Lettre d'Information - n°108 novembre 2016
Lettre d'octobre 2016. Tirage : 61.231 exemplaires
L'AGENDA
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La musique juive
dans tous ses tats
LInstitut Europen des Musiques Juives organise un grand concert
de gala intitul "la musique juive dans tous ses tats" - 2e dition
avec au programme des pices de la Liturgie juive du 17 me au 20 me sicle par le Chur de la synagogue Kehilat Gesher ; puis des mlodies sfarades
et polyphoniques bulgares, interprtes par le Quatuor Balkanes et David Bruley ; et enfin de la musique Klezmer et
Salsa cubaine par Cigarillos
en el Struddle et ses 9 musiciens.
Salle Cortot, 78 rue
Cardinet, 75017 Paris, le 6 novembre 2016
18H.
Rservations : par tel : 01
45 82 20 52 : en ligne : contact@iemj.org
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re de renouveau l'Orchestre de Bretagne
DR
Trs motiv par son nouveau directeur musical, Grant Liewellyn,
nomm en mai 2015, l'Orchestre Symphonique de Bretagne vit une re de renouveau
tout en prservant une identit forte. C'est la premire fois que le chef
(galement directeur musical de l'Orchestre Symphonique de Caroline du Nord) va
diriger l'OSB Paris. Franois Dumont, qui s'est lanc le dfi d'enregistrer
l'intgrale des concertos de Mozart avec l'orchestre, dirigera une
partie du programme depuis son piano (le concerto K. 453). Le concert au cours
duquel on pourra entendre l'aria de Mozart Ch'io mi scordi di
te , chante par la soprano irlandaise Helen Kearns, et la Symphonie N 2
op. 36 de Beethoven, prsentera
encore deux compositions de la compositrice, pianiste et percussionniste
Frdrique Lory (*1970) : Plinn et variations (2001) et Avel Viz,
Complaintes du vent d'est (2014) avec Marthe Vassalo, spcialiste de chant
traditionnel breton.
A l'occasion de cette soire Paris, l'orchestre prsentera la
sortie de deux nouveaux enregistrements CD sous son propre label, OSB Productions.
Salle Gaveau, le 10 novembre 2016 20H30.
Rservations : Billetterie
45-47, rue de la Botie, 75008 Paris ; par tel. : 01 49 53 05 07 ; en ligne :
www.sallegaveau.com
15 - 23 / 11
Festival L'esprit du piano de Bordeaux
Le
grand rendez vous pianistique bordelais de l'automne va de nouveau runir stars
de l'instrument et jeunes espoirs ; sans oublier le jazz. Les festivits
s'ouvriront par un rcital de Boris Berezovsky qui jouera la Sonate
n29
Hammerklavier , op.106 de Beethoven, puis des Pices
lyriques de Grieg (15/11, Auditorium, 20H). Le jeune David Violi se produira
dans des uvres de Debussy - Children's Corner et
de Schubert - Sonate D 960 (16/11, Universit Montaigne, 20H). Nicholas
Angelich jouera avec lOrchestre National de Bordeaux Aquitaine, dirig par
Paul Daniel, le concerto N 5 l'Empereur de Beethoven, avant
l'intgrale de la musique de scne d'Egmont avec Chlo Briot et Marcial
Di Fonzo Bo, rcitant (17/11, Auditorium, 20H). L'immense Paul Badura Skoda donnera
les trois dernires sonates op 109, 110 et 111 de Beethoven, la rencontre des
gants (19/11, Auditorium, 20H). Pavel Kolesnikov se produira dans un programme
runissant Mozart - sonate K. 332 -
Tchaichovski extraits de Saisons - et Schumann - Carnaval de Vienne
op. 36 - (20/11 Auditorium, 11H). Philippe
Bianconi partagera son programme entre Beethoven - sonate
Pastorale op. 28 -, Schumann - Davidsbndlertnze - et
Liszt (21/11, Thtre Fmina, 20H).
Autre concert que celui de Guillaume
Vincent et d'Ismal Margain avec le Chur de lOpra National de Bordeaux,
dirig par Salvatore Caputo, juxtaposant des pices pour piano seul de Chopin
et de Liszt, un morceau pour deux pianos ou piano quatre mains telle que la
rare sonate op. 56 de Schumann rvise par Bizet, et enfin des pices pour chur de Brahms (22/11,
Auditorium, 20H). Enfin Jean-Baptiste Fonlupt donnera deux rcitals l'glise
Notre Dame, consacrs Schubert Klavierstcke -, Schumann - Arabesques
op. 18 & Novelette op. 21 -, Ravel - La valse - et Liszt
(23 et 24 /11 20H). Par ailleurs une
Carte Blanche Jazz avec Yaron Herman et Ziv Ravitz aura lieu le 18/11 20H,
l'Auditorium.
Du 15 au 23
novembre 2016 : auditorium et autres lieux
Renseignements et rservations : Billetterie, 8-13, Cours Georges
Clemenceau, 33000 Bordeaux ; par tel : 05 56 00 85 95; en ligne : www.espritdupiano.fr
ou www.opera.bordeaux.com
18, 20, 22, 25,
27, 29 / 11
Le Turc en
Italie au Capitole
La
vogue de Rossini ne se dment pas et les scnes hexagonales n'hsitent pas
prsenter ses opras buffa les plus originaux. Ainsi le Capitole qui s'offre
une nouvelle production du Turc en Italie (1814) qu'on peut considrer
comme une suite ou une rplique de L'Italienne Alger. Brio, humour,
aisance vocale, abondance orchestrale et surtout vitalit contagieuse dans les
ensembles caractrisent cet opus bouffe. La mise en scne est signe d'Emilio
Sagi dont on peut prdire une solide verve et un sr maniement de la veine
cocasse au fil des imbroglios et quiproquos typiques de ce rpertoire.
L'Orchestre du Capitole sera dirig par Attilio Cremonesi. Deux basses rompues
l'bouriffant comique rossinien sont de la partie : Pietro Spagnioli et
l'infatigable Alessandro Corbelli.
Thtre du Capitole, les
18, 22, 25, 29 novembre 2016 20H
et les 20, 27/11 15H
Rservations
: billetterie : Place du Capitole, 31014 Toulouse Cedex 6 ; par tel.: 05 61 63
13 13 ; en ligne : www.theatreducapitole.com ou service.location@capitole.toulouse.fr
18 20 / 11
Orchestres en
fte ! ou la France en musique !
La 8e dition d'Orchestres en fte ! organise par l'Association Franaise des Orchestres (AFO) aura lieu le week end du 18 au 20 novembre sur tout le territoire
national. Le compositeur choisi pour le thme de ce week-end est Ludwig van
Beethoven. En parallle
l'exposition parisienne Ludwig van . Le parrain de cette dition est Enki
Bilal. Quelques 24 orchestres participent l'opration, pour une centaine
d'vnements dans toute la France. Dont une srie intitule L'orchestre
dconcertant destine faire dcouvrir tous, petits et grands, de
manire souvent ludique, ce qu'est un orchestre symphonique : de Valenciennes
Metz, de Tours Mulhouse, de Massy Clermont-Ferrand, de Lyon Marseille.
Plusieurs orchestres rgionaux se produiront la Philharmonie
de Paris dans le cadre de son Week end Beethoven , proposant
concerts symphoniques mais aussi de musique de chambre et animations festives.
Ainsi l'Orchestre du Capitole de Toulouse, dirig par Tugan Sokhiev (avec,
entre autres, une cration d'Hugues Dufourt ; 18/11, 20H30), l'Orchestre
National d'Ile-de-France, dirig par Enrique Mazzola avec Louis Lortie pour le
Cinquime concerto l'Empereur ; 19/11, 11H) ; l'Orchestre Victor
Hugo Franche-Comt (19/11, 12H30), les solistes de l'Ensemble Intercontemporain
pour Ludwig van de Kagel (19/11 14H30 & 16H), l'Orchestre
Poitou-Charentes et Jean-Franois Heisser
(33 Variations sur 33 variations de Hans Zender (19/11, 17H30),
l'Orchestre du Conservatoire de Paris (20/11, 11H), l'Orchestre des Pays de
Savoie, dirig par Nicolas Chauvin (20/11, 14H30), l'Orchestre Philharmonique
de Strasbourg et Michel Tabachnik pour la IX me Symphonie (20/11,
16H30) ou encore l'Orchestre de Picardie avec chur de smartphones, pour la
7 Symphonie et un concert-jeu o il faudra reconnatre si une pice est de
Beethoven ou ne l'est pas (20/11, 19H).
DR
Des projets artistiques transversaux en partenariat avec
l'AFO mettront en avant de jeunes artistes qui auront carte blanche pour
tmoigner de ce week-end festif : des musiciens (l'Orchestre Franais des
jeunes, les CNSMDP de Paris et de Lyon) mais aussi de jeunes photographes (de
l'cole des Gobelins) et de jeunes dessinateurs (des ditions Dargaud).
Du 18 au 20
novembre 2016
Renseignements : Association franaise des orchestres (AFO ) :
www.france-orchestres.com.
Philharmonie de Paris : Billetterie, 221 avenue Jean Jaures 75019
Pars; par tel : 01 44 84 44 84 ; en ligne : www.philharmoniedeparis.fr
19, 22, 24, 26,
28 / 11
Owen Wingrave par l'Acadmie de l'Opra de Paris
DR
Cr
en 1971 la BBC, l'avant dernier opra de Benjamin Britten, Owen Wingrave,
op. 85, reste mconnu sur le continent. Inspir de la nouvelle ponyme d'Henry
James, il fut crit spcialement pour la tlvision, un projet que le
compositeur caressait dj pour Le Tour d'crou. Il traite du funeste
destin du rejeton d'une illustre famille anglaise, de grande tradition
militaire, qui refuse d'embrasser la carrire des armes. Un lment
fantastique, comme dans l'autre opra inspir de James, teinte celui-ci d'une
atmosphre particulire. L'uvre est l'aboutissement d'un des combats mens par
l'homme Britten, son antimilitarisme farouche qui trouve son accomplissement
musical travers le thme du hros sacrifi, tout comme dans Peter Grimes ou
Billy Budd. Cet opra singulier mais impressionnant sera interprt par les
artistes de l'Acadmie de l'Opra National de Paris, dirig par Stephen Higgins
et mis en scne par Tom Creed.
Amphithtre de l'Opra
Bastille, les 19, 22, 24, 26 et 28 novembre 2016 20H.
Rservations:
Billetterie 130, rue de Lyon, 75012 Paris ; par tel.: 08 92 89 90 90 ; en ligne
: www.operadeparis.fr
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Journe Quatuors
en Arles
Quatuor Van Kuijk Adrien Vecchioni
La Journe Quatuors sera clbre le dimanche 20
novembre avec deux formations de choix. D'une part, le Quatuor Van Kuijk,
accompagn par le talentueux clarinettiste Raphal Svre, qui joueront de Mozart, le quatuor n 19 en ut majeur K. 565
Dissonances , d'Anton
Webern, Langsamer Satz,
pour quatuor cordes, et de Johannes
Brahms le Quintette pour
clarinette et cordes en si mineur, opus 115 (11H) ; et d'autre part, le Quatuor Mosaques qui se produira dans le quatuor en r majeur, opus 33 n 6 de Haydn, le quatuor n 16 en
mi bmol majeur, K. 428 de Mozart et le quatuor n 6 en si bmol majeur, opus 18 n 6 de Beethoven
(15H).
Jeune ensemble fond en 2012,
le Quatuor Van Kuijk est dj reconnu linternational et clbr par la
critique. Rvl au grand public lՉge quinze ans, lors des Victoires de la
musique classique 2010, Raphal Svre apparat aujourdhui comme le plus jeune
reprsentant de lՎcole franaise de clarinette. Le Quatuor Mosaques, quant
lui, est considr comme le plus grand quatuor jouant sur instruments dՎpoque.
Chapelle du Mjan, le 20 novembre 2016
11H et 15H.
Rservations:
Association du Mjan, Place Nina Berberova BP 90038, 13633 Arles cedex ; par tel : 04 90 49
56 78 ; en ligne : www.lemejan.com
3, 4 / 12
Concours de
Belcanto Bellini 2016
La sixime dition du Concours International de Belcanto Vincenzo Bellini aura
lieu les 3 et 4 dcembre l'Opra de Marseille. La soprano Mady Mespl sera la
marraine de la comptition belcantiste qui accroit d'anne en anne sa
dimension internationale. Buenos-Aires devient partenaire officiel du Concours
en 2016. A l'invitation de la Chancellerie Argentine et du Ministre de la
Culture argentin, ce pays forte tradition lyrique a reu dbut septembre les
dernires auditions de slection des candidats 2016 opres l'auditorium de
la radio nationale. Deux des candidats slectionns Buenos Aires sont issus
de l'Acadmie du Teatro Colon, aussi partenaire du Concours. Un grand nombre de
candidats venus des quatre coins du monde ont particip ces auditions trs
slectives tout au long de l'anne, en France et l'international. Au final,
16 candidats affronteront un jury comme chaque fois trs cibl, plac cette
anne encore sous la prsidence d'Alain Lanceron (Warner music Group) qui aura
ses cts Isabelle Masset, co-directrice artistique du grand Thtre de
Bordeaux, Maurice Xiberras, directeur gnral de l'Opra de Marseille, Claudio
Orazi, surintendant du Teatro Lirico de Cagliari, Alberto Triola, Directeur
artistique de l'Opra de Florence, Prsident du Maggio Musicale
Fiorentino et Directeur artistique du Festival de Martina Franca.
Associ au Concours, la cration de la "Vincenzo Bellini belcanto
Acadmie", en 2015, propose aux chanteurs une formation cible sur la
technique et l'interprtation belcantiste. Elle offre aux chanteurs la
possibilit de Masterclasses avec les plus grands, toujours sous la houlette du
Maestro Marco Guidarini dont l'expertise du rpertoire est bien connue .
Prochain atelier du 5 au 8 janvier 2017 dans le cadre du Prestigieux
"Gstaad New Year Music Festival". La comptition belcantiste
inscrit son palmars la russite de tous ses grands Prix. Ainsi de la soprano
Pretty Yende, dcouverte lors de sa premire dition en 2010. Cette nouvelle
star des scnes mondiales est l'affiche de l'Opra Bastille dans le rle
titre de Lucia di Lammermoor et vient d'enregistrer son premier album
chez Sony.
Quelques liens
:
http://www.concoursinternationaldebelcantovincenzobellini.com/
http://opera.marseille.fr/programmation/evenement/concours-international-de-belcanto-vincenzo-bellini
musicarte-org@live.fr
Contact tl :
06 09 58 85 97
Jean-Pierre Robert.
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Les Ondes
Martenot l'honneur
Pura Pnichet,
Prsidente de la FEAM / DR
La
Fdration des Enseignements Artistiques Martenot organise le dimanche 4 dcembre 2016 un Concert-Expo au thtre Adyar,
intitul Ondes en Seine : 17h Expo / vernissage, 18h concert,
20h rencontre avec les artistes, compositeurs, musiciens, peintres, suivi
dun pot amical offert. Le concert est consacr principalement la cration
duvres courtes pour Ondes Martenot et divers instruments crites spcialement
par les compositeurs : Marie-Hlne BERNARD, Damian
CHARRON, Jean-Franois DEMOULINS, Patrick LENFANT, Laurent MELIN, Arnaud
MILLAN, Brigitte NERAT, Martial ROBERT, Roger TESSIER, Jean-Pierre TULLIER,
Olivier TOUCHARD, Nicolas VERIN.
Prix des places : 20 plein
tarif, 15 adhrents
la FEAM, 10 tudiants / chmeurs. Gratuit pour les moins de 12 ans.
Thtre Adyar, 7 square Rapp, 75007
Paris, le 4 dcembre 2016, partir de 17H.
Renseignements et rservations :
par tel. : 06 60 90 10 60 ; en ligne : sur le site de la Fdration :
http://federation-martenot.fr/Ondes-en-Seine
ou directement :
https://www.helloasso.com/associations/federation-des-enseignements-artistiques-martenot/evenements/ondes-en-seine
Daniel Blackstone.
6, 7, 9, 10, 11
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L'Ile du rve de Reynaldo Hahn
Reynaldo Hahn en 1907 par Lucie Lambert / BNF
Le
Thtre de l'Athne donne une raret, le premier ouvrage lyrique de Reynaldo
Hahn (1874-1947) cr en 1898 l'Opra Comique. Il s'agit de l'adaptation du
rcit autobiographique de Pierre Loti Le mariage de Loti . Cette
''idylle polynsienne'' en trois actes narre les amours de l'crivain dans les
les sous le vent. La musique, encore dans l'influence de Massenet, a dj
toute cette lgance qui fait l'originalit de la manire de Reynaldo Hahn avec
ici une pointe d'exotisme raffin. La production, initie au printemps dernier
au festival Musiques au pays de Pierre Loti Rochefort, prsente
une version pour douze instrumentistes, cinq solistes et un ensemble vocal. Elle sera dirige par le jeune Julien Masmondet et mise
en scne par Olivier Dhnin.
Thtre de
l'Athne, les 6 (19H), 7, 9, 10 dcembre 2016 2OH et le 11/12 16H.
Rservations : billetterie, Square de l'Opra Louis Jouvet, 7 rue
Boudreau, 75009 Paris ; par tel. : 01 53 05 19 19 ; en ligne : www.athenee-theatre.com
Le Festival de
Pentecte 2017 de Salzbourg
Helga Rabl-Stadler & Cecilia
Bartoli / DR
Profitant de la prsence Paris de la diva Bartoli pour les
reprsentations de Norma dans la production du Festival de Pentecte 2013,
la prsidente du festival de Salzbourg, Helga Rabl-Stadler et la directrice du
festival de Pentecte, Cecilia Bartoli avaient convi la presse l'Ambassade
d'Autriche pour prsenter le programme du Festival 2017. Cette sixime dition,
qui marque le dbut du second mandat de la chanteuse, est l'occasion d'un
retour rtrospectif sur une aventure qui fut vite un vrai succs : Giulio
Cesare (2012), Norma (2013), La Cenerentola (2014),
Iphignie en Tauride (2015) et West Side Story (2016), pour ne citer
que l'opra mont chaque anne et repris lors du festival d't. Aprs la
clbration de figures fminines, Bartoli a pour cette nouvelle dition, choisi
le thme des Dlices de la mlancolie et d'aborder un rle
travesti, celui d'Ariodante de Haendel. Revenant au baroque et un
musicien qu'elle chrit entre tous. L'opra sera mis en scne par Christoph Loy
et affichera un cast de prestige autour de la ''padrona'' (Kathryn Lewek,
Sandrine Piau, Norman Reinhardt, Christophe Dumaux). Il sera dirig par le
fidle Diego Fasolis qui conduira les Musiciens du Prince Monaco. Cette
nouvelle formation, prcise Bartoli, inspire du modle de l'orchestre de cour,
est constitue d'interprtes venant de divers pays europens. Il accompagnera
aussi, avec le mme chef, une excution concertante de La Donna del lago de
Rossini, un opera seria rarement donn et pourtant un vritable chef
d'uvre dont Bartoli dit rver depuis longtemps .
L'histoire se situe en cosse - comme l'opra de Haendel marquant la premire manifestation de
l'engouement des romantiques pour la nature.
Les concerts dont la programmation est aligne sur la mme
thmatique cossaise et mlancolique, permettront d'entendre l'Orchestre
dell'Academia Nazionale di Santa Cecilia sous la baguette de son chef Antonio
Pappano, avec les chanteurs Bryn Terfel (Hollnder de Wagner) et Tatiana Serjan
(Lady Macbeth de Verdi). Une matine donnera entendre des airs tirs d'opras
composs sur l'Orlando Furioso de l'Arioste, chants par le contre tnor
Max Emmanuel Cencic (Porpora,Vivaldi et Haendel). Puis un concert anniversaire
ftera les 40 ans de prsence Salzbourg d'Anne-Sophie Mutter qui jouera
Schubert avec des confrres prestigieux tels Daniil Trifonov, et Vivaldi avec
les Mutter's Virtuosi. Enfin le ballet, que Bartoli considre comme un art du
sublime, sera reprsent par La Sylphide avec les forces du Thtre
Mariinsky. Tradition et innovation sont les matres mots de sa
politique artistique, conclut Cecilia Bartoli qui espre cette dition aussi
attractive que festive.
Du 2 au 5 juin
2017.
Renseignements et rservations : Salzburger Festspiele,
Herbert-von- Karajan Platz 11, A 5020 Salzburg ; par tel.: 00 43 662 8045 500 ; par tlcopie : 00
43 662 8045 555 ; en ligne : www.salzburgfestival.at
ou info@salzburgfestival.at
Jean-Pierre Robert.
PAROLES D'AUTEUR
Un instrument multiforme :
Introduction organologique la
cornemuse
Les debuts de la cornemuse
La cornemuse est un instrument
trs ancien, datant dau moins 2000 ans. En se tournant vers lantiquit
romaine et les crits des historiens dcrivant la vie de lempereur Nron
(37-68), nous trouvons la premire trace crite fiable de la cornemuse. En
effet, bien que certaines allusions plus anciennes pourraient faire rfrence
un instrument dot dune outre, aucun document ne dcrit linstrument
clairement avant lan 115. Cest en cette anne que lhistorien Dion
Chrysostome (30-116) crit dans son 71me discours sur le Philosophe en
faisant allusion lempereur Nron : on dit quil pouvait peindre,
sculpter et jouer de laulos, la
fois par les lvres et en ajustant en sac sous son aisselle . Nron,
selon lhistorien Gaius Suetonius Tranquillus, tait connu pour ses dons en
course de chars et en musique. Initi celle-ci ds son plus jeune ge, il
chantait et jouait de la lyre. Il semblerait que lempereur, qui naimait point
la concurrence et qui aurait marmonn juste avant son suicide que le monde
allait perdre un artiste, se produisait galement en tant que joueur
dinstruments vent. En effet, en 121 Suetonius Tranquillus crit que Nron
aurait dclar quil aurait souhait organiser des jeux et sy produire en tant
que musicien en jouant de plusieurs instruments vent, dont lutriculus (petite outre) (dans Vita Neronis, De Vita Caesarum VI).
Aprs la mort de lempereur, la cornemuse se fait discrte pendant quelques
sicles. Au Moyen-Age, elle rapparait partout en Europe sous diverses formes.
Aujourdhui, la cornemuse est un instrument bien vivant dans de nombreuses
cultures autour du monde. Plus de 150 instruments diffrents ont t recenss,[1]
dont un grand nombre sont encore jous aujourdhui de lInde lIrlande et de
la Sude la Libye.
Le fonctionnement de la cornemuse
La cornemuse se distingue des
autres instruments par son rservoir dair, aussi appel sac ou poche. Celui-ci
est rempli dair laide du souffle du musicien et dun tuyau dinsufflation
ou par un soufflet, actionn par lun des bras du musicien. Lair de la poche
est distribu dans les diffrents tuyaux grce la pression exerce sur le sac
par le bras du musicien. La cornemuse peut avoir une huit sorties dair,
aussi appeles voix par lorganologue Marie-Barabara Le Gonidec.
Celles-ci peuvent tre des tuyaux mlodiques, semi-mlodiques ou des bourdons.
Les bourdons nont aucun trou de jeu et nՎmettent quune seule note
accompagnatrice. Les tuyaux mlodiques sont utiliss pour jouer la mlodie et
les tuyaux semi-mlodiques prsentent un nombre limit de trous de jeu, souvent
utiliss pour crer un accompagnement harmonique et/ou rythmique.
Schma du fonctionnement dune cornemuse.
Illustration Ilya Franciosi, 2016.
La classification de la cornemuse au cours du temps
Daprs les diffrentes
classifications tablies au cours du temps, la cornemuse, comme lorgue, a
toujours t un instrument part. Elle ne rentre dans aucune catgorie prcise
et provoque souvent lajout de commentaires particuliers et la cration de
catgories distinctes.
Michal Praetorius, dans le
volume De Organographia de son Syntagma musicum (1619/1620), tablit
une classification qui spare les instruments vent et percussion. En tout
premier nous trouvons les instruments vent naturel, c'est--dire dont
le vent est fournit par la nature, donc pas par le souffle humain ; il
sagit dinstruments soufflets : orgue, cornemuse [2].
Voici un extrait de sa classification (Les catgories o se situe la cornemuse
sont marques en gras) :
1) instruments vent[3] a. A vent naturel b.
A souffle humain -hauteurs
dtermines par le souffle [() cor, trompette, etc] -hauteurs
dtermines mcaniquement -par
une coulisse -par
des trous devant, ou devant et derrire, ou devant, de ct et derrire 2) instruments percussion () |
Cette classification est
assez peu prcise et il est impossible de dduire automatiquement que la
cornemuse se situe dans la premire catgorie. En effet, dans le cas des
cornemuses le souffle est majoritairement fourni par un humain et les hauteurs
sont dtermines par des trous sur le tuyau mlodique.
Une classification
dimportance qui apparut aprs celle de Praetorius fut tablie par Victor
Mahillon, fondateur du Muse Instrumental de Bruxelles cr en 1867, afin de
pouvoir rpertorier les instruments de la collection en incluant mme ceux dont
personne ne connaissait le fonctionnement. Selon cette classification la
cornemuse est un arophone polyphone rservoir dair avec tuyaux. La
dfinition de cette catgorie est beaucoup plus prcise que celle propose par
Praetorius, dautant plus que dans une sous-catgorie elle prcise galement si
linstrument est jou avec ou sans clavier. Cependant, Mahillon ne prend pas en
compte la nature de lՎlment mis en vibration, cest dire lanche. Lanche
est un lment important pour linstrument. Le son est toujours cr par une
anche, simple ou double, selon le tuyau et les cornemuses. Ici, Mahillon passe
cette partie de lanatomie de linstrument sous silence. De plus, il existe
certaines cornemuses qui ne sont pas polyphones, tel que le monotsabuno grec o la cornemuse est
simplement constitue dune poche et dun tuyau mlodique.
La classification
Hornbostel-Sachs, publie en 1914 dans le Zeitschrift
fr Ethnologie, est la plus utilise aujourdhui. Elle a t cre partir
de la classification de Mahillon. Son but est de pouvoir classifier les
instruments indpendamment de leur fonction ou de leur mode de jeu. Seule la
structure de linstrument est prise en compte. La cornemuse a sa place dans
cette classification mais fait encore une fois lobjet de suffixes
supplmentaires afin dՐtre mieux dfinie. Voici un rsum de lextrait de la
classification Hornbostel-Sachs, reproduite dans le New Grove Dictionary of Music and Musicians (2001 :177-178),
o elle apparat.
1
Idiophones 2 Membranophones 3 Cordophones 4 Arophones 41 Arophones libres 42
Instruments vent proprement dits 421 A biseau fltes 422 A
anche 422.1
Hautbois 422.11 isols 422.21 groups (sets of oboes) 422.121 avec perce cylindrique (double aulos) 422.122 avec perce conique : trouv en Inde 422.2
Clarinettes 422.21 isoles 422.211 perce cylindrique, 422.211.1 sans trous ou avec trous pour les
doigts : trouv en Colombie Britannique 422.211.2 avec trous pour les doigts (clarinette
europenne) 422.212 perce conique (saxophone) 422.22 groupes : trouv en Egypte (zummara) 422.3 A anche libre 423 Trompettes Suffixes
additionnels utiliser avec nimporte quelle division de cette
catgorie : -6
rservoir dair -61
rigide -62 flexible -7
trous bouchs par les doigts -71
avec des cls -72
avec Bandmechanik [vraisemblablement un rouleau ou ruban perfor] -8
avec clavier -9
avec un systme mcanique (with mechanical drive) |
Nous
pouvons remarquer que la classification Sachs-Hornbostel est plus complte,
notamment grce au suffixe -6 ajout en note, mais elle nest toujours pas
satisfaisante. En effet, la cornemuse est un instrument anche, mais
contrairement aux hautbois et aux clarinettes, elle peut tre dcrite comme instrument
anches multiples, ainsi quՈ perces multiples. La plupart des cornemuses
nont pas le mme type danche selon le tuyau mis en vibration. La gaita galicienne, par exemple, a une
anche double (catgorie hautbois) pour le tuyau mlodique et des anches
idioglottes (simple, battante, catgorie clarinette) pour les bourdons.
La
classification de la cornemuse nest pas une tche aise. Avec une morphologie
changeante selon la rgion et le pays, de nombreuses ramifications sont
ncessaires afin de pouvoir les classer convenablement. Genevive Dournon, dans
son Guide pour la classification des
musiques et des instruments traditionnels (2000), classe la cornemuse ainsi :
4 arophones 41
air dans un contenant tubulaire ou globulaire 412
anche (s) = lamelle(s) vibrante(s)- dcoupe dans ou rapporte sur le tuyau-
dont l'branlement par le souffle entrane la vibration de la colonne d'air 412.4
anches battantes (simple et/ou double) avec sac, rserve dair de volume
variable (sac); insufflation buccale ou par soufflet = cornemuse.[4] |
Voici
lextrait de la classification o se situe la cornemuse.
