistes qui complèteront leurs connaissances.  Excellent guide à travers les dédales du jazz.



Édith Weber.


Pierre BRUNEL : Aimer Chopin.  Symétrie, 2010.  265 p.  10,20 €.

Original dans sa conception, ce livre nous propose une promenade musicale à partir de quelques pièces célèbres, d’accès facile pour l’auditeur « éclairé » et le pianiste amateur « confirmé ».  Chaque œuvre, replacée dans le contexte historique, dans la vie de Chopin, souvent éclairée par sa correspondance, est accompagnée d’une analyse musicologique pertinente, de références littéraires et discographiques judicieuses, ainsi que de conseils concernant l’interprétation pianistique.  Un livre à retenir parmi les nombreuses publications consacrées à Chopin, en cette année du bicentenaire, un ouvrage qui ne manquera pas de conforter l’amour de ceux qui aiment Chopin.  Pour « happy few.




Sylvie OUSSENKO : SchumannÉditions Eyrolles, 2010.  181 p., CD inclus.  10 €.

Une biographie claire, didactique, concise, qui va à l’essentiel.  De lecture facile, avec des notes explicatives incluses dans le texte, des extraits de correspondances et de critiques musicales, un catalogue des œuvres, un glossaire, une bibliographie et une discographie sélectives, auxquels s’ajoute un CD audio.  En cette année de bicentenaires, un livre qui fait un peu oublier son illustre jumeau, idéal pour une première approche de la vie et de l’œuvre de Robert Schumann (1810-1856).





New Musicology, perspectives critiques.  Revue Filigrane.  Marta Grabocz & Makis Solomos.  Éditions Delatour France, n°11, 2010.  173p.  20 €.

Cette 11e livraison de Filigrane se propose de répondre à la question posée dans le numéro 1 de la revue, intitulé : « Musicologies ? »  Elle tente de définir les différents profils que pourrait revêtir la « nouvelle musicologie ».  Joseph Kerman, dans les années 1980-1990, plaidait pour un nouveau souffle ; sous l’influence des mouvements postmodernes et de l’anthropologie culturelle, il souhaitait élargir le concept d’œuvre musicale autonome au cadre plus vaste du discours sur la musique, en tenant compte des données des sciences humaines et sociales contemporaines.  La « nouvelle musicologie » doit se recentrer sur le « sens », expliquant l’investissement subjectif du chercheur et la nécessaire étude du contexte, au détriment de l’œuvre musicale elle-même.  Cette démarche a permis l’émergence et la reconnaissance des musiques dites populaires ainsi que la dissolution de l’idée d’art dans la notion, plus généraliste, de culture.  Une vision « transversale » qui n’est pas sans intérêt.




Patrice Imbaud.


Hector BERLIOZ : Mémoires, comprenant ses voyages en Italie, en Allemagne, en Russie et en Angleterre.  Introduction d’Alban Ramaut.  Symétrie (www.symetrie.com) & Palazzetto Bru Zane.  Format de poche, 708 p.  14,80 €.

Spécialiste du romantisme musical français, Alban Ramaut (professeur à l’université Jean-Monnet de Saint-Étienne) nous propose une relecture de l’intégralité de ces célèbres Mémoires, où il convient néanmoins de faire la part de l’exaltation propre au cher Hector.  Lequel nous prévenait lui-même : « Je ne dirai que ce qu’il me plaira de dire ; et si le lecteur me refuse son absolution, il faudra qu’il soit d’une sévérité peu orthodoxe, car je n’avouerai que les péchés véniels. »  L’édition désormais de référence.





André GIDE : Notes sur Chopin.  Avant-propos de Michaël Levinas.  NRF-Gallimard.  12 x 18,5 cm, 172 p., ex.mus.  13,50 €.

Parues en 1931 dans La Revue musicale, ces Notes sur Chopin sont une confidence de l’excellent pianiste que fut l’auteur de Paludes.  Ne confiait-il pas, en 1951, à une jeune musicienne : « J’ai passé avec Chopin plus d’heures que je n’en ai passé avec aucun auteur ».  Lecture originale d’une œuvre, proposant un fructueux rapprochement entre le compositeur des Mazurkas et le poète des Fleurs du Mal – tous deux considérés longtemps comme « malsains ».  Une réédition qui vient à son heure.




Alexis GALPÉRINE : Édouard Souberbielle.  Un maître de l’orgue.  Éditions Delatour (www.editions-delatour.com).  17 x 24 cm, 354 p., ill. n&b.  CD inclus.  28 €.

En tant qu’organiste, théoricien du chant grégorien & professeur, Édouard Souberbielle (1899-1986) eut, de son temps, une influence considérable.  N’aura-t-il pas formé, à l’École César Franck où il enseignait, des organistes tels que Michel Chapuis, Francis Chapelet et André Isoir ?  Quelque peu oublié aujourd’hui, il est ici réhabilité par son petit-fils, le violoniste Alexis Galpérine, lequel nous dépeint toute une société de musiciens que connut son aïeul : d’Indy, Vierne, Alain, Ravel, Messiaen, Poulenc, Viñes, Sauguet, Rouault et Léon Bloy dont il fut le gendre.  Aux côtés d’écrits de Souberbielle lui-même, de nombreux témoignages d’anciens élèves constituent la dernière partie de cette belle biographie.




Jacques BOUCHER & Odile THIBAULT : Récit au Grand Orgue, entretiens avec Antoine Reboulot.  Éditions de la Taille (www.delataille.net).  15 x 23 cm, 374 p., ill. n&b.

Non-voyant de naissance, Antoine Reboulot (1914-2002) fut successivement organiste titulaire de la tribune de Notre-Dame de Versailles, puis de Saint-Germain-des-Prés à Paris, avant d’enseigner, dès 1967, à la Faculté de musique de l’Université de Montréal.  Récit au Grand Orgue, entretien avec son disciple & ami Jacques Boucher (www.jacquesboucher.org), retrace l’itinéraire d’un homme passionné et généreux – enfance relativement difficile, premières émotions musicales et carrière exceptionnelle.  Le grand organiste donne aussi son sentiment sur les artistes qu’il aura connus, ses maîtres Widor et Vierne, mais aussi Marchal, Dupré, Caussade et son ami Gaston Litaize.




Pascale ROUET : André Isoir (°1935).  Histoire d’un organiste passionné.  Préface de Gilles Cantagrel.  « Organ Prestige », Éditions Delatour (www.editions-delatour.com).  14,5 x 20,5 cm, 210 p., ill. n&b.  20 €.

Disciple d’Édouard Souberbielle puis de Rolande Falcinelli, André Isoir - après avoir obtenu à trois reprises le Premier Prix du Concours d’improvisation de Haarlem - se spécialisa dans la « musique ancienne française ».  Pascale Rouet, enseignant elle-même l’orgue (Conservatoire de Charleville-Mézières), nous livre ici la biographie d’un compositeur-interprète d’une rare profondeur d’inspiration – mais non moins facétieux à l’occasion (voir, ci-dessous, la couverture du présent ouvrage).  Entretiens, documents, confidences & témoignages, assortis de discographie, bibliographie & extraits de presse constituent une précieuse monographie.





Alexander WERTH : Scandale musical à Moscou, 1948.  Traduit & présenté par Nicolas Werth.  « Histoire contemporaine », Tallandier (www.tallandier.com).  13 x 20 cm, 192 p., 15,90 €.

Correspondant de la presse britannique en URSS, Alexander Werth (1901-1969) fut le témoin attentif de l’offensive idéologique d’un Jdanov – la Jdanovschina en musique.  Période durant laquelle des compositeurs comme Prokofiev ou Chostakovitch, taxés de « formalisme bourgeois », se virent contraints de faire officiellement repentance…  C’est de cette « Conférence des compositeurs et des musiciens » (1948) dont Alexandre Werth se fait ici le chroniqueur scrupuleux – Comédie humaine au pays d’Ubu-Roi…  Nicolas Werth, son fils, a traduit et mit en perspective cet éclairant document – en étroite relation avec les Mémoires de Chostakovitch.




Claude ABROMONT & Eugène de MONTALEMBERT : Guide des formes de la musique occidentale.  « Les Indispensables de la musique », Fayard/Henry Lemoine.  16,5 x 23,5 cm, 240 p., ex. mus.  20,00 €.

Conjuguant éclairages historique, stylistique, esthétique & expressif, ce Guide donne tout leur relief aux formes de notre musique occidentale : suite, sonates baroques et classiques, rondo, rondo-sonate, lied, chansons, contrepoint… sans oublier de plus récentes formes : à processus, ouvertes, différées…  Le tout illustré de nombreux exemples musicaux.




Laurent GUIRARD (Sous la direction de) : 50 ans de psychologie de la musique.  L’école de Robert Francès.  « Médecine des arts », Alexitère.  16 x 22 cm, 210 p., tableaux & schémas.  25 €.

Selon Laurent Guirard, maître d’œuvre, le propos de ce collectif est de mettre en lumière ce qui - eu égard aux conditions notamment institutionnelles de l’époque - aura permis à Robert Francès de telles avancées en matière de connaissance sur « La perception de la musique » (Vrin, 1958).  Ce célèbre ouvrage du « père de la psychologie de la musique française » fait ici l’objet - sous la plume d’éminents spécialistes - d’une étude pluridisciplinaire approfondie : À propos de l’acculturation tonale (A. Zenatti), Souvenirs et réflexions (M. Imberty), Le livre de R. Francès et ses prolongations (E. Bigand), Électro-encéphalogramme et musique (J. Vion-Dury & M. Besson), Mémoire des mélodies (W. J. Dowling), Relire Robert Francès (H. de la Motte-Haber), Du difficile passage de la perception au jugement esthétique (J.-M. Chouvel), Le livre de R. Francès et ses implications didactiques (J.-P. Mialaret), Peut-on concilier expérience musicale et nécessités pédagogiques ? (Laurent Guirard).

Sommaire complet sur : www.medecine-des-arts.com/50-ans-de-psychologie-de-la.html




Marie-Charlette BENOIT, Marie-Claude FRÉNÉA, Denise GRUNWALD & Charles POLIO : L’éducation artistique de la main, selon l’enseignement de Marie Jaëll, pianiste et pédagogue.  « Pédagogie », Symétrie (www.symetrie.com).  21 x 30 cm, 52 p., ill. n&b et couleurs.  25 €.