412.41 deux tuyaux avec anche battante simple [tsambouna (Grce), mashak (Rajhastan), tulum (Turquie)] 412.42
deux tuyaux, ou plus, avec anche simple et/ou double [(biniou (France), gaita
(Espagne), Scottish Highland Bagpipe (Ecosse), zampogna
(Italie)] 412.421
avec soufflet manuel [musette, cabrette
(France)] |
Bien
que plus labore que la classification de Hornbostel-Sachs, la classification
propose par Genevive Dournon reste tout de mme trs simplifie. En effet,
linstrument est complexe et prsente de nombreuses varits dune rgion
lautre. Il est donc difficile de les contenir dans un nombre aussi rduit de
sous-niveaux si lon souhaite tenir compte des particularits de chacun. Cette
classification sous-entend nouveau que la cornemuse est obligatoirement
polyphone avec lutilisation du pluriel ds la description de
linstrument : anches battantes . En effet, bien que rare, une cornemuse
peut tre monodique. De plus, la distinction nest pas faite entre les
instruments anche(s) simple(s) ou double(s). Dans un ouvrage tel que le guide
de Genevive Dournon, ce manque de prcision nest pas forcment gnant car il
sagit de pouvoir associer un instrument type une catgorie assez prcise
sans trop aller dans les dtails. En effet, le but de cette classification
publie lUNESCO est de [fournir] au nophyte une base organologique
indispensable, pour reconnatre, identifier et classer les instruments de
musique .[5]
Enfin, la classification de
Jean-Pierre Van Hees, spcifiquement conue pour la cornemuse, est la plus
complte ce jour. Publie en 2014 dans son livre La cornemuse : un monde sonore, les catgories tablies
peuvent tre ajoutes au numro classificatoire 412.4 de la taxonomie de
Dournon. En effet, Van Hees choisit de classifier les cornemuses en trois
catgories selon le type danche : les cornemuses anche(s) simple(s),
les cornemuses hybrides ( anches simple(s) et double(s)) et les cornemuses
anche(s) double(s).[6] On peut constater que
cette catgorisation recoupe galement diverses aires gographiques : les
cornemuses anches simples se trouvent principalement lest de lEurope, les
cornemuses hybrides se trouvent louest de lEurope et les cornemuses
anches doubles se trouvent en Italie et historiquement en France.
Avant de passer trois
exemples concrets dans chaque catgorie, regardons de plus prs les diffrentes
composantes dune cornemuse.
Un instrument complexe
La cornemuse runit en un
instrument plusieurs matriaux dorigine animale ou vgtale, voire synthtique
aujourdhui. Voici un aperu des diffrentes parties de la cornemuse avec des
indications sur la facture et les matriaux.
Le sac
Le sac de la cornemuse est
lՎlment ncessaire pour russir produire un son continu. Cette partie
indispensable est souvent fabrique partir de peau danimal. De nombreuses
poches sont fabriques partir de peaux de chevreaux. Le processus de tannage
change en fonction des rgions selon les savoir-faire mais galement selon la
raret de la peau. En Croatie, par exemple, certaines peaux de chvre sont
tannes longuement afin que la peau devienne lastique et translucide, perdant
tous ses poils. Ces peaux durent de nombreuses annes contrairement aux peaux
de chvres utilises par les facteurs bulgares ou grecs, par exemple, qui ont
plus danimaux leur disposition et tannent les peaux avec une solution base
deau et de sel, sans oublier un passage la chaux. Bien que ces derniers
retournent la peau, laissant donc les poils gnralement coups assez court
lintrieur de la poche, ceci nempche pas une dgradation plus rapide du sac
due aux changements de taux dhumidit ni le risque possible dinfestation dinsectes
lintrieur des pores laisss par les poils. Afin de contrecarrer cette
humidit, les bulgares rangent souvent leurs instruments dans un sac en
plastique afin de retenir un certain taux dhumidit aprs le jeu pour que la
peau ne se dessche pas. Si le sac schait, il deviendrait sec comme du papier
et cela le rendrait cassant donc fragile.
Le sac peut tre fabriqu
avec plusieurs matriaux, diffrents selon les rgions. LՔle de Malte, par
exemple, est connue pour avoir historiquement utilis des peaux de chiens
entiers pour leurs sacs. Ceci se retrouve dans dautres partie du monde tel que
la Pologne, la Croatie ou encore Majorque. En effet, la peau de chien nest pas
du tout poreuse donc est moins sensible aux infestations dinsectes. Cependant,
elle tend sentir trs fort, et lodeur, contrairement aux autres peaux
danimal, ne sattnue pas avec le temps, ce qui a pouss les facteurs et
joueurs de cornemuse utiliser des peaux dautres animaux tels que la chvre
ou la vachette. En France, la peau de vachette est souvent utilise. La peau
est tanne puis coupe et cousue afin dobtenir la forme voulue. Depuis la
deuxime partie du XXme sicle, les joueurs et les facteurs de cornemuses se
sont penchs sur dautres matriaux tels que le caoutchouc ou le GoreTex afin
dallonger la dure de vie dun sac, souvent limite quelques annes, voire
quelques mois selon le taux dhumidit, la frquence dutilisation et la
qualit de la prparation de la peau. Plus rcemment, quelques socits
spcialises dans la fabrique de sacs de cornemuses ont brevet des solutions
utilisant un mlange de matriaux rsistants lhumidit du type GoreTex et de
matriaux organiques tels que la peau de vachette. Certains modles sont mme
pourvus dune fermeture clair afin que le musicien puisse vider son sac de la
condensation. A ce mme effet, certains sacs sont galement pourvus de
dshumidificateurs. Aujourdhui le monde de la cornemuse retient une grande
varit de matriaux pour le sac, variant selon la rgion, selon les facteurs
des instruments et selon le got des musiciens.
Diffrents stades de prparation dun sac en peau de
chvre. De droite gauche : la peau fraiche et traite, tendue selon la
forme voulue du sac ; la peau sche ; le sac attach toutes ses
extrmits afin de vrifier quil est bien tanche ; la peau tanne
attache la cornemuse, prte jouer.
Photo : Cassandre Balosso-Bardin, Mallorque, juin
2012.
Les anches
Les cornemuses utilisent des
anches simples et des anches doubles. Elles sont traditionnellement fabriques
partir de roseau cependant beaucoup de joueurs de cornemuse aujourdhui
utilisent des anches en plastique qui varient moins selon le taux dhumidit et
la temprature.
Les anches doubles
ressemblent une anche de hautbois avec deux fines languettes de roseau
apposes lune contre lautre et relies leur base. La largeur et la longueur
de lanche dpendra de la facture du tuyau mlodique. Les musiciens peuvent
galement choisir des anches plus ou moins dures en fonction de leurs besoins
musicaux. La facture des anches doubles est dlicate et elle est souvent
laffaire de spcialistes. Les anches simples, cependant, sont fabriques plus
aisment. Egalement traditionnellement en roseau, elles peuvent aujourdhui tre
fabriques en plastique, en bois ou en rsine selon les facteurs.
Le musicien peut ajuster les
anches en les modifiant lgrement. Pour lanche double, le musicien peut
ouvrir ou fermer louverture de lanche. Plus louverture de lanche est
troite, plus le tuyau mlodique montera et moins la pression sera leve. A
linverse, plus louverture sera grande, plus le tuyau mlodique baissera et
plus le musicien devra exercer de force sur le sac. Lanche simple peut
galement tre rgle. La longueur de la languette et la largeur de lanche
dterminent la justesse. La longueur de la languette peut tre modifie
laide dun lastique. Afin dempcher lanche de se bloquer avec une pression
trop grande, le musicien peut gratter la languette afin de lallger et/ou
ajouter un cheveu entre la languette et le corps de lanche afin de maintenir
lanche lgrement ouverte.
De gauche droite : anche double en
plastique ; anche double en plastique pot de yaourt pour une cornemuse du
centre France en sol ; anche double en roseau pour la gaita galicienne en do ; anche double en roseau pour la xeremies majorquine en do dise ;
anche simple en rsine et roseau pour le tuyau mlodique dune gaida bulgare en sol ; anche simple
en roseau pour le petit bourdon en sol de la gaita galicienne ; anche simple en roseau pour le grand bourdon en
do de la gaita galicienne (avec un
cheveu sous la languette) ; anche simple en plastique pour un bourdon en la.
Photo : Cassandre Balosso-Bardin
Le tuyau dinsufflation et le soufflet
Le sac de la cornemuse peut
tre rempli dair par deux systmes : par le souffle humain ou par un
soufflet. Dans le premier cas, le musicien souffle dans un tuyau dinsufflation
muni dun clapet qui permet lair de rester dans le sac lorsque le musicien
inspire.
A gauche lair rentre et passe dans le sac ;
droite la pression dans le sac pendant le jeu ferme le clapet et empche
lair de sortir.
Dans le deuxime cas,
le musicien attache un soufflet au sac ce qui lui permet de gonfler le sac
dair avec son bras plutt quavec ses poumons. Ceci donne notamment une plus
grande libert pour chanter tout en jouant.
Tadeusz Rytwinski joue de la cornemuse polonaise avec
un soufflet sous son bras droit.
Photo : Sean Kelly 2014
Le tuyau mlodique et le tuyau semi-mlodique
La cornemuse peut avoir plus
dun tuyau mlodique. Lorsque le second tuyau mlodique est identique au
premier, avec le mme nombre de trous, on peut parler dun double tuyau
mlodique. Lorsque les tuyaux mlodiques diffrent, on parle de tuyau mlodique
et de tuyau semi-mlodique. La tsampouna,
par exemple, peut se trouver sous deux formes : avec deux tuyaux jumeaux
juxtaposs, ces derniers peuvent tre deux tuyaux mlodiques identiques ou un
tuyau mlodique et un tuyau semi-mlodique avec un, deux ou trois trous selon
linstrument.
A gauche, on observe une tsampouna avec un tuyau mlodique et un tuyau semi-mlodique alors
que les deux cornemuses au centre et droite ont des doubles tuyaux
mlodiques.
Photo : Cassandre Balosso-Bardin 2014.
Les tuyaux mlodiques sont
majoritairement fabriqus en bois. Ils peuvent tre tourns ou taills.
Certains instruments ont des tuyaux mlodiques en roseau tels que le tulum (Turquie) la tsampouna (Grce) ou encore le mizwid
(Tunisie). Ces derniers sont souvent encastrs dans une gouttire en bois afin
de les protger. Aujourdhui dautres matriaux sont parfois utiliss tels que
la rsine ou le plastique mais le bois, exotique ou local, reste le matriau le
plus courant.
Le(s) bourdon(s)
Le(s) tuyau(x) mlodique(s)
de la cornemuse peu(ven)t tre accompagn(s) dun ou plusieurs bourdons.
Ceux-ci peuvent tre monts sur la mme souche que le tuyau mlodique (voir
ci-dessous la zampogna italienne) ou
sparment (voir lexemple de la gaita
galicienne). Le bourdon permet deffectuer un accompagnement avec une note
continue. Le musicien ne peut pas changer la note de son bourdon lorsquil joue
si cՎtait le cas, nous serions en prsence dun tuyau semi-mlodique avec un
ou plusieurs trous de jeu. Le bourdon saccorde sur le tuyau mlodique et est
gnralement ajust la tonique de ce dernier. Lorsque la cornemuse a
plusieurs bourdons, ils peuvent doubler la tonique loctave ou jouer une
dominante. Dans certaines cornemuses, les bourdons sont adapts pour pouvoir
changer de ton facilement avec des coulisses ou des trous que le musicien peut
boucher avant de jouer ou lors dune pause musicale.
Joueurs de xeremies
de Majorque : les trois bourdons sont monts sur la mme souche et le
tuyau mlodique est spar. Les joueurs de cornemuse sont accompagns de
joueurs de flute (flabiol) et tambour
(tambor). Photo : Cassandre
Balosso-Bardin 2013.
CAS DETUDES
En nous inspirant de la
classification de Van Hees, regardons prsent de plus prs un exemple pour
chaque catgorie : cornemuses anches simples, cornemuses hybrides et
cornemuses anches doubles.
Les cornemuses anches simples
Le territoire des cornemuses
anches simples sՎtend de lInde la Croatie et de lAfrique du Nord
(Tunisie et Libye) la Russie. Il existe quelques exemples de cornemuse
anches simples en Europe de lOuest tel que la boha en Gascogne et la sckpipa
en Sude. Alors que la sckpipa peut
tre relie aux territoires de lest par les pays baltiques, la boha est une exception en Europe,
entoure uniquement par des cornemuses hybrides. Cependant, daprs les
ressources iconographiques notre disposition cette co-existence avec les
cornemuses hybrides semble tre apparue au Moyen-ge.
De par leur nature, les
cornemuses anches simples ont des tuyaux perce cylindrique. Deux lgres
exceptions peuvent tre voques : le tuyau mlodique de la djura gaida bulgare est lgrement
conique et le tuyau mlodique de la kaba
gaida des Rhodopes est lgrement inversement conique. Dans les deux cas la
conicit est trs lgre et nempche pas le tuyau de fonctionner avec un
systme anches simples. Observons prsent un exemple de cornemuse anches
simples, la tsampouna grcque, aussi
appele askomandoura en Crte.
Tsampouna et toumbaki.
Photo : Cassandre Balosso-Bardin.
La tsampouna est joue dans les les
grecques, notamment les les gennes. Plus au Nord, la frontire Bulgare, on
trouve un autre type de cornemuse anches simples, la gaida avec un grand bourdon spar du tuyau mlodique. La tsampouna varie selon les les avec soit
deux tuyaux mlodiques identiques, soit un tuyau mlodique et un tuyau
semi-mlodique, mais linstrument reste le mme aux yeux des musiciens. La tsampouna est traditionnellement joue
avec un tambour appel toumbaki ou
avec une lyre cordes frottes. Le rpertoire est la fois instrumental et
chant et ddi la dance.
Cas
dՎtude organologique : la tsampouna
(les Grcques) |
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Nom : tsampouna tsampouna ou askamantoura askamandoura (clarinette outre). Ce
modle est une askamandoura,
reconnaissable par son double tuyau mlodique accord et jou lunisson. Facteur : Serafim Marmaridis (2015) Aire de jeu : les les gennes (Grce) Sac :
peau de chvre retourne (poils lintrieur) Tuyau dinsufflation : tuyau muni dune valve interne afin que lair ne
ressorte pas lorsque le joueur inspire. Certains modles nont pas de valve.
Le joueur appose alors sa langue sur le tuyau dinsufflation lorsquil
inspire afin que lair ne ressorte pas. Bourdons : non-existants |
|
Tuyaux mlodiques : double tuyau mlodique en roseau insr dans une
souche en bois. Les tuyaux mlodiques sont accords et jous lunisson.
Dautres modles prsents sur dautres les ont un tuyau mlodique et un
tuyau semi-mlodique ce qui leur permet de crer des effets de bourdon
rythmiques. Les tuyaux mlodiques sont encastrs dans une gouttire en bois,
fixs avec de la cire ou de la colle. Le facteur y a grav un motif feuillu
selon son imagination. Les pavillons des cornemuses grecques peuvent aussi
tre fabriqus partir de corne. Exemple musical: https://youtu.be/_4k2ruLIG5I |
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Anches : Deux anches simples, une pour chaque tuyau
mlodique. Les anches sont fixes dans les tuyaux mlodiques par de la cire
afin quelles ne se dplacent pas. Les anches de ce facteur sont fabriques
partir dun morceau de bois creux o il a appos une languette, maintenue par
un lastique. Celui-ci est amovible et peut aider rgler la justesse des
anches. Ce modle danche permet dassurer un plus grand contrle sur la
facture. Vous trouverez un modle danche simple plus traditionnel sur
bourdon de la gaita. |
Les cornemuses hybrides
La cornemuse hybride est le
type de cornemuse le plus connu internationalement grce la cornemuse
cossaise, la great Highland bagpipe
(abrviation : GHB). En effet, la GHB a un tuyau mlodique perce conique
et anche double ainsi que trois bourdons perces cylindriques et anches
simples. La GHB est communment joue en si bmol et a un ambitus dune
neuvime, du la au si bmol. Malgr lhgmonie de la GHB, les cornemuses
hybrides sont nombreuses, avec des timbres, des tonalits et des rpertoires
trs diffrents. En France, par exemple, nous pouvons compter plus dune
dizaine de cornemuses diffrentes dont la majorit sont des cornemuses
hybrides : la cornemuse du centre France,[7]
la veuze, le biniou kozh et le binous
bras en Bretagne, la cornemuse
miroirs du limousin, la chabrette du Limousin, la musette bressane, la musette
ou cabrette auvergnate, galement joue Paris dans les bals musette (do son
nom), la musette Bchonnet, la bodega des Pyrnes
On trouve les cornemuses
hybrides louest de lEurope. Certaines, comme la GHB et la gaita galicienne sont joues
lՎtranger aprs avoir t exporte par diffrentes voies. La GHB, par exemple,
tait utilise dans larme et est maintenant fortement reprsente dans les
pays du Commonwealth tels que lInde et lAustralie. Le Canada et les
Etats-Unis ont galement de nombreux groupes de GHB et participent
rgulirement aux concours internationaux de pipe bands (groupes de cornemuses et de tambours). La GHB nest pas
la seule cornemuse tre fortement reprsente et joue par de nombreux musiciens.
En Galice, la gaita, la cornemuse
galicienne, a connu un renouveau dans les annes 1990. Elle est maintenant
joue par des milliers de personnes. Regardons de plus prs la gaita galicienne, lun des instruments
hybrides le plus jou aprs la great
Highland bagpipe cossaise.
Cas
dՎtude : la gaita gallega
(Galice, Espagne) |
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Nom : Gaita
gallega Facteur : Cristobal Prieto (2005) Aire de jeu : Galice (nord-est de lEspagne). La gaita est galement joue au nord du
Portugal o elle cohabite avec la cornemuse portugaise, trs voisine dans son
organologie. La gaita est aussi
joue dans de nombreuses communauts lՎtranger o des centres galiciens
ont t crs par des gnrations dՎmigrants dans des villes telles que
Buenos Aires, Paris, Bruxelles, Londres, Ble, Zurich, Bonn, Caracas... |
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Sac : Sac en Gore-Tex,
fabriqu par la compagnie cossaise CANMORE. Le Gore-Tex est une membrane
impermable qui a la capacit de transpirer tout en tant tanche. Couramment
utilis pour les chaussures et pour le matriel de plonge, le Gore-Tex,
tait utilis pour les sacs de cornemuse afin de crer un matriau qui se
dtriorait beaucoup moins rapidement lorsquexpos des hauts taux
dhumidit. La socit cossaise CANMORE, spcialise dans la fabrication
des sacs de cornemuse, dveloppa le premier sac base de tissus pourvu dune
membrane Gore-Tex et le commercialisa en 1987. Depuis, de nombreux autres
types de sacs ont t dvelopps comme certains avec une fermeture clair
afin de vider plus facilement la condensation du sac ou bien, plus rcemment,
un sac hybride avec une membrane synthtique interne et une membrane externe
en peau naturelle afin de recrer la texture dun sac en peau danimal.
Dautres fabricants de sacs exportent dans le monde entier dont les marques
Bannatyne, Ross, Begg et Gannaway. |
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Tuyau dinsufflation : Tuyau dinsufflation avec une valve au bout afin que
lair ne ressorte pas lorsque le musicien inspire. La valve est en
caoutchouc, attache par une petite vis. Tuyau mlodique : Le tuyau mlodique de la gaita est conique. Ce tuyau mlodique est en palissandre avec un
joint en lige. Il a 8 trous de jeu, dont un pour le pouce, ainsi que
quelques trous daccord son pied. Ceux-ci sont souvent retouchs par les
musiciens afin dajuster la justesse du tuyau mlodique, influant sur la
longueur du tuyau. La justesse des notes tant souvent dpendante de lanche
(celle-ci peut tre ajuste en louvrant ou la fermant et en linsrant plus
ou moins profondment dans le tuyau) les joueurs de cornemuse modifient
souvent la justesse en rajoutant soit de la cire, soit du ruban adhsif
autour des trous de jeu afin de modifier leur hauteur. La gaita est communment joue en do.
Afin de pouvoir jouer plus facilement dans diffrentes cls et de sintgrer
dans des groupes musicaux avec dautres instruments, les musiciens ont
souvent des tuyaux mlodiques en r, si bmol ou encore sol. Exemple musical : Duo Dani Belln et Diego Maceiras (gaita et accordon) |
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Bourdons : La gaita
peut avoir un trois bourdons. Ceux-ci se nomment le roncn (do), la ronqueta
(do) et le chilln (sol). Le grand
bourdon (roncn) est la base de la
musique, accord la tonique de la cornemuse. Les deux petits bourdons sont
optionnels. Certains facteurs ont dvelopp un systme de robinet qui permet
de choisir si lon veut activer le bourdon ou non (cf image). Anches :
La gaita utilise la fois des
anches simples pour les bourdons cylindriques et une anche double pour le
tuyau mlodique perce conique. Historiquement, le chilln pouvait tre cylindrique et muni dune anche double ce
qui augmentait sa puissance sonore considrablement. Les anches des gaitas sont traditionnellement
fabriques partir de roseau. |
Les cornemuses anches doubles
Les cornemuses anches
doubles sont beaucoup moins nombreuses que les deux types de cornemuses que
nous avons tudis ci-dessus. Elles sont majoritairement de deux
familles : la musette baroque, dveloppe au XVIIe et XVIIIe sicles ainsi
que les cornemuses dItalie du sud, connues sous le nom de zampogna ou surdulina.
Alors que les cornemuses baroques se sont dveloppes dans un milieu bourgeois
et aristocratique, les zampogne sont
issues dun milieu plus rural. Au XIXe sicle, les joueurs de zampogna, les zampognari taient bien connus Paris o ils jouaient dans la rue
avec des tambourins (tamburelli) ou
encore linstrument accompagnateur de la zampogna,
un chalumeau appel chiaramella ou piffero. Encore aujourdhui la zampogna est associe un monde rural
et est notamment emblmatique de la priode de Nol lorsque les bergers passent
de village en village, jouant les chants de Nol la zampogna et la chiaramella.
Cas
dՎtude : la zampogna (Italie) |
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Nom : Zampogna a
chiave (cornemuse cl) Facteur : Ilario Garbani Marcantini (ca. 2002) Aire de jeu : Italie du Sud (Calabre, Pouilles, Salento, Lecce,
Sicile) Sac : Peau
de vachette. Le sac traditionnel est gnralement fabriqu en peau de chvre.
La vachette est utilise surtout en France avec des sacs de cornemuse cousus.
Ces derniers sont solides et ont une dure de vie assez longue. Le facteur a
peut-tre choisi de passer au sac en peau de vachette cousue afin dallonger
la dure de vie du sac. Tuyau dinsufflation : tuyau assez long muni dun valve interne afin
dempcher lair de ressortir lorsque le musicien inspire. |
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Tuyaux mlodiques : La zampogna
est connue pour ses deux tuyaux mlodiques, chacun jou par une main diffrente.
La diffrence de taille des
tuyaux permet un jeu diffrent sur chacun. Le tuyau mlodique court et plus
aigu est utilis pour la mlodie alors que le tuyau mlodique plus long et
plus grave est utilis pour laccompagnement harmonique et rythmique. La zampogna a chiave de Garbani,
illustre ici, est en sol majeur, une tonalit commune pour les zampogne. Selon sa taille, le tuyau de
plus long de la zampogna est
souvent muni dun systme pour soulager le musicien du poids de linstrument.
Ici, la cornemuse est munie dune sangle que le musicien se passera autour du
poignet afin de rendre le jeu plus ais. Exemple musical : Solo de zampogna
https://www.youtube.com/watch?v=CU_xR_mS9YI |
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Bourdons : La zampogna
peut avoir jusqua trois bourdons. Les bourdons peuvent tre rendus muets
grce un bouchon leur extrmit. Lun des bourdons de cette zampogna, illustr ci-contre, a des
trous latraux qui permettent de changer le bourdon du r au r# ou mi selon
les besoins de la musique et du musicien. La zampogna est aisment reconnaissable par sa morphologie unique.
Tous les tuyaux de la cornemuse (mlodiques et bourdons), lexception du
tuyau dinsufflation, sont insrs dans une seule souche lavant de la
cornemuse. |
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Anches : Les tuyaux mlodiques et les bourdons de la zampogna ont une perce conique. Ceci
les amne donc tre munis danches doubles. Traditionnellement fabriques
partir de roseau, ces anches sont en pot de yaourt, un plastique lger qui
permet lanche de vibrer aisment. Les anches en plastique sont rpandues
dans le monde de la cornemuse. En effet, malgr une lgre perte de richesse
de timbre, les anches doubles en plastique varient moins en fonction de la
temprature et de lhumidit ce qui donne un certain confort au musicien. |
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CONCLUSION
Le monde de la cornemuse est
vaste et extrmement riche. Cet article aura servi de brve introduction
linstrument, neffleurant quune petite partie de son univers. Allant au del
de lorganologie, chaque cornemuse est au centre dune histoire culturellement
passionnante. Lun des livres les plus complets et des plus rcents au sujet de
la cornemuse est le livre de Jean Pierre Van Hees, La cornemuse : un infini sonore (Coop Breizh 2014). Pour les
adeptes de linternet, il existe un magnifique site compil sous la direction
scientifique de Marie-Barbara Le Gonidec pour le MuCEM avec le soutien du
ministre de la Culture et de la Communication, mis en ligne en 2007 : http://www.cornemuses.culture.fr. Enfin, je vous invite visiter la page de
lOrganisation Internationale pour la Cornemuse qui organise des
colloques internationaux biennaux autour de cet instrument, invitant des
musiciens, facteurs et universitaires du monde entier pour partager leurs
musiques et leurs connaissances.
Cassandre Balosso-Bardin*.
*Cassandre Balosso-Bardin est docteur en ethnomusicologie et postdoctorante l'Universit Paris-Sorbonne pour le projet de recherche Geste-Acoustique-Musique. Elle est galement directrice de l'International Bagpipe Organisation.
[1] Voir louvrage de Jean Pierre Van Hees, La cornemuse, un infini sonore, Breizh Coop, 2014.
[2] Meeus, cours dOrganologie pour les L2, p13
[3] Source : Nicolas Meeus, cours dorganologie pour L2: 13
[4] Dournon, Guide pour la classification des musiques et des instruments traditionnels 2000 :131
[5] Dournon, Guide pour la classification des musiques et des instruments traditionnels 2000 : quatrime couverture
[6] Afin de faciliter la lecture, le pluriel sera dsormais utilis pour les anches de cornemuse sauf lorsque linstrument est monodique ou sil sagit dune seule anche.
[7] Lire Les matres sonneurs de George Sand pour un magnifique portrait dՎpoque du joueur de cornemuse de Centre France.
REPERES PEDAGOGIQUES
Daniel Franois-Esprit Auber
un compositeur franais mal connu
Compositeur de premier plan qui rgna la fois sur
lOpra,
lOpra Comique et le conservatoire, qui traversa le
sicle romantique,
des tourmentes rvolutionnaires la Commune.
Une famille dartistes aux relations
privilgies avec la royaut
Le
grand pre, Daniel Auber , Normand dorigine, vient sՎtablir Paris,
exerce la profession de matre sculpteur. Il dcore les carrosses de Louis XVI.
Il dcde le 11 messidor an V (29 juin 1797) en laissant trois hritiers tant
chacun pour un tiers dans la succession concernant notamment un cabinet
dhistoire naturelle : Franoise Catherine Auber, fille dun premier
mariage avec Catherine Guillaumet, Jean Baptiste Daniel Auber, son fils dun
deuxime mariage avec Marguerite Louise Lebeau et Antoine Vincent Vigogne mari
Marie-Adelade Auber, issue dun troisime mariage avec Marie Jeanne Vincent.
Lettre du 19 octobre 1764 Daniel Auber
Le
pre, Jean Baptiste Daniel Auber (1740-1819), fut officier
des chasses royales capitaine des chasses du Prince de Cond . Il
logeait avec sa famille faubourg Saint-Denis. Il tait aussi peintre et grand
amateur de musique la cour.
Daniel
Franois-Esprit Auber nait le 29 janvier 1782 Caen lors dun voyage que ses
parents firent dans cette ville. Ses parents taient de situation aise[1].
N sous le rgne de Louis XVI, sept ans avant la Rvolution. Il maintiendra la
tradition familiale du got pour la
capitale des deux gnrations antrieures
en rsidant 24 rue Saint-Georges Paris. Il sera lun des compositeurs
des plus prolixes de son temps. Sa production musicale dbuta en 1813 avec le
sjour militaire et sachvera avec son dernier opra-comique en
trois actes Rve damour en 1869. Pas moins de 10 opras, 37 opras
comiques, une belle brochette de ballets, de la musique de chambre et une
grande quantit duvres religieuses dont la plupart composs pour la chapelle
du Louvres en 1852 constitueront sa production. Richard Wagner encensera Auber en tant
que le reprsentant principal du gnie lyrique Franais .
Portrait peint par Hortense Haudebourt-Lescot
(1785-1845)
provenant
de la famille de Maissin
La Rvolution cre une rupture de vie
pour le pre et le fils
Le
pre se reconvertit dans le commerce des objets dart et ouvre un commerce
destampes comme diteur de gravures, rue Saint Lazare. Il souhaite que son
fils reprenne laffaire et lenvoie en 1802, aprs la signature de la paix
dAmiens, Londres, apprendre les rgles du commerce et lAnglais. La rupture
du trait dAmiens en 1804 le ramne Paris et se lie avec un clbre violoncelliste
nomm Lamare, nom sous lequel Auber crira un certain nombre de concertos pour
violoncelle.
Auber,
ayant grandi dans une atmosphre dart et les dons quil tenait de son
hrdit, ne pouvait que sՎpanouir. Il est dou des plus heureuses
dispositions pour la musique, tudie, grce aux relations de son pre, le piano
sous la direction de Ignaz
Ladurner, le violon et le
violoncelle avec des professeurs de musique, et commence composer de la
musique de chambre et des romances. A peine sorti de lenfance, il publie
plusieurs romances, entre autres, Le bonjour , qui eurent un
succs et fit le tour des salons du Directoire. Il compose quelques romances et
petits airs Italiens avec le professeur, baryton de lOpra Comique, Jean
Blaise Martin.