« Le premier effort de l’éducation consiste à apprendre à sentir notre main dont la destination est si supérieure à celle à laquelle notre inconscience la réduit » estimait Marie Jaëll (L’intelligence et le rythme).  Émerveillée par le jeu de Franz Liszt et l’harmonie entre la pensée et les mains d’un tel artiste, Marie Jaëll s’est attachée à découvrir le secret de ce prodigieux toucher.  En collaboration avec le docteur Charles Féré, elle imagina des exercices permettant d’améliorer les fonctions de la main (affinement de la sensibilité, dissociation des mouvements des doigts…).  Cinq chapitres : Finalité des exercices / Préparation aux exercices / Éveil de la sensibilité de la main / Développement de la relation main & sons / Coordination de la pensée musicale & de la main.




Boris TERK : A voice is a person.  Kathleen Ferrier.  Allia (www.alliaeditions.com).  10 x 17 cm, 80 p.  6,10 €.

Bel hommage ici rendu à Kathleen Ferrier, l’une des voix les plus poignantes qui fût.  « Dans sa voix s’entend maintenant l’absence » écrit Boris Terk à propos de la sublime contralto qui, au contraire de son répertoire tragique [Chant de la Terre, Kindertotenlieder…], était un être profondément joyeux.  Apologie érudite qui nous fait, en outre, pénétrer les arcanes d’une voix prodigieuse, « cette personne à part entière »…





Yaël BENZAQUEN : SOS Voix.  Guy Trédaniel (www.editions-tredaniel.com).  15,5 x 22 cm, 256 p., ill. n&b et couleurs.  20 €.

Le propos de Yaël Benzaquen, professeur de chant, cible aussi bien les professionnels de la voix que leurs thérapeutes, souhaitant apporter des solutions à toutes formes de déficience vocale.  « Retrouver, comprendre & maîtriser sa voix en toutes circonstances » plaide-t-elle.  Ouvrage intéressant quant aux mécanismes d’émission et à l’analyse des comportements ; le plan proprement musical laisse, en revanche, à désirer.  Ainsi – véniel exemple - l’auteur confond-elle la2 et la3.




Julien DELLI FIORI : Ascenseur pour le jazz.  Une histoire du jazz.  Éditions de La Martinière (www.editionsdelamartiniere.fr).  Album relié, 22 x 25,5 cm, 200 p., ill. n&b et couleurs.  35 €.

Reprenant l’intitulé de sa célèbre émission sur France Inter, Julien Delli Fiori dresse ici un portrait de la plupart de ces artistes qui, depuis plus de quarante ans, auront rythmé sa vie (et la nôtre) : Fats Waller, John Lee Hooker, Django Reinhardt, Duke Ellington, Chet Baker, Thelonious Monk, John Coltrane, Stan Getz, Miles Davis…  Dix parties : New Orleans, Swing, Be bop, Hard bop, West Coast, Free jazz, Jazz Fusion & Jazz Rock, Jazz vocal, Jazz & co, Jazz now.  Superbe iconographie.  En annexe : Jazz & cinéma, Bibliographie, Festivals…




Francis HOFSTEIN : Muddy Waters. Biographie. « Félin poche », Le Félin (www.editionsdufelin.com).  11,5 x 17,5 cm, 142 p.  10,90 €.

À la charnière entre le blues du Sud et celui de Chicago, le guitariste McKinley Morganfield, dit Muddy Waters (1915-1983), influa sur notamment Eric Clapton et les Rolling Stones.  C’est le parcours de cette figure emblématique du blues – aventure exceptionnelle – que le psychanalyste Francis Hofstein retrace ici.  Le guitariste Rémi Charmasson propose, quant à lui, une analyse attentive de I can’t be satisfied, morceau de celui qui prônait de « chanter derrière le temps, en retard ».




Nicholas J. GIORDANO, Sr : Physics of the Piano.  2010, Oxford University Press (www.oup.com).  En anglais.  Relié sous jaquette.  19,5 x 25,5 cm, 170 p.  Croquis, illustrations n&b.  £35.00

Pourquoi le piano sonne-t-il comme un piano ?  Quels sont les caractéristiques physiques qui permettent une telle spécificité ?  Le propos est ici de répondre à ces questions.  Bien qu’exigeant un minimum de connaissances en mathématiques & physique, l’ouvrage s’adresse à quiconque est intéressé par la musique & ses instruments.  12 chapitres : Introduction / Introduction to waves & sounds / Why the piano was invented / Making music with a vibrating string / Hitting strings with hammers / Turning string vibrations into sound / Connecting the strings to the soundboard / Evolution of the piano / How we perceived musical tones / The magic of Steinway / What physics can & cannot teach us about pianosGlossaire, références, index.




Thierry CARPENTIER : Le son à la guitare. « Méthode en poche, n°55 », Hit Diffusion (www.editions-hit-diffusion.fr).  12 x 21 cm, ill. n&b.  11,93 €.

Nous sont ici données toutes les clés pour faire sonner au mieux une guitare électrique : ampli, effets, cablage, niveaux, son en groupe… À l’aide de nombreux schémas & photos explicatifs.




Amanda STHERS : Liberace.  Plon (www.plon.fr).  13 x 20 cm, 122 p., 16 €.

Prodigieux virtuose du piano, star américaine des années 1960, Liberace (1919-1987) était-il fou ?  Ami d’Elvis et de Streisand, il aura fait remodeler le visage de son amant à l’image du sien propre lorsqu’il était adolescent avant de se séparer de lui, puis de mourir – parmi les tout premiers - du sida.  À travers cinq séances d’une confession imaginaire, la romancière Amanda Sthers lui donne la parole.





Stéphane BÉCHY (Sous la direction de) : La musique du cheval.  « Cheval-Chevaux » revue semestrielle n°5, Éditions du Rocher (www.editionsdurocher.fr).  18 x 24 cm, 214 p., dessins de Caran d’Ache.  22 €.

Parmi les contributions des dix-huit collaborateurs ici réunis par Stéphane Béchy, organiste & rédacteur en chef de cette belle publication, signalons celles de Jean-Louis Gouraud (« Grandes orgues pour le cheval »), Michaël Levinas (« Chopin et Géricault »), Claire Veillères (« Le cheval fait musique » / « Une valse à deux temps »), Patrice Franchet d’Espèrey (« Dans le silence du manège »), Cesare Fiaschi (« Traité des embouchures »), Jean-Claude Racinet (« Les trois temps du galop »), Adamo Walti (« Avant d’être cavalier, j’ai été cheval »)  et… Stéphane Béchy (« Des pieds et des mains » / « Racinet musicien »).  Sans préjudice de bien d’autres chroniques, nouvelles ou récits hippiques.





« Que peut encore l’Art ? »  Museum international, n°244, revue de l’Unesco (Tél. : 01 45 68 55 91. www.unesco.org/culture/museumjournal).  21 x 30 cm, 76 p., ill. n&b.

Il s’agit là des Actes du colloque éponyme organisé, les 25 et 26 juin 2009, par l’Unesco à Paris.  Communications regroupées en deux parties…  Crise des valeurs : La quête de la beauté contre l’arrogance de l’art (Masahiro Hamashita), Les arts : valeur refuge ou accord futur ? (Thierry Dufrêne), Les croque-morts des arts (José Sasportes), Esthétique & construction d’une éthique planétaire (Rafael Argullol).  Art et résistance : Décoloniser l’esprit : le travail de l’imagination créatrice (Rex Nettleford), Écrire dans l’urgence ou le partage inégal du sensible (Tanella Boni), Art & résistance transculturelle (Rachida Triki), De l’autonomie à l’auto-transcendance de l’art africain contemporain (Adriano Mixinge).





Maryvonne CASSAN (Sous la direction de) : Histoire des arts avec le Louvre.  Hatier (www.editions-hatier.fr) / Louvre éditions.  Reliure souple, 22,5 x 30 cm, 360 p., ill. n&b et couleurs.  CD-Rom inclus.  49 €.

Conçu pour l’enseignement de l’Histoire des arts, ce superbe album apportera au professeur les savoirs nécessaires pour : commenter des œuvres avec ses élèves/ traiter de notions telles que la beauté, le corps, la représentation du pouvoir, la place de l’artiste dans la société, etc./ utiliser les vocabulaires spécifiques/ situer historiquement styles & artistes/ comprendre les contextes de création & de réception des œuvres…  Double entrée possible : par les thèmes essentiels, par une œuvre & son analyse.  Le CD-Rom propose, quant à lui, 55 œuvres à vidéoprojeter pour aborder périodes ou courants artistiques.  Pour les seuls arts visuels, un magnifique outil, éminemment pratique.





Pierre LADONNE : Del Cap de la Roca Negra… au fil des souvenirs.  « Quatre générations de musiciens d’Auvergne ».  Roman autobiographique.  Agence des musiques des territoires d’Auvergne (tél. : 04 73 64 60 00. www.amta.fr).  17 x 24 cm, 224 p., ill. n&b et couleurs, ex. mus.  CD inclus.  25 €.

Troisième du nom, Pierre Ladonne (°1931) relate la vie artistique de quatre cabrettaires issus du canton de Pierrefort (Cantal), mais aussi celle de la colonie auvergnate de Paris.  Parcours initiatique nourri des mélodies des meilleurs spécialistes : Antoine Bouscatel, Victor Allard, René Anglade, Yvonne Franques, Marguerite Giraud…  Trois parties : Les années d’avant-guerre / Les années d’occupation / Les années d’après-guerre.  Ouvrage judicieusement assortie de 30 partitions des morceaux préférés des musiciens cités.  Fort joyeux et dansants, les 24 morceaux que comporte le CD sont, pour la plupart, joués à l’accordéon diatonique ou chromatique et à la cabrette.



« Musique et écologie », trimestriel L’Écologiste, n°32 (www.ecologiste.org).  21 x 29,5 cm, 66 p., ill. n&b et couleurs.  6 €.

Paraphrasant Platon, ne peut-on dire qu’il ne saurait y avoir d’équilibre écologique sans la musique ?  Tel est l’un des propos de cette livraison de l’édition française de The EcologistPrincipaux articles : « Quelle est la nature de la musique » (Denys Trussell), « Qu’est-ce que la musique traditionnelle ? » (Guillaume Veillet), « Test : savons-nous écouter ? » (Françoise Lemarchand), « Le paysage sonore » (Murray Schafer), « La nature selon Bach » (Armand Farrachi), « L’art de l’improvisation » (Fabrice Contri), « Qu’est-ce que la musicothérapie ? » (Édith Lecourt).  Une approche assurément originale.





Émilie SAPIELAK : L’école de la honte.  La bête noire des enfants, l’angoisse des parents, le cauchemar des serviteurs de l’État.  Don Quichotte, éditeur.  14 x 20,5 cm, 286 p., 18 €.

D’une terrifiante lucidité est ce constat, mais aussi d’une exceptionnelle qualité littéraire.  Professeur de français certifié, néo-titulaire sans poste fixe, l’auteur [notre photo] a enseigné trois ans dans divers collèges de la banlieue nord-ouest de Paris.  D’une noirceur absolue, l’ouvrage se lit comme un thriller : IUFM cauchemardesque, impuissance et avilissement de professeurs hagards pris dans une mécanique tournant à vide, au cœur de la barbarie quotidienne d’enfants totalement déboussolés entre la violence et la peur.  Le tableau ne rend certes pas compte de ce qu’il en est sur l’ensemble du territoire, mais les situations décrites et analysées ne sont qu’hélas ! trop crédibles.  À lire absolument !


  


POUR LES PLUS JEUNES

Henri DÈS (Textes et musique) : La petite Charlotte.  Illustrations : Séverine Duchesne.  Les Éditions des Braques (www.leseditionsdesbraques.com). 1 livre + 1 CD (TT : 57’35).  Album cartonné, 21 x 21 cm, 34 p., ill. couleurs.  18 €.

Pour enfants de 3 à 7 ans, une recette (tarte aux poires & chocolat) et les 14 chansons originales du 2e album d’Henri Dès (1979) : L’ogre, Le mille-pattes, Le fantôme, T’es pas beau, Le bout de carton…  À regarder, lire, écouter, chanter !





Chante le monde.  Voyage musical autour du monde en 18 chansons et comptines.  1 livre + 1 CD Enfance et musique (www.enfancemusique.com).  Distr. Au Merle Moqueur & Harmonia Mundi.  Illustrations : Carine Sanson.  Relié.  21,5 x 21,5 cm, 30 p., ill. couleurs.  19,90 €.

Voilà un album qui fera le bonheur de tous ses lecteurs/auditeurs, de 2 ans… à plus !  Dix-huit titres pour éveiller aux sonorités et mélodies d’autres cultures - d’Espagne, Portugal, Roumanie, Pologne, Chine, Haïti, Maroc, Andalousie, Antilles, Amérique du Nord, Inde, Italie, Sénégal… Et ce, dans cet extrême souci de qualité graphique & musicale qui fait la marque d’« Enfance et musique ».





Serge PROKOFIEV : Pierre et le Loup.  Raconté par François Morel & Olivier Saladin.  Orgue de Barbarie : Pierre Charial.  Orchestre de Basse-Normandie, dir. Dominique Debart.  Paysage sonore : Michel Musseau.  1 livre + 1 CD Enfance et musique (www.enfancemusique.com).  Distr. Au Merle Moqueur & Harmonia Mundi.  Illustrations : Pef.  Relié.  21,5 x 21,5 cm, 32 p., ill. couleurs.  19,90 €.

Par les merveilleux et hilarants duettistes François Morel & Olivier Saladin, voici la énième version de cet illustrissime conte musical.  Rien moins qu’orthodoxe, bien sûr…  Dans, notamment, les succulents commentaires off des deux compères et une orchestration joyeusement iconoclaste (interventions de Pierre… à l’orgue de Barbarie).  Réjouissant en diable ! Dès 3 ans.



Francis Cousté.


 

 





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Alexander AGRICOLA : Missa In myne Zyn.  Ricercar (stephanie@outhere.com) : RIC 306.  TT : 59’50.

Alexander Agricola (ca 1456-1506) - à ne pas confondre avec Martin Agricola, le musicien humaniste - est engagé à la cour de Philippe, duc de Bourgogne, fils de Maximilien Ier, empereur du Saint Empire romain germanique.  Sa Missa In myne Zyn repose sur la mélodie hollandaise éponyme.  Elle est structurée en 3 parties (sans Kyrie), se présentant comme un genre de fantaisie, avec, non seulement des versions d’Agricola, mais aussi d’anonymes.  La première partie : Ante Missam sur des sources populaires remplace le Kyrie ; la deuxième : Ad Missam, concerne les Gloria, Credo, Sanctus, Agnus Dei.  Enfin, Ad Vesperam comprend les motets Pater meus agricola est et l’antienne mariale Regina coeli.  La Capilla Flamenca (5 voix, 3 violes de gambe, dir. Dirk Snellings) a signé cet enregistrement tout en transparence et finesse, sortant des sentiers battus.



Johann Sebastian BACH : Cello Suites2CDs Ramée (stephanie@outhere.com) : RAM 1003.  TT : 58’29 + 79’50.

L’instrument, utilisé au temps de J. S. Bach pour ses Suites pour violoncelle seul (BWV 1007-1012) composées à Cöthen entre 1717 et 1723, pose encore une énigme.  Peu jouées après la mort du compositeur, c’est surtout Pablo Casals qui les relança au XXe siècle.

Quoi qu’il en soit, Dmitry Badiarov, à la fois luthier et interprète, propose une version avec violoncello da spalla, c’est-à-dire : violoncelle d’épaule, datant de 2004.  Ce choix se justifie par les sonorités saisissantes et exceptionnelles et par son jeu plus maniable qu’avec un violoncelle normal.  Ces 6 Suites, souvent redoutées par les interprètes en raison de certaines difficultés (jeu polyphonique), font l’objet d’un excellent enregistrement.  Elles s’imposent par leur intériorité, leur musicalité et leur expressivité.  Les fins connaisseurs les apprécieront à leur juste valeur.



Ignacio CERVANTES : Danzas para piano2CDs + 1DVD Roldan/Colibri : 111.  Distr. : CD Diffusion (info@cddiffusion.fr).  TT : 154’00.

Ignacio Cervantes (1847, La Havane/1905, La Havane), enfant prodige puis pianiste virtuose & compositeur cubain, a largement contribué à la créolisation de la musique de son pays.  Cette réalisation comprend un DVD (avec le concert du 31 juillet 1997, au Théâtre national de Cuba, pour le 150e anniversaire de la naissance du musicien), un CD audio et un CD intitulé Partituras.  Il est possible à la fois de voir et d’entendre le jeu et la technique du pianiste, mais encore de découvrir des partitions, dédicaces, documents, signatures…  Incursion très réussie dans l’univers cubain.  Le bilan est éloquent : 43 Danses tour à tour nostalgiques, énergiques, associant romantisme et flamenco, toujours bien rythmées.  Elles sont brillamment interprétées par 5 pianistes.  Excellent tableau de la vie musicale à La Havane.



Musique en la Chapelle d’Henri IV.  Eustache Du Caurroy.  2CDs Triton (triton@disques-triton.com) : TRI 331167.  TT : 49’59 + 34’11.

Les éditeurs de disques ont actuellement tendance à privilégier les musiques dans l’entourage des souverains : c’est le cas de la Chapelle d’Henri IV (1553-1610), en ce quatrième centenaire de la mort du roi de France.  Aux diapasons la 392, la 415 et la 440 et avec la prononciation gallicane restituée, les Chantres de Saint-Hilaire - chœur de 5 chanteurs solistes avec serpent et basse) fondé en 2000 par Fr.-X. Lacroux - s’attachent à révéler les Preces Ecclesiasticae d’Eustache Du Caurroy (1549-1609), mort un an avant Henri IV.  Dès les premières mesures, ils s’imposent par leurs voix prenantes, s’élevant des profondeurs, chargées d’expressivité et d’intériorité.  Le CD 1 : Pater et Filius et Spiritus sanctus se présente comme une intense prière en plain-chant, en faux-bourdon (aquitain et gallican), à plusieurs voix.  Le CD 2 : Ave Maria et Conclusio, comprenant le célèbre Christus vinxit plein d’allant, se termine par le Te Deum à 6 voix : une réussite du genre.



Terres d’EspagneMusique d’orgue dans les royaumes de Philippe IV.  Hortus (editionshortus@wanadoo.fr) : 081.  Distr. Codaex.  TT : 70’12.

Voici encore un disque en hommage historique à un souverain : Philippe IV (1605-1665), dit « Le Grand », roi des Espagnes et des Indes, avec une sélection de pages interprétées à l’orgue historique de Lorris-en-Gâtinais par Damien Colcomb, passionné par la facture d’orgues ibérique, élève, entre autres, d’André Isoir, Francis Chapelet et Freddy Eichelberger.  Le programme illustre les formes espagnoles : Tiento, Canción… et des musiciens célèbres, tels que F. Correa de Arauxo (1584-1654), M. R. Coelho (ca 1555-ca 1635), ou moins connus, tels que P. Cornet (ca 1575-1633) et A. Van den Kerckhoven (1618-1701).  Soit 12 pièces interprétées en première mondiale avec musicalité, bien structurées et prouvant une parfaite maîtrise de l’instrument français (contemporain des œuvres), de l’esthétique typiquement espagnole aux XVIe et XVIIe siècles.  Irrésistible.



Rolande FALCINELLI : Improvisations.  Hortus : 079.  Distr. Codaex.  TT : 73’38.

L’improvisation à l’orgue est généralement considérée comme une spécialité de l’École française, comme le prouve ce CD (d’après des enregistrements historiques), avec des Improvisations de Rolande Falcinelli (1920-2006), élève, entre autres, de M. Dupré.  Les discophiles réentendront des Improvisations sur les noms de Franz Liszt et de Marcel Dupré (1986 : centenaire de la mort du premier ; naissance du second) ; sur un thème de Claude-R. Roland et sur B-A-C-H (1985 : tricentenaire de sa naissance) ; sur un thème de Maurice Duruflé (1983), entre autres.  Ils apprécieront tout particulièrement celle sur deux thèmes de Jean-Jacques Werner (1982), d’abord présentés à découvert, puis traités dans le langage délibérément du XXe siècle.  La regrettée organiste tire le meilleur parti des possibilités de registration (orgues des cathédrales de Belley, St-Louis de Versailles et de l’église St-Étienne-du-Mont).  Dans ses Improvisations (entre 10’00 et 14’00), elle fait preuve d’inventivité, spécule sur les contrastes (calme/impétuosité, grave/aigu, virtuosité/expressivité…) ; l’ensemble est servi par une éblouissante technique compositionnelle et organistique.