Auber
court le cachet et fin 1804, tous les quatuors quil avait composs en
Angleterre furent jous au conservatoire et lui valurent des applaudissements.
En 1805, il compose sa premire uvre de scne, Julie, pour une socit
damateurs qui se retrouve la salle Doyen de Paris. Il rencontre Ingres avec
lequel il lie une amiti durable.
En
1806, il est admis compositeur la Socit Acadmique des enfants dApollon.
Il compose des uvres pour violoncelle au profit et sous le nom de son ami
Jacques Michel Hurel de Lamare (1772-1823). Fin 1808, il compose un concerto
pour violon lintention du clbre violoniste Jacques Frol Mazas
(1782-1849) qui obtient un immense succs lors de sa premire excution au
Conservatoire de Paris. Auber merge de la foule des compositeurs amateurs et
attire lattention des artistes notamment Luigi Cherubini qui est un matre
exigeant. Il suit pendant trois ans
les cours de composition avec Cherubini qui lui trouve un mcne.
Luigi
Cherubini (1760-1842) introduit Auber chez le Prince de Caraman, grand
seigneur, o il assure pendant cinq ans et six mois la belle saison les
fonctions de matre de musique au chteau de Chimay en Belgique. Le Prince
tait un bon violoniste, Auber tenait le piano et la Princesse chantait. Auber
composa mme un opra-comique en trois actes qui sera reprsent au thtre du
chteau de Chimay en 1812. Pendant six ans, Auber dlaisse la composition et
frquente les salons, surtout celui de Franois-Antoine-Eugne de Planard,
auteur dopra-comique en vogue, Passy o se runissent de nombreux artistes
et o Auber sadonne limprovisation au piano. Planard se prend daffection
pour lui et lui fournit le livret dun deuxime opra-comique, Le Testament
et les Billets doux.
La mort de son pre en 1819 le dsigne,
37 ans, soutien de famille de sa mre et ses frres et booste
sa carrire de musicien professionnel
La
mre, Adelade Vincent (1757-1850) a eu, outre Daniel Franois Esprit Auber, le
compositeur, trois autres enfants :
Antoine
Flix, sous intendant militaire (1786-1863) qui a eu avec sa femme Adelade
Bourlier de Saint Martin deux filles, Marie Adelade Louise Flicie Auber qui
se mariera avec Louis Eugne de Maissin, et Claire Auber marie monsieur Chrtien de Poly.
Auguste
Auber (1788-1859) Chef descadron de Chauffeurs
Anne
Auber (1790-1859) qui pousa Monsieur Fouret.
Auber
avait plus de trente ans lorsquil fit reprsenter pour la premire fois une de
ses uvres lOpra Comique et prs de quarante ans lorsquil obtint son
premier succs. Ce fut la rencontre avec le librettiste du sicle en la
personne dEugne Scribe, auteur des meilleurs livrets dopras du sicle, qui
changea le cours de sa carrire artistique. Ds 1823, la mort du librettiste,
en 1861, ils collaborrent pendant quarante ans au rythme de deux opras en moyenne par an. Le
succs couronnait leur collaboration.
Limmense uvre couronne de succs
vecteur dune notorit nationale et internationale
En
1813, las de son rle de musicien amateur, succs mais cantonn un cercle
dun certain monde dartistes et damateurs, Auber tente daffronter le
vritable public. Il fait son dbut en public par un opra en un acte quil fit
reprsenter au thtre Feydeau sous le titre du Sjour militaire qui
connut un succs modeste. Mais qui partir de 1819 il allait enchaner sans
relche que des productions salues comme des succs et concrtises par les
faveurs si ce nest de la fortune du moins une belle
aisance [2].
Une
vie mondaine longue et riche
Auber,
clibataire, frquente les salons o se runissent de nombreux artistes et o
il sadonnera des improvisations au piano puis une riche et diversifie vie
mondaine. Dou dune lgance, de manires charmantes et dun esprit de bon
aloi, le maestro fait flors dans les cercles parisiens. Il a hrit de la
rputation desprit et de rparties spirituelles adaptes toutes les
situations du prince de Talleyrand[3].
Lors dun dner organis par Michele Enrico Carafa, il rencontre Gioachino, un
des compositeurs les plus rputs de son temps, qui vient de sinstaller
Paris pour prendre la direction du Thtre-Italien. Sa galanterie pour le beau
sexe tait proverbiale. Il eut de brves aventures sentimentales avec ses
interprtes. La compositrice de romances Pauline Duchambre demeura sa compagne
la plus fidle. Il se rendait aussi frquemment des soires thtrales. Auber
tait rgulirement invit par des femmes pour danser et par lEmpereur passer des soires au
Palais des Tuileries, par la Princesse Mathilde, par le Ministre d'tat,
Rouher, par le marchal de France, ministre de la guerre, Le Buf, le marchal de France, ministre de la
maison de lEmpereur et des Beaux-Arts, le Comte Vaillant, le Marquis de Moustier,
Ministre des Affaires trangres, le Snateur, Prfet de la Seine Haussmann
lHtel de ville, le ministre des finances Magne, le Comte de
Nieuwerkerke,Snateur, Surintendant des Beaux-Arts puis Surintendant des Muses
Impriaux...
Invitation
dAuber de lEmpereur au Palais de Compigne
du 20 au
27 octobre 1856
Sajoutaient
les rceptions protocolaires de la sance impriale douverture de sessions
lgislatives, des prsidents des assembles et des ambassades pour commmorer
des vnements ou anniversaires
Auber en 1869 / DR
Une
carrire prestigieuse et honorifique exceptionnelle
Auber
a t le musicien officiel sous trois types de rgimes politiques
diffrents et avait mission
dՎcrire la musique de circonstance pour lorganisation des ftes, tour tour,
dabord, Royales (Louis XVIII de 1814 1815 puis de 1815 1824, Charles X de 1824 1830, Louis
Philippe de 1830 1848), puis, Rpublicaines (la seconde Rpublique de 1848
1851) et enfin, Impriales (Napolon 1er de 1799 1814 sous le
premier Empire, Napolon en 1815 pour les cent jours, et Napolon III de 1851
1870 sous le second Empire).
Crmonie du baptme du Roi de Rome le 9 juin 1811
crite par Auber
Auber,
selon son biographe B. Jouvin, nest pas rest parmi les boudeurs et ce
que jappellerai les compositeurs dAncien Rgime. Il na pas point fulmin
contre les novateurs [4].
Ce
biographe mentionne lentretien de Ledru-Rollin avec Auber salu comme une
gloire nationale en ces termes : Monsieur Auber, vous
ne pensiez crire quun chef duvre, et vous avez fait une rvolution :
1830 et ses trois immortelles journes , au sujet de La Muette de
Portici. L'opra La Muette de Portici, traduit dans toute lEurope
qui a occup laffiche de 1828 1882 avec 505 reprsentations Paris avait
donn le signal de la rvolution Belge la suite de laquelle la Belgique prit
son indpendance en se sparant du Royaume des Pays-Bas.
Sous
Louis Philippe, Auber est lu, la majorit absolue des trente-cinq votants au
troisime tour de scrutin aprs lՎlimination successive dAntoine Reicha et Stanislas Champein,
le 12 avril 1829, membre de la section de composition musicale lacadmie des
Beaux-arts[5] puis est nomm en 1830
directeur des concerts de la Cour. En 1842 il obtient le titre le plus important de sa
carrire : il est dsign par le roi pour succder Luigi Cherubini comme
directeur du Conservatoire royal de musique.
A
la tte de la premire cole lyrique, le conservatoire fournit non seulement
Paris, mais la France et lEurope, de chanteurs, dacteurs et dactrices auquel
de trs nombreuses familles sadressent, ou se font recommander pour une
admission, une audition , une faveur. Le conservatoire est une ppinire
Lettre de recommandation du Prince Joseph Poniatowski
(1816-1873), compositeur dopra (qui sera snateur nomm par Napolon III) en
faveur dHector Berlioz, pour un poste de direction dorchestre.
En
1848, quand la Rpublique dcida la question des honoraires en faveur des
citoyens reprsentants, le maestro dit avec un malicieux sourire Allons donc !
vingt-cinq francs par jour ces gens-l ? Cest une erreur. Ils sont
impayables.[6]
Napolon
III le nomme, en 1852, grand maitre de sa musique directeur de la
musique de la chapelle des Tuileries,[7]
ce qui le rendra familier des soires la cour ou chacun lui tmoigne une
sympathie pleine dadmiration. Lors de lExposition universelle de 1867, il est
nomm Prsident du comit de la composition musicale. Il est nomm, par le
ministre de linstruction publique et des cultes, le 30 avril 1853, membre de
la commission des arts et des difices religieux (section des orgues et de la
musique religieuse) tablie prs de ladministration des cultes[8],
la commission dsigne par le garde des sceaux, ministre de la justice et des
cultes, pour procder la rception du grand orgue de la cathdrale de Paris[9].
Il est aussi nomm le 3 avril 1870 par le ministre des Beaux-arts dans la
commission charge de rviser le rglement du conservatoire imprial de
musique et de dclamation[10].
Ces
fonctions prestigieuses seront accompagnes par loctroi de nombreuses
distinctions. Le 10 mai 1825 il est promu chevalier de la Lgion dhonneur, en
1835 , officier et le 29 avril 1847, commandeur. En 1861, il est grand officier
de la Lgion dhonneur. Il fut aussi officier de lordre Belge de Lopold et
dcor de plusieurs autres ordres ainsi que de diffrentes mdailles dor.
Lettre
du 1er octobre 1859 du
ministre dEtat et de la maison de lEmpereur
attribuant une mdaille dor :
Lettre du
1er octobre 1859 du ministre d'tat et de la maison de
lEmpereur
attribuant une mdaille dor
Lettre du 6 juillet 1868 de lambassadeur dAutriche
attribuant une mdaille dor pour la ddicace dun hymne du sacre du Roi de
Hongrie
Auber
meurt 89 ans, le 12 mai 1871. Ses funrailles se droulent dans la plus
grande discrtion lՎglise de la Sainte-Trinit en raison de la tourmente de
la Commune qui frappe Paris. Le successeur dAuber la direction du
conservatoire fit transporter clandestinement le cercueil dans le caveau. La
pense des amis du compositeur fut de soustraire cette gloire Franaise
loutrage des funrailles publiques ordonnes par les matres que Paris sՎtait
laisser imposer : ceux-ci nauraient pas manqu den faire une comdie
bouffonne intercale dans la tragdie des spoliations et des
emprisonnements selon B. Jouvin, chroniqueur du Figaro[11].
Aprs
la Commune, le 15 juillet 1871, Jules Simon, ministre de lInstruction publique
et des Beaux Arts, prononce une allocution funbre devant le Conservatoire indiquant
Tout lui russi dans l'art et dans la vie. Les moins musiciens le
comprenaient et l'aimaient premire vue, et l'on sentait que ses airs lui
venaient tout seuls et ne lui cotaient aucun effort. Il y a plus de travail
dans la plus courte scne des Huguenots que dans toute la Muette, qui pourtant,
est un chef d'uvre. Oui, cet homme a le plus produit que personne, et il est
certain qu'il n'a jamais travaill. La facilit le perdit parfois et le sauva
toujours... [12].
En
hommage Auber, son buste orne la faade de lOpra Garnier, une station de
RER porte son nom ainsi que plusieurs rues dans diffrentes villes de France.
Plusieurs dictionnaires de la musique mentionnent les compositions dAuber[13],
ainsi que quelques articles[14].
Fac-simil
de loraison funbre
Le
30 octobre 1875, lՎloge dAuber est lu dans la sance annuelle[15].
En 1877, un monument funraire est lev son honneur dans la 4 division du
cimetire du Pre-Lachaise.
Christian Bigaut*.
* Christian Bigaut est
Docteur en droit, Inspecteur Gnral de L'administration de l'Education
nationale et de la recherche.
[1]
Inventaire du 8 mars 1779 demand par Daniel Auber la mort de sa femme Marie
Jeanne Vincent et inventaire du 22 messidor an V au 24 fructidor an v, aprs de
dcs de leur pre, Daniel Auber le 11 messidor an V (29 juin 1797) la
demande de ses trois enfants
[2]
Adolphe Adam, Lettres sur la musique Franaise 1836-1850,22 aout 1840
[3] Jouvin Benot , D.F.E Auber, sa vie et
ses uvres, Hegel, Paris 1864
[4]
Notice publie par Le Menestrel. D.F.E Auber. Sa vie et ses uvres par B Jouvin.
1864
[5]
Lacadmie royale des Beaux-Arts de
lInstitut a dans sa sance de ce jour, procd au remplacement de M Gossec
dans la section musique. Elle a nomm, la majorit absolue des suffrages, M
Auber au troisime tour de scrutin. Le nombre de votants tait de 35, majorit
18. Au 1er tour, M Auber a obtenu 16 voix, M Champein 12, et M
Reicha 6. Au dernier tour, le scrutin a donn M Auber 19 voix et 15 M
Champein
[6]
Auber par Eugne de Mirecourt. Paris. Gustave Havard, diteur. 1857
[7]
Maisons de leurs majests et de leurs altesses impriales. Paris Typographie de
Henri Plon, imprimerie de lEmpereur. Voir les annes 1857, 1863,1866, 1867 et
1868.
[8]
Lettre du Cabinet du ministre de linstruction publique et des cultes du 30
avril 1853
[9]
Lettre du ministre du 3 avril 1858 adressant Auber la mdaille commmorative
de la conscration et de la restauration de lՎglise mtropolitaine
[10]
Lettre du ministre des Beaux-Arts du 3 avril 1870
[11]
Menestrel, numro du 11 octobre 1871, voir aussi : Association des Amies
et amis de la commune de Paris (1871) 2012. Trimestre 1 n49
[12]
Discours de M Jules Simon prononc aux funrailles de M Auber, le 15 juillet
1871. Firmin Didot frres, 1871
[13]
Herbert Schneider, D.F. E Auber , Dictionnaire de la musique en
France au XIX sicle, Jol-Marie Fauquet (dir), Fayard, Paris ,2003 ,
Ftis Franois Joseph Biographie universelle des musiciens et biographie
gnrale de la musique (1866-1868).Paris, Firmin Didot.
[14]
Julien Tiersot, Revue musicale n140 LOpra-comique au XIX
sicle Novembre 1933, Herv Lacombe, Les voies de lopra
Franais au XIX sicle Fayard, 1997, Forum Opra. Revue n16, Janvier
2003, Daniel-Franois-Esprit Auber par Bruno Peeters , J .Chantavoine, Quelques lettres
indites dAuber, Revue dhistoire et de critique musicales (3),1903.
[15]
Vicomte Delaborde, Eloge dAuber , lu dans la sance annuelle du 30 octobre
1875, Firmin Didot, 1875, p 2
Clbration du bicentenaire de la
naissance de Sir William Sterndale Bennett (1816-1875)[1]
N le 13 avril 1816, au 7 Howard Street, dans le
centre de Sheffield, Yorkshire, Bennett est discrtement commmor cette anne
dans son pays. Il souffre encore certainement de faire partie dune poque dont
la plupart des protagonistes sont, hlas, tristement relgus au fond des
bibliothques dans leur partie la plus poussireuse. Tout cela est parfaitement
injuste dautant que Bennett incarne sans aucun doute lhonnte homme dans sa
dimension la plus profonde.
Jaimerais,
en quelques lignes, voquer cette merveilleuse personnalit dont la courte vie
fut trs riche mais galement trouble par des vnements personnels difficiles[2]. En
effet, la perte de sa mre puis de son pre, au cours de sa plus tendre
enfance, le rendra craintif tout au long de son existence. Ses dons musicaux
lui ont heureusement permis de saccomplir professionnellement au cours dune
riche carrire dinstrumentiste, de chef dorchestre, de compositeur et de
pdagogue.
Ds
1833, Felix Mendelssohn Bartholdy (1809-1847) avait bien compris son gnie
loccasion dun concert donn dans le cadre de la Philharmonic Society de Londres dont Bennett sera ultrieurement le
chef principal (1842/48 1856/66). William Sterndale, g de dix-sept ans,
jouait alors en soliste, le 26 juin, son Concerto pour piano en r mineur, opus 1 (1832/33), aux Hanover Square Rooms. Lamiti de
Mendelssohn et du monde musical de Leipzig lui taient dsormais acquises.
Il
est, dailleurs, tout fait stimulant de reconstituer le fil conducteur de
lHistoire de la musique anglaise en tant quelle est associe celle du monde
germanique. la Royal Academy of Music,
Bennett avait bnfici, grce lun de ses excellents professeurs, Philip
Cipriani Potter (1792-1871), dun enseignement mozartien. De plus, lun des
rares lves de Mozart, le compositeur et organiste londonien Thomas Atwood
(1765-1838), lune des figures de proue de la church music, travaillait Londres, cette poque. Le 28 mai
1836, Mendelssohn lui adressera une belle lettre dՎloges au sujet de William
Sterndale. De la sorte, un lien de belle complmentarit
sest tiss entre lAngleterre et lAllemagne, linstar du futur couple
royal, Victoria et Albert. Bennett se rendra ainsi plusieurs reprises
Leipzig o Robert Schumann (1810-1856), entre autres, lapprciera
particulirement.
En
1847, la disparition de Mendelssohn a singulirement affect Bennett. Lanne
suivante, un tonnant conflit avec lirascible chef dorchestre napolitain,
naturalis britannique, Michael Costa (1808-1884) achvera de le dmoraliser
pendant quelques mois. Il reprendra de lՎnergie, en octobre 1849, avec
lheureuse fondation de la Bach Society.
Le Thomaskantor faisait alors, pour
certains esprits aviss, lobjet dune rvlation. Sa musique a influenc en
profondeur celle de Bennett.
Succdant,
le 4 mars 1856, lorganiste et compositeur Thomas Attwood Walmisley
(1814-1856), Bennett est lu Professor of
music de lUniversit de Cambridge lample majorit des voix. Par la
qualit de son enseignement et ses rformes en matire de musique
universitaire, il a t lorigine de son magnifique dveloppement jusquՈ nos
jours.
Entre
1857 et 1858, Bennett dirigera les Lancashire
Festival Concerts Manchester, de mme que ceux du Festival de Leeds pour
lequel, encourag, il composera sa cantate The
May-Queen, opus 39, sur un livret du fameux critique musical Henry
Fothergill Chorley (1808-1872).
Bennett
a parfois fait lobjet de certaines remarques selon lesquelles il na pas t
contrairement nombre de ses collgues un musicien cratif pour lՃglise
tablie. Nanmoins, sa contribution lhymnologie sest rvle significative
lorsquil a ardemment collabor avec Otto Goldschmidt (1829-1907) lՎdition,
en 1863, de The Chorale Book for England fond sur les belles traductions, en
anglais, de Catherine Winkworth (1827-1878) des Kirchenlieder appartenant au fonds luthrien.
DR
Le
22 juin 1866, Bennett est nomm Principal
de la Royal Academy of Music, son Alma Mater, dont la situation tait
alors catastrophique. En acceptant cette position, il annihilait toute
aspiration au calme et au travail de composition. Trs scrupuleux, il
sattachera remplir de nombreuses tches administratives dvoreuses de temps
et infcondes en matire dimagination. Il se consumera peu peu au cours des
huit annes qui lui resteront vivre. Cest ce tragique prix quil a pu
sauver linstitution aujourdhui florissante.
Le
24 mars 1871, Bennett est anobli sur linitiative du Premier Ministre libral
William Ewart Gladstone (1809-1898). La reine Victoria souhaitait honorer de la
sorte non seulement lhomme mais aussi la musique anglaise.
Aprs
plusieurs annes de silence, en tant que compositeur pour son instrument,
Bennett travaillera sa Sonate The Maid
of Orleans, opus 46 (1869/73). Dans le cadre de la commmoration de sa
naissance, le 13 avril dernier, le compositeur, pianiste, professeur et homme
de radio britannique David Owen Norris a interprt et prsent cette partition
la Bodleian Library dOxford, sur
un piano conu en 1828 par la clbre firme Broadwood. Cette sonate fut
inspire par le drame de Johann Christoph Friedrich von Schiller (1759-1805), Die Jungfrau von Orleans (1801). Au mme
concert dOxford, quelques songs ont
t chants par le tnor Mark Wilde. Il est intressant de se rappeler que
Bennett a t lun des premiers compositeurs publier ce rpertoire la fois
en anglais et en allemand.
Entre
1871 et 1874, il sest notamment consacr, avec ce qui lui restait dՎnergie,
un Prelude et une Funeral March, premiers essais dune
musique de scne destine lAjax
(?) de Sophocle (ca 496 ca 405 av. J.-C.). Sir William Sterndale
Bennett sest teint le 1er fvrier 1875, peu aprs midi, dans sa
demeure londonienne du 66 St Johns Wood, lՉge de cinquante-neuf ans. Il a
reu les honneurs dune inhumation Westminster
Abbey, le 6 fvrier, et repose dsormais non loin de Henry Purcell
(1659-1695) et William Croft (1678-17278).
Sir
Arthur Seymour Sullivan (1842-1900) a t lun de ses nombreux tudiants.
Bennett a frquent un monde exceptionnel fait de grands musiciens mais galement
de peintres, dՎcrivains et de penseurs. Parmi eux, jaimerais citer le grand
musicologue George Hogarth (1783-1870), le beau-pre de Charles Dickens
(1812-1870). Par son attention aux autres, Bennett a aussi favoris la carrire
londonienne de Clara Schumann (1819-1896), Jenny Lind (1820-1887), et de Joseph
Joachim (1831-1907). Modeste, authentique anglais, quilibr entre un art
classiquement matris et une authentique expression romantique, voil ce qui
dfinit la personnalit et la psychologie esthtique de Bennett. Le compositeur
irlandais Sir Charles Villiers Stanford (1852-1924) la fort bien compris
lorsquil a rdig, en octobre 1916, lun des plus beaux textes consacrs
cette importante figure de lHistoire de la musique.
Cette
anne, David Owen Norris sest employ rendre hommage cette figure parmi
les plus remarquables de la premire poque victorienne. Cest ainsi que, entre
de nombreuses manifestations, il a jou le 5 mars Orpington, Kent, le
Quatrime concerto pour piano, opus 19 (1838). Le 12 novembre, sur lle de
Wight, il interprtera, avec Joseph Spooner, la Sonata Duo pour piano et violoncelle, opus 32 (1852), jadis ddie
au fameux Alfredo Carlo Piatti (1822-1901).
Il
reste encore un peu de temps pour lhonorer en France. Mais rien nempcherait
de le jouer aussi lanne prochaine
[1]
Barry Sterndale BENNETT, A tribute on the bicentenary of his
birth , in British Music, The
Journal of the British Music Society, Volume 38 2016/1, p. 3-20 J. R.
Sterndale BENNETT, The Life of William
Sterndale Bennett, Cambridge, At the University Press, 1907 Rosemary
FIRMAN, Bennett, Sir William Sterndale , in Oxford Dictionary of National Biography 5, Oxford, Oxford
University Press, 2004, p. 159-163 Nicholas TEMPERLEY, Rosemary WILLIAMSON,
Bennett, Sir William Sterndale , in The New Grove 3, Oxford, Oxford University Press, 2001, p.
281-286..
[2]
Dans mon Charles Dickens, la musique et
la vie artistique Londres lՎpoque victorienne, Paris, Beauchesne,
2014, je fais trs souvent allusion Bennett.
PROPOS PARTAGES
Avec sa cheffe Claire Gibault, le Paris Mozart
Orchestra s'engage
En
2011, la cheffe d'orchestre Claire Gibault fonde le Paris Mozart Orchestra
(PMO) l'image de son grand frre italien le Bologna Mozart Orchestra qu'elle
a mis sur pied en Italie avec Claudio Abbado. Cet ensemble de 40 musiciens
s'est donn, entre autres activits, la mission d'intervenir en milieu
scolaire. Il s'agit pour l'orchestre d'aller jouer dans les coles (primaires,
collges et lyces) et d'inviter le jeune public ses concerts parisiens.
C'est ainsi qu'est n Un orchestre dans mon bahut, une formidable
initiative qui reoit cette anne le soutien financier de La France
s'engage dont le PMO est laurat. Nous avons demand Claire
Gibault de nous en rvler l'originalit et toutes les modalits
DR
Quel est le profil de
votre orchestre Paris Mozart Orchestra ?
Nous
ne sommes pas institutionnels. C'est un ensemble gomtrie variable qui n'a
que cinq ans d'existence. C'est encore jeune pour une formation. Il s'adapte
idalement aux formats de la musique contemporaine, aux projets pdagogiques et
l'conomie d'une telle entreprise. Ses contraintes nous rendent d'autant plus
inventifs.
Quelle aide financire
recevez-vous ?
Nous
avons obtenu un soutien du Ministre et de la Mairie de Paris mais qui n'est
pas suffisant pour faire vivre l'orchestre. Nos ressources principales viennent
du mcnat priv, des fondations familiales et fondations d'entreprises, trs
engages dans l'action culturelle.
Comment les musiciens
sont-ils recruts ?
Ce
sont des musiciens parisiens pour la majorit, qui font de la musique de
chambre. C'est un tat d'esprit. On choisit tous ensemble qui va jouer dans cet
orchestre et nous formons d'abord une belle fraternit. Je crois qu'ils sont
toujours trs heureux de se retrouver et cela incite d'autres musiciens venir
nous rejoindre. Certains font partie de grandes phalanges, d'autres sont intermittents
et tous trs attachs aux actions que mne l'orchestre. Nous sommes tous pays
de la mme faon et partageons les mmes conditions de vie dans nos
dplacements. Nous voyageons en seconde et dormons dans les htels Ibis... Cela
ne pose aucun problme du moment que je suis avec eux.
Quelles sont les salles
qui vous accueillent ?
Nous
avons jou Mozart et Schubert au Thtre des Champs Elyses avec la soprano
Julie Fuchs il y a deux ans. Nos mcnes avaient pay 500 places pour y
accueillir les lves de Corbeil-Essonnes, Mantes-la-Jolie, Aubervilliers... On
a cette anne donn un magnifique concert avec la chanteuse Mirto Papatanassiou
en le de France : deux soires trs favorablement accueillies par la critique.
J'ai aujourd'hui, mes cts, une trs bonne administratrice et une charge de
production avec qui je vais dvelopper tout la fois le mcnat et la
diffusion. La Philharmonie de Paris est un de nos partenaires et des tournes
en Asie et en Italie sont en projet. Dans l'immdiat, nous avons en dcembre
prochain un concert au Thtre du Chtelet pour la sortie de notre premier
disque commercial chez Sony. On y entendra l'uvre de Graciane Finzy, Scnographie
d'Edward Hopper o Nathalie Dessay est rcitante. Cette dernire chantera
aussi des airs de standards amricains revisits par de jeunes jazzmen
franais.
Venons-en
au projet qui nous intresse tout particulirement, celui d'Un orchestre
dans mon bahut dont c'est en 2016 la sixime dition. Qu'en est-il
exactement ?
C'est
la partie d'action pdagogique du PMO. Il fallait un nom un peu accrocheur et
nous nous sommes fixs sur Un orchestre dans mon bahut. Il concerne
aujourd'hui 17 tablissements des acadmies de Versailles et de Crteil. Notre
but est d'aller rencontrer les jeunes des coles et de les runir autour d'un
projet artistique qui puisse croiser les diffrentes disciplines, musique,
littrature, arts plastiques... et fdrer les nergies du plus grand nombre.
Quels sont vos partenaires
dans cette action ?
C'est
l'Education nationale. Nous avons avec le PMO un projet pdagogique par anne
scolaire. Il a t dfini depuis le dbut avec les Rectorats de Crteil et de
Versailles. Ce sont eux qui choisissent les tablissements dans lesquels nous
allons intervenir, tablissements souvent les plus loigns des
salles de concerts et de l'ide mme du concert, puisque nous allons jusqu'
Mantes La Jolie, Les Tarterts et Corbeil-Essonnes. Avec l'extension de notre
mcnat, nous sommes passs de 7 tablissements 17 et certains ne veulent
plus nous lcher. Nous y retournons donc chaque anne.
Le projet fait appel un
genre musical spcifique qui vous attache.
Je
ne sais pas pourquoi, j'ai eu cette intuition ds le dbut, mais je pense que
cela venait de l'Italie o j'ai entendu et pu diriger ce qu'on nomme l-bas le
Melologo . C'est une pice pour orchestre et rcitant dont Fabio
Vacchi, compositeur dont j'ai dirig la musique, est trs familier. Je n'avais
aucune envie d'arriver dans les classes avec Pierre et le loup ou le
Carnaval des Animaux et il tait impratif que notre projet soit
trans-disciplinaire et fasse se rencontrer les enseignants. L'ide du Mlologue
permettait donc de lier le texte et la musique et d'y agrger toutes les
associations visuelles qu'ils peuvent susciter. J'ai t nourrie par ce genre
d'une trs grande richesse et j'ai senti qu'il pouvait parfaitement convenir
nos jeunes lves d'aujourd'hui.
DR
Quelles ont t les
premires uvres proposes ?
Nous
n'avons pas pu faire de commande d'un monologue original la premire anne.
J'ai donc pris une pice de Jean Franais sur des extraits du Gargantua de
Rabelais. Le projet s'est limit au texte et la musique mais a enchant
professeurs et lves qui ont travaill autour de l'criture de Rabelais. Pour
autant je souhaitais joindre les arts plastiques nos ralisations et donner
une place la musique d'aujourd'hui. Rapidement j'ai donc pu faire des
commandes aux compositeurs et lier l'criture contemporaine des textes
d'envergure qui stimulent l'imaginaire des jeunes. Lorsque j'ai demand
Graciane Finzi de nous crire une pice, elle m'a immdiatement propos de
travailler sur les toiles du peintre amricain Edward Hopper qui tait
l'honneur au Grand Palais en 2012. Elle a trouv des textes de l'crivain
franco-espagnol Claude Esteban pour finaliser ce beau projet
pluri-disciplinaire qu'elle a appel Scnographie d'Edward Hopper.