Divna. L’âme du chant orthodoxe.  Jade (jade@milanmusic.fr) : 6997252.  TT : 28’42.

Divna Ljubojevic et le Chœur Melodi restituent en profondeur « l’âme du chant orthodoxe » à travers les formes anciennes comme le Kondakion de la Nativité du Christ - de Romanos le Mélode (VIe siècle), sur le ton de la narration, mettant en jeu la Vierge, les anges et les bergers — ou le Polyéléos, psaume (134) de louange conclu par la doxologie.  D’autres pièces arrangées par Divna donnent un exemple de différents modes : Dieu est avec nous (6e mode) ; Psaume 65 (Prokimenon, 8mode) ; Chant de communion (Psaume 110, en 9e mode, d’Isidor Bajic)…  L’ensemble se termine sur une pièce traditionnelle : Toutes les nations, battez des mains !  Ces chants alternés entre Divna et le Chœur Melodi font apparaître les caractéristiques mélodiques de cette musique avec ses secondes augmentées ; ils recréent avec bonheur le calme, la plénitude et l’intériorité typiques du chant orthodoxe.


Édith Weber.


« Et la fleur vole ». Airs à danser & airs de cour autour de 1600.  Les Musiciens de Saint-Julien, dir. François Lazarevitch.  Annie Dufresne (Dessus).  Alpha (www.alpha-prod.com) : 167.  TT : 66’07.

Un disque qui s’intéresse au répertoire musical du début du XVIIe siècle, et tout particulièrement au répertoire dansé, tant instrumental que vocal.  Une belle interprétation.



Marin MARAIS (1656-1728) : Les Voix humaines. Deuxième livre (1701). Deuxième partie.  Jean-Louis Charbonnier & Paul Rousseau (basse de viole), Mauricio Buraglia (théorbe), Pierre Trocelier (clavecin), Hélène Decoin (violon), Philippe Suzanne (flûte traversière).  2CDs Ligia Digital : Lidi 0301218-10.  TT : 61’38 + 61’36.

Un disque qui s’inscrit dans l’intégrale des pièces de viole de Marin Marais, comprenant deux suites en  majeur et sol majeur avec, en particulier, la très belle pièce intitulée Les voix humaines, toute d’intériorité et de gravité, hymne à la voix humaine et à l’instrument qui, à l’époque, s’en approchait le plus, la viole.  La viole, seule, ou associée à d’autres instruments, la musique en général qui  transcende la parole, qui enhardit, qui bouleverse, charme et aide à vivre ce compositeur admiré de la cour du Roi Soleil et de l’Europe entière, qui s’interroge sur les questions fondamentales de la vie, de la mort, du destin.  L’essence des autres pièces est, avant tout, celle des musiques de danse, rythmées et jubilatoires. Une musique parfaitement interprétée, des danses mais aussi une méditation qui est un des moments forts de l’œuvre de Marin Marais.



Johann Sebastian BACH (1685-1750) : Missae Breves BWV 233 & 236.  Ensemble Pygmalion, dir. Raphael Pichon.  Alpha (www.alpha-prod.com) : 170.  TT : 61’00.

Utilisant le pastiche, c'est-à-dire réutilisant des œuvres préexistantes pour créer une œuvre nouvelle, les Missae Breves de Bach témoignent d’un génie musical affirmé dans l’exercice de refonder un nouveau chef-d’œuvre à partir d’œuvres anciennes.  Ces messes se limitent à deux mouvements : Kyrie tripartite et Gloria divisé en cinq mouvements indépendants dont les extrêmes sont confiés au chœur, le reste du texte étant réparti en trois arias solistes ; elles fascinent par leur équilibre et leur théâtralité, mêlant cheminement spirituel et virtuosité.  Bien joué, bien chanté, un disque à retenir.



W. A. MOZART : Concerto n°9 « Jeune homme ».  Concertos n°12, 14.  Edna Stern (piano).  Orchestre d’Auvergne, dir. Arie van Beek.  Zig-Zag Territoires : ZZT100901.  TT : 70’05.

Un dialogue parfaitement clair et réussi, un climat intimiste, voire chambriste, lié au faible effectif de l’Orchestre d’Auvergne, voilà pour les points forts de cet enregistrement.  En revanche, cette vision minimaliste entraîne un certain défaut de « cantabile », essentiel chez Mozart, dû au manque d’ampleur dans le jeu du piano et à une certaine lourdeur dans la sonorité orchestrale.



Robert SCHUMANN : Klavierwerke & KammermusikGordan Nikolitch & Daishin Kashimoto (violon), Lise Berthaud (alto), François Salque (violoncelle), Éric Lesage (piano).  Alpha (www.alpha-prod.com) : 166.  TT : 57’13.

Pari audacieux et risqué que de proposer un nouvel enregistrement de ces deux œuvres majeures de musique de chambre, avec piano, de Robert Schumann (1810-1856) : le célébrissime Quintette op.44 et le Quatuor op.47, mais cette année de bicentenaire autorise toutes les audaces… d’autant que le pari semble réussi avec cette remarquable interprétation, respectant parfaitement l’équilibre entre cordes et piano, ainsi que la cohésion de l’ensemble.  Deux œuvres quasiment jumelles (composées en 1842) au climat différent, véritable concerto de chambre pour le Quintette, discours plus intimiste pour le Quatuor, réunissant le piano virtuose et la maitrise des cordes, dans un scintillement de sons et de couleurs.  Certains préfèreront, peut-être, plus de rondeur dans la sonorité des cordes et regretterons le toucher, parfois un peu brutal d’Éric Lesage.  Un beau disque néanmoins.



Mikhail GLINKA : Orchestral Works.  Musica Viva (Moscow Chamber Orchestra), dir. Alexander Rudin.  Fuga Libera : FUG571.  TT : 72’45.

Un disque regroupant une sélection d’œuvres orchestrales, plus ou moins connues, de Glinka (1804-1857), associant parfois voix et orchestre : deux ouvertures (œuvres de jeunesse), des mélodies pour soprano, mezzo ou basse, une symphonie inachevée, trois scènes dansées prévues pour l’opéra Une vie pour le Tsar - ensemble de compositions revisitées ou complétées par Musica Viva, dans une optique chambriste.  Une vision nouvelle particulièrement convaincante, tout en finesse et sensibilité, des voix magnifiques font de ce disque une indiscutable réussite.


Alexander Rudin ©DR


Itinéraire.  Jacques Boucher, orgue.  XXI-21 Productions (www.xxi-21.com) : 21718TT : 78’19.

Un itinéraire à travers les différents horizons de la littérature organistique et de la facture instrumentale qui la porte.  Comportant de nombreuses œuvres composées sur plus de trois siècles (Bonnet, Weckmann, Couperin, Vierne, Widor, Letondal, Bouchard, Franck, Tournemire, Dupré), jouées avec talent par Jacques Boucher sur différents « instruments à tuyaux », illustrant la richesse de la facture d’orgue en terre de Nouvelle-France.  Un disque hommage à cet « instrument qui tutoie Dieu ».



Musique française pour violon & orgue.  Anne Robert, violon.  Jacques Boucher, orgue.  XXI-21 Productions (www.xxi-21.com) : 21716. TT : 55’25.

Dialogue entre violon & orgue autour d’œuvres de : Guilmant, Dubois, Bréville, Donnay, Joubert, Saint-Saëns, Armingaud, Gounod, Journeau, Boulnois et Reboulot.  Des œuvres profanes et sacrées, certaines contemporaines, une très belle sonorité, une remarquable interprétation pleine de sensibilité et de virtuosité, conduisant, ici, à une véritable symbiose musicale, ailleurs à un violent affrontement des deux instruments.  Un disque indispensable.



Le sommeil de l’ange.  Musique basque pour txistu & orgue.  Sergio Torices Roldan (txistu), Jesus Martin Moro (orgue).  Hortus (www.editionshortus.com) : 077.  TT : 59’25.

Un disque très original mêlant les sonorités de l’orgue Daldosso de l’église d’Urrugne à celles du txistu, flûte à bec traditionnelle basque, à trois trous, se jouant de la main gauche, la main droite étant réservée aux percussions.  Regroupant des œuvres de compositeurs basques contemporains et notamment de Gorka Cuesta (°1969) dont la pièce le Sommeil de l’Ange a été composée en 2002, entre musique traditionnelle et musique savante, exprimant intimement l’âme basque, un disque qu’il faut assurément retenir.



Astor PIAZZOLLA : Histoire du Tango.  Marc Grauwels (flûte), Ensemble Astoria, Christophe Delporte (accordéon & bandonéon).  Fuga Libera (www.fugalibera.com) : FUG608.  TT : 55’13.

Œuvre dédiée au flûtiste Marc Grauwels qui en assura la création, œuvre majeure d’Astor Piazzolla (1921-1992), emblématique du Tango nuevo, mêlant avec bonheur les sonorités traditionnelles du tango au swing, aux phrasés empruntés au jazz et à la musique nouvelle grâce aux réminiscences de Bartók et de Stravinski.  Plus qu’un disque, un climat, une histoire d’amitié, une danse, un frôlement, une indiscutable réussite.


Patrice Imbaud.


« Parole e Querele d’Amore ».  Madrigali a due voci (XVIIe) de Monteverdi, Merula, Strozzi, Rognoni, Sances, Valentini, Gagliano, Carissimi.  Ensemble Barcarole : Agnès Mellon (soprano), Dominique Visse (contre-ténor), Marianne Muller (viole de gambe), Marco Horvat (lirone), Éric Bellocq (théorbe), Brice Sailly (orgue & clavecin).  Zig-Zag Territoires (www.zigzag-territoires.com) : ZZT 101001.

Joutes amoureuses, « tendresse, baisers, désir, jalousie, querelles, taquineries, désespoir et lamentations », sont le fil conducteur de cet enregistrement qui, grâce à de remarquables interprètes, magnifie l’éros musical du XVIIe siècle italien.



André-Modeste GRÉTRY (1741-1813) : Céphale & Procris.  Ballet héroïque en 4 actes.  Livret de Jean-François Marmontel.  Céphale : Pierre-Yves Pruvot (baryton) / Procris : Katia Vellétaz (soprano) / Aurore : Bénédicte Tauran (soprano) / Palès/La Jalousie : Isabelle Cals (soprano) / Flore : Aurélie Franck (mezzo-soprano) / L’Amour : Caroline Weynants (soprano).  Les Agrémens, Chœur de chambre de Namur, dir. Guy Van Waas.  2CDs Ricercar (www.ricercar.be) : RIC 302.  TT : 2h29’09.

« Vous êtes musicien et homme d’esprit, Monsieur, la chose est rare ! », c’est par ces mots que Voltaire accueillit un jour Grétry.  Fort galant et spirituel est, en effet, l’art de ce musicien que tant aima Louis XV.  Recréé en 2009 pour la réouverture de l’Opéra royal de Versailles, Céphale & Procris est un ballet où le chant tient la plus grande place.  Nulle réserve quant à la distribution ici réunie : beauté des timbres, diction parfaite, musicalité…



W. A. MOZART : Concertos pour piano n°9, 19, 20, 24Clara Haskil (1895-1960), piano.  2CDs « INA, Mémoire vive » (www.ina.fr).  TT : 60’51 + 59’19.

Impériale Clara Haskil !  Voici réunis quatre enregistrements historiques de cette incomparable mozartienne : Concerto n°9, K.271 « Jeunehomme » (1955, Lausanne, dir. Igor Markevitch), Concerto n°19, K.459 (1956, Besançon, dir. Jerzy Katlewicz), Concerto n°24, K.491 (1956, Paris, dir. André Cluytens), Concerto n°20, K.466 (1948, Aix-en-Provence, dir. Ernest Bour).



Déodat de SÉVERAC (1872-1921) : Le Cœur du moulin.  Poème lyrique en 2 actes (1908).  Livret de Maurice Magre.  Jean-Sébastien Bou (Jacques), Sophie Marin-Degor (Marie), Pierre-Yves Pruvot (Le meunier), Marie-Thérèse Keller (La mère).  Maîtrise & Chœurs de l’Opéra de Tours, Orchestre symphonique Région Centre-Tours, dir. Jean-Yves Ossonce.  Timpani (www.timpani-records.com) : 1C1176.  TT : 75’30. 

Il s’agit là du premier enregistrement mondial de cet opéra en 2 actes, œuvre d’un compositeur à propos duquel Debussy écrivit : « Il fait de la musique qui sent bon, et l’on y respire à plein cœur ».  Jugement confirmé !  Voilà certes un ouvrage qui mériterait d’être monté sur une grande scène nationale.

Déodat de Séverac Le Cœur du moulin (Opéra - Première mondiale)


Gabriel PIERNÉ (1863-1937) : Œuvres pour pianoLaurent Wagschal, piano.  Timpani (www.timpani-records.com) : 1C1178.  TT : 61’41. 

Gabriel Pierné est, enfin ! sorti du purgatoire où un certain terrorisme avant-gardiste – bien heureusement désuet aujourd’hui – l’avait relégué.  Nous permettant de redécouvrir des œuvres souvent d’une grande profondeur, alliée à un lyrisme parfaitement maîtrisé : Variations en ut mineur op. 42 (1918), Étude de concert op.13 (1887), Trois pièces formant suite de concert op.40 (1903), Passacaille op.52 (1932).  Dans la magnifique interprétation de Laurent Wagschal, au jeu très intériorisé et doté d’un rare sens du phrasé.  La révélation d’un répertoire et d’un interprète.


Ernest CHAUSSON (1855-1899) : Concert op.21, Chanson perpétuelle op.37, Quatuor op.35.  Sandrine Piau (soprano), Régis Pasquier (violon), Philippe Bianconi (piano), Quatuor Parisii.  Saphir (www.saphirproductions.net) : LVC 1092.  TT : 78’26.

Ernest Chausson ou « l’invention musicale au crépuscule d’une tradition »…  Par de nos plus grands interprètes, voici regroupés le Concert pour piano, violon & quatuor à cordes (dont la célèbre Sicilienne), La chanson perpétuelle (interprétée - avec toute la pureté vocale et la pudeur requises - par la merveilleuse Sandrine Piau) et le trop rare Quatuor à cordes en ut mineur (chef-d’œuvre interrompu par la mort tragique du compositeur, dont pieusement Saint-Saëns acheva le 4e mouvement).  Un indispensable !



Guy SACRE (°1948) : Œuvres pour piano, vol. 2.  Billy Eidi, piano.  Timpani (www.timpani-records.com) : 1C1163.  TT : 73’37. 

D’une grande délicatesse et élégance est la musique, éminemment française, de Guy Sacre.  À l’exception du Thème varié (6’34), ce 2e volume de l’œuvre pour piano ne comporte que des pièces brèves (de 0’58 à 2’41).  En cinq cycles : Nouvelles chansons enfantines / Neuf contes moraux / Soliloques / Petits exercices de la solitude / Carnaval.  Pièces finement ciselées par l’excellent Billy Eidi (qui avait déjà enregistré le précédent volume : 1C1026).



Éric LEBRUN (°1967) : Vingt Mystères du Rosaire, pour violon, violoncelle, harpe & grand orgue, op.10 (2010).  2CDs Bayard Musique (www.bayardmusique.com).

Voilà un répertoire qui permettra - n’en doutons pas - de relever le niveau si souvent consternant des musiques programmées dans nos édifices cultuels.  Quatre parties composent cette superbe fresque : Cinq mystères joyeux / Cinq mystères lumineux / Cinq mystères douloureux / Cinq mystères glorieux.  Interprètes : Andréa Garnier, Isabelle Lesage (violon), Clara Izambert (harpe), Éric Lebrun, Marie-Ange Leurent, Lucie Flesch, Yannick Merlin, Béatrice Piertot (orgue), Philippe Bary (violoncelle).  Chacune des quatre parties étant précédée d’une antienne grégorienne chantée par Isabelle Frémeau (soprano).



« Bohemia ».  Josef SUK (1874-1935) : Quatre Pièces pour violon & piano op.17.  Leoš JANÁČEK (1854-1928) : Dumka ; Sonate pour piano & violon.  Bohuslav MARTINŮ (1890-1959) : Sonate n°3 pour piano & violon H.303.  Milena DOLINOVA (ca 1856-1891) & Krystof MARATKA (°1972) : Czardas IIIMarianne Piketty, violon.  Dana Ciocarlie, piano.  Integral Classic (www.integralclassic.com) : INT 221.173.  TT : 71’21.

Inspirées de chants traditionnels, les pièces de Suk et la Dumka de Janáček sont une parfaite initiation aux couleurs de l’âme slave.  Rayonnante joie de vivre, avec quelques échos de jazz, la 3e Sonate de Martinů est l’un de ses chefs-d’œuvre.  La Sonate de Janáček est l’expression sauvage et douloureuse d’un génie solitaire.  La transcription par Krystof Maratka de la Czardas de Milena Dolinova est ouverture à la musique de l’un des plus brillants compositeurs tchèques d’aujourd’hui.  Par deux virtuoses particulièrement concernées, un disque enthousiasmant.



Perles oubliées de la flûte.  Œuvres de Mel Bonis, Max Meyer-Olbersleben, John Francis Barnett & Edwin York-Bowen.  Michel Moragues, flûte.  Kyoko Nojima, piano.  Saphir (www.saphirproductions.net) : LVC 1112.  TT : 74’55. 

Élève de Rampal, le flûtiste Michel Moragues a fondé, avec ses frères, le Quintette Moragues.  Il interprète ici, avec le talent qu’on lui connaît, un ensemble de pièces qui ne manqueront pas d’enrichir le répertoire, déjà fort étendu, de son instrument : Sonate de Mel Bonis, Fantaisie-Sonate op.17 de Max Meyer-Olbersleben, Grand Sonata op.41 de John Francis Barnett et Sonata op.120 d’Edwin York-Bowen.



Franz & Karl DOPPLER : Musique pour deux flûtes & piano, vol. 1.  Claudi Arimany & Shigenori Kudo (flûtes), Alan Branch (piano).  Saphir (www.saphirproductions.net) : LVC 1119.  TT : 73’33. 

Les huit morceaux ici enregistrés furent écrits entre 1852 et 1860, à l’occasion de tournées des frères Doppler.  De ces compositeurs, fort célèbres en leur temps, ont été ici enregistrés : Duettino sur des motifs hongrois op.36, Andante & rondo op.25, Fantaisie sur des motifs hongrois op.35, Concert-paraphrase op.18, Souvenir de Prague op.24, Valse di bravura op.33, Rigoletto-Fantasie (d’après Verdi) et Souvenir à Mme Adelina Patti op.42 (d’après Bellini).



« Unlimited ! »  Avec Éric Aubier (trompette) & Thierry Escaich (orgue).  Coffret de 2CDs Indesens (www.indesens.fr) : INDE025.  Distr. Codaex (CD physique) & Believe (digital).  TT : 56’31 + 55’28.

Le 1er CD est consacré à quelques « tubes » indémodables : Trumpet Volontary (Jeremiah Clarke), Ave Maria (Bach/Gounod), Ave Verum (Mozart), Agnus Dei (Bizet), extraits de Suites, Partita, Cantate et Sonate (J. S. Bach) ainsi que, dans des arrangements de Th. Escaich, Amazing Grace, Nobody knows et un Christmas Medley Le 2nd CD comporte des pièces de compositeurs de notre temps : André Jolivet, Ivan Jevtic, Nicolas Bacri, Henri Tomasi et… Thierry Escaich.  Loin de cette ridicule superbe que, dans pareils duos, nous auront infligée tant de trompettistes, Éric Aubier ne fait pas, pour autant, « pavillon bas » !  D’une parfaite musicalité.



Richard WAGNER & Richard STRAUSS.  Kirsten Flagstad, soprano.  Orchester der Städtischen Oper Berlin, dir. Georges Sebastian.  2CDs Audite (www.audite.de) : 23.416.  TT : 54’38 + 42’17.