L'uvre
fait l'objet du CD mentionn ci-dessus avec Nathalie Dessay comme rcitante;
mais d'autres mlologues ont vu le jour depuis...
Nous
sommes rests au mme niveau d'exigence en convoquant l'criture contemporaine.
Notre but est de parvenir une ralisation qui puisse tre aussi intressante
pour des lves de la sixime la terminale que pour des mlomanes avertis et
un public adulte. L'uvre doit pouvoir tre joue l'intrieur d'un
tablissement scolaire comme dans les salles de concert parisiennes. L'ide de
proposer des sujets trans-disciplinaires a immdiatement emport l'adhsion des
professeurs. Le choix de certaines uvres a permis au projet de prendre des
dimensions insouponnes. Lorsque, par exemple, nous avons mont le mlologue
de Fabio Vacchi en 2013, Soudain dans la fort profonde, le texte
d'Amos OZ sur les questions brlantes de discrimination a suscit une rflexion
gnrale trs profonde au sein de chaque tablissement. Pour Sacrs
Caractres, avec la musique de Sophie Lacaze et les Caractres de la
Bruyre, les professeurs d'ducation sportive ont infiltr le mime dans ce
travail plusieurs mains.
Quelle
est la participation active des lves dans l'laboration du spectacle annuel ?
Au
fil des annes et de la rflexion, nous avons pu concevoir en parallle notre
propre travail des volets co-cratifs sous la forme d'ateliers o les jeunes
vont dvelopper leur talent cratif. Avec les professeurs et en fonction des
thmatiques, ils sont invits s'exprimer travers des textes, des dessins,
voire des chansons, qui les impliquent directement dans la proposition
artistique : Entendre l'uvre, c'est l'aboutissement de leur
travail , nous dit Antoine Mignon, professeur de musique au Lyce Jean
Vilar de Meaux.
Concert au collge Louis Braille d'Esbly / DR
Pouvez-vous
prciser quelles sont les grandes tapes de cette ralisation artistique ?
Dans
un premier temps, je m'entretiens avec les proviseurs et principaux de chaque
tablissement pour leur exposer le contenu du projet choisi en amont avec le
Rectorat. Puis je rencontre les lves qui je tiens prsenter les tenants
et aboutissants du mtier de musicien. Et nous commenons, avec les
professeurs, mettre sur pied les ateliers co-cratifs et dfinir le matriau
sur lequel ils vont pouvoir travailler avec leurs lves. Puis c'est avec
l'orchestre que je les retrouve, dans les cantines, praux, gymnases o nous
pouvons dialoguer, parler des instruments, prsenter les uvres (le matin) et
donner un concert l'aprs-midi. De grands comdiens nous accompagnent et l'on
organise un jury littraire o ce sont les lves qui votent pour dsigner le
rcitant du concert de l'aprs-midi. Tout cela en vue de les prparer au
mlologue qu'ils iront couter en fin d'anne scolaire. Nous renouvelons
l'exprience une deuxime fois au cours de l'anne, pour avancer dans
l'imprgnation de cette uvre nouvelle et resserrer le lien qui se cre entre
les jeunes et les musiciens. On se rend compte alors quel point les lves,
qui peuvent tre en difficult scolaire, aiment ce type d'activit et
s'investissent dans les propositions qu'on leur fait. Ce qui est merveilleux
galement, pour les musiciens, c'est que l'exprience est diffrente pour
chaque tablissement. Nous sommes d'ailleurs en train de construire un blog
interactif pour fdrer toutes les coles et rpercuter les actions de chacune
d'entre elles. Avec le soutien de La France s'engage , nous
envisageons dans les annes venir d'intervenir aussi dans les milieux ruraux,
notamment les petits villages de la Sarthe o notre surprise a t de dcouvrir
que plusieurs coles possdent en leur sein des orchestres.
Je suppose qu'une telle
entreprise ne va pas sans difficults ?
Nos
difficults, s'il y en a, sont d'ordre conomique car l'ducation nationale ne
finance pas nos actions. Or, chaque dplacement avec l'orchestre est un cot
certain. Elle nous aide en revanche dans la logistique de contact avec les
tablissements scolaires et les contrats de partenariat qui sont signs avec
eux. Nous avons d'excellents rapports avec ses conseillers musique qui peuvent
aussi nous guider dans le choix des thmatiques.
Je
crois que la partition commande cette anne est encore chez l'diteur. De qui
et de quoi s'agit-il ?
Nous
avons fait appel cette anne dith Canat de Chizy. Comme vous pouvez le
remarquer, j'aime privilgier les femmes compositrices lorsque j'ai en face de
moi d'immenses musiciennes comme Graciane Finzy, Sophie Lacaze, dith Canat de
Chizy... Cette dernire a immdiatement mis le dsir de travailler sur Nicolas
de Stal qui l'a dj beaucoup inspire, notamment dans son concerto d'alto, Les
Rayons du jour (2005), titre ponyme d'une toile du peintre. L'opportunit
galement est la parution rcente de la correspondance de Nicolas de Stal qui
viendra nourrir les textes dits par le rcitant. Je sais que ma vie sera
un continuel voyage sur une mer incertaine , lit-on dans une lettre son
pre de 1937. Nous avons dcid d'intituler ce mlologue L'invitation au
voyage, une proposition qui, d'emble, a rjoui tous les enseignants par
les correspondances et parallles qu'elle peut susciter dans l'imaginaire de
chacun. Les lves sont invits crire des lettres, des e-mails et choisir
d'autres tableaux de Nicolas de Stal. Ils peuvent participer musicalement avec
des pices espagnoles, marocaines, italiennes, autant de pays qui ont inspir
l'uvre du peintre. Nous avons rencontr Anne de Stal, sa fille et
Marie-Claude Char, l'pouse du pote que Nicolas de Stal a beaucoup frquent;
et nous avons propos de faire un concours de rcitation de posie autour d'Allgeance
qui, au dire de son pouse, sublime toute l'uvre du pote.
Sur
quelle scne parisienne pourrons-nous voir cette Invitation au
voyage en 2017 ?
Nous
serons le 6 mars prochain la Philharmonie de Paris avec Tony Harrison comme
rcitant, et la Salle Rossini de la Mairie du IXme un peu plus tard. J'en
profite pour annoncer que nous donnerons l'anne prochaine le premier mlologue
de l'histoire qui est Pygmalion de Jean-Jacques Rousseau et Horace
Coignet. J'ai demand cette fois Philippe Hersant d'crire une musique
originale et la graphiste Sandrine Revel (Prix Artmisia 2016) de nous
rejoindre, qui dessinera en direct sur l'cran.
Mais
avant cela, je vous donne rendez-vous le 19 dcembre, pour Pictures of
America, une soire qui s'annonce trs festive et fait l'objet d'une
tourne en rgions.
Propos recueillis par Michle Tosi.
L'ŒIL ECOUTE
Esa-Pekka
Salonen fait scintiller le Philharmonia Orchestra
Benjamin Ealovega
Une
constatation s'impose qui est le fil rouge de ce concert : la fabuleuse
plastique sonore du Philharmonia Orchestra de Londres. Dans un programme d'une
tonnante diversit puisque associant Stravinski, Beethoven et Sibelius. Les Symphonies
d'instruments vents sont ddies Claude Debussy auquel Stravinski tait
li la fois par l'admiration et l'amiti. Acheve en 1920, Garches, l'uvre
sera remanie en 1946. Elle est crite pour 23 vents, que Salonen ne dispose
pas autour de lui mais laisse la place habituelle qu'ils occupent dans le
grand orchestre, crant une impression bienvenue de lgre distance. Le choral
final, conu comme un Tombeau de Claude Debussy , conclut une
uvre d'un seul tenant qui ne dpasse pas une douzaine de minutes. Une
crmonie austre qui se droule en courtes litanies , dira l'auteur dans
ses Mmoires. Quelque chose de hiratique, de rituel aussi, voire de violent
dans l'association des timbres et la diffrentiation dynamique. Sans parler
d'une extrme complexit. La lecture de Salonen est d'une prcision au scalpel
dans ces diverses squences aux courts dveloppements, avec des retours en
arrire et de constants changements de tempo, des blocs qui se font et se
dfont. O apparait comme un refrain, anticipation du thme du choral final.
Les instrumentistes anglais sont d'une prodigieuse tenue offrant une palette irrsistible.
La Troisime Symphonie de Beethoven forme un contraste on ne peut plus
marqu. Avec l'entre de l'entier orchestre symphonique, bien sr, mais aussi
par le ton adopt. La vision de Salonen est d'un classicisme revisit proche de
cette musique rvolutionnaire qui n'vite pas un certain asctisme, amplement
dfendu par un orchestre dont la cohsion clate chaque mesure. L'allegro con
brio installe une fulgurance qui ne se dmentira jamais ensuite. la
diffrence de Simon Rattle qui privilgie une manire souple, proche de la
danse, Salonen s'avre plus au pied du rythme, presque sec en apparence,
quoique le rsultat ne donne jamais le sentiment de rudesse. La marcia
funebre a un caractre solennel plus que triste et on aura remarqu la
sret des trois cors, l'agilit du timbalier et surtout l'ensemble des
pupitres des bois d'une tonnante clart. Le vivace du scherzo trace des traits
joyeux et le finale est justement grandiose sans inutile opulence.
En
seconde partie, La Cinquime Symphonie de Sibelius (1919) dcouvre
d'autres perspectives que la direction trs physique du chef va transfigurer.
Au sortir de la Grande guerre, le compositeur finnois propose une nouvelle
symphonie qui eu gard sa tonalit de mi bmol peut se situer dans le droit
fil de l'Hroque de Beethoven. En tout cas bien des commentateurs ont voulu y
voir quelque lointaine parent. On a souvent dcri la musique symphonique de
Sibelius. Si elle est loigne des schmas classiques, elle en cr d'autres,
ancre dans l'vocation de la terre natale du compositeur, de ces contres
nordiques et leurs immensits, ce que Salonen sent bien sr du dedans. D'o une
foison de thmes bass sur le timbre plus que sur la stricte forme, une
mouvance du discours et des enchanements presque improbables. L'interprtation
haletante souvent, voire incandescente aux ultimes pages du premier mouvement,
mais aussi contemplative ( andante mosso, quasi allegretto
mdian), vibre au son de l'orchestre anglais dont Salonen forge le son de manire
aussi singulire qu'il le fit Aix, l't dernier, dans le Pellas et
Mlisande de Debussy ou Oedipus Rex de Stravinski. L encore, une
association chef-orchestre qui a valeur de rfrence. En bis est
donn un extrait d'Apollon musagte, la danse d'Apollon
que tressent les seules cordes. Joli coup que de finir par Stravinski et par
les cordes l o l'on avait dbut avec les vents. Une ultime remarque : une
salle loin d'tre pleine comme on aurait pu le penser avec un tel chef et
pareil orchestre. L'attrait de la Philharmonie de Paris jouerait-il un mauvais
tour la salle de l'avenue Montaigne ? Une rflexion creuser au fil de la
saison.
Jean-Pierre Robert.
Le Tour
d'crou : un huis
clos terriblement ambigu
Benjamin
BRITTEN : The Turn of the Screw. Opra en deux
actes et un prologue. Livret de Myfanwy Piper d'aprs la nouvelle d'Henri
James. Nikolai Schukoff, Heather Newhouse, Anne Mason, Cheryl Barker, Lucien
Meyer, Silvia Paysais. Membres de
l'Orchestre Symphonique de Mulhouse, dir. : Patrick Davin. Mise en scne :
Robert Carsen. Opra de Strasbourg.
Klara Beck
Le
Tour d'crou de Britten est un bien
curieux opra. Inspir de la nouvelle d'Henri James, le livret en adopte
l'tranget et la concision. Opra de chambre crit pour un effectif de treize
musiciens jouant 18 instruments et comprenant six personnages, ses seize scnes
sont rparties symtriquement dans ses deux actes, chacune introduite par un
interlude instrumental conu sous forme de variations ; on n'est pas loin du
schma musico-dramatique de Wozzeck d'Alban Berg puisque ces variations
annoncent le contenu de la scne qui suit. Un prologue introduit l'histoire :
une Gouvernante est appele par le tuteur de deux enfants, Flora et Miles, pour
s'occuper d'eux dans sa proprit la campagne, la condition expresse de ne
le dranger aucun prix. La jeune femme accepte cette mission avec
enthousiasme mais s'aperoit peu peu que des choses tranges se passent : le
fantme de deux anciens serviteurs, Peter Quint et Mrs Jessel. apparaissent. Et
soudain tout bascule, alors que les deux enfants entretiennent un comportement
ambigu, le garon surtout en proie l'envotement de Quint, tenant des propos
trangement double sens, et en venant intercepter sous la pression de
celui-ci, la lettre que la Gouvernante s'est finalement rsolue adresser au
matre des lieux.
Ce
climat de malaise, Robert Carsen l'inscrit paradoxalement dans un crin d'une
singulire beaut esthtique. Cumulant pour la premire fois - dans cette production
cre l'origine pour le Theater an der Wien - les fonctions de dcorateur,
d'clairagiste aussi bien que metteur en scne : le manoir de Bly o se droule
ce huis clos infernal est apprhend travers diverses perspectives dans un
camaeux de gris la fois dans les dcors et les costumes, rehausss par des
clairages latraux d'une magique splendeur. Point d'extrieurs ici, tout sera
concentr dans la seule demeure. L'accent est port sur quelques objets
essentiels dont ces grandes fentres par lesquelles on voit au dehors ou
travers le prisme desquelles les figures immatrielles se dessinent. Et
travers un schma dramaturgique o les diverses scnes sont perues dans le
ressenti de personnages qui s'imbriquent troitement au point de se contaminer,
celui de la Gouvernante au premier chef. Car chacun des cinq autres participent
la construction du labyrinthe dans lequel s'enferme inexorablement la jeune
femme. D'autant plus effrayant qu'il est mental. Elle est de surcroit en proie
un mcanisme de projection, singulirement sur le tuteur des enfants, absent
physiquement mais omniprsent dans ses penses, jusqu' en tre amoureuse. Elle
veut prserver les enfants et notamment l'innocence de Miles, et semble en
dfinitive par sa rigidit et sa volont surprotectrice, contribuer elle-mme
la destruction de ce dernier, autant que Quint dont le garon parvient in
extremis se dfaire de l'emprise. Il meurt dans ses bras et elle ne peut que
constater son chec. Carsen, qui voit justement la pice comme un scnario de
film en noir et blanc avec ses squences souvent trs courtes, comme il en va
du court Prologue o est projet la rencontre entre la Gouvernante et le
tuteur, mise sur l'intimit malsaine qui s'tablit entre protagonistes et public.
Par petites touches, il resserre l'tau tout en brossant le ct fantasque de
Quint et en accentuant l'emprise sexuelle de celui-ci sur l'autre servante
comme sur le jeune Miles, par exemple lors de la dernire scne du Ier acte
d'une plus que suggestive atmosphre sensuelle.
Klara Beck
Patrick
Davin imprime sa phalange de musiciens de l'Orchestre Symphonique de Mulhouse
une patte sonore d'une relle tenue au sein d'une orchestration tour tour
clairseme et touffue, avec sa rythmique souvent convulsive, ses ostinatos
impressionnants des percussions, dont le gong et la caisse claire, ses traits
inquitants des bois, de la clarinette basse par exemple, ses singulires
associations de timbres et les couleurs particulires qu'apportent en particulier
le clesta menaant ou la harpe envotante dans ses glissandi. Et surtout
mnage la continuit entre interludes et scnes qui suivent. De la distribution
se dtache la Gouvernante de Heather Newhouse, d'une vraie sincrit et
vocalement juste dans un rle exigeant. Plus que chez d'autres interprtes, la
jeunesse du personnage clate chaque scne, et son parcours de terreur et de
dsespoir reste trs intrioris. Laissant au spectateur le soin de tirer ses
propres conclusions et de trier parmi les incertitudes que recle le rcit.
Anne Mason, Mrs Grose, dgage de sa belle voix grave une vision o perce
l'ambigut de la vieille intendante, moins passive qu'elle n'en a l'air,
cense assurer la permanence de la vie du domaine. Cheryl Barker, familire de l'idiome
brittnien qu'elle a souvent ctoy l'ENO de Londres, prte Mrs Jessel de
poignants accents. Le Peter Quint de Nicolai Schukoff, un peu raide vocalement,
n'a pas l'aura des voix anglaises auxquelles on est ici habitu, d'un Ian
Bostridge par exemple, sans remonter au crateur du rle Peter Pears : ce
timbre translucide et si particulier qui colle au personnage, comme cette
locution qui gnre l'tranget. Mais la composition est crdible et les
vocalises assures. Des deux enfants, membres de la Matrise de l'Opra
national du Rhin, l'interprte de Flora est la plus en situation, quoique
paraissant curieusement la plus ge, alors que le texte prcise qu'elle est la
cadette et la plus ''enfant''. Le jeune garon qui campe Miles est plus en retrait,
en particulier dans les monologues ou changes-confrontations avec la
Gouvernante, o le dbit de la langue anglaise montre ses limites : la
dclamation n'est pas assez assure pour dfendre une partie il est vrai
terriblement ingrate. Ainsi le passage Malo, Malo, Malo la fin
de la scne 6 de l'acte I, ou le terrible Vous voyez, Je suis mauvais,
je suis mauvais, n'est-ce pas ? qui termine le Ier acte, moments si
cruciaux, ne dveloppent pas assez d'impact. C'est toute la difficult de cette
pice que de rendre les deux jeunes protagonistes parfaitement audibles, et
partant crdibles, au-del mme de l'ide de fragilit.
Jean-Pierre Robert.
Samson et
Dalila : l'opra
biblique revisit
Camille
SAINT-SANS : Samson et Dalila. Opra en trois
actes et quatre tableaux. Livret de Ferdinand Lemaire. Anita Rachvelishvili,
Aleksandrs Antonenko, Egils Silins, Nicolas Test, Nicolas Cavallier, John
Bernard, Luca Sannai, Jian-Hong Zhao. Orchestre et Churs de l'Opra National
de Paris, dir. Philippe Jordan. Mise en scne : Damiano Michieletto. Opra
Bastille.
Vincent Pontet/ONP
Aprs
quelques dcennies d'absence, Samson et Dalila, l'uvre lyrique majeure
de Camille Saint-Sans revient l'Opra de Paris. L o elle n'entra au
rpertoire que tardivement, en 1892, alors que cre en 1877 Weimar. Grce
aux bons soins de Liszt. Cet opra biblique trouve sa source dans
un pisode du Livre des Justes, l'un des livres de la Bible hbraque ;
mais les vnements relats dans l'opra n'en reprennent qu'une infime partie.
Car si Samson y succombe aux charmes vnneux de Dalila, celle-ci avait dj
tent de le sduire par trois fois auparavant, en vain. Imagin l'origine
comme un oratorio, l'opra s'en ressent dans ses immenses passages choraux du premier
et du troisime acte, o l'on peut songer aux matres du pass, JS. Bach,
Haendel. C'est que le sujet n'appelle pas un dveloppement dramatique trs riche. Ce dont
pourtant Saint-Sans a su s'accommoder, mnageant un intressant cheminement
quant la conqute par les Philistins du secret de la force herculenne de
Samson par le truchement des appts de la jeune femme, objet de l'acte central
et du duo d'amour qui en est la cl de vote. Autour de cela : les lamentations
du peuple hbreu qui se sent dlaiss par son chef, les invectives du satrape
du camp adverse, l'incitation la haine du grand prtre de Dagon qui tente
d'amadouer Dalila en lui offrant son or, et enfin le supplice de Samson expos
la rise de tous lors d'une scne d'hystrie collective l'issue de laquelle
l'lu d'Isral provoque l'croulement du temple des Philistins.
Il
n'tait pas - ou plus - pensable de reprsenter cette trame telle quelle. On
l'a bien sr actualise. Damiano Michieletto la transporte dans un univers
contemporain : des choristes en vtements bariols, la gestuelle travaille,
qui au dernier acte, enfilent des habits d'poque pour donner l'impression de
reconstituer l'histoire ; une dcoration pure faite de deux aires de jeu
superposant la vaste chambre de Dalila et un lieu impersonnel cens reprsenter
la ville de Gaza o est situe l'action. Mais point heureusement de rfrence
une actualit brlante de conflit au Moyen-Orient. Sa mise en scne tente de
simplifier une action dj condense et offre une lisibilit certaine pour ce
qui est de l'interaction churs-solistes, sans succomber un parti illustratif
simpliste. Ainsi des passages de ballets rduits l'allusif au Ier acte et
purement et simplement vacus au dernier, la bacchanale de pacotille se voyant
remplace par des mouvements de sautillements frntiques plus dsordonns que
rellement cadencs. On a plutt privilgi ce qui ressortit au vcu des
protagonistes de cette douloureuse histoire, et au premier chef au conflit
intrieur que vit Samson, partag entre devoir et sentiments privs, entre
l'amour pour Dalila et son rle de
chef spirituel du peuple hbreu. A sa solitude aussi : ainsi apparat-il
isol dans quelque prison mentale au premier tableau, l o au dbut du dernier
acte, lors que mutil par ses contempteurs, il vit son exclusion physique et
morale en demandant piti pour son peuple comme lui meurtri. Le portrait de
Dalila est plus fouill encore et c'est l sans doute l'originalit de cette
vision de l'uvre. Alors qu'on la pense uniquement femme fatale, tout comme ses
surs en haine recuite Jzabel et Salom, elle est ici prsente dans ses
propres contradictions : amoureuse par calcul et vengeance fminine, jouet
entre les mains du chef philistin, mais aussi prte mettre en jeu sa propre
vie, titre d'ultime argument. Elle menace de se suicider et c'est avec le
couteau que Samson lui a ravi des mains que celui-ci va se couper une mche de
cheveux, signant la perte de sa puissance. A l'acte suivant, son parcours
devient singulier : n'ira-telle pas jusqu' s'inquiter du sort de Samson
durant la grande supplication de celui-ci, horrifie du traitement qui lui a
t rserv. Et c'est elle qui, aux lieu et place de l'enfant, guide Samson
vers le centre du temple et asperge le sol d'essence provoquant le cataclysme
final. Rachat ou ultime bravade ? Il fallait l'oser.
Vincent Pontet/ONP
Et
quelle Dalila ! Anita Rachvelishvili est de la trempe des plus grandes
interprtes du rle : un timbre de mezzo grave qui flirte avec le contralto,
comme la fin de l'air Amour ! Viens aider ma faiblesse ! , un
legato enviable jusque dans le pianissimo, une claire projection qui distingue
ses interventions mme loin de la rampe, une sre manire d'aborder le chant
arioso caractristique de l'uvre. Et surtout une incontestable autorit ds sa
premire apparition et qui ne cesse de s'affirmer, rendant hautement crdible
les diverses facettes du personnage tel qu'ici rimagin. Si l'on ajoute que
les trois airs sont des morceaux d'extrme intensit dramatique et de
formidables contrastes vocaux, on tient l une interprtation de rfrence,
justement salue par le public. Le Samson d'Aleksandrs Antonenko n'est pas de
la mme eau, sans doute dsavantag par l'locution en franais, et manque de la
vraie couleur d'un tnor natif de
l'hexagone. Mais en est-il actuellement ? La puissance est au rendez-vous
moyennant quelques passages en force au dbut. Quoique on note une relle
apprhension du conflit que vit le personnage. Reste que le duo, bnficiant de
l'aura de l'interprte fminin, dveloppe son vrai impact. Des autres
interprtes, distribus ingalement, on remarque le Vieillard hbreu de Nicolas
Cavallier. Les churs maison font de l'excellent travail, en particulier au Ier
acte dont l'criture vocale est proche du chant grgorien. L'autre triomphateur
de cette production est Philippe Jordan qui ne fait pas mystre de sa passion
pour une uvre qu'il estime injustement dlaisse. Son approche, quasi
chambriste maints endroits, exhale une douceur envotante ou des emportements
soigneusement contrls.
L'Orchestre de l'Opra est somptueux, les bois en particulier : mlismes
de flte et de hautbois au dbut du II me acte, trait enjleur de clarinette parant
le duo. Et on lui sait gr de ne pas accentuer les passages par trop
orientalisants qui maillent la partition, au tableau final notamment dont sont
presque gomms la facilit d'criture et un exotisme aujourd'hui bien pass de
mode. En ressortent le magistral mlodisme de Saint-Sans, son art de penser
une orchestration chatoyante, et finalement de faire de l'orchestre un
protagoniste part entire, au-del de son rle d'accompagnateur ou de faire
valoir du chant comme chez Gounod ou Massenet.
Jean-Pierre Robert.
Incandescent Ange
de feu l'Opra de Lyon
Serge
PROKOFIEV : L'Ange de feu. Opra en cinq actes
et sept tableaux, op. 37. Livret du compositeur d'aprs le roman ponyme de
Valri Brioussov. Ausrine Stundyte, Laurent Naouri, Margarita Nekrasova, Mairam
Sokova, Vasily Efimov, Dmitry Golovin, Taras Shtonda, Ivan Thirion, Almas
Svilpa, Yannick Berne, Paolo Stupenengo, Philippe Maury, Kwang Soun Kim,
Marie-Eve Gouin, Pascal Obrecht, Charles Saillofest, Jean-Franosi Gay,
Paul-Henry Vila, Sharona Applebaum, Pei Min Yu, Sophie Calmel, Joanna Curelaru.
Orchestre et Churs de l'Opra de Lyon, dir. Kazushi Ono. Mise en scne :
Benedict Andrews. Opra de Lyon.
Acte I : Laurent Naouri, Ausrine Stundyte Jean-Pierre Maurin
L'Opra
de Lyon poursuit son exploration des grandes pages de l'opra russe. Avec cette
fois, une uvre peu souvent joue, L'Ange de feu. Serge Prokofiev tait
fascin par l'occultisme, et la dcouverte du roman de Valri Brioussov, matre
du symbolisme russe, fut le dclic de la mise en chantier d'un opra, crit
entre 1920 et 1927. Qui sera cr
bien plus tard, en 1954, en version de concert au Thtre des Champs-Elyses
Paris - en franais - et l'anne suivante scniquement La Fenice de Venise,
en italien ! Entre temps la Troisime symphonie (1928) aura repris pour l'essentiel
le rseau thmatique de l'opra. Curieux destin pour une uvre hors norme qui,
dans l'Allemagne superstitieuse du XVI me sicle, plonge le spectateur dans le
mysticisme et le religieux, le rel et la fiction, et dpeint une figure de
femme possde comme il en est peu dans le monde lyrique : Renata a vu nagure
lui apparatre Madiel, un ange de feu, et depuis est envote par cette vision,
jouet de forces contraires qui la torturent corps et me. Cette possession
est-elle anglique ou diabolique ? L'pigraphe du roman, dans lequel il
est question du diable, maintes fois apparu une vierge sous les traits d'un
esprit de lumire et de la manire dont il lui fit commettre divers
pchs laisse peu de doute. Un personnage non moins trange, le chevalier
Ruprecht, qui elle se confie, tente en vain de la librer de l'obsession
qu'elle poursuit travers la recherche d'un homme idalis, le comte Heinrich
en qui elle voit la rincarnation de Madiel. Entre au couvent, elle dchane
l'hystrie parmi les nonnes et prit sous l'exorcisme du Grand Inquisiteur. On
aura crois au fil du dlire hallucinatoire de Renata et de sa qute forcene,
une voyante prdisant sang et crochet de fer, un libraire d'ouvrages sulfureux,
Jakob Glock, un savant matre s magie noire, Agrippa de Nettesheim, et mme
Faust et Mphisto qui curieusement ont chang leur tessiture vocale par
rapport au schme tabli par Gounod ; en fait une galaxie de personnages tous
aussi mystrieux qu'inquitants, et toutes sortes de ''diableries'', pour
reprendre le mot du musicien. La musique pouse ce drame fantasque et la
tension qu'il gnre, par un symphonisme dense, souvent fracassant, et un
rseau motivique serr, multipliant des thmes courts vocateurs d'tats divers
(l'hystrie de Renata ou son amour-dvotion son ange protecteur). Elle est
tour tour ensorcelante comme son hrone, ou dmoniaque l'image de son
sujet, en tout cas aussi expressionniste, voire violente, qu'elle tait lyrique
et emplie de fantaisie dans L'Amour des trois oranges. Il faut, dira
Prokofiev, crire de manire ce que la musique vienne en permanence
renforcer l'impression que provoquerait le drame seul sans la musique
(Journal intime, 1924).