Voix grandiose et grandioses visions d’une frémissante humanité…  En 1925, à Berlin, Kirsten Flagstad interprétait, de Wagner, les Wesendonck-Lieder, trois extraits de Tristan (dont Isoldes Klage und Liebestod) et le final du Götterdämmerung (Brünnhildes Schlussgesang), ainsi que, de Richard Strauss, les 2e, 3e et 4e des Vier letzte Lieder, suivis du monologue d’Elektra (Orest ! Orest ! O lass deine Augen).  Plongées dans des cratères d’une violence qu’aura seule pu égaler, dans R. Strauss, une Leontyne Price…  Bonheur de retrouver aussi Georges Sebastian, cet immense chef d’orchestre naturalisé français qu’une honteuse cabale tint si longtemps éloigné de nos maisons d’opéra.



L’Occidentale de fanfare : Version Originale.  Le Maxiphone collectif (www.lemaxiphone.com).  TT : 63’58.

N’excluant pas plus le jazz, le rock, le funk que le reggae, cette peu banale formation de 9 musiciens fonde sa quête d’un tout nouveau répertoire, inspiré du folklore français, sur la polyvalence instrumentale de ses membres : Anne Colas (flûtes), Guillaume Schmidt (saxophones), Fred Pouget (clarinettes), Ronan Legourierec (bombardes & saxophone baryton), Fidel Fourneyron (trombone & tuba), Anthony Maselin (cornemuse & uillean pipe), Claude Barrault (trompette, bugle, saxhorn & cornet), Maurice Fari (percussions) et Gwen Goulène (bombarde, accordéon, flûte, percussions, harpe).  Quatorze titres, dans de savoureux arrangements signés Fred Pouget, Gwen Goulène, Ronan Legourierec ou Gilles Chabenat.



Collectif RUKA : Ceci n’est pas une fanfareJazz Bond Association (www.jazzbondassociation.info) : JBR 9.  TT : 36’06.

Joyeux collages sonores « gagueusement » assumés !  Sous huit titres : Ainsi naissent les hommes / Interdit aux tartes, même tenues en laisse / No entiendo nada / Rüka baga / Ceci n’est pas une fanfare / Arrête ton pipeau / Sous le manteau / Baroco loco.  Quatre énergumènes menant la danse : Marc Béhin (guitares, ukulélé, gongs, cloches), Eduardo Palacio (percussion, batterie, appeaux), Yvan Picault (saxophone, clarinette basse, sifflets) et Olivier Wiesner (guitare préparée, basse).


Francis Gérimont.


Olivier GREIF : Concerto « Durch Adams Fall ».  Sonate de Requiem.  Henri Demarquette (violoncelle).  Giovanni Bellucci (piano).  Orchestre national de France, dir. Jean-Claude Casadesus.  Accord : 480 3761.

Le lecteur connaît assez les options esthétiques de la signataire de ces lignes pour ne point s’étonner de l’agacement éprouvé à l’écoute d’un langage qui abuse du collage et de schèmes simplistes.  Cet agacement se heurte à la conscience – soyons honnêtes jusqu’au bout – d’éprouver une empathie sincère pour un auteur déchiré par les tragédies de l’histoire, lequel endossa lesdites tragédies au point de s’abîmer dans une errance claustrale de l’esprit (que l’on nous pardonne l’oxymore, mais on sait comment Olivier Greif disparut de la scène musicale), puis de revenir à son art en y jetant le cri de toutes les douleurs humaines… jusqu’à la mort.

Tout le disque est porté par le chant, au galbe absolument parfait, de l’archet d’Henri Demarquette ; son émotion est communicative, jamais « surjouée », toujours modulée par un pur vibrato qui caresse l’attention de l’auditeur.  La Sonate de Requiem lui ouvre le champ d’un chaleureux compagnonnage avec Giovanni Bellucci.  Que Jean-Claude Casadesus nous excuse, mais pour lui décerner d’aussi laudatives mentions, faudrait-il encore qu’il ait quelque chose à faire, et l’on touche là une faiblesse d’Olivier Greif, à savoir une inexpérience dans le champ de l’orchestration dont il prenait peut-être la mesure quand, avec lucidité, il disait à la fin de sa vie : « Je crois que je commence à être un vrai compositeur ».  En effet, son trop long retrait du monde et sa mort précoce (après un si bref retour à la vie musicale) l’auront privé d’un élargissement de son savoir compositionnel qui aurait étayé la portée de son inspiration ; nous voici à jamais orphelins d’une écriture à laquelle manquèrent les outils dont se serait assurément servi, pour mieux sculpter son message bouleversant, cet esprit tourmenté par les plus hauts mystères.

Par La Chute D'Adam


Marc MONNET (°1947) : Bosse, crâne rasé, nez crochu, pour deux pianos, ensemble & transformations en temps réel (2000) (a).  Imaginary Travel, pour piano & électronique (1996) (b).  Épaule cousue, bouche ouverte, cœur fendu, pour violon solo, ensemble & transformations en temps réel (2008) (c).  (a) Géraldine Dutroncy & Dimitri Vassilakis (pianos), Ensemble Court-Circuit, dir. Pierre-André Valade, Alexis Baskind & Gilbert Nouno (informatique musicale Ircam).  (b) François-Frédéric Guy (piano) & Thierry Coduys (informatique musicale).  (c) Tedi Papavrami (violon), Daniel Gloger (contre-ténor), Ensemble Court-Circuit, dir. Pierre-André Valade & Thierry Coduys (informatique musicale).  2CDs Zig-Zag Territoires (www.zigzag-territoires.com) : ZZT 100403.

Les titres fantaisistes de Marc Monnet répercutent l’esprit de dérision qu’il a glané lors de ses années auprès de Mauricio Kagel, mais quand on franchit ce pas déconcertant, il vaut de ne s’attacher qu’à la musique.  Comment ne pas disperser l’écoute quand se juxtaposent ou se télescopent des atmosphères tellement antagonistes ?  Par un sens des enchaînements littéralement cinématographique, voire cinétique.  Dans Bosse, crâne rasé, nez crochu, une virtuosité exubérante succède à des gouttes d’atmosphère intimement posées, un relent de bal américain s’interpose entre de mystérieuses touches de transformation électronique de l’émission sonore ; louons une nouvelle fois l’osmose des étonnants duettistes que nous avions admirés au Festival Messiaen, Géraldine Dutroncy & Dimitri Vassilakis, et leur empire sur le jaillissement des timbres de leurs claviers, la distillation de l’émotion poétique et le déploiement de la matière sonore.

Épaule cousue, bouche ouverte, cœur fendu nous enveloppe de couleurs sombres ouvrant sur des paysages profonds où l’électronique trace des échappées fantastiques autour du violon puissant de Tedi Papavrami engagé dans de véritables cadences concertantes.  La présence sonore de ces captations est exceptionnelle.  Il faut dire que, pour l’enregistrement des deux œuvres avec ensemble, Marc Monnet s’est adjoint un preneur de son de l’Ircam, Frédéric Prin, et un directeur artistique de luxe : le compositeur Philippe Hurel, co-fondateur de Court-Circuit (dont les musiciens se montrent au mieux de leur forme).  Et, comme par hasard, il en ressort une prise de son magnifiquement fidèle, judicieusement dosée avec l’électronique (aux interventions pourtant très subtiles), donc guidée par l’oreille d’un vrai musicien.  Les deux ouvrages des années 2000 témoignent d’une considérable évolution du compositeur, qui nous séduit assurément. 

La pièce de 1996, Imaginary Travel, pour bénéficier du prestigieux concours de François-Frédéric Guy et montrer des essais électroniques savoureux, n’en restait pas moins tributaire des « tics » d’une époque déjà révolue à sa date de composition ; le résultat n’aboutit pas à une œuvre « composée », mais à une accumulation d’expérimentations.  Le voyage imaginaire de Marc Monnet a donc franchi de nouvelles étapes ces dernières années, qui le propulsent vers des horizons aux perspectives élargies.



Camille SAINT-SAËNS : Symphonie n°3, Concerto pour piano n°4.  Les Siècles, dir. François-Xavier Roth, avec Daniel Roth (à l’orgue de Saint-Sulpice), Jean-François Heisser (piano Érard de 1874).  Musicales Actes Sud : ASM 04 (distr. Harmonia Mundi).

Nous nous sommes déjà exprimés (Lettre d’information de juin 2010) sur les réserves que nous inspire la musique du XIXe siècle jouée « sur instruments d’époque »… et sur l’adhésion que nous inspire l’incontestable talent de François-Xavier Roth.  Témoignages appréciables de concerts, ces captations associent deux partitions en ut mineur de Saint-Saëns.  Dès les premières mesures de la 3e Symphonie, une prenante atmosphère s’immisce et, de chaleureux essors en nerveuses exhortations, on se laisse convaincre par une interprétation dont les intentions expressives touchent juste.  L’acoustique de l’église de Saint-Sulpice enrobe le son de l’orchestre et pallie les restrictions d’effectif, mais on entend à peine le piano – même à 4 mains au plus fort de l’action.  Avant que ne résonne le tutti – qui s’impose par l’arithmétique du nombre –, ceux qui ont intimement connu le chef-d’œuvre de Cavaillé-Coll au temps de Marcel Dupré (au temps où il sonnait si majestueux, incomparablement clair et ample à la fois) ne peuvent que s’émouvoir de l’entendre sonner « petit ».  Raillons au passage la convention qui consiste à déranger les « stars » des organistes pour plaquer quelques accords qu’un étudiant de conservatoire ferait aussi bien.  Car il ne s’agit en rien d’une symphonie concertante !  Rappelons-le avec force, cette symphonie est anglaise (Saint-Saëns, concertiste, fit de nombreuses tournées en Grande-Bretagne, et l’op.78 lui fut commandé par la London Philharmonic Society qui en assura la création) : elle comporte un orgue car il était « normal », en Angleterre, d’intégrer l’orgue à l’orchestre, l’instrument à tuyaux se trouvant « normalement » sur les plateaux de toutes les salles de concert ; on trouve l’orgue dans l’effectif de nombreuses partitions symphoniques anglaises du temps (Charles Villiers Stanford, Gustav Holst, avaient d’ailleurs reçu une formation d’organiste dans leur cursus « normal » d’études), et c’est avouer la grande misère de la France en matière d’orgues de concert que d’aller jusqu’à souligner cette particularité – qui n’en est une qu’à l’intérieur de nos frontières – en l’adjoignant au titre !  Or la partition, dédiée à la mémoire de Franz Liszt, s’intitule 3e Symphonie en ut mineur, point à la ligne.

Les concertos pour piano comptent parmi les chefs-d’œuvre de l’immense pianiste que fut Saint-Saëns, et le caractère des thèmes du 4e (notamment le premier, avec son insistance sur la quarte augmentée de l’appoggiature) justifie la tendresse que lui porte Jean-François Heisser.  L’intelligence des deux interprètes met en valeur tous les caractères que la mobilité de la composition fait défiler.  Alors, que penser du piano Érard de 1874 par lequel le soliste répond aux instruments « d’époque » de l’orchestre ?  Le grand pianisme de Saint-Saëns se situe dans la filiation de celui de Liszt, c’est dire que ces virtuoses-compositeurs ont stimulé l’évolution du piano moderne vers plus de brillance et de sécurité d’intonation, qualités que l’on nous permettra de préférer à la voix vacillante de l’aïeul.  Le piano Érard, tout comme l’orchestre, s’avère à cours de réserve pour monter l’effervescence de l’Allegro final.



Benjamin DALE : Sonate en mineur.  William HURLSTONE : Sonate en fa mineur.  Mark Bebbington, piano.  Somm : CD 097 (distr. Codaex).

Voici deux pièces rares pour compléter la découverte de la musique anglaise à l’époque où elle conquérait à peine son autonomie par rapport à l’influence post-romantique du continent.  La « première mondiale » au disque de la Sonate (1894) de Hurlstone attire l’attention sur ce talentueux camarade d’Arnold Bax et York Bowen, victime de son asthme chronique à l’âge de 30 ans.  Les séductions romantiques s’y parent d’évolutions du langage qui auraient probablement porté des fruits délectables, le compositeur eût-il vécu.  En revanche, la Sonate (1902-1905) de Benjamin Dale, malgré l’intérêt de sa conception architecturale enchâssant diverses formes l’une dans l’autre, s’avère trop longue (48 minutes !), d’autant que le jeu de Mark Bebbington, élégant mais pas assez coloré dans l’extension de la palette dynamique, ne soutient guère l’intérêt.  D’un point de vue technique, on s’étonnera d’une restitution… bizarre des résonances du piano (mauvais usage de la réverbération artificielle ?).



William WALTON : Symphonies n°1 et 2.  Orchestre national de Lille, dir. Owain Arwel Hughes.  Bis : SACD-1646 (distr. Codaex).

L’implication d’un orchestre français dans un enregistrement de musique anglaise est suffisamment rare pour être soulignée.  Le chef gallois Owain Arwel Hughes donne une image au dynamisme presque « américain » de ces deux symphonies dont il privilégie le brio et l’alacrité, mais sans réussir à vaincre l’acidité qui entache le jeu des cordes et des bois lillois, privant cette version pleine d’impact de concurrencer d’antérieures réalisations dues aux grands orchestres anglais.


Sylviane Falcinelli.


Niccolò PAGANINI : 24 Caprices pour violon seul.  Julia Fischer, violon.  Universal/Decca : 478 2274.  TT : 79'42.

La jeune violoniste Julia Fischer, déjà figure notable de la profession, s'attaque aux fameux Caprices de Paganini.  Pour le côté virtuose de ces pièces ? « Précisément parce qu'elles ne le sont pas » réplique-t-elle.  Et pour dissiper les malentendus associés au qualificatif de musique diabolique, colporté avec la vigueur du dogme ou illustré par ce portrait tourmenté que fit Delacroix du compositeur-interprète.  L'art violonistique porté à sa quintessence plutôt.  Il faut se rappeler qu'il s'agissait dans l'esprit de son auteur d'exercices de travail, non censés être joués en concert.  Et pourtant, entendue dans sa continuité, une certaine logique se dégage de cette somme : une suite de pièces d'un seul tenant ou figurant quelque scène contrastée en plusieurs séquences, voire en la forme d'un thème et variations.  Au-delà des difficultés techniques amoncelées à l'envi, Julia Fischer fait montre d'une belle autorité, d'une sûre maîtrise de l'intensité et des couleurs.  On est séduit par la sonorité charnue, le sens de la déclamation faite de sensibilité, l'étonnante fluidité du discours.  Quelques choix personnels s'avèrent judicieux, comme le fait de jouer le 6Caprice avec la sourdine, ce qui introduit comme un halo de mystère et un agréable répit au milieu de mille courses échevelées.  Surtout, elle ne cherche pas à solliciter le texte pour l'effet en soi.  À cet égard les fins de morceaux restent d'une remarquable discrétion.  Une prise de son naturelle fait le reste.



Maurice RAVEL : Concerto « pour la main gauche » pour piano et orchestre en  majeur. Concerto en sol majeur pour piano et orchestreMiroirs.  Pierre-Laurent Aimard, piano.  The Cleveland Orchestra, dir. Pierre Boulez.  Universal/DG : 477.  TT : 70'32.

Voilà un bien beau disque de piano, et généreux ! Avec les deux concertos pour piano, composés simultanément, Ravel livre son dernier message.  Si l’on a pu dire que les pièces forment un couple, chacune développe une atmosphère bien spécifique : enjoué, insouciant, insolite avec ses traits jazzy, mais aussi lyrique quoique sans effusion, pour ce qui est du Concerto en sol ; dramatique, presque tragique, en ce qui concerne celui conçu « pour la main gauche » où « tout est tension » selon Boulez.  Pierre-Laurent Aimard les aborde sans a priori, concerné plus par le phénomène acoustique et la perfection formelle que par la virtuosité et la pure brillance pianistique.  La rythmique est implacable dans le Concerto en ré où cette main unique qui balaie le clavier de gauche à droite donne l'impression qu'en réalité les deux mains sont à l'œuvre.  C'est de précision incisive qu'il faut parler à propos de l’œuvre-sœur où domine l'esprit de divertissement avec de pittoresques clins d'œil.  Dans l'un et l'autre cas, le tissu orchestral peaufiné par Boulez est pure splendeur : rythmique qui, pour être instable, reste lumineuse, formidable impact des tuttis, absolue transparence du discours.  Miroirs forme un complément naturel.  Dans ces pièces pour piano seul, d'une ingéniosité rare, Ravel semble s'inspirer du chatoiement de l'orchestre.  Aimard pare son interprétation d'une élégance toute française.  On y admire, comme dans les pièces concertantes, le souci d'allègement de la texture par des attaques claires et franches, l'objectivité qui tourne le dos à quelque impressionnisme à la manière d'un Debussy ; car pour reprendre le mot de Cortot, « là où Debussy suggère, Ravel élucide et précise ».  Mais aussi les harmonies puissamment suggestives (Une barque sur l'océan), insaisissables (Noctuelles) ou encore presque réalistes par une écriture « en pointe sèche » (Alborada del gracioso).  Il en révèle surtout l'étonnante modernité.



Richard WAGNER : Parsifal, festival scénique sacré en trois actes.  Livret du compositeur.  Gary Lehman, Violeta Urmana, René Pape, Evgeny Nikitin, Nicolai Putilin, Alexei Tanovitski.  Chœurs et Orchestre du Théâtre Mariinsky, dir. Valery Gergiev.  4 SACDs Mariinsky : MAR0508.  TT : 258'35.

Il est, décidément, peu de domaines que Valery Gergiev n'aborde.  Sa passion pour la musique de Wagner ne date pas d'hier.  On se souvient d'une exécution mémorable de Parsifal précisément, à Salzbourg, il y a bientôt dix ans.  Aujourd'hui, à la tête de son orchestre, il revient à l'ultime chef-d'œuvre du maître de Bayreuth, après avoir fréquenté le Ring, le Vaisseau ou Tristan.  Fruit d'exécutions de concert, le résultat est convaincant.  Gergiev privilégie un discours hiératique, ménageant de suggestifs silences, aux Ier et IIIe actes, quoique le début de ce dernier arbore une lenteur à la limite de la surcharge.  Le second, abordé avec vivacité, prend une tonalité plus théâtrale qu'accentue l'excitation d'un brelan de filles-fleurs menées tambour battant et non sans une pointe d'acidité vocale, d'un curieux effet ici.  Partout ressort la clarté de l'orchestration, son authenticité, ses sombres couleurs, comme le sens de la construction.  L'orchestre du Théâtre Mariinsky fait montre d'une qualité instrumentale remarquable, dans l'articulation notamment, nette et précise.  Il n'est pas de pupitres qui ne méritent des éloges.  Cette exécution est adornée par une distribution de haut niveau.  Le Gurnemanz de René Pape la domine, de son riche timbre de basse chantante capable de merveilleux pianissimos.  Le ton de conversation adopté dans le grand récit du I, comme lors de l'échange au III avec Parsifal apporte au personnage une vibrante humanité et une expression dépourvue d'emphase.  Evgeny Nikitin, Amfortas, est plus en retrait : le portrait reste dépourvu de l'ultime émotion qui rend ce roi déchu si bouleversant dans sa souffrance, et la voix a tendance à se durcir lorsque sollicitée dans le registre aigu.  Violeta Urmana, Kundry, offre de la femme séductrice et pécheresse un intéressant portrait, quoique, là aussi, gênée par les passages exposés.  Gary Lehman assure le rôle-titre de sa voix barytonnante et de modeste calibre.  La composition manque cependant de charisme.  La partie chorale est irréprochable et l'effet d'étagement sonore entre ses diverses composantes, chœurs d'hommes, de femmes, d'enfants, est parfaitement jaugé.  Là comme ailleurs, la prise de son achève un bel équilibre orchestre-voix.



« ¡México! », chansons mexicaines.  Rolando Villazón, ténor.  Simon Bolivar soloists and guests.  Universal/DG : 477 8769.  TT : 65'48.