Acte II : Laurent Naouri, Ausrine Stundyte,
Vasily Efimov Jean-Pierre
Maurin
La
mise en scne de Benedict Andrews vite la surcharge qu'une telle trame
pourrait induire et mise sur le parcours intrieur de l'hrone, partage entre
illusion et ralit, rationnel et irrationnel. Son personnage est dmultipli,
entoure qu'elle est d'une nue de jeunes filles son image, comme l'est
d'ailleurs aussi celui de Ruprecht et ses multiples rpliques, jusque parmi les
machinistes appels construire ou modifier les volumes d'un dcor aux
perspectives fuyantes. La rgie en effet unifie un propos s'cartant de toute
logique, travers le prisme ingnieux d'un plateau tournant, et en fluidifie
les divers pisodes. Ainsi du grand rcit confession introductif de Renata
contant ses diverses rencontres avec l'ange et une obsession naissante, de
l'enfant l'adolescente, de la jeune fille l'adulte. Cette extrme mobilit,
qui absorbe des bribes de dcoration parses, apporte un sentiment de mouvement
dans une uvre proposant somme toute une action rduite, et tient en haleine
jusqu' la dernire scne. Et on passe sur quelques dtails naturalistes de
premier degr, en particulier au IV me acte, pour saluer la cohrence d'une
dramaturgie mnageant avec habilet les constants basculements chez Renata, les
questionnements irrsolus et un suspense adroitement amen rvlant au final la
possession dmoniaque dont elle est en ralit l'objet. L'ultime tableau du
couvent o se succdent en un tournoiement infini les petites cellules
monacales qui peu peu se peuplent de leurs occupantes, retrouve la
circularit de la premire scne de l'htel et de ses chambres esseules, l o
Ruprecht avait rencontr Renata, par hasard ou vraie concidence. La direction
d'acteurs qui restitue avec acuit tout ce qu'il y a de paroxystique dans les changes,
focalise aussi sur des effets de chevauchement d'identit : l'ange qui apparait
sous les traits d'un ministre du culte, n'est-il pas le comte Heinrich, dont la
vision est tant suscite, et mme aussi l'Inquisiteur de la dernire scne,
agent d'anantissement d'une obsession voue tre condamne.
Acte V : Ausrine Stundyte, Almas Svilpa
Jean-Pierre Maurin
La
force de ce spectacle on la tire surtout de ses deux interprtes principaux.
Ausrine Stundyte, hier formidable Katerina dans Lady Macbeth de Mzensk de
Chostakovitch, dj Lyon (cf. NL de 3/2016), trouve en Renata un autre rle
sa mesure, offrant au personnage une paisseur dramatique peu commune,
attachante, nigmatique dans ses aspirations contradictoires, mles
d'angoisse, de dchirement, d'une dsarmante sincrit jusque dans ses
revirements les plus inattendus. Cette sincrit est au service d'une
interprtation musicale d'une puissance souvent insoutenable, faisant sien le
langage hach, partag entre une sorte de sprechgesang et une style arioso bien
spcifique, grce une voix de soprano dramatique ample mais aussi d'un grand
raffinement ; sans parler de la performance physique d'un rle qui tient son
interprte constamment en scne, soumise ici des crises convulsives et autres
exigences svres de mise en scne. Vocalement incandescente, cette prestation
a tout d'une interprtation d'anthologie o la voix semble faire corps avec
l'orchestre en une rare symbiose. Du Ruprecht de Laurent Naouri mane la mme
intensit. Le baryton, qui pouse la prosodie russe avec aisance, se mesure
cette figure d'anti hros avec un naturel qui force l'admiration dans le chant
comme par la prsence : c'est que l'apparente solidit de Ruprecht, esprit
curieux de tout, humaniste quoique adepte des sciences occultes, contraste avec
l'imprvisibilit, la fragilit mais aussi la ferme rsolution de celle qui
voit pourtant en lui son sauveur. Une distribution sans faute les entoure,
peuple de personnages pisodiques, dont les tnors Vasily Efimov, Jakob Glock,
ou Dmitry Golovin, Mphisto et Agrippa, et la basse Almas Svilpa, l'Inquisiteur
comme aussi les personnages muets d'Heinrich et de l'Ange. Le brio avec lequel
Kazushi Ono dirige cette musique puissante, l'coulement motorique, aux climax
impressionnants et dont n'est pas exclu le sarcasme, est une autre joie, comme
la performance de l'Orchestre de l'Opra de Lyon confront sans doute la
difficult de la dcouverte. Mme si l'on peroit que le chef se laisse par
moment emporter par le flux d'un discours luxuriant, quasi tellurique, o les
thmes souvent s'entremlent, se chevauchent presque, le magistral fini sonore
rend justice la partition visionnaire de Prokofiev.
Jean-Pierre Robert.
Festival Quatre x
Quatre ou lavenir radieux du quatuor cordes
La Chapelle Corneille-Auditorium de Normandie
ric Benard
Un
magnifique festival de musique de chambre totalement ddi au quatuor cordes
organis par lOpra de Rouen en collaboration avec Pro Quartet, dans le cadre
somptueux de la Chapelle Corneille-Auditorium de Normandie. Quatre journes
pour entendre et apprcier huit talentueux quatuors de la jeune gnration
(Quatuor Diotima, Cambini-Paris, Van Kuijk, Zade, Arod, Danel, Thomas Dunford
au luth accompagn dun quatuor vocal et Quatuor de lOpra de Rouen), plus
dune vingtaine duvres (Haydn, Mozart, Beethoven, Schubert, Brahms, Bruckner,
Mendelssohn, Webern, Bartk, Debussy, Ravel, Gounod, Franck, Kurtag, Dowland et
Weinberg) certaines bien connues, mais galement nombre de belles dcouvertes
dont la mise en miroir avec des standards du genre tait riche denseignements.
Ancienne chapelle jsuite de la contre Rforme, difie en 1615, totalement ramnage avec une scne
centrale circulaire et une rvision de lacoustique, inaugure en fvrier 2016
pour servir de cadre une programmation musicale ambitieuse, varie, consacre
lexcellence, la Chapelle Corneille, situe dans le vieux Rouen, offrait son
cadre somptueux et adquate cette manifestation dont le lustre ne
dpareillait pas au milieu des dorures baroques. A titre dexemples, pour nen
citer que quelques uns, caractristiques de cette diversit de programmation et
de cette qualit musicale.
Le
Quatuor Cambini-Paris dont les particularits sont de jouer sur instruments
anciens dots de cordes en boyau et de se prsenter dans une ancienne
configuration o premier et second violon se font face, laissant violoncelle et
alto en charnire centrale. Un jeune quatuor constitu en 2007 regroupant
quatre talentueux instrumentistes (Julien Chauvin, Karine Crocquenoy,
Pierre-Eric Nimylowycz, Atsushi Saka) issus du Cercle de lHarmonie puis du
Concert de la Loge, anciennement appele Olympique, regroups autour du premier
violon de Julien Chauvin. Un programme classique et romantique qui constitue le
cur du rpertoire des Cambini associant Haydn (Quatuor n 3 opus 76 dit LEmpereur ) Mozart (Quatuor n 16 ddi Haydn K. 428) et
une curiosit de dcouverte rcente, le Quatuor
n 1 de Gounod. Force est de reconnaitre que luvre de Gounod ptit
quelque peu du voisinage avec ses illustres prdcesseurs, le dsir des Cambini
de dfendre avec brio cette composition tardive du musicien franais nen tant
que plus mritoire. Gounod nՎcrivit que cinq quatuors cordes achevs,
dcouverts en 1993 dont celui propos ce soir semble tre le premier du corpus
compos en 1892. Un quatuor sans grande originalit qui nous parut peut tre un
peu dsquilibr entre les parties, laissant la part prdominante au premier
violonA moins quil ne sagisse dun dfaut acoustique ? Une dcouverte
que lon pourra rentendre et juger de faon plus approfondie prochainement au
disque avec les autres lments du corpus en cours denregistrement grce la
collaboration du Palazzetto Bru Zane, ardant dfenseur des partitions oublies
de la musique romantique franaise.Affaire suivre. Point de rserve, en
revanche pour les quatuors de Haydn et Mozart, gages dune longue et
indfectible amiti. Haydn le maitre incontest et inventeur du genre et Mozart
qui ne cessera de faire progresser la forme par sa gniale inspiration. Si le
Quatuor de Haydn, datant de 1797, tout entier organis autour du deuxime
mouvement o le musicien rend hommage au rgime imprial, resplendit dune
lumire solaire par son nergie, son architecture classique, sa srnit et sa
plnitude, le Quatuor de Mozart, plus ambigu, oscille entre ombre et lumire,
tmoignant de limportance de cette priode (1783-1785) dans la vie du
compositeur puisquelle correspond son initiation maonnique (1784) vritable
chemin initiatique qui le conduira des tnbres profanes vers la lumire de
lIniti dont le prsent Quatuor K. 428
et le Quatuor des Dissonances donn
en bis portent tmoignage. Une interprtation magnifique de clart
et de lyrisme, la sonorit chaude et profonde, un quilibre parfait, une
cohsion infaillible que lon pourra retrouver au disque puisque lensemble du
corpus des quatuors de Mozart ddis Haydn a t enregistr dernirement par
les Cambini pour le label Ambroisie Nave, coffret unanimement salu par la
critique.
Quatuor Cambini-Paris Franck Juery
Se
prsentant dans une conformation plus classique (1e violon, 2e
violon, alto, violoncelle) bard de mdailles glanes dans diffrents concours
internationaux prestigieux et aprs un premier disque consacr Mozart, le
jeune Quatuor Van Kuijk (Nicolas Van Kuijk, Sylvain Favre-Bulle, Grgoire
Vecchioni, Franois Robin) quatuor franais fond en 2012, avait la lourde
tche de dfendre deux monuments de la musique de chambre franaise, le Quatuor
cordes de Debussy et celui de Ravel, associs aux Six Moments musicaux de Gyorgy Kurtag dans une confrontation
surprenante au demeurant, mais pleine dintrt. Ces Six Moments musicaux rsultent dune commande faite au compositeur
hongrois en 2005 pour le concours international de quatuor cordes de
Bordeaux. Six pices miniatures dans la ligne de Webern alternant lyrisme et
contrastes abruptes lorigine, par la pulvrisation des timbres, dune sorte
de spatialisation du son voquant les mobiles de Calder. Le Quatuor
en sol mineur de Claude Debussy, compos en 1893, est le seul
quatuor du grand Claude. Il marque une date importante dans lՎvolution de la
musique de chambre, enfin libre
de sa structure rigide, de la rhtorique et de lesthtique congeles et
rigides . Jugement premptoire, sil en est, qui nest pas un mince
compliment dans la bouche de Pierre Boulez ! Trs orchestral, tendant un
pont entre tradition et modernit, Debussy y amalgame des lments emprunts au
chant grgorien, la musique tzigane, au gamelan javanais, sans oublier les
influences de Massenet ou de Franck. Contemporain du Prlude laprs midi dun faune, le deuxime mouvement, en rappelant la
langueur, fut un moment sublime dune rare motion porte par lalto
blouissant de Grgoire Vecchioni. Alors que Debussy surprend par lՉpret des
premires notes, Maurice Ravel sduit demble par son Quatuor en fa majeur plaant lauditeur sous son charme envoutant.
Postrieur dune dizaine dannes (1903) par rapport celui de Debussy, le
compositeur de Pellas et Mlisande
en fut un dfenseur inconditionnel face aux critiques de Gabriel Faur qui
luvre est ddie. Si linspiration est debussyste, la manire est typiquement
ravlienne par son originalit, sa dlicatesse, sa grande invention rythmique
faisant un usage virtuose du pizzicato. Les Van Kuijk nous en livrrent une
lecture trs sduisante, claire, remarquablement mise en place, immdiatement
convaincante. En bis, pour relcher la tension aprs un final trs rythm, les Chemins de lamour de Francis Poulenc,
adapts pour quatuor cordes, concluaient cette magnifique soire.
Quatuor Van Kuijk Adrien Vecchioni
Exclusivement
fminin, fond en 2009, le Quatuor Zade (Charlotte Juillard, Leslie Boulin
Raulet, Sarah Chenaf, Juliette Salmona) se produit dj dans les salles les
plus prestigieuses de la plante musique. Son rpertoire trs tendu va de la
priode classique la musique daujourdhui, sa discographie comprend dj
deux disques publis chez NoMadMusic, le premier consacr en 2014 Martinu et Janacek,
le second en 2015 lopus 50, dits ''quatuors prussiens'', de Haydn. Pour
lheure cest Beethoven (Quatuor n 3
opus 18) et Csar Franck (Quatuor en
r majeur) que les Zade dfendaient de leur talent, sans oublier le trs
mconnu Intermezzo pour quatuor
dAnton Bruckner. Sans sattarder sur cette anecdotique pice de Bruckner,
extraite de son Quintette en fa qui ne fera probablement
pas date dans la carrire du musicien de Saint Florian, plus intressante,
nen pas douter, la confrontation entre le Quatuor de Beethoven, uvre de
jeunesse puisquil sagit du premier quatuor du matre de Bonn, compos en
1799 lԉge de 29 ans, et le
Quatuor de Csar Franck, dernire uvre instrumentale du compositeur, crite
lanne de sa mort en 1890, lՉge de 68 ans. Une comparaison qui confirme le
fait que la valeur nattend pas le nombre des annes, tant le quatuor
beethovenien frappe demble par une impression de maitrise absolue du genre
alliant quilibre et synthse : tension et dynamisme du premier mouvement,
lyrisme parfois tourment du deuxime, quilibre serein du troisime, cavalcade
finale sur une tarentelle endiable.
En regard, le Quatuor de Franck parut hlas un peu terne malgr
lengagement des instrumentistes. Une uvre de structure cyclique qui manque un
peu dattrait, parfaitement excute par les Zade et notamment par Charlotte
Juillard impressionnante dengagement et dintriorit qui irradie luvre de
sa prsence sonore dans le larghetto et le finale. Pour conclure ce superbe
concert, un bis emprunt Haydn que les Zade connaissent sur le bout des
doigts et un triomphe mrit.
Quatuor Zade / DR
Un
festival parfaitement russi de bout en bout, dans un lieu patrimonial hors du
commun, qui nous rassure quant lavenir (radieux) du quatuor cordes
franais ! Bravo tous !
Patrice Imbaud.
Un superbe Cos fan tutte
en ouverture de la saison lOpra de Rouen
Wolfgang Amad MOZART : Cos fan tutte. Dramma
giocoso en 2 actes. Livret de Lorenzo da Ponte. Gabrielle Philiponet, Annalisa
Stroppa, Cyrille Dubois, Vincenzo Nizzardo, Laurent Alvaro, Edouarda Melo.
Orchestre de lOpra de Rouen Normandie & Chur Accentus, dir. Andreas
Spering. Mise en scne de Frdric Roels.
Jean Pouget
Pour
ouvrir cette nouvelle saison centre sur le libertinage, dans son acception
philosophique et historique, ssame dun monde subversif et mystrieux peupl
de dsirs et de charmes interdits, Frdric Roels, directeur gnral et
artistique de linstitution lyrique normande, levait le rideau avec Cos fan tutte de
Mozart. Si ce troisime opus de la trilogie Da Ponte est gnralement
interprt comme une mtaphore de linconstance et de linfidlit fminine,
Frdric Roels en proposa un clairage nouveau sous la forme dun jeu de rles
o tout est dj accept davance sauf la fin Un jeu un peu pervers sous la
houlette du maitre du jeu Don Alfonso second par sa maitresse Despina, couple
machiavlique, un peu sado masochiste dont la conduite nest pas sans rappeler
les aventures amoureuses dun certain divin marquis. Un jeu
finalement men entre soi, pour chapper lennui. Tout se joue alors grand
renfort de masque, de travestissements, de mise en miroir et de voyeurisme o
la farce ctoie le drame afin de rester fidle lambigit du dramma giocoso.
Une mise en scne attrayante et pertinente qui emporta immdiatement ladhsion
du public, transpose de nos jours, bien pense, se droulant dans une
scnographie du plus bel effet, tantt dans un salon bourgeois dune lumineuse
blancheur, tantt dans un jardin paradisiaque peupl dombres et de dsirs
cachs.
Jean Pouget
Un
opra classique cr en 1790 au Burgtheater de Vienne, tout entier bti sur la
symtrie des couples, des voix et des tessitures qui sՎchangeront au long de
lintrigue, une uvre surtout qui brille par lexceptionnelle qualit musicale
de ses nombreux ensembles vocaux, impliquant donc une grande homognit dans
le choix des voix. Point de dception avec cette distribution vocale
particulirement blouissante reposant sur six jeunes chanteurs au premier rang
desquels il faut citer Cyrille Dubois, rvlation des Victoires de la musique
et de la Critique. Si ce jeune et talentueux tnor est dj connu pour ses
interprtations remarques dans la mlodie franaise et le lied, sa prestation
dans le rle de Ferrando fut tout fait enthousiasmante par la qualit de son
timbre, sa facilit vocale et son implication scnique. Face lui le Guglielmo
de Vincenzo Nizzardo parut peut tre lgrement en dessous. En revanche aucune
rserve concernant le duo fminin, Gabrielle Philiponnet (Fiordiliji) et
Annalisa Stroppa (Dorabella) dont le ramage somptueux neut dՎgal que le
plumage rutilant et coquin, particulirement mis en valeur par les costumes au
demeurant trs drles de Lionel Lesire Laurent Alvaro (Don Alfonso)
machiavlique souhait, belle basse parfaitement apparie avec le soprano
agile dEduarda Melo (Despina) en soubrette espigle, formrent un couple
irrprochable vocalement, tout entier anim par lintrigue, le plaisir du jeu,
la sduction et le caprice, image dun couple derrire lequel en filigrane se
dessinait lombre tutlaire du
marquis de Sade. Dun point de vue strictement orchestral, il convient
encore de souligner la belle tenue de lorchestre de lOpra de Rouen, et
notamment des vents (petite harmonie et cors) omniprsents tout au long de la
partition, renouant avec la tradition des srnades et divertimenti chers au
compositeur salzbourgeois. En bref, une premire trs russie qui laisse sur
une interrogation quant la recomposition finale des couples et quant aux
traces que laissera ce jeu de rlesUne question essentielle qui rsume elle
seule le sujet de lopraUne belle saison en perspective suivre (www.operaderouen.fr).
Patrice Imbaud.
Riccardo Chailly & la
Filarmonica della Scala : Effusion lyrique
Riccardo Chailly Gert Mothes
Dsign
par la critique comme le meilleur chef dorchestre du monde dans un classement
rcent, Riccardo Chailly, qui vient de quitter lorchestre du Gewandhaus de
Leipzig, se prsentait la tte de sa nouvelle phalange de la Scala de Milan
devant le public parisien dans la grande salle de la Philharmonie de Paris,
associ pour un soir avec Martha Argerich au piano, dans un programme
minemment romantique appariant Schumann et Verdi. Salle comble videmment et
un public immdiatement conquis par lOuverture
de Manfred de Robert Schumann, dans une lecture trs narrative, toute en
nuances, trs enleve, rvlant demble la grande qualit musicale de la
phalange milanaise et limmense science de la direction dorchestre du chef
italien. Une uvre finalement assez peu donne au concert inspire du pome
dramatique de Byron o Schumann semblait se retrouver dans ses craintes de la
folie et de la mort. Une partition datant de 1851 empreinte dun romantisme
exacerb o se mlent sentiment de faute (Manfred a aim sa sur Astart, la
conduisant la mort), dsir de rdemption, voyage au pays des morts afin
dobtenir pardon et purification. Une uvre tendue, dsespre, vhmente,
passionne, trs contraste, parfois abrupte, dynamique, dun dramatisme croissant o
la baguette de Chailly, prcise, fougueuse fit merveille. Venait ensuite le Concerto
pour piano et orchestre (1845) du mme Schumann, interprte par la grande
dame du piano, Martha Argerich, personnalit emblmatique du monde musical par
son charisme. Chacune de ses apparitions tant un vnement en soi allant bien
au-del de linterprtation ponctuelle dun soir. Un concerto pour piano qui
compte assurment parmi les plus belles uvres du gnie schumannien laissant
une large place la mlodie toute imprgne de lesprit romantique.
Linterprtation qui en fut donne nous parut, ce soir, un peu ingale. Ds
lentame du premier mouvement la sonorit lgrement terne et rche du piano,
parfois couvert, contrasta avec le brio de lorchestre, la soliste nous gratifiant toutefois
dune belle cadence. Le deuxime parut quant lui assez plat, avant que le
troisime particulirement russi ne renoue le dialogue avec lorchestre, le
clavier se faisant alors plus orchestral dans sa projection. En bis, les Scnes denfant portrent lՎmotion
son paroxysme par la posie et la dlicatesse du jeu de la pianiste argentine.
Aprs la pause, place Verdi avec la musique de ballet des Vpres siciliennes (1855). Une Sinfonia
qui reprend plusieurs thmes de lopra, droulant devant lauditeur autant de
scnes diffrentes au climat tour tour angoissant, funbre, violent, lyrique,
vritable exercice dorchestre (tous les pupitres sont sollicits) et de
direction o Riccardo Chailly nous donna entendre par la force et le lyrisme
de son interprtation, un vritable opra sans parolesUn magnifique concert
dun lyrisme exacerb, du grand art !
Patrice Imbaud.
Anne-Sofie Von Otter chante les Nuits dՎt
Anne-Sofie Von Otter / DR
En
ce dbut de saison, lOrchestre National de France, dirig ce soir par Fabien
Gabel, semble poursuivre son exploration du rpertoire franais avec deux
compositeurs majeurs Hector Berlioz (Les
Nuits dՎt) et Claude Debussy (Nocturnes),
associs tous deux, dans un clin dil Kurt Mazur (ancien directeur musical
du National dont Fabien Gabel fut chef assistant) Richard
Strauss (LAmour de Dana et Till lespigle) en qui Debussy (allias
Monsieur Croche, critique musical) reconnaissait le seul musicien original de
la jeune Allemagne. Magnifique programme qui nous permettait dՎcouter les
belles et rarement donnes Nuits dՎt
dHector Berlioz chantes par la mezzo soprano sudoise Anne-Sofie Von Otter
qui les pratique depuis de nombreuses annes. Un cycle vocal compos en 1841
sur des pomes de Thophile Gautier, initialement prvu pour mezzo ou tnor,
secondairement orchestr entre 1843 et 1856. Beaucoup de chanteurs sy sont
essays, malheureusement souvent sans succs, si lon excepte la grande Rgine
Crespin, encore aujourdhui ingale dont les enregistrements font encore
rfrences (Orchestre de la Suisse Romande, dir. Ernest Ansermet. Decca. 1963).
Six mlodies accompagnes par un orchestre restreint, caractrises par
lՎconomie, la clart et la transparence de lՎcriture, la prcision de la
prosodie, la richesse des timbres et la dlicatesse de lornementation dont le
National se tira admirablement sous la direction du chef franais
particulirement attentif aux quilibres. Loin de se complaire dans une strile nostalgie,
force est davouer que linterprtation donne ce soir au TCE par la mezzo
sudoise fut tout fait digne dՎloges par la qualit de la diction, lՎvident
amour des mots, la souplesse de la ligne,
la posie du chant men peut tre sur un tempo un peu lent que le souffle
dAnne-Sofie Von Otter eut quelque mal assumer, notamment dans la deuxime
partie du cycle. Les trois Nocturnes (1899) de Debussy constituent,
assurment, un sommet de linspiration debussyste quelques annes avant La Mer (1905) incarnant le style
impressionniste en musique. Triptyque symphonique avec chur de femmes,
initialement appel Scnes au crpuscule,
il enchaine Nuages, Ftes et Sirnes
comme autant de rfrences visuelles plus que musicales, dont le National donna
une vision toute en nuances, fidle la partition qui se veut en demi teinte
associant dans une subtile alchimie souplesse et rigueur, rptition et
renouvellement dont Dutilleux saura plus tard sinspirer. Nuages chargs dimmobilit changeante avant de conduire au
silence, plus extraverties Ftes laisse
clater la fanfare pour revenir l encore au silence, tandis que Sirnes laisse entendre un chant
envotant accompagn du cor anglais pour retourner finalement au silence et
la paix nocturnes. Bien diffrentes les deux uvres de Richard Strauss, LAmour de Dana (1937-1940) fragment
symphonique (1952) extrait de lopra ponyme o la musique volue par larges
et voluptueuses vagues sonores et Till
lespigle, pome symphonique (1895) nous contant les aventures burlesques
et dramatiques de ce .hros populaire la fois historique et lgendaire. Une
uvre pleine de verve qui fait briller lorchestre et notamment le cor. Une
virtuosit orchestrale, une heure de musique nouvelle chez les
fous comme disait Debussy, que Fabien Gabel mit parfaitement en vidence
par sa direction intelligente face un National au mieux de sa forme. Un bel
exercice de direction qui nous laisse comme un regretmais une belle manire de
terminer un concert sur un clat de rire, ce qui nest pas si frquent !
Sans oublier les irrprochables Sirnes
du Chur de Radio France.
Patrice
Imbaud.
Andris Nelsons & le Royal
Concertgebouw Orchestra : un concert sans clat
Andris Nelsons / DR
Il
ne suffit pas toujours de runir sur la mme affiche, attrayante sil en est,
une phalange prestigieuse reconnue comme une des meilleures du monde, un chef
emblmatique et trs mdiatique qui, au jeu des chaises musicales, vient
dhriter du fauteuil de directeur musical du Boston Symphony Orchestra et du
Gewandhaus de Leipzig, pour obtenir un concert dexceptionBeaucoup le pensait,
beaucoup sont repartis dus tant la prestation musicale ne rpondit pas aux
espoirs escompts ! Un programme, avouons-le, sans originalit, un peu
bizarre mme dans sa conception, peut-tre justifi par la filiation
quentretiennent les hros wagnriens, probablement plus par les affinits
connues dAndris Nelsons pour les deux compositeurs Wagner et Strauss. Le Prlude de Lohengrin (1850), le Prlude de Parsifal et lEnchantement
du Vendredi Saint (1882) de
Richard Wagner en premire partie, suivis de deux pomes symphoniques de
Richard Strauss, Mort et Transfiguration
(1890) et Till lespigle (1895).
Rien de bien nouveau sous le plafond de la Philharmonie de Paris Les pomes
symphoniques de Strauss ayant t donns, il y a quelques mois, dans leur
intgralit, et avec quelle loquence, par Riccardo Chailly et le Gewandhaus
Leipzig. Lattente tait donc assez forte, surtout lie la personnalit du
chef letton qui lon doit, force est de le reconnaitre, quelques grands
moments de musique et quelques notoires motions, ces dernires annes. Si le Prlude de Lohengrin a pu faire illusion
les premires minutes avec une entame diaphane des premiers violons rapidement
suivie dune belle plnitude sonore, conduite avec un art consomm des
nuances par un Andris Nelsons la
gestique atypique, arachnenne et, semble-t-il, peu prcise en juger par les
nombreux dcalages et les difficults de lorchestre suivre sa direction, les
dcalages devinrent particulirement flagrants dans le Prlude de Parsifal et lEnchantement
de Vendredi Saint qui nous plongrent assez rapidement dans un ennui
tenace, entretenu par un tempo trop lent, par labsence de chair et de ferveur,
majorant dautant le caractre extrmement manir de la direction. Une lecture
qui force de se vouloir savante et de rechercher la transparence en arrive
paraitre totalement dcharne, rduite une esthtique du vide. Assurment
plus russie, la deuxime partie nous donna entendre Mort et transfiguration, dans un discours trs narratif alliant
puissance et clart et un Till lespigle
jubilatoire. Deux occasions de faire valoir les qualits instrumentales des
musiciens du Concertgebouw qui nous sembla enfin retrouver un peu de son lustre
lgendaire, des cordes magnifiques, une petite harmonie toute en rondeur, des
cuivres rutilants. En bis, Wagner toujours, avec le Prlude de lacte III de
Lohengrin, une belle faon de refermer le boucle et de conclure ce concert
qui ne restera pas dans les mmoires.
Patrice Imbaud.
Martha & Friends la
Philharmonie de Paris
Martha Argerich Adriano Heitman
Une
belle soire que cette soire donne la Philharmonie de Paris o la clbre
pianiste argentine, Martha Argerich, entoure de sa fille Annie Dutoit comme
rcitante, recevait nombre de ses amis pour un magnifique concert. Un programme
trs original, des invits prestigieux et le charisme de Martha expliquant
srement laffluence du public venu trs nombreux. La pianiste lgendaire
retrouvait ds louverture son complice Stephen Kovacevich dans le Prlude laprs midi dun faune, dans
un arrangement pour deux pianos crit par Debussy lui-mme, pice quelle avait
dj donne Montreux avec Michel Broff il y a 31 ans ! Une uvre
surprenante, qui inspirera sans doute Ravel plus tard, o lon retrouve
assurment les ruissellements, la dlicatesse et lՎlgance du grand Claude.
Stephen Kovacevich resta ensuite seul sur scne pour interprter de faon
magistrale, potique et douloureuse la Mazurka
n 13 en la mineur op. 17 n 4 de Frdric Chopin. Une Mazurka, o Chopin
dans une confidence intime exprime toute la douleur de lexil, que le pianiste
amricain joua avec un toucher dune dlicatesse infinie, refusant tout pathos
pour aborder lՎmotion pure. Les Six
Etudes en forme de canon de Robert Schumann, transcrite par Debussy pour
deux pianos, rappelaient la vnration de Schumann pour J.S Bach, mlant dans
un syncrtisme parfait, sous les doigts de Lilya Zilberstein et Akane Sakai,
lՎlvation cleste du Cantor et les tourments romantiques de Schumann. Le Trio pour piano et cordes n 2 de
Chostakovitch (Martha Argerich au piano, Renaud Capuon au violon et Edgar
Moreau au violoncelle) concluait en beaut cette premire parie sur une
allgorie du temps, suspendu dans le premier mouvement, fracass dans le
second, lgiaque dans le troisime, obsdant et macabre dans le dernier. Aprs
la pause, La Valse de Ravel, dans sa
version pour deux pianos, permettait Gvantsa et Khatia Buniatishvili de faire
montre de leur incroyable virtuosit dans cette apothose de la valse viennoise
o se conjuguent tournoiement fantastique et issue fatale, le compositeur
franais masquant, ici, sous la pudeur dun grand art, les sentiments tragiques
ressentis la fin de la Grande Guerre. Rarement donne, la Sonate pour violoncelle et piano de
Szymon Laks (1901-1983), interprte par Edgar Moreau et Akane Sakai, fut une
dcouverte pour beaucoup. Son tonnant troisime mouvement, Presto, par son rythme envotant
prfigure lexprience minimaliste que Steve Reich dveloppera quelques annes
plus tard. Enfin, au terme dune longue soire, Martha Argerich entoure de
Nicolas Angelich et de Jean Claude Gengembre et Camille Basl aux percussions,
retrouvait la Sonate pour deux pianos et
percussions de Bla Bartk
comme une vieille connaissance puisquelle en a enregistr la version de
rfrence avec Stephen Kovacevich il y a plus de quarante ans ! Une uvre
complexe russissant la difficile synthse entre un piano percussif et la
richesse timbrique des percussions, visant avant tout chose une homognit
sonore dont linterprtation enthousiasmante fit lever la salle. Un magnifique
concert et un triomphe bien mrit pour la grande dame du piano.
Patrice Imbaud.
Le Concert de la
Loge : un concert lumineux
Le Palais des Tuileries / DR
L'auditorium
du Louvre avait du mal contenir la foule accourue entendre l'ensemble Le
Concert de la Loge et Sandrine Piau. Mais avant toute recension de ce beau
concert, il convient de dnoncer la situation grotesque dans laquelle Julien
Chauvin et ses musiciens se trouvent : interdiction d'utiliser le mot
Olympique car c'est le Comit National Sportif qui se le rserve soit disant de
droit. On croit rver sachant que le titre exact de l'ensemble que fait revivre
Julien Chauvin est bien Le Concert de la Loge Olympique, dont l'origine remonte
1782 !
Et
justement l'vocation du pass tait bien prsente lors de cette soire car ce
n'est qu' quelques mtres plus loin que deux sicles plus tt la symphonie
n83 dite La Poule de Joseph Haydn fut donne. En effet les
concerts de la Loge Olympique l'poque taient donns dans la salle des
Cent-Suisses du Palais des Tuileries. Julien Chauvin et ses comparses abordent
les deux premiers mouvements avec nergie. Ds les premires mesures on admire
l'excellence des instrumentistes commencer par la hautboste Emma Black dans
sa brve intervention au dbut du premier mouvement. Mais ce qui frappe
d'emble, c'est l'engagement de tous les instrumentistes qui ne cessera aucun
moment durant tout le concert. Dans le second mouvement, Julien Chauvin insiste
sur la violence des contrastes peut-tre un peu trop, d'autant plus que l'auditorium
offre une acoustique plutt sche. Vient ensuite un extrait de l'opra de
Guiseppe Sarti Didone abbandonata. Sandrine Piau conduit son air la
tonalit tragique ( Io d'amore, oh Dio ! Mi moro / Je meurs
d'amour, Dieux!) avec l'motion qui s'impose aide en cela par une voix
parfaitement ductile avec des changements de couleurs expressifs. Plus tard,
dans un air de Jean Chrtien Bach, elle donnera un tout autre aspect de son
grand talent.
Suit
une brve symphonie qui fut pour beaucoup une rvlation. Elle est de
Marie-Alexandre Gunin. Compose en 1777,
en r mineur elle porte le numro d'opus 4 n3. L'nergie qu'insuffle
son orchestre Julien Chauvin y est totalement justifie : un premier mouvement
plein de couleurs, un deuxime o la musique avance avec dtermination et un
troisime particulirement brillant. Marie-Alexandre Gunin (1744-1835) mrite
d'tre sorti de l'ombre. Il fut conseill sans doute par Gossec qui il
ddicace ses premiers trios. Violoniste parmi les plus dous de sa gnration,
il a reu l'influence de l'cole de Mannheim de Johann Stamitz et a pu du reste
jouer avec les deux fils de ce dernier, Karl et Anton. Sa notorit tait telle
que le premier mouvement de sa symphonie opus 4 a t donn l'occasion de la
rception de Voltaire en maonnerie, en prsence de Benjamin Franklin.
Le
plaisir de jouer des musiciens du Concert de la Loge se confirme dans
l'accompagnement qu'ils font de l'extrait de la srnade en deux actes L'Endimione
de Jean Chrtien Bach chant en musicienne virtuose par Sandrine Piau. Cet
air Semplicetto, ancor non sai (jeune simple d'esprit)
est aussi l'occasion d'entendre la merveilleuse flte de Tami Krausz qui
s'entrelace avec la voix arienne de la cantatrice. Ce fut un moment qu'il faut
bien qualifier de magique. Le concert se terminait par les deux derniers
mouvements de la symphonie de Haydn dont le troisime mouvement trs rythm
donne de nouveau la flte l'occasion de se distinguer. Le quatrime mouvement
est rendu avec une nergie irrsistible qui peut-tre aurait pu tre plus
nuance. C'est sans doute le seul reproche que l'on peut faire cet
ensemble : une couleur vive qui laisse sans repos. Mais on admirera la
mise au point parfaite de toutes les uvres prsentes, le concert se terminant
en apothose par le bis qui runit tous les protagonistes dans l'air de Suzanne
du quatrime acte des Noces de Figaro Deh vieni, non
tardar . Une belle soire toute en lumire.
Gilles Ribardire.
Cration de
L'Ombre de Venceslao, opra de Martin Matalon
Martin
MATALON : L'ombre de Venceslao. Opra en 2 actes
et 32 scnes. Livret de Jorge Lavelli d'aprs la pice ponyme de Copi. Thibaut
Desplantes, Ziad Nehme, Estelle Poscio, Sarah Laulan, Mathieu Gardon. Jorge
Rodriguez, danseur de tango, Germain Nayl, acteur, Ismal Ruggiero, mime, David
Maisse, voix enregistre. Anthony Millet, Max Bonnay, Victor Villena, Guillaume
Hodeau, bandononistes. Paul Henri Nivet, Benjamin Leblay, Stefano Amori, Yann
Sylvere Le Gall, Les Serviteurs de scne. Ingnieur du son / Grame, Max
Bruckert. Orchestre Symphonique de Bretagne, dir. Ernest Martinez Izquierdo.
Mise en scne : Jorge Lavelli.
Martin Matalon & Jorge Lavelli / DR
Favoriser
l'insertion en milieu professionnel de jeunes artistes lyriques et faire tourner
un spectacle dans onze maisons d'opra et pour une quarantaine de
reprsentations, c'est ce quoi s'engage le Centre Franais de Promotion
Lyrique (CFPL) s'agissant de L'ombre de Venceslao, l'opra du
compositeur argentin Martin Matalon. Donn en cration mondiale Rennes. le
spectacle va voyager sur les scnes de Bordeaux, Marseille, Avignon, Toulouse,
Montpellier... jusqu' Buenos Aires et Santiago du Chili!
L'Ombre
de Venceslao, le second opra de
Matalon, est une adaptation de la pice ponyme de Copi que ralise Jorge
Lavelli, l'me frre de l'crivain argentin. Le livret nous plonge dans
l'histoire de l'Argentine des annes 50, en proie la dictature de Pern et
aux coups d'tat militaires qui ruinent la situation conomique du pays. Avec son
chapeau et son poncho, Venceslao incarne le gaucho, paysan lev la dure
( J'irai pieds nus scande-t-il), au parler gras et aux pulsions
viscrales, qui fuit la socit et tente de retrouver ses origines au contact
de la nature. Contraint l'errance et au voyage, en lutte perptuelle avec les
lments la pluie torrentielle semble la mtaphore des calamits de son pays
- il entraine les siens vers le Nord, sa maitresse Mechita, le vieux Largui et
le perroquet, tout la fois sa mmoire et son confident. Le singe (rle mim)
qui vient grossir les rangs Iguaz semble incarner cet tat sauvage que
Venceslao appelle de ses vux. China et Rogelio, ses deux enfants runis par un
mariage incestueux, regardent au contraire vers les lumires de la ville, passant
par le meurtre et toutes les compromissions pour arriver leurs fins. China va
tuer sa mre, son bb et mme son mari, avant de succomber sous les rafales de
la milice! Venceslao quant lui n'ira pas au-del des chutes d'Iguaz. Il a
puis ses propres forces et celles de son compagnon de route, son double, le
cheval Gueule de rat. La mort, annonce par les cartes de Mechita, reste sa
seule issue (il se pend) mais son ombre ne cessera de hanter la mmoire des
Argentins.
DR
Jorge
Lavelli, qui assure galement la mise en scne, fait dfiler dans un rythme de
plus en plus effrn les 32 scnes du livret qui croisent les destins
respectifs des deux gnrations. A la faveur de courts interludes orchestraux,
il renouvle pour chacune d'elles l'espace et le dcor, souvent pittoresque :
telle cette corde tendue qui coupe la scne et o schent les draps blancs
derrire lesquels Venceslao, trs expansif, honore sa matresse Mechita.
Chantant
dans son arbre gnalogique , Martin Matalon quant lui labore une
matire sonore foisonnante et colore, intgrant l'orchestre un accordon,
une partie de percussions trs en relief le dferlement des peaux est
impressionnant - et les ressorts de l'lectronique qui sollicite la technique
Grame. Superbe et tellurique, l'ouverture plante un dcor d'orage et de dluge
ml au bruit des roues de la charrette de Venceslao. C'est le chaos de
l'Argentine et la route de l'exode qui rsonnent ici avant le dbut du drame.
Dans la fosse, les musiciens de l'Orchestre Symphonique de Bretagne sont
exemplaires sous la direction investie d'Ernest Martinez Izquierdo. Le rythme
de tango et les chansons de Tita Merello l'Edith Piaf de la Pampa diffuses
par la radio sont associs au personnage de China et fibrent de manire presque
obsessionnelle le parcours dramaturgique. Entre les deux actes, l'interlude des
quatre bandonons (Anthony Millet, Max Bonnay, Victor Villena et Guillaume
Hodeau) aussi trange que fascinant, confre d'ailleurs la danse lascive un
rle beaucoup plus que divertissant.
DR
Sur
le plateau, le texte parl et la voix chante se relaient dans un mouvement
trs fluide, juxtaposant constamment le dbit de la parole et le temps plus
tir de la musique. Matalon double souvent la ligne de chant par un instrument
soliste, une manire subtile de relier la fosse et le plateau, ou cale la voix
sur le rythme de la danse, comme dans la trs belle scne 8 de l'Acte I entre
Venceslao et sa fille China. Cette dernire est magnifiquement dfendue par la
ptillante colorature suisse Estelle Poscio, qui est aussi la partenaire zle
et trs dvtue du danseur Coco Pellegrini dans le Tango du deuxime acte. Si
la voix du baryton Thibaut Desplantes/Venceslao est un rien monolithique,
l'envergure scnique et la rusticit qu'il donne au personnage impressionnent.
La voix plus lgre et un brin plotte du baryton franais Mathieu Gardon colle
au personnage du vieux Largui, l'amoureux transi de Mechita ruin par la crise conomique et les
inondations, qui peine choisir son camp et passe son temps dormir. Le tnor
de Ziad Nehme/Rogelio est clair et joliment timbr quoiqu'un peu tendu.
Rvlation de la soire, la mezzo-soprano Sarah Laulan incarne une Mechita au
caractre bien tremp, avec une vraie dimension dramatique et une voix
chaleureuse au mdium charnu. On n'oublie pas la voix lgrement traite et
enregistre du perroquet/David Maisse, le personnage bouffe qui dclenche
systmatiquement le rire du public. Dans la scne cl du drame (Acte II scne
28), Venceslao lui confie le rcit de son enfance en Uruguay, de sa mre
gorge par la milice, de sa fuite sur un poulain... L'ombre de Venceslao,
c'est un peu l'histoire de Copi.
Michle Tosi.
L'orchestre Les Passions, 30 ans !
DR
L'orchestre
Les Passions-Orchestre baroque de Montauban sous la direction de Jean-Marc
Andrieu fte ses trente ans dexistence ! A cette occasion aprs un
concert de cration au Festival de Radio France et Montpellier au mois de
juillet, puis un concert anniversaire Montauban, cest la Cathdrale
Saint-Etienne de Toulouse, le 6 octobre, quil a interprt le Requiem (1705) de Jean Gilles,
puis le Magnificat
(1741) et In Exitu Isral
(1749) dAntoineEsprit Blanchard. Ces deux compositeurs ont t Matres de
Chapelle de cette Cathdrale. Pendant tout un week-end plusieurs rendez-vous
ont eu lieu Toulouse, plac sous la prsidence dhonneur du musicologue
Gilles Gantagrel (expositions, colloques) et en prsence de la musicologue
Bernadette Lespinard, grande spcialiste de Blanchard.
Jean-Marc
Andrieu est trs attach au baroque mridional et infatigable, cherche
dnicher des uvres peu ou pas connues. Jean Gilles, n Tarascon en 1668,
sarrta dans la ville rose o il succda Campra, Matre de Chapelle de la
Cathdrale Saint-Etienne. Il y mourut en 1705, 37 ans. Son Requiem, crit
pour une personnalit de Toulouse qui refusa de payer luvre, ft jou ses
propres funrailles, dirig par Campra, comme celles de Rameau et de Louis
XV. La version que propose Jean-Marc Andrieu est celle qui se rapproche le plus
possible de loriginal. Elle tait interprte par le Chur de Chambre Les
Elments sous la direction de Jol Suhubiette, et Anne Magout et Ccile
Dibon-Lafarge, dessus, Franois-Nicolas Geslot, haute-contre, Bruno Boterf,
taille, Alain Buet, basse-taille. La Cathdrale tait pleine et le succs au
rendez-vous. Mais le clou de la soire aura t les deux uvres
dAntoine-Esprit Blanchard : le Magnificat
et In Exitu Isarl ; une
grande premire pour beaucoup dauditeurs. Lhistoire peut paratre injuste,
car ce compositeur a uvr pendant trente ans Versailles et il est lun des
derniers reprsentants du genre du Grand motet dans la grande tradition de la
musique instaure par Louis XIV. Il est pass la case oubli ! Ses pices
sont empreintes de faste, de thtralit. In Exitu Isral est une musique descriptive, forte (le
tremblement de terre, Mose frappe au rocher, le dernier chur). LՎquipe
vocale, le chur Les Elments , habitus ce type de rpertoire,
ont enthousiasm lauditoire. Les Passions est un orchestre engag, homogne,
trs bien quilibr, et la direction de Jean-Marc Andrieu prcise et dune
grande nergie fait merveille. Le magnifique timbre dAnne Magout est parfait
pour ce style de rpertoire ainsi que celui de Bruno Boterf, un ancien de
l'Ensemble Clment Janequin. On peut regretter que Franois-Nicolas Geslot,
indispos, nait pas pu offrir son beau chant de haute contre que lon peut
entendre dans ses disques. Alain Buet tait tout fait correct dans ses
interventions sans convaincre totalement. Mais ces petits dtails ne sont rien
face la russite de cet anniversaire. Il est plus que dommage que cette
formation soit absente des grandes manifestations nationales comme les Journes
Versailles, Saintes ou dans dautres festivals o sont reus des ensembles de
qualit bien moindre face lexcellence de cet orchestre et au travail que
fait Jean-Marc Andrieu. On flicitera aussi le travail efficace de Catherine
Kauffmann-Saint-Martin pour promouvoir Les Passions.
Un trs bel album a t dit chez Ligia avec trois
Motets grand chur dAntoine-Esprit Blanchard : Magnificat, De profundis, In
exit Israel.
Stphane Loison.
Le festival Toulouse
Les Orgues
Le
festival international Toulouse les Orgues, cr en 1996 par Michel Bouvard et
Jan-Willem Jansen, en hommage Xavier Darasse, a clbr son 20me
anniversaire du 5 au 16 octobre 2016. Depuis sa cration, 780 concerts ont t
organiss et plus de 200 000 spectateurs sont venus couter de lorgue ! La
ville possde une trentaine dorgues dont certains sont classs monuments
historiques. Cette anne le cross over sest fait entendre, Lorgue, qui fait
dialoguer les cultures , comme le proclame le thme choisi pour cette dition.
Partenaire des trente ans des Passions le concert douverture du TLO - nous
avons pu assister quelques concerts tonnants.
Rock The Organ / DR
A
l'glise Notre-dame de la Dalbade, Yves Rechsteiner lorgue, accompagn par
Frdric Maurin, la guitare lectrique, et Henri-Charles Cageta aux
percussions, a organis une soire Rock The Organ, cration de rock
progressif pour orgue, percussions et guitare lectrique. Cet impressionnant
organiste a jou des adaptations duvres de Frank Zappa, Pink Floyd, Emerson
Lake et Palmer, Pat Metheney, King Crimson. Et une cration de Gavin Bryars,
prsent au concert, compositeur de musique daujourdhui dans la mouvance
minimaliste que de nombreux quatuors apprcient. Dans lesprit cross over un autre
concert tout aussi tonnant, au Couvent des Jacobins, intitul les deux
Andalousies , mlangeait musique et chant dOrient et dOccident. Ces
musiques mdivales taient accompagnes lorgue positif jou par Thilo
Muster, sur une conception de Marc Loopuyt. Il a interprt, accompagn par
deux chanteurs et un joueur de oud, des Buleria Mora, Sevillana, Fandango,
Coletillas, une suite arabo-andalouse et une sonate de Scarlatti la guitare
accompagne par lorgue, qui montrait les influences arabo-andalouse sur les
compositions de ce musicien. Ces concerts dans toute la ville et les environs
sont extrmement priss et dune qualit musicale exceptionnelle. Pendant ces
dix jours de nombreux et talentueux organistes se sont succds avec des programmes
trs clectiques, de Bach Jehan Alain en passant par Ravel, Elgar, Liszt, et
des uvres du XVII me sicle.
Mene avec brio, esprit et humour, par Yves Rechsteiner lui-mme, la
prsentation, presque exhaustive, du programme musical ne peut quaiguiser
lapptit musical de lassistance venue nombreuse dcouvrir la quarantaine de
manifestations programmes dans lesprit du thme choisi cette anne. Comme le
souligne le directeur artistique : Toulouse les Orgues fte un grand
vnement, il a vingt ans ! Vingt ans, nest-ce pas le plus bel ge pour courir
le monde, souvrir aux autres et rver davenir ? Deux lignes principales
guident cette dition anniversaire. Dune part, lorgue part la rencontre des
cultures du monde, dautre part de jeunes interprtes vont se lancer dans des
virages audacieux pour imaginer lavenir du concert dorgue. Et nous faisons le
pari que les deux lignes se croiseront . Tous les styles, tous les thmes lis
lorgue auront donc t reprsents tout au long des deux semaines eu
festival. Comme limprovisation et les musiques des XXme et XXIme sicles
auront t explores avec imagination dans tous les domaines, du rock, au
cinma (Cin-concert Le Tigre vert). Le dialogue des cultures, particulirement
clbr, aura vu cohabiter lEspagne, les Balkans et lOrient mythique.
Stphane Loison.
Jean Muller, un
pianiste d'envergure
Marlene Soares
Jean Muller est un jeune pianiste Luxembourgeois
bard de nombreux prix. Il a une technique toute preuve, impressionnante
mme. Son rcital la salle Cortot tait clectique et il a jou Brahms,
Ligeti en passant par Prokofiev avec une gale assurance, peut-tre avec la
mme intensit et manque de nuances. Dans la magnifique salle Cortot, la pdale
tout va mise dans la sonate op. 1 N 1 de Brahms empchait la musique de
respirer. Ses interprtations de Ligeti, Arc-en-ciel - Escalier du diable
, et de Barcarolle n3 de Boumans taient exemplaires, vertigineuses. La
Sonate N 6 de Prokofiev nest pas une uvre de grande envergure. Cest
Sviatoslav Richter qui la cre en 1940. Jean Muller a une approche simple et
directe, et la pice ne demande pas de grandes rflexions. En bis, un prlude
de Rachmaninov nous a fait dcouvrir un pianiste de haute envergure dcouvrir absolument.
Un disque vient d'tre dit chez Soupir Music LX
n5242 - qui correspond en tous points au rcital. Un bel album et dune belle
diversit musicale.
Il faut dcouvrir la 20me saison Autour du Piano 2016-2017, avec des concerts la salle Cortot, la Fondation Dosne-Thiers, la salle Gaveau et au Muse Jacquemart-Andr : www.autourdupiano.fr
Stphane Loison.
La Hongrie et la Pologne l'honneur
Rafael Payare / DR
Le public relativement peu nombreux du grand
auditorium de la Maison de la Radio a eu le plaisir assez rare d'couter un
concert unique tant par sa programmation que la qualit de ses interprtes. Un
concert qui sortait des sentiers battus en rassemblant les uvres de quatre
compositeurs hongrois et polonais, Zoltn Kodly, Bla Bartk, Krzysztof Penderecki et
Witold Lustoslawski. Programme exigeant et quilibr puisque les deux pices
trs intriorises du milieu taient encadres d'ouvrages beaucoup plus
extravertis. Quant l'orchestre philharmonique de Radio France, il tait men
la baguette, dans tous les sens du terme, par Rafael Payare, chef aussi
exigeant que prcis. Les Danses de Galnta doivent leur nom une
bourgade aujourd'hui slovaque, o, enfant, Kodly entendit avec ravissement un
orchestre tsigane. L'uvre, cre en 1933, reprend d'ailleurs le principe du verbunkos,
danse traditionnelle de recrutement militaire qui fait alterner les moments
vifs et les passages lents. C'est une musique vibrante et euphorique, dans
laquelle le compositeur se montre magnifique orchestrateur et fin coloriste,
plutt que grand mlodiste, tirant toutes les ressources de l'orchestre, lequel
est en perptuel dialogue avec des instruments solistes clarinette, hautbois,
flte, piccolo... Il y a quelque chose d'irrsistible dans cette uvre
narrative au style imitatif, qui suscite des images de rjouissances paysannes
sur l'aire battre aprs la moisson ou celles de chevaux courant dans la
puszta. Tout le talent du chef se mesure la manire dont il communique ses
intentions l'ensemble qui le lui rend bien !
Kodly, c'est un talent
immense, mais Bartk, c'est le gnie ! Le premier est national, le second,
universel. Il y a entre ces deux musiciens, absolus contemporains et amis, tous
les deux pionniers dans le domaine de l'ethnomusicologie, une diffrence
d'ordre, comme dirait Pascal. La sduction immdiate d'une musique joyeuse qui
emporte, mais qui s'couterait parfois un peu chanter et serait tellement
consciente dՐtre hongroise, laissait donc place l'pret du chef-d'uvre
qu'est le Concerto pour violon et orchestre n2, achev en 1938.
D'emble, cette musique nous transporte sur une autre plante... que la Hongrie
natale si chre au compositeur ! Et nous sommes aussitt ports sur les ailes
d'un violoniste qui s'empare avec une aisance confondante du premier thme,
ample, libre, autoritaire et trs lyrique la fois. Le jeu de Valeriy Sokolov
fait entendre TOUTES les notes, sans aucun accroc ni affolement. Et cette
virtuosit extrme ne nuit jamais la musicalit : tout est quilibr et
nuanc, sonne juste. L'auditeur est saisi, littralement happ par l'vidence
de ce qui est en train de se produire devant lui : un homme lui redonne
une musique terriblement exigeante, tour tour ruptive, incroyablement douce,
inquite, trouble et mlodieuse, avec l'assurance impressionnante d'un
funambule marchant, courant ou sautillant sur sa corde. L'orchestre n'est pas
en reste, qui restitue parfaitement le miracle d'un quilibre, manifeste dans cette
criture, entre des climats envotants et un emportement rhapsodique parfois
droutant, entre galement le souci du dtail et celui de la grande forme.
Valeriy Sokolov est aussi un musicien gnreux, qui, en bis, gratifia son
public du Recitativo und Scherzo-Caprice de Fritz Kreisler, la fois
expressif et intime, lgant et la sonorit chatoyante. Le silence gnral se
densifia autour du soliste, dont chaque inflexion remplissait la grande salle.
Le public aura sans doute not ladmiration que portaient les autres musiciens,
en particulier les violonistes, celui quils semblaient regarder comme un
dieu vivant.
Aprs l'entracte, place
un effectif plus rduit pour la trs belle Sinfonietta per archi (1992)
de Penderecki, transcription du Trio pour cordes crit un an auparavant.
Base sur le principe de construction des concerti grossi, cette pice
courte (une douzaine de minutes) fait dialoguer les instruments, soit par
pupitres, soit par opposition entre le concertino (les solistes) et le ripieno
(les autres cordes), jouant ainsi sur l'espace, ce qui est la fois tonnant
et absolument charmant dans cette partition trs intrieure privilgiant le
registre mdium. D'ailleurs, ceux qui aiment le son de l'alto ont t la
fte. La quatrime et dernire uvre au
programme, le Concerto pour orchestre de Lustoslawski (1950-1954) veut aussi clbrer
les noces du folklore et de la musique savante. Cela commence au pupitre des
violoncelles, soutenus par la frappe rgulire de la timbale, dans un climat
quon pourrait qualifier dinquitant : un thme nerveux qui petit petit
contamine tout lorchestre et mle la rudesse populaire de plus en plus cuivre
une sorte de lgret volatile. et l, on reconnat le Sacre du printemps (martlement des
percussions, dramaturgie de lensemble) et le Concerto pour orchestre de Bartk (par exemple cuivres jouant
ensemble un petit thme). Cette criture virtuose et enleve atomise de plus en
plus les timbres et lensemble finit par ressembler une course effrne. Contrairement
au Concerto de Bartk, nous restons,
ici, la surface dune musique brillante justement, dont la vitalit le
dispute au pittoresque. Men par le vibrant Rafael Payare, le
Philhar a parfaitement honor une musique dont lun des mrites
est de mettre en valeur tous les pupitres.
Patrick Jzquel.
Lintgrale de Ravel par Bertrand Chamayou
Un
rcital quil ne fallait pas manquer Chambry! Celui de lintgrale
Ravel de Bertrand Chamayou Et le public ne sy est pas tromp. Cest un thtre
Charles Dullin comble qui a accueilli, dans le cadre du Bel-Air clavier festival - quil dirige, Bertrand Chamayou et son
intgrale Ravel. Enregistre par ses soins lan dernier, elle fut lobjet dun
concert mmorable en janvier au Thtre des Champs-Elyses, un mois avant que
lartiste ne soit couronn par une Victoire de la musique. Que dire de son
interprtation, part quelle est brillante, prcise, sure,
intelligente ? Une intelligence qui transparat mme dans lagencement
successif des pices du concert ! Tout en mettant en valeur les nombreuses
facettes du compositeur euskado-savoyard , linterprtation de
Bertrand permet au geste ravlien de saffirmer dans toute sa
splendeur. Quant lusage de la pdale, quil change avec un soin particulier,
sans souvent poser le talon (sa taille modeste le permet), il reste un modle
pour tous ceux qui la conoivent comme un moyen denrober le son en permanence
par lajout dharmoniques.
Une curieuse rencontre de Bel
Air : Julian Trevelyan
Julian
vient-il dun autre temps ? Cest la premire impression quil donne
lorsquon a la chance dentendre ce trs jeune pianiste et la surprise de le
voir saluer son public comme un gentleman du XIXe sicle. Rcompens en octobre
2015 ( 16 ans) par un second prix au prestigieux Festival Long-Thibaud, ce
jeune britannique semble tout droit sorti dun monde perdu, un monde de bonnes
manires et de contrle, ce qui sexplique sans doute par le ct self made man de ce brillant
interprte, qui na, dit-on, jamais frquent les conservatoires et les
lyces ! Les uvres quil avait choisi de nous interprter (Chaconne
de Bach/Busoni, 1re Valse-Caprice de Faur, Gaspard de la nuit de Ravel, les
Douze Notations de Boulez et la trs redoute Sonate op. 111 de Beethoven)
en disent long sur sa maturit. Je me demande tout de mme ce quil jouera 50
ans ! Son interprtation est trs propre, trs construite, mais javoue ne
pas avoir t subjugu : peut-on 17 ans faire sien lopus 111 de
Beethoven ? Je ne le crois pas. Et jaurais prfr dcouvrir ce jeune
homme plein de promesses dans des uvres o pourrait sexprimer la fougue de
son ge ! Cette sonate de Beethoven, avec ses rubatos peu adapts la
pice, nous rapprochait bien plus curieusement de Nohant que de Vienne !
Et jespre quil ne men voudra pas si jai not une petite faiblesse de la
main gauche : cette dernire nobtient en effet lintensit quen abordant
le clavier de trs haut, et rarement en lui confiant un poids gal celui de
la main droite. Quil comprenne le caractre constructif de ma remarque, et se
donne la peine de visionner les vidos : il verra combien son paule
gauche est toujours plus haute que la droite. Non seulement en modifiant cette
position, il gagnera en puissance expressive, mais surtout il vitera les
dsagrments quelle risque de provoquer sur son dos dune droiture sans
gal ! Un jeune homme trs prometteur, donc, qui pourrait devenir un jour
une personnalit attachante.
Louverture du Festival des nuits
romantiques Aix les bains
Paganini
cassait parat-il volontairement une une les cordes de son violon pour
montrer sa virtuosit. Nemanja Radulovic
sest encore un peu rapproch de son modle, vendredi 23 septembre, en achevant un mouvement de concerto de
Bach sur trois cordes ! Malgr ce contre-temps (et
labngation dun violoniste qui lui prta son instrument), le brillant
violoniste nous a transmis par son jeu, comme chaque anne, son nergie et son
enthousiasme. Et si la justesse fut un peu moins au rendez-vous, la faon
inimitable quil a de dialoguer avec un orchestre ne pouvait que sexprimer au
mieux dans ces concerti grossi partags avec lensemble double sens quil cra en 2008.