Rolando Villazón aime chanter.  Comme tout citoyen mexicain.  Il se fait plaisir en proposant un bouquet de chansons de son pays qui, assure-t-il, « ont une valeur artistique qui va bien au-delà du divertissement ».  Son enthousiasme est intarissable et cela se ressent.  À mi-chemin entre le chant populaire et l'air classique, empruntant à la danse par leurs mouvements chaloupés et autres rythmes latino, ce sont des musiques brillantes.  Leur originalité s'enrichit de la sonorité d'instruments à percussion typiques comme les maracas, ou à corde, tel le cuatro, cette singulière guitare vénézuélienne à quatre cordes.  Les arrangements ont été préparés avec soin.  Le ténor dit avoir préféré « un petit ensemble de chambre à des arrangements de type hollywoodien pour orchestre symphonique ».  Fort à propos, pour restituer à ces chansons leur caractère intime.  Enregistré en mars dernier, après quelque mois d'abstinence, le disque met en avant une belle condition vocale.  On a infiniment de plaisir à retrouver le legato de ce timbre ensoleillé.  La langue espagnole en devient un régal.  Aigus lumineux, pianissimos susurrés, notes tenues, fins en falsetto ou en note diminuée, tout est fait pour laisser s'épanouir le charme de cette musique un brin sensuelle, attachante dans sa simplicité, et permettre de « faire ressortir son caractère joyeux », quel que soit le sentiment exprimé.



DVD

Charles GOUNOD : Mireille.  Opéra en cinq actes & sept tableaux.  Livret de Michel Carré, d'après le poème Mirèio de Frédéric Mistral.  Inva Mula, Charles Castronovo, Franck Ferrari, Alain Vernhes, Sylvie Brunet, Anne-Catherine Gillet, Sébastien Droy, Nicolas Cavailler.  Chœur et Orchestre de l'Opéra national de Paris, dir. Marc Minkowski.  Mise en scène : Nicolas Joel.  2DVDs Fra Musica : FRA002.  TT : 2h32'.

Saisie en direct à l'Opéra Garnier, lors de l'inauguration de la saison 2009/2010, Mireille n'aura pas tardé à nous venir en DVD.  Si le tragique émerge vite dans cet opéra, l'action n'y progresse que lentement, sans imprévu.  Elle se concentre sur l'atmosphère poétique et la trajectoire d'une insouciante jeune fille qui, confrontée au drame de la jalousie amoureuse, connaîtra une sorte d'assomption mystique.  La mise en scène de Nicolas Joel se plaît à illustrer une atmosphère, celle d'une Provence gorgée de soleil, et à tracer des portraits pourvus d'émotion et de simplicité.  La captation filmée ne cherche pas à se départir d'une certaine neutralité.  Elle saisit au premier degré une direction d'acteurs qui se veut objective, presque convenue ; ce qui peut montrer ses limites.  Ainsi du personnage d'Ourrias, le prétendant malheureux, dont le rictus de dépit s'étale bien généreusement.  Les tons mordorés de frondaisons de plusieurs des tableaux séduisent, comme les costumes d'une belle couleur locale provençale.  Mais le tableau du Rhône et son atmosphère fantastique donnent peu de choses à voir, comme celui du désert de la Crau, écrasé d'un soleil aveuglant.  Reste que la caméra se plaît alors à détailler le calvaire de Mireille en de magnifiques plans rapprochés, mettant en évidence l'engagement de l'interprète dont la naïveté touchante a laissé place à une déchirante détresse.  Tout comme la jeunesse et la passion contrariée de Vincent sont ailleurs finement évoquées.  L'exécution musicale est remarquable : la direction flamboyante de Marc Minkowski nous régale de la richesse mélodique que Gounod a accumulée, dont l’ensemble des protagonistes se font une fête.



Georges BIZET : CarmenDrame lyrique en trois actes.  Livret d’Henri Meilhac & Ludovic Halévy, d'après la nouvelle de Prosper Mérimée.  Elīna Garanča, Roberto Alagna, Barbara Frittoli, Teddy Tahu Rhodes, Keith Miller.  The Metropolitan Orchestra, Chorus and Ballet, dir. Yannick Nézet-Séguin.  Mise en scène : Richard Eyre.  2DVDs Universal/DG : 073 4581.  TT : 156'.

La production de Carmen du Met donne à voir le grand spectacle comme on l'aime à New York dans des décors grandioses et une mise en scène démonstrative.  Transposé dans les années 30, le plus réussi est sans conteste le premier acte qui grâce à un décor évolutif, saisit ses divers climats, qui de la place grouillante de Séville, qui de la caserne et de sa soldatesque nonchalante.  Le deuxième est attrayant, quoique encombré d'une effervescence hystérique lors de l'entrée d'Escamillo dont l'air fameux frôle la parodie à force de mimiques ampoulées.  Les choses tournent court au troisième qui se complaît dans quelque poncif décoratif de paysage montagneux.  Le dernier connaît une franche animation avec défilés hauts en couleurs où ne manquent ni les picadors ni le pauvre curé.  L'extrême mobilité de la caméra et la variété des angles de vue (dont une captation frontale, comme du premier rang d'orchestre) suit habilement personnages et ensembles.  On se souviendra de quelques belles images (le visage de Carmen durant l'air de José, le duo final).  La haute définition apporte une indéniable relief.  Dommage qu'on ait choisi la version avec les récitatifs de Guiraud dont l'impact dramatique est bien mince.  La distribution est dominée par la Carmen d’Elīna Garanča, irrésistible, sans pathos inutile, magistralement chantée.  Le Don José de Roberto Alagna a, certes, encore à dire, mais n'a plus la brillance d'hier ; ce qui le conduit à prendre des risques tel ce falsetto concluant l’air de la fleur.  La bonne surprise vient de la Micaéla de Barbara Frittoti, d'une belle ligne vocale.  La déception, de l'Escamillo, desservi par un physique impossible de géant bellâtre et un chant passé en force.  Yannick Nézet-Séguin tire de superbes sonorités de l'orchestre du Met, même s'il favorise des tempos rapides, voire martelés (l'air du toréador) et a tendance à appuyer sur l'effet.


Jean-Pierre Robert.


« Chorus », la première émission rock d’Antoine de Caunes.  Réalisation : Claude Ventura.  Coffret de 3DVDs Ina éditions (www.ina.fr).  Livret de 24 pages (Interview d’Yves Bigot / Entretien avec Antoine de Caunes / Le petit dictionnaire du rock).

Diffusée de septembre 1978 à juin 1981, « Chorus » c’était, sur le service public, 37’00 de musique live, chaque semaine.  Une programmation qui rend compte de l’incroyable foisonnement du rock à cette époque charnière.  En trois séquences : Playlist (sélection à voir et écouter), Big Live (performances les plus mythiques), Live Express (meilleurs live de « Chorus »).  DVD 1 : The Clash sur la scène du Palace + Magma, Telephone, The Cure, Siouxsie & The Banshees, Ramones, Stray Cats.  DVD 2 : ZZ Top au Pavillon Baltard + Trust, The Jam, The Stranglers, The Undertones, Madness, Tom Waits, Garland Jeffreys, Tom Petty.  DVD 3 : The Police au Théâtre de l’Empire + Jacques Higelin, Peter Gabriel, Dire Straits, The Pretenders, Captain Beefheart, Elvis Costello.  À l’Ina, mille grâces !


Francis Gérimont.

 




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Musique(s)


Par Hervé Guilleminot

Gallimard Jeunesse

Collection : Tothème

Thèmes : Musique – Instruments – Société – Jeune - Concert

96 pages

13,90 €

La nouvelle collection Tothème, chez Gallimard Jeunesse, est particulièrement innovante car elle incite le lecteur à réfléchir de façon ludique.  Des textes concis et accessibles offrent des repères précis.  La mise en scène est dynamique et aiguise la curiosité en mettant les informations en perspective.


Qui sont les leaders du rock’n’roll, du blues, du psychédélisme, du reggae ou de l’électro ?  Quel est l’album incontournable d’Elvis Presley, de Prince, de Madonna ou de Mickael Jackson ? Quel support a entraîné le plus de changement dans les habitudes d’écoute de la musique parmi le vinyle, la K7, le CD et le MP3 ?

À travers un parcours en 60 entrées, pénétrez dans l’univers de la musique, vivez tous les grands concerts, découvrez les tubes qui ont fait danser des générations entières.

Hervé Guilleminot est un passionné de rock en tout genre, a écrit de nombreuses biographies de stars du rock telles que Kurt Cobain, les Beatles, les Rolling Stones, les Doors, U2…


Vous pouvez retrouver et écouter sur le site Deezer les 100 chansons qui ont marqué l’histoire du Pop/Rock

http://deezer.com/partners/totheme/musiques






Tremblements de tête


Hervé Suhubiette

Didier Jeunesse

36 pages - 23,50 €


Tiré du dernier spectacle d’Hervé Suhubiette, Tremblements de tête est un étonnant livre-disque où règne un joyeux désordre, fait de rêveries, fanfares et inventions sonores.

Le CD démarre sur deux chansons : Bonjour ! et Pour entrer dans ma tête qui donnent le ton.  Hervé Suhubiette nous convie à un véritable voyage introspectif.  Tour à tour en colère, amoureux, mélancolique et joyeux, l’artiste nous fait partager ses pensées, humeurs et coups de gueule, sans jamais oublier son public : les enfants.

Les thèmes correspondent aux multiples questions des enfants : le deuil, la complexité de l’état amoureux, la capacité à rêver ou encore le désir d’être un autre.

Au son du piano et de l’accordéon, entre fanfare et mélodies plus douces, ses chansons pêchues et touchantes sont ponctuées de bruitages : klaxons, sonnettes, tic tac de l’horloge et autres bizarreries.  Hervé Suhubiette fait partie de cette nouvelle scène de la chanson, originale et créative, qui n’est pas sans rappeler l’énergie d’Higelin.

Le livre-disque est illustré avec douceur, à l’aquarelle, par Anouck Boisrobert, nous entraînant dans son univers onirique - puissant et mélancolique.


Laetitia Girard.


 

 

S’ouvrant sur un éditorial de l’Inspecteur général de l’Éducation nationale, M. Vincent Maestracci, orientant de façon concise l’élève dans son travail, le supplément Baccalauréat 2011 de L’éducation musicale est d’une rare densité : pas moins de 148 pages d’analyses et références.

 

Indispensable aux professeurs d’Éducation musicale et aux élèves de Terminale qui préparent l’épreuve de spécialité « série L » ou l’épreuve facultative « Toutes séries générales et technologiques du baccalauréat », cette publication réunit les connaissances culturelles et techniques nécessaires à une préparation réussie.

 

À commander aux Éditions Beauchesne : 7, cité du Cardinal-Lemoine, 75005 Paris. Tél : 01 53 10 08 18.  Fax : 01 53 10 85 19.  s.desmoulins@leducation-musicale.com

 

 


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Dossiers à paraître :

  • La voix



 

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