L
o jadhre un peu moins, cest lorsque Nemanja nous fait du Nigel Kennedy.
Pourquoi prendre certaines pices dans un tempo si rapide quon entend plus
toutes les notes ? Quon soit puriste ou pas, on admettra que le style de
Bach ne supporte pas le clinquant, le faire valoir tout prix.
Jespre simplement que le directeur artistique du CD - qui nous est annonc -
des uvres de Bach chez Deutsche
Grammophon par ces artistes, aura su modrer leur ardeur, et permettra
tous de jouir de lart incommensurable du Cantor de Leipzig, lorsquil prenait
la peine de satteler des uvres profanes et virtuoses ! Ce nest pas
lexcution de la trop clbre Toccata et fugue dans un arrangement digne des plus grands mfaits
de Stokowski qui ma fait ragir. Cette partition, lune des plus
insipides partitions du matre
donc la plus connue ne mrite pas beaucoup plus dՎgards. Mais les concerti
sont des perles harmoniques et contrapuntiques qui ne supportent pas la
contre-faon.
Faut-il
vraiment - me direz-vous - tre puriste, lorsquon joue devant un public qui
na pas encore compris quun concerto est en trois mouvements, et quon
napplaudit pas la fin du premier ? Je rponds oui, lorsquon sappelle
Nemanja, et quon a tant uvr, depuis maintenant plus de dix ans, pour rendre
passionnante la musique aux plus nophytes. Tmoins lincursion dans le monde
populaire de ses bis : du groupe ABBA
la liste de Schindler, en passant
par la musique tzigane, de quoi
enthousiasmer la salle des congrs dAix les bains, et faire oublier la version
arrange pour violon des Bachianas
Basileiras de Villa- Lobos, pour le coup lgrement oubli dans cette
soire de festival, dont le thme tait Villa-Lobos et
Bach !
Le Trio Zadig Aix
Il
a vraiment beaucoup de talent, ce tout jeune trio Zadig. Et sil est vrai que le trio de Ravel, quils ont
magistralement interprt, tait nettement plus en place que celui, trs
dcevant, de Villa-Lobos (je parle ici de la composition, pas de
linterprtation !), la soire a t crescendo.
Aprs un Rachmaninov trs loquent, la pice de Ravel sest rvle
dcidment la Savoie sait rendre hommage son petit-fils cette
anne ! dans toute sa complexit et sa valeur. Quant aux bis (Schubert
et Haydn) ils nont fait que trs brillamment confirmer le professionnalisme et
la musicalit de cet ensemble dont on na pas fini de parler.
Un concert symphonique dcevant
Il
fallait bien une uvre de dimensions respectables pour honorer lartiste que le
Festival des Nuits Romantiques avait
choisi cette anne : Villa-Lobos! Mais javoue que jattendais autre chose
que ce pensum que constitue sa premire symphonie ! Le public qui pensait
se ddommager par la Symphonie
fantastique en a t pour ses frais. Ryan McAdams, qui dirigeait l'Orchestra Sinfonica Nazionale de la RAI
de Turin avait commenc lendormir par une pavane pour une infante qui, en
effet, tait dfunte. Tellement
dfunte que le tempo choisi rendait la pice interminable. La symphonie
fantastique, qui ne lest vraiment que lorsquon lalimente sans cesse dune
nergie communicative, avait beaucoup perdu de sa superbe. Quand on se souvient
de la pche quun Berstein pouvait insuffler cette uvre, on
reste stupfait de constater combien lon peut dnaturer ce point un
chef-duvre. Non pas que lorchestre est mauvais. Loin de l (pas toujours
trs ensemble, cest vrai). Mais Monsieur McAdams ne cesse de le ralentir par
des gestes beaucoup trop grands, qui rpriment involontairement tout lan.
Philippe Morant.
LEDITION MUSICALE
FORMATION MUSICALE CHUR DENFANTS
Michel LYSIGHT : La
complainte des esclaves sur un texte dAlain Van Kerckhoven pour chur
denfants deux voix, 2 percussionnistes et 2 instruments ou piano. Moyen.
Delatour : DLT2502.
Citons simplement la prsentation : Les esclaves de cette courte pice humoristique sont bien entendu les jeunes choristes, suppliant leur chef de chur de ne plus jamais leur donner chanter de musique contemporaine. La musique est un clin d'il pastichant les grands classiques, tout en conservant la touche personnelle du compositeur. Nous ne prendrons pas partie dans cette querelle La pice est en tout cas bien rjouissante et linterprtation de cette uvre ne laissera certainement pas le public ni les choristes indiffrents.
COMEDIE MUSICALE
Claire VAZART : H2O. Comdie
musicale en 3 actes. Piano chant. Assez facile. Delatour : DLT2635.
On peut se demander si le terme de comdie musicale est celui qui convient le mieux. Tragdie musicale serait plus exact La qualification de drame lyrique quon donne West side story conviendrait certainement encore mieux cette uvre. Le thme est en effet la fois cologique et politique puis quil sagit de la rsistance une dictature, celle de la possession de leau. Par ailleurs, cest une uvre ouverte qui se prte des adaptations de vido, de danse, des improvisations thtrales. Elle est conue pour solistes et chur mixte. Il vaut mieux prvoir un gros effectif. Le langage musical est vari, mais reste cependant assez simple.
ORGUE
Charles BALAYER : Bach chat pour
orgue 4 mains. Moyen. Delatour : DLT2694.
Que voil une pice bien
rjouissante qui aurait paru autrefois iconoclaste Il sagit dun thme de
forme AABA alternant rythmes latin et swing. Nous ne dtaillerons pas ici les
diffrents emprunts luvre du Cantor. Prciss dans la prface, ils pourront
donner lieu une recherche profitable pour les interprtes. Lorgue sonne un
peu ici comme un orgue de cinma : et cest bien agrable ! On peut
couter lintgralit de la pice sur le site de lՎditeur et sur YouTube.
Serge OLLIVE : Arabesque Op.
38 pour orgue. Niveau intermdiaire. Waldhorn Editions (auto-label) :
WH-4515167.
Si la pice ne demande que cinq jeux dont quatre fonds de 8, elle ne sera commodment joue que sur trois claviers, mme si deux sont possibles. Ondoyante, ondulante, cette uvre porte bien son nom, avec un ct un peu troublant, comme flottant entre deux eaux. Ce nest pas pour rien quelle a t crite Saint Malo Ce qui constitue videmment un compliment. Ajoutons quil est possible de lՎcouter en intgralit sur le site de lՎditeur ou sur YouTube https://www.youtube.com/watch?v=dHLnnTXh7Ac
Pascale ROUET : Bien
commencer lorgue. Vol. 4. Rpertoire pour les dbutants adultes.
Delatour : DLT1766.
Nous avons recens en octobre 2015 les trois premiers volumes de cette mthode, qui sadressaient des dbutants enfants. Cette fois, cest aux dbutants adultes que lauteur sadresse. Elle reprend donc la mme mthodologie mais adapte ce public spcifique. Abordant tous les styles, elle initie ses lves y compris la musique contemporaine. Figure galement dans ce volume une prsentation claire et simple (mais pas simpliste !) de linstrument permettant lՎlve de matriser cette bte multiforme Bref, louvrage, trs pdagogique, devrait passionner les lves et aider puissamment les professeurs.
Pascale ROUET : Pour
continuer lorgue. Rpertoire de pices avec pdalier. Volume II.
Delatour : DLT1767.
Faisant suite au premier volume recens en octobre 2015, ce deuxime volume contient la fois des incontournables , des transcriptions ainsi que des pices contemporaines crites spcialement par Jean-Luc Etienne, Yves Lafargue, Eric Lebrun, Jacques Pichard et Christophe Marchand. Tout cela donne un rpertoire aussi vari que passionnant.
PIANO
Charles BALAYER : Bach chat pour
piano 4 mains. Moyen. Delatour : DLT2695.
On se rapportera, pour la prsentation de luvre, celle de la version pour orgue quatre mains. Il sagit en effet de la mme uvre, non moins revigorante, mais crite, cette fois, pour le piano. Comme pour la version pour orgue, on peut couter lintgralit de la pice sur le site de lՎditeur et sur YouTube.
GUITARE
Stella BENDETOWICZ : Danse
somnambule. Pice pour guitare. Elmentaire. Lafitan : P.L.3087.
Pourquoi parler dune danse somnambule ? Sans doute cause de son ct, rveur, immatriel et de son rythme. Si lՎcriture est deux temps, on oscille entre un sentiment de deux temps et de trois temps. Ce mi mineur modulant doucement est vraiment plein de charme. Cette jolie pice devrait avoir beaucoup de succs auprs des lves et de leurs auditeurs.
Hugues CHAFFARDON : La
maison des Landes. Pice pour guitare. Elmentaire. Lafitan :
P.L.3083.
Outre son intrt musical, cette pice, prsente un dbut et une fin o le chant se trouve la partie infrieure. Prsent trois temps et en do mineur, le mme thme se dploie quatre temps la partie suprieure dans la partie mdiane qui module pour nous conduire un retour du thme du dbut mais cette fois en do dise mineur. Le titre permettra linterprte de se constituer des images mentales un peu nostalgiques. Cest un trs joli morceau.
Jean-Marc FRZIGNAC : Couleur
orient. Pice pour guitare. Elmentaire. Lafitan. P.L.3081.
Il ne sagit pas ici dune pice de genre mais plutt, comme le laisse entendre le titre, une ambiance, une atmosphre orientale : moins un paysage que des couleurs chatoyantes. Mlismes, recherches de timbres, cette pice demande un vritable interprte matrisant parfaitement sa technique pour en tirer toute la richesse musicale.
Marc BATANI : Renaissance
italienne. 6 pices pour guitare choisies et revues par Marc Batani.
Lemoine : 29 259 H.L.
Cest partir dun manuscrit pour luth aujourdhui disparu mais heureusement copi par un musicologue italien que Marc Batani a ralis ses transcriptions. Il ne sagit dailleurs pas dune simple transcription mais dune adaptation la guitare de ces pices fort intressantes. Le tout a t fait avec beaucoup de got et en respectant le style de lՎpoque. Ces six courts morceaux peuvent trs facilement constituer une suite bien agrable pour commencer un concert.
Ignacio CERVANTES : Danzas
cubanas pour 2 guitares. Lemoine : 29 260 H.L.
Ignacio Cervantes est un compositeur cubain de la deuxime moiti du XIX sicle. Il a fait ses tudes au Conservatoire de Paris avec Marmontel et Charles Alban. Retourn dans son pays, il a renouvel la musique cubaine. Ces danses, crites primitivement pour piano, ont t transcrites pour deux guitares par Marc Batani. Alejo Carpentier nous dit : Les danzas de Cervantes occupent dans la musique de lՔle la place quoccupent les danses norvgiennes de Grieg ou les danses slaves de Dvorak dans les musiques de leurs pays respectifs . Cest un grand plaisir que de dcouvrir ces uvres si peu connues.
Olivier BENSA : Microfaune. 24
prludes dans tous les tons pour guitare. 3me cycle. Lemoine :
HL 29246.
Chacun de ces vingt-quatre prludes porte un nom dinsecte. Le jeu de mot du titre nest pas une simple concidence : le Faune est galement un papillon Si chaque tonalit est bien caractrise, les accidents de parcours sont fort nombreux. Mais cest de bonne guerre dans des tudes qui, bien que pdagogiques, sont aussi des pices de concert. Ajoutons quune description de chaque insecte figure en tte des morceaux et permet ainsi linterprte de se faire une image mentale de lambiance de la pice.
Manuel SAUMELL : 19
Contradanzas pour 2 guitares. Transcription Marc Batani. Lemoine :
29 261 H.L.
Ces pices du plus important compositeur cubain du XIX sicle, transcrites du piano pour deux guitares, sont tout fait remarquable dans la mesure o chacune est constitue dune partie plus influence par la musique occidentale et dune autre qui est invariablement crole par lutilisation des formes rythmiques de la, musique cubaine : habanera, tresillo, cinquillo. Lensemble, ddi au duo Isabelle Chomet Bertrand Caz, qui ont enregistr ces pices, est tout fait passionnant.
VIOLON
Gabriel DURLIAT : David et
Goliath pour violon et piano. Prparatoire. Lafitan : P.L.3084.
Dabord, il y a la prsentation des acteurs. Le thme de David est ptillant souhait. Celui de Goliath est grave et inquitant . Quant au face face, il demandera que les deux interprtes nous fassent participer au combat : les thmes sentrechoquent avec violence. Le tout se termine videmment par lissue attendue : David lance une pierre, elle vole et assomme Goliath . Trmolo et glissando du violon nous font vivre la scne en direct La victoire de David sexprime dans un r majeur la fois majestueux et primesautier pour se terminer par un sol Majeur Plus lent et majestueux . Lensemble est plein dhumour, trs expressif et devrait plaire autant linterprte quՈ ses auditeurs.
Csar FRANCK : Sonate pour
piano et violon, Andantino quietoso op.
6, Mlancolie pour violon et piano.
Urtext. Brenreiter : BA9425.
On est vraiment heureux de trouver une dition aussi soigne de la clbrissime sonate ainsi quune prface en franais, puisquil sagit de musique franaise aussi copieuse que dtaille de Gudula Schtz traduite par Vincent Giroud. Cette dition comprend galement un Andantino quietoso publi en 1743, uvre de jeunesse mais qui est trs loin dՐtre sans intrt et une Mlancolie contemporaine de la Sonate qui, bien quՎtant une uvre de circonstance, nen est pas moins dun intrt certain. Bien sr, les notes critiques en fin de volume sont, elles aussi, trs intressantes.
ALTO
Yves BOUILLOT : Chant et
danse. Pice en deux mouvements pour alto et piano. Fin de 1er
cycle. Lafitan : P.L.2973.
Le Chant fait penser une marche solennelle bien classique mais en fait non dpourvue de surprises, par les harmonies qui laccompagnent et par la modulation subite en pizzicati qui la coupe soudain. Quant la deuxime pice, elle a des allures de danse paysanne ou de danse populaire mais elle non plus nest pas sans surprises et comporte notamment quelques hmioles. La partie de piano, si elle peut tre joue facilement par un lve, le sera plus aisment par un pianiste de second cycle. Lensemble est en tout cas fort plaisant.
Csar FRANCK : Sonate arrange pour piano et alto. Urtext.
Brenreiter : BA10918.
En mme temps que loriginal pour violon, les ditions Brenreiter publient les versions pour alto et violoncelle de cette clbre sonate. On y retrouve la prface de lՎdition pour violon ainsi que lhistorique de la version pour alto, sur laquelle on sait peu de chose. La partie de piano est identique celle de loriginal pour violon. Larrangement de Douglas Woodfull-Harris sinspire trs largement de la transcription pour violoncelle et piano mais, en raison de la tessiture de lalto, reste plus proche de loriginal.
Matthieu STEFANELLI : Praeludium
et Organum pour alto solo (ou violoncelle). Difficile. Delatour :
DLT2698.
Ce court diptyque est crit primitivement pour alto mais cest la version pour violoncelle qui fut cre la premire le 17 aot 2014 au Festival des Chapelles de lՔle de Groix. Cest dailleurs lՎcoute de musiques polyphoniques de la Renaissance qui inspira le compositeur. Le Preludium, sur la corde de la, est crit dans cet esprit, ainsi que lOrganum. La partition contient les deux versions avec leurs doigts propres.
VIOLONCELLE
Tomaso ALBINONI : Adagio et
Allegro de la sonate pour violon et basse continue op.6 n6. Transcription
pour violoncelle et piano de Laurent Rannou. Prparatoire. Lafitan :
P.L.2772.
Si lՎditeur fait paratre cette pice dans sa collection Musique de chambre , cest que la partie de piano est destine tre joue par un pianiste de mme niveau que le violoniste. La transcription est en tout point remarquable car il sagit dun vritable trio : le piano joue constamment deux voix, ce qui rend sa partie particulirement intressante. Cette pice constitue donc une remarquable introduction la musique de chambre.
Frdric BORSARELLO : les
cahiers du violoncelle. Volume 2. 1 vol. 1 DVD. Sempre pi : SP061.
Comme dans le premier volume, dont nous avons rendu compte en novembre 2014, le DVD contenu dans ce volume constitue une pice matresse de la mthode. Explorant toutes les positions, cette mthode conduit pas pas le violoncelliste jusquaux techniques les plus avances de son instrument. Il sagit donc dun outil remarquable au service des lves et de leur professeur.
Csar FRANCK : Sonate Version
violoncelle et piano. Mlancolie pour
violoncelle et piano. Urtext. Brenreiter : BA10917.
En mme temps que la version originale pour violon, les ditions Brenreiter publient les versions pour alto et pour violoncelle de luvre. Sy ajoute ici la Mlancolie pour violon. On lira avec beaucoup de profit les commentaires sur cette version ajouts la prface originelle. Ni lune ni lautre de ces transcriptions nont t effectues par lauteur, mais en ce qui concerne la sonate, on sait que Franck connut et approuva la version ralise par Jules Delsart et publie ici.
CONTREBASSE
Christophe PICOT : Cnossos pour
contrebasse et piano. Fin 2me cycle. Sempre pi : SP0231.
Lorsquon parle de Cnossos,
comment ne pas voquer le Minotaure Cette pice attachante mais rugueuse ne
peut manquer dy faire penser. Lensemble est fougueux, tragique et plein de
caractre. Aprs une monte de la tension, celle-ci se dtend pour finir morendo.
FLTE
Romain DUMAS : Du ct de
chez pour flte et piano. Fin de 1er cycle. Lafitan :
P.L.3074.
Il y a deux parties dans cette pice : dabord un moderato avec expression puis un Allegro staccato . La caractristique la plus intressante de cette uvre est quil sagit dune vritable sonate et que le piano ne joue pas le rle daccompagnateur mais de partenaire. Il y a de nombreux changes entre flte et piano, des contrechants, bref il sagit vraiment de musique de chambre. Cest donc une pice intressante la fois pour le travail quelle permet et pour son charme indniable. Quant son style, il correspond bien au titre.
Arletta ELSAYARY : Les rves
de Julie pour flte et piano. Dbutant. Lafitan. P.L.3046.
Avec Arletta Elsayary, ces rves ne peuvent tre que charmants ! Non seulement ils le sont, mais ils sont galement plein de posie et de fantaisie. Notre jeune fltiste devra, pour en rendre toute la finesse, matriser parfaitement son articulation. Il en sera de mme de son pianiste qui devra reproduire soigneusement les mmes articulations quand le thme passe entre ses mains. Il nest pas si facile dՎcrire des pices pour dbutant et celle-ci est une russite.
CLARINETTE
Alain FLAMME : La Bancale pour
clarinette et piano. Elmentaire.
Lafitan : P.L.3065.
Ce titre fait penser ceux de certaines pices du XVIII sicle, comme La Bougon , Lagaante ou lindiscrte Ce rapprochement est cruel : cest certainement aux rythmes de sa pice et au fait quelle soit 5/4 que lauteur pensait en choisissant ce titre. Toujours est-il quil est amplement mrit, mais il faut dire que ce ct bancal est plein dintrt et plein de charme ! Dautant plus que ce 5/4 se change vite en un 3/4 en forme de valse mme si de nouveaux changements de mesure viennent vite rompre ce bel quilibre. Cest en tout cas plein de caractre et, tout simplement, de musique.
SAXOPHONE
Franois ROSS : Noise
Dfense pour saxophone solo (baryton et soprano). Difficile.
Delatour : DLT2708.
Jouant alternativement du baryton et du soprano, linterprte est en mme temps acteur, puisque ses interventions instrumentales sont prcdes ou suivies dinterventions parles relatant les navigateurs errants sur limmensit ocane . Il est inutile de prciser que lauteur fait appel toutes les techniques contemporaines de jeu du saxophone. La pice a t crite en 1998 lors dun passage Londres.
BASSON
Max MREAUX : Retrouvailles pour
basson et piano. Fin de 1er cycle. Sempre pi : SP0222.
Lensemble, en do Majeur, se droule 9/8 dans une atmosphre joyeuse et bon enfant. La fin du morceau est marque par une cadence dabord du basson puis du piano. Le tout se termine dans la mme atmosphre de bonhommie tranquille. Basson et piano mnent ensemble un agrable contrepoint qui fait du pianiste un vrai compagnon et constitue ainsi une bonne initiation la musique densemble. Il existe une version pour saxhorn.
Pascal PROUST : Petit trot pour
basson et piano. 1er cycle. Sempre pi : SP0220.
Il suffit de fermer les yeux pour voir passer la carriole tire par un vaillant petit cheval. Sagit-il de musique descriptive ? Pourquoi pas ? Ce nest pas un gros mot ! Mais cest plus que cela, cest toute une promenade varie qui se droule devant nous. Si le piano contribue trs fortement donner limpression de trot, ce nest pas son seul rle. Et les deux instruments foltrent avec bonheur. Cest donc une jolie pice bien agrable entendre et jouer.
COR
Yves BOUILLOT : 3
caractres. Pice en 3 mouvements pour cor (en fa ou en mi bmol) et piano.
Fin de 2me cycle. Lafitan : P.L.3004.
Chacune de ces pices illustre bien un caractre . La premire, intitule Bravache se droule sur des rythmes et des intervalles qui voquent une marche militaire, le tout de faon un peu parodique. Si lauteur sous-titre sa pice avec la dfinition du dictionnaire qui affecte la bravoure ; fanfaron , ce nest pas par hasard. La deuxime, intitule Rveur a pour sous-titre qui se complat dans des penses vagues ou chimriques . Elle permet au cor de sՎpancher sur des arpges du piano rappelant des accents de harpe. Quant la troisime, Chevaleresque , qui a le caractre hroque et gnreux des anciens chevaliers , elle sՎlance sur des accents qui rappellent la gigue de la troisime suite en r de Bach Le tout constitue un ensemble aussi vari quagrable.
Ivan BOUMANS : As simple as
friendship pour cor en fa et piano. 3me cycle. Sempre
pi : SP0209.
Aussi simple quune amiti cela reste voir. Sans doute le titre sadresse-t-il plutt la ddicataire Bref, cette pice lgante et raffine tant dans la conduite de sa mlodie que dans ses harmonies suppose une amiti exigeante. Mais les interprtes en seront bien rcompenss par lintrt musical de luvre.
SAXHORN, EUPHONIUM,
TUBA
Max MREAUX : Retrouvailles pour
saxhorn et piano. Fin de 1er cycle. Sempre pi : SP0228.
Il sagit de la version pour saxhorn (euphonium ou tuba) de luvre pour basson recense plus haut.
Pascal PROUST : Petit trot pour
saxhorn et piano. 1er cycle. Sempre pi : SP0221.
Il sagit de la version pour saxhorn (euphonium ou tuba) de luvre pour basson recense plus haut.
ORCHESTRE et MUSIQUE DE CHAMBRE
Joseph SUK : Mditation sur
le vieil hymne tchque Saint Wenceslas op. 35a pour orchestre
cordes. Brenreiter : conducteur BA9584. Version pour quatuor
cordes : partition de poche : TP 583, parties spares : 9583.
Lhistoire de cette uvre est particulirement intressante : Joseph Suk est en 1914 second violon dans le Bohemian string quartet qui est oblig, au commencement de chaque prestation, de jouer lhymne national autrichien. Suk dcide alors de faire suivre cet hymne obligatoire par une uvre inspire de lancien hymne sacr de Bohme : Saint Wenceslas . Le message est immdiatement compris par les auditeurs Appele Mditation, cette uvre est joue pour la premire fois le 27 septembre 1914. La version pour orchestre cordes est joue ds le 22 novembre par lorchestre philharmonique tchque. Les deux versions ne sont que peu diffrentes, si ce nest lajout dune partie de contrebasse. Ajoutons que luvre ne vaut pas seulement par son intrt historique mais aussi, bien sr, par son intrt musical et que cette dition urtext vaut galement par la prface de Zden_c Nouza, pleine de prcieux renseignements sur luvre et sa gense.
Frdric LEDROIT : 3me
Mditation sur la Passion du Christ. Opus 55d pour quatuor cordes. Difficile. Delatour : DLT1218.
Reprenant trois pisodes de la passion selon Saint Jean, lauteur nous entraine dans une mditation dabord sur le reniement de Pierre, puis sur la marche de Jsus, dj dans sa gloire malgr ses perscuteurs. Enfin, la troisime partie se situe devant Pilate. Aprs un puissant crescendo reprsentant la dclaration du Christ, luvre sachve en point dinterrogation sur la question de Pilate : Quest-ce que la vrit ? Cette pice, charge de beaucoup dՎmotion sՎcoute la fois comme une mditation et une prire. On en trouvera un trs bel enregistrement sur le site de lՎditeur et sur YouTube.
Daniel Blackstone.
ORGUE
Jean-Dominique PASQUET : 5 Aphorismes en forme de variations, op. 23 pour orgue. Paris,
Le Chant du Monde (www.lechantdumonde.com ), 2016, OR4990, 7 p.
N
Krity-Paimpol en 1951, Jean-Dominique Pasquet, lve de Suzanne Chaisemartin
aprs avoir t titulaire de lՃglise du Val de Grce, puis du Temple du
Saint-Esprit est depuis 2009 lorganiste de lՃglise Rforme de lOratoire
du Louvre (Paris). Il enseigne lanalyse musicale lՃcole Normale ;
pdagogue averti, il est aussi un compositeur influenc par lesthtique de
Marcel Dupr.
Son opus 23 : 5 Aphorismes en forme de variations, compos en mars 2011
la mmoire de Marie-Jo Feldman Lafond , repose sur un thme donn par
lՎquivalent musical des lettres formant ses prnom et noms (A = La). Il est structur en 5 parties. Le
premier Aphorisme : Prambule, est introduit par 4 accords ff et 1 accord p au 2e clavier contrastant avec lՎnonc p du thme au 1er manuel, pour revenir aux accords initiaux avec
reprise du prnom en valeurs longues. Le deuxime, Scherzando, est crit pour 2 claviers (donc sans pdale), staccato avec des intervalles trs
disjoints. Le troisime, Larghetto,
pour 2 claviers et pdale, doit tre interprt legato et sans rigueur. Le
quatrime, Fugato, fait
progressivement entrer les manuels et la pdale. Enfin, le dernier, Postlude alla Dupr (organiste que J.-D.
Pasquet admire beaucoup) aprs une introduction Large et syncope fait alterner des rpliques aux deux mains sur
une pdale de noires. Il se termine a
tempo par des accords et un saut doctaves.
Chaque partie
bnficie de prcieuses indications relatives aux mouvements, tempi, phrass,
nuances, la registration pour les deux manuels et la pdale : modle du
genre. Ces miniatures seront apprcies lors de cultes, doffices ou de
concerts.
dith Weber.
ORGUE (Transcriptions)
Claude DEBUSSY : uvres pour orgue : La Cathdrale engloutie - Clair de
Lune -Prlude laprs-midi dun faune. Transcriptions pour orgue de Jean-Baptiste Robin. Paris, Le Chant du Monde (www.lechantdumonde.com ), OR4985, 27 p.
Au dpart, la
transcription pour orgue de ces uvres impressionnistes ncessitant des coloris
particuliers voulus par Debussy, pourrait surprendre. En fait, elle se justifie
lorgue grce lexploitation de jeux spcifiques. En organiste averti,
Jean-Baptiste Robin propose des transcriptions pour deux claviers et pdale,
proches de luvre, respectant les nuances qui toutefois sont optionnelles. Il
tient compte de la facture dorgue et grce sa solide exprience propose
de trs utiles Notes pour linterprte ainsi
quoccasionnellement, deux possibilits de registrations : en fonction,
dune part, des Orgues et, dautre
part, des instruments retenus par Debussy (par exemple : les hautbois).
Pour La Cathdrale engloutie, il
prvient juste titre quun orgue dau moins 61 notes est indispensable :
utile prcaution avant de constituer un rpertoire.
dith Weber.
VIOLON ET ALTO
Marlijn HELDER : Choral Fantasie I & II pour violon seul. Paris,
Le Chant du Monde (www.lechantdumonde.com ), 2016, VS4984, 7 p.
Marlijn HELDER : Choral Fantasie I & II pour alto seul. VS4983,
7 p.
Les ditions Le
Chant du Monde, ont publi en 2016 les Choral
Fantasie I & II respectivement pour violon seul et alto seul
composes par la pianiste hollandaise Marlijn Helder, Laurate en 2015 du 3e
Concours international de Composition, spcialis dans la musique de notre
temps.
La premire Choral Fantasie (Largo) pour violon seul,
compose en 2010, commence par lexposition dun thme atonal en valeurs
longues, avec des contrastes dynamiques pp/sfz
donnant lieu un dveloppement en triples croches, avec utilisation de
doubles cordes en octaves parallles et de glissendi
entrecoups dun interlude lent aboutissant un dferlement de triples croches
(mesures 4/4, 6/16, 5/8, 6/8, 4/8) pour revenir au Tempo primo en valeurs longues. La seconde (galement Largo), compose en 2015, spcule aussi
sur une dynamique trs varie, de nombreux chromatismes expressifs, et se
termine avec le retour au Tempo primo.
La version pour alto est crite en
cl dUt 3.
Les deux
fascicules sont assortis de prcisions techniques (doigts, sul pont, sul tasto, sul tasto/flautando).
Violonistes et solfgistes non expriments : sabstenir.
dith Weber.
CLARINETTE & ACCORDEON
Jean-JacquesWERNER : Melencolia pour clarinette en si bmol et accordon. Paris, Le Chant du Monde (www.lechantdumonde.com ), MC4991, 2016, 12 p. (+ partie de clarinette, 5 p.). Dure : 9
30.
Compositeur
prolifique et inventif, Jean-Jacques Werner (n Strasbourg en 1935),
sinspire de la clbre gravure sur cuivre (1514) : La Melencolia du peintre Albrecht Drer, n Nuremberg le 21 mai
1471 et mort dans cette ville, le 6 avril 1528. Celle-ci reprsente, au premier
plan, un ange assis portant un livre, un compas et des cls ; un angelot
assis sur une roue ; un sablier, un cadran solaire, des outils parpills
sur le sol et, en haut gauche, sous larc en ciel, linscription : Melencolia I : autant de
symbolismes particulirement riches auxquels le compositeur fait cho.
Dans son uvre
(2011), il prconise une association de timbres rare : clarinette en si bmol, avec sa sonorit assez
mlancolique, et accordon assurant un support harmonique gnreux et quelques
transitions. Cette vocation musicale exige du clarinettiste qui doit aussi
tre un bon solfgiste (batteries de doubles, triples croches en quintolets
jusquՈ 11 notes) une solide matrise technique, un sens du phras (deux en
deux, syncopes), et des deux instrumentistes le respect des indications
mtronomiques et dynamiques respectives ainsi que des prcisions de
lauteur : libre, fugitif, laise Le style de J.-J. Werner est dlibrment de notre temps
(dissonances finalit expressive, accords complexes, rythmes subtiles).
Lensemble se termine en glissant du sfz
ppp. 9 minutes 30 de musique
sur le papier quun enregistrement discographique rvlerait
encore mieux.
dith Weber.
LE COIN BIBLIOGRAPHIQUE
Jean-Jacques VELLY et Liao HUI-CHEN (dir.) : Extrme-Orient et Occident. Musique et culture.
Paris, LHARMATTAN (www.harmattan.fr ), 2016, Coll. Lunivers esthtique, 244 p., 26 .
Jean-Jacques Velly et Liao
Hui-Chen ont publi les Actes du Colloque qui sest tenu en Sorbonne en 2013 et
sont prfacs par S. E. M. Michel Ching-Long L, Ambassadeur de Tawan en
France, qui met laccent sur les relations et les liens de son pays avec la
France, les projets de coopration et la prsence de trs nombreux tudiants
tawanais essentiellement lUFR de Musicologie. Ce volume runit douze
communications autour de trois parties : Les relations
franco-asiatiques dans le domaine culturel , Linspiration
extrme-orientale dans la musique occidentale et Portraits
croiss dans la musique des XXe et XXIe sicles .
En fait, lintrt pour la
culture et la musique extrme-orientales a t lanc ds le XVIIIe sicle, non
seulement par les Chinoiseries, mais
encore par les Mmoires (1777) du
Pre Joseph-Marie Amiot (1718-1793), puis, au XIXe sicle, par les recherches
de Louis Laloy (1874-1944), la fois musicologue et sinologue. Quelques portraits croiss portent, entre autres,
sur Marguerite Canales et la Flte de Jade ; Paul
Haas et la posie chinoise ; Le contraste entre musique
occidentale et extrme-orientale ou encore Les conceptions du
temps dans la musique de Hsu Tsang-Hovei .
Danile Pistone, dans sa Postface, dgage la prennit des
changes littraires et artistiques, les problmes de perception, dinspiration
et dexploitation de traits caractristiques rattachant luvre au pays choisi
(cf. p.193). Des exemples musicaux et
des rfrences bibliographiques pluridisciplinaires (histoire, posie,
organologie, analyse) renforcent encore lintrt de cette publication. Les
lecteurs curieux apprcieront cette large ouverture rciproque sur la musique
et la culture extrme-orientales et occidentales. Cette publication illustre le
rayonnement international de lUFR de Musicologie.
dith Weber.
Anthony GIRARD : Franchir lHorizon. Entretiens avec Pascal PISTONE. Chteau-Gontiers,
AEDAM MUSICAE, (www.musicae.fr ), 2016, 267 p., 25 .
Dans ses crits comme dans
ses uvres musicales, Anthony Girard (n en 1959) Professeur au CNSMD de
Paris, Docteur en Musicologie, thoricien et compositeur hors pair fait
preuve dune rare dimension philosophique, esthtique, spirituelle et
mtaphysique faisant penser, entre autres, Olivier Messiaen.
La comprhension de ses
uvres gagnera en intensit et, grce ses Entretiens
avec Pascal Pistone, Matre de Confrences lUniversit
Bordeaux-Montaigne, son Horizon
compositionnel et intellectuel sera largement dgag au fil des pages. Ils sont
structurs en trois parties : lHistoire : Se librer du temps ; le Message : couter le silence ; lAnalyse : Archologie secrte. Pour Anthony Girard, analyser une uvre
revient l interprter loin de la mode et, ventuellement, la
rhabiliter . Sa connaissance trs approfondie des langages
musicaux dans la longue dure et de lՎvolution des systmes dՎcriture lui
permet de franchir toutes les frontires esthtiques. Les questions
trs circonstancies, percutantes et judicieusement formules par Pascal
Pistone, appellent des rponses personnelles du compositeur au cours dun
dialogue trs vivant et enrichissant avec, au passage, des ractions parfois
teintes dhumour, permettant de dgager par del lanalyse subjective les
problmes de filiation esthtique. Laccent est mis sur la qute mystique, la
subtilit et la finesse, le sens de lՎquilibre et linventivit dAnthony
Girard qui a aussi le sens du paradoxe. Il rejette le proslytisme,
lՎsotrisme, la dmesure au bnfice dun engagement sincre. Par sa
sensibilit religieuse, il se dmarque de la mode et des coles actuelles. En
fait, pour lui, tout nest quordre, sincrit et intriorit. En Annexe, le Catalogue chronologique (p. 93-129), trs prcis, par catgories
duvres, est particulirement imposant et illustre la diversit de 35 ans
(1980-2015) dinventivit pour des formations instrumentales varies. Les
lecteurs, analystes et interprtes apprcieront leur juste valeur les Notices de prsentation des uvres
rdiges par le compositeur (gense, cration, uvres de commande,
particularits harmoniques, sources, description, inspiration et impulsion
initiale).
Bref comme nous lavions
mentionn dans LՎducation musicale (Lettres dinformation, Juillet 2015 et
Janvier 2016) , toute la dimension philosophique, esthtique et
spirituelle du compositeur , dj rvle, est encore confirme par ces Entretiens et ses propres Notices. Anthony Girard dpasse lHorizon postromantique et renouvelle les
critres danalyse. Tout en restant dans le sillage et lesprit de la musique
franaise, il simpose par ses compositions et ses hautes spculations misant
sur lintriorit.
dith Weber.
Sylvie BOUISSOU, Graham SADLER et Solveig SERRE (tudes runies
par) : Rameau,
entre art et science, Coll. tudes et Rencontres de lՃcole des
Chartes, n47, Paris, cole des Chartes (www.enc-sorbonne.fr), 2016, 554 p.
26, 50 .
La formulation
succinte : entre Art et Science rsumerait elle seule
lapport et le rle de Jean-Philippe Rameau, n Dijon en 1683 et mort Paris
en 1764. Compositeur et thoricien, il a dploy des activits multiples. Ses
enjeux thoriques ont suscit des dbats et des discussions dans diverses
spcialits : musicologie, analyse, esthtique, linguistique,
mathmatiques, interprtation
Prsent par Sylvie
Bouissou, Graham Sadler et Solveig Serre avec une mthodologie exemplaire et
bnficiant dune excellente typographie, cet ouvrage est structur en 6
parties. La premire : Rameau face aux Thtres souligne son
opposition la rforme dramatique envisage par Voltaire, replace sa
production dans le contexte des Thtres de la Foire et des parodies, mais
aussi de lAcadmie Royale de Musique ; pose une question pratique :
comment terminer un opra ? . La deuxime :
Regards sur Rameau , grce de minutieuses recherches darchives,
le situe Dijon, dans son environnement mondain et sociologique et dans son
contexte maonnique (Louis de Cahusac), sans oublier son lecteur attentif,
Nicolas-Louis Le Dran (1687-1774). La troisime : Interprter
Rameau concerne les critres dexcution lՎpoque (1764-1787) de
Christoph Willibald Gluck, tudie le cas esthtique dHippolyte et Aricie ; noter : plus dun sicle
denregistrements des uvres de Rameau (1904-2014) si rvlateurs. La
quatrime : Au cur des sources voque les copistes de
Rameau, sa rception ( Lille) travers la Collection Decroix. La cinquime :
Enjeux thoriques prsente des ides de Rameau (ainsi que de
Jean-Jacques Rousseau et Jean Le Rond dAlembert) relatives la thorie
(architecture harmonique, ttracorde, thorie et pratique de la basse
fondamentale). La sixime partie : Mthodes danalyse et interdisciplinarit
est la plus significative de toutes ces contributions franaises et anglaises,
assorties de rsums franais dtaills. Elle aborde, entre autres, sa thorie
des modulations, lՎvolution de son langage dans ses Tragdies en musique, donne un exemple
prcis : le monologue dArmide
et tudie le dveloppement de la critique musicale au XVIIIe sicle
(accompagne dune judicieuse typologie des critiques). En guise de conclusion,
taye par des exemples musicaux analyss avec finesse, la question fondamentale
: La thorie de Rameau, un outil danalyse ? est pose par
Raphalle Legrand. Elle observe que somme toute, une telle approche
analytique historicise possde la saveur dune recherche en archives :
les traces du pass restent muettes sur bien des points, mais nous apportent
souvent ce que lon navait pas cherch. (p. 464).
Ces tudes y compris le Catalogue thmatique sont complter
par la lecture des ouvrages signals dans la trs clairante Bibliographie raisonne, modle du genre. Elle concerne
notamment Lart de bien chanter
(1679) de Bnigne de Bacilly, lHistoire
de la musique et de ses effets (1715) de Pierre Bourdelot et Jacques Bonnet
ou encore les ides de son contemporain Johann Mattheson (1681-1764) et, aprs
1800, entre autres, les travaux dArthur Pougin (Rameau, essai sur sa vie et ses uvres, 1876), la Thse de
Paul-Marie Masson (LOpra de Rameau,
1930) et, plus proches de nous : les publications de Jrme de La Gorce,
Sylvie Bouissou Cette somme intradisciplinaire souligne le parcours entre Art et Science de l artiste
philosophe (selon DAlembert), lՎvolution de la thorie musicale, de
lapproche analytique et des critres dinterprtation dans la longue dure.
Une mise au point dcisive du cas Rameau.
dith Weber.
Commander une
uvre. Mcanismes et influences . CIRCUIT
Musiques contemporaines, vol. 26, n2, 2016. Les
Presses de lUniversit de Montral, (www.revuecircuit.ca), 185 p.
Ralis par les musicologues
Michel Duchesneau et Annelies Fryberger, ce numro revt un double intrt
relatif la pratique et lactualit (In
memoriam, nouveauts). Il concerne dune part les commanditaires duvres
musicales, dautre part les compositeurs soucieux de prsenter une uvre selon
des critres particuliers et dans une optique prcise.
Douze articles en franais
et en anglais, rsultant de lexprience de leurs auteurs, brossent un tableau
de la cration musicale (avant, pendant et aprs) : notre poque en gnral,
en France, aux tats-Unis et au Canada en particulier. La partie documentaire
prsente une grande ouverture sur lactualit musicale et artistique, ainsi que
sur les nouveauts. Cette Revue apporte des rponses de nombreuses
interrogations : qui commande (Institutions, tat, Fondations,
particuliers, mcnes) ? qui se lance dans la comptition ? qui
juge (comptences des Jurys, comme dailleurs pour les Thses de
Doctorat) ? quel est laboutissement (cration publique de luvre,
budget, audition au concert) ? bref : la rception de luvre
slectionne qui contribuera la vie et au rayonnement artistiques dun pays.
Certaines situations sont voques, comme, par exemple lIRCAM (Pierre Boulez)
en France ou encore le rglement de la commande aux tats-Unis. Les lecteurs
trouveront aussi des renseignements sur la Chapelle historique du
Bon-Pasteur : la Maison de la musique (Canada) ou un compte-rendu :
Entendu dans Cette ville trange :
Fuck toute ! une gnration de compositeur-e-s dcomplexe
sa marge . La Revue comporte galement des Nouveauts en
bref , quelques illustrations et prcisions concernant les auteurs et,
bien entendu, les rsums des articles.
Cette Revue bilingue
sadresse aux musicologues et compositeurs, ainsi quaux sociologues, mlomanes
et discophiles. Elle devrait absolument tre mieux connue des lecteurs franais
et circuler, car elle aborde des thmes largement ouverts, par exemple La recherche musicale. Aux croisements de
lart et de la science (vol. 24, n2, 2014) ; Contenir le sonore. Les nouveaux profils de la notation (vol. 25,
n1, 2015) ; La musique des
objets (vol. 23, n1, 2013) ; Du
spirituel dans lart ? (vol.
21, n1, 2011)
dith Weber.
A Festival
of Nine Lessons and Carols . Nouveau Chur de Garons de Hambourg, dir. Rufus Beck 1CD RONDEAU PRODUCTION (www.rondeau.de ):
ROP6131. TT : 6641.
Le Nouveau Chur de Garons
de Hambourg, plac sous la direction de Rufus Beck (galement acteur et lecteur),
propose un Festival de neuf Leons et
Carols (chants anglais traditionnels pour Nol), complts par des Rcits
autour de la Fte lus par Rufus Beck. Il sagit dabord de prsenter le miracle
de la naissance de Jsus avec des extraits bibliques et des histoires
religieuses, autrement dit de commenter ces vnements et de contribuer cette
grande fte. Toutefois, pour les Lessons,
quelques adultes se sont joints pour accompagner les jeunes dans leur priple
vers Bethlhem et pour intervenir dans les churs mixtes. En fait, ce disque
sappuie surtout sur lancienne tradition anglaise reposant sur des Christmas Carols que lon peut entendre
depuis toujours Cambridge et en Angleterre.
Le programme commence avec
une Procession et lannonce de lՃvangile : Processional Hymn (Autrefois,
dans la ville de David) et le chant pour 4 voix mixtes : O magnum mysterium de William
Byrd ; le Festival se termine
par lHymne (Chant des Anges) : Hark,
The Herald Angels Sing. La partie centrale comprend neuf Lessons voquant, tour tour, Adam, les
cloches, le miracle, la sainte nuit (Silent
Night), la joie (In dulci jubilo)
jusquՈ la 9e qui permet dentendre le clbre chant O Come. All Ye Faithful. La premire Leon sappuie sur la lecture
du texte allemand Der Traum dAugust
Heinrich Hoffmann von Fallersleben (1798-1874), suivi dun chur 5 voix
mixtes. Dautres numros voquent le Pre Nol, le carillon, une danse
franaise du XVIe sicle. Un peu plus loin, il sera question du grand miracle,
de la Veille de Nol, sans oublier lincontournable mlodie de Franz Gruber
(XIXe sicle) : Stille Nacht (Douce Nuit), adapte par Karl Heinrich
Reinecke pour chur mixte 4 voix. Le Choral assonanc latin/allemand : In dulci jubilo/Nun singet und seid froh,
est chant daprs une mlodie du XIVe sicle arrange par William Westbrook.
Dautres Lessons concernent la Bonne
Nouvelle, le rcit chant rappelle lՎtable et la naissance de Jsus.
noter tout particulirement luvre de commande de ce nouveau Chur reposant
sur le texte mystique bien connu de Goethe : Meeres Stille. En conclusion des Lessons, retentit le clbre Carol : O Come. All Ye Faithful (Adeste
fideles) Et, pour finir, ladaptation pour chur mixte 4 voix de
William Hayman Cummings (1831-1915) de Hark,
The Herald Angels Sing pose un point dorgue lumineux sur ce Festival biblique interprt par un
chur garons disciplin et convaincu. Cadeau original et sortant des sentiers
battus, offrir pour Nol : tous, jeunes et vieux, ne seront pas dpayss
par cette clbration de Nol in England mais,
en fait, universelle.
dith Weber.
Max REGER : Orgelwerke - Works for Organ. Ulfert Smidt. 1CD RONDEAU PRODUCTION (www.rondeau.de ) : ROP6131. CD :
TT : 6006.
En cette anne 2016, pour
clbrer le centenaire de la mort de Max Reger (1873-1916), Ulfert Smidt,
organiste de la clbre glise du March Hanovre, a qualifi ce compositeur
allemand nayant pas encore gagn en France toute la place quil mrite de
vainqueur de la crise son poque. Ce qualificatif est illustr
par ses 2 grandes Fantaisies sur des
chorals (op. 40) dans lesquelles Max Reger exploite magistralement les deux
mlodies bien connues : Wie schn
leuchtuns der Morgenstern (n1, datant de 1899 et ddie au thologien
strasbourgeois Friedrich Spitta ne pas confondre avec Philipp, le biographe
de Bach). Les premires strophes concernent lՃpiphanie, alors que la dernire,
avec sa Fugue bien structure, traduit lespoir dans la Rsurrection. La seconde
Fantaisie : Strafmich nicht in deinem Zorn (op. 40, n2, 1899) daprs le
Psaume 38 sappuie sur le texte de J. B. Freystein (1697) et repose sur la
mlodie en usage Dresde en 1694. Une brve Introduzione grave
prpare lexposition du choral si familier. Le compositeur spcule sur
les contrastes. Il traite avec une grande libert ses Fantaisies trs dveloppes.
Ulfert Smidt, lOrgue Goll
de la Marktkirche de Hanovre, se joue de toutes les difficults techniques. Il
saffirme comme un ardent dfenseur de Max Reger qui, comme laffirme Paul
Hindemith, aura t le dernier gant de la musique , et pourtant,
il na vcu que 43 ans. Lexcellent organiste interprte ensuite 6 des 12 Pices pour orgue / Zwlf Orgelstcke (op. 59) qui ont fait
la rputation du compositeur : Kyrie
eleison (n7), Capriccio (n10), Fuge (n6), Pastorale (n2), Melodia
(n11), Benedictus (n9). Comme
toujours, il simpose par sa matrise technique et par son sens de la
registration sapparentant une orchestration. Max Reger fait appel la
virtuosit ; son inspiration est particulirement diversifie. Son
uvre se situe mi-chemin entre la
musique ancienne et la musique moderne. Il se considre dailleurs comme un admirateur
de Bach, Beethoven et Brahms.
Grce Ulfert Smidt :
voil Max Reger mieux introduit chez les organistes et discophiles en France.
En effet part quelques lves du regrett Charles Muller (au Conservatoire
de Strasbourg) et Jean-Baptiste Dupont (n en 1979), actuellement titulaire des
Grandes Orgues de la Cathdrale Saint-Andr (Bordeaux) qui, pour le Centenaire,
sest lanc dans lenregistrement de lIntgrale, chez HORTUS , peu
dorganistes franais se risquent interprter luvre complexe de ce musicien
catholique ayant paradoxalement rnov la musique dՎglise protestante. Le
Label leipzicois RONDEAU PRODUCTION rend un digne hommage au principal
reprsentant de lՃcole dorgue allemande en son temps.
dith Weber.
A New
Generation and Four Centuries of the Organ in Central Europe . 2CDs ARTA (www.arta.cz ).
Diffusion : CD DIFFUSION (www.cddiffusion.fr) : F10214. 2015. TT : 7553+ 7647.
Les jeunes organistes et les
Orgues dEurope Centrale sont gnralement moins connus lOuest du Continent. Cest pour
remdier cette lacune que le Label tchque ARTA a publi deux disques fort
instructifs, avec la participation dՎlves trs avancs et de quelques invits
qui se sont produit lors des Concours (2014 et 2015) de lAcademy of Performing
Arts de Prague, linitiative de Jaroslav Tuma (n en 1956), organiste,
claveciniste et pianofortiste Professeur au Conservatoire de Prague, qui a
form de nombreux instrumentistes.
Le programme de ces deux
disques comportant des uvres gnralement bien connues sՎtend sur plusieurs
sicles. Pour lՎpoque baroque, en Allemagne, les mlomanes apprcieront des Prludes de Choral, Sonates, Fantaisies, Partitas de Johann Ulrich Steigleder
(1593-1635), organiste Stuttgart et la Cour de Wurtemberg, Dietrich
Buxtehude (n v.1637- mort Lbeck en 1707, clbre par les Abendmusiken) et son lve :
Nicolaus Bruhns (1665-1697) que J. S. Bach admirait ; ainsi que de Johann
Pachelbel (n en 1653 Nuremberg et mort dans cette ville en 1706), Jean
Sbastien Bach et son fils Carl Philipp Emanuel Bach (1714-1788), entre autres
Pour lՎpoque romantique, la Sonate en Si
b Majeur (op. 65) de Felix Mendelssohn simposait. La France est
reprsente par Csar Frank (extraits de LOrganiste),
Maurice Durufl (Choral sur le Veni
Creator) et, plus proche de nous : Thierry Escaich (avec 5 versets de lHymne Victimae Paschali laudes). LItalie, par
une Canzona de G. Frescobaldi et une Partita de B. Pasquini. Parmi les
musiciens dEurope centrale dcouvrir : les Tchques Jiri Ignac Linek (1725-1791),
pdagogue et compositeur baroque, avec un Prlude
en R majeur et une Fugue en Do Majeur, Jan Hanus
(1915-2004) avec une Suite lyrique, Petr Eben (1929-2007) avec une Partita
sur le choral O Jesu all mein Leben bist du
dcouvrir : des
instruments historiques de valeur et de nombreux organistes diplms dՃcoles
suprieures de musique tchques :
Daniel Knut Pernet, Marie Pochopova, Marek Mosnar, Michaela Kacerkova, Marie
Zahradkova, Ivana Michalovicova, Vladimir Kopacik, Juraj Slovik, Ludmila
Dvorakova, Peter Hngesberg, Iveta Zatkova, Pavel Svoboda, Tomasz Soczek Ils
simposent par leur synthse de prs de quatre sicles duvres europennes et
attestent la remarquable vitalit de lՃcole dorgue en Europe Centrale.
dith Weber.
Le chant
des origines. Graduel de Bellelay (XIIe sicle ). Ensemble
Venance Fortunat. 1CD MONTHABOR MUSIC (www.monthabor.com ) : 250028.
TT : 62 39 + DVD.
Ce coffret de 2 disques revt un tripe
aspect : historique par son
intitul : Le chant des origines
, visuel par les divers contextes et commmoratif, car il marque la
dernire ralisation du remarquable Ensemble Venance Fortunat (daprs Saint
Venance Fortunat, n prs de Trvise vers 530 et mort Poitiers vers 600,
vque de cette ville et pote mdival chrtien, auquel on doit, entre autres,
les Hymnes Pange lingua et Vexilla regis).
Cet Ensemble, lanc par
Anne-Marie Deschamps en 1975, a t fond officiellement en 1980. Il runit de
fidles chanteurs professionnels (dont quelques uns y ont particip depuis
les dbuts), par exemple D. Thibaudat (Soprano), G. Lacascade (Baryton), entre
autres. Sa fondatrice est la fois chanteuse, musicologue et palographe
mdiviste. Elle est spcialise dans lՎtude approfondie des
manuscrits mettant en valeur le chant vivant des traditions orales
porteuses de textes essentiels . LEnsemble Venance Fortunat permet ainsi
de dcouvrir le Graduel de lAbbaye
de Bellelay (Suisse) labor vers 1160. Il sagit du Manuscrit Ms.18 donn la
Bibliothque cantonale de Porrentruy, dcouvert par le psychiatre Robert
Christe (de lAtelier dAxiane) et restitu grce aux multiples recherches
acharnes dAnne-Marie Deschamps, avec le concours dexperts :
musicologues, philologues, palographes (notation musicale neumatique),
archivistes, relieurs et restaurateurs.
Le DVD intitul : Le fabuleux voyage du Graduel de Bellelay
concerne un film de Manuella Maury, Romain Gulat et Didier Humbert, produit
par lOffice de la Culture de la Rpublique et du Canton du Jura. Il restitue
le lieu gographique, latmosphre (cloches, cierges, gestique, chant, costumes
des interprtes) et propose des exemples des folios et de la reliure. La
narration est rythme par des extraits du Concert donn par lEnsemble Venance
Fortunat, le 16 novembre 2008, en lAbbaye de Romainmtier (Suisse). La
restitution de manuscrits implique diffrentes disciplines : philologie
compare, contextes historiques et liturgiques, pratique vocale, codicologie,
architecture, et, bien entendu, de solides connaissances du latin et des
abrviations.
Le programme du Graduel de Bellelay sarticule autour
des diffrents temps de lAnne liturgique : Avent, Nol, piphanie,
Carme, Jour des Cendres, Semaine Sainte, dimanche de Pques, Ascension,
Pentecte et circonstances particulires. Les Introt, Graduel, Alleluia, Offertoires et Communions
sont intercals entre les pices de lordinaire de la Messe (Kyrie, Gloria, Credo, Sanctus, Agnus Dei). Comme le signale le texte de
prsentation : Les caractristiques musicales de ce Graduel se signalent trs souvent par
une grande vocalit du chant, laissant supposer que les chantres de lAbbaye
ont favoris un dveloppement vocal virtuose avec prolifration des
rpercussions, soit un mme son rpt sur une mme syllabe . Les 23
pices (auxquelles sont jointes, titre comparatif, quelques variantes
provenant dautres manuscrits) sont crites en notation neumatique sur 4 lignes ;
elles illustrent le chant du soliste, le chant ornement et raffin que les
grands chantres virtuoses de lՎpoque affectionnaient tout particulirement.
Aprs plus de huit sicles,
Anne-Marie Deschamps obtient de ses interprtes une articulation
souffle-parole qui puisse transmettre le message traditionnel, tout en selon
ses propres termes lui donnant la prsence dune vie nouvelle , afin de
recrer ce que les spcialistes du chant religieux avaient voulu raliser ds
les Origines. Elle a le grand mrite
de restituer le plain-chant mdival, puissant ferment de notre culture
, avec le maximum dexactitude et de rigueur scientifique, et de le rendre
accessible aux mlomanes du XXIe sicle. Disque couter et vido regarder
avec motion et respect, car cette interprtation bnficie de lexprience de
toute une vie au service de la musique mdivale.
dith Weber.
Catherine BRASLAVSKY : Pilgrimage/Plerinage. 1CD (www.jade-music.net ) : 699 885-2. 2016. TT : 52 52.
Ce disque, plac sous le
motif conducteur : Plerinage,
rvle en quelque sorte litinraire et les ides esthtiques de Catherine
Braslavsky, la fois chanteuse, mdiviste, musicologue et compositrice. Il
souligne ce que la musique reprsente pour elle : celle quelle aime entendre et celle quelle aimerait composer .
Son parcours commence
judicieusement par un retour aux sources
de la musique religieuse avec la squence pour le dimanche de Pques : Victimae Paschali laudes attribue
Wipo (XIe sicle), chapelain de Konrad II, Empereur du Saint Empire Romain
Germanique. Cette squence a t maintenue par les Pres du Concile de Trente
(1545-1563). Puis Catherine Braslavsky se souvient de son mentor en
composition : Hildegard von Bingen (1098-1179) bndictine
mystique et compositrice , avec lhymne au Saint-Esprit : Spiritus Sanctus vivificans, vita movens omnia Ces textes sont
chants avec une remarquable souplesse vocale. Pour ses propres compositions,
Catherine Braslavsky exploite aussi linspiration liturgique, en reprenant, par
exemple, le texte grec antique du Grand Kyrie
traditionnel quelle met en musique, ainsi que les textes latins de lAgnus Dei, ou encore du De profundis et du Psaume 23 : Si ambulem im medio umbrae mortis, non
timebo interprt par le Chur Terra Sancta et des percussions : une
russite du genre. Sa musique est, tour tour, suggestive, mystrieuse,
discrte et sՎlve des profondeurs. Elle est lorigine du texte et de la
musique de sa Berceuse (Cradle Song) pour lEnsemble Terra
Sancta, avec des vocalisations imagines, ce qui sera aussi le cas pour Joyfull Pilgrims (Joyeux Plerins). Elle a galement mis en musique le texte si
prenant de Joseph Rowe : O You So
True, de caractre langoureux et vocateur, qui est chant avec insistance,
discrtement soutenu, entre autres, par le violoncelle.
Rsultat de
dcouvertes et de redcouvertes sans cesse renouveles pour toucher et
exprimer ce que nous portons au plus profond de nous et qui se rapproche de
luniversel , cette ralisation confirme les propres paroles de Catherine
Braslavsky : La musique, comme la vie elle-mme, me semble tre un
plerinage dans le temps et lespace autant quun voyage vers notre nature et
donc vers les autres. Suivez le guide, il est bon ! Tout pour se
laisser entraner sa suite.
dith Weber.
Stefano GERVASONI : Le Pr (op. 70)
qui, dans la production de Ratez, occupe une place marquante. Ils en restituent
le lyrisme, mais aussi le caractre dansant pour aboutir un genre
de valse, ce qui comme le rappelle M. Murawski , pour Ratez, augmente le tempo pour pouvoir
exploser au final et se reposer sur le dernier accord . Point dorgue
trs convaincant et (re)dcouverte de ce compositeur franais si attachant, grce
un diteur et des interprtes polonais.
dith Weber.
Ren de BOISDEFFRE :
Works for Violin and Piano 1.
Bogdanovich Dejean, violon,
Jakub Tchorzewski, piano. 1CD ACTE PRALABLE (
"http://www.acteprealable.com/") :
AP0362. TT : 6553.
Voici encore un autre mrite
du Label ACTE PRALABLE qui tout en ayant pour objectif la diffusion du
patrimoine musical polonais sattache prsenter des compositeurs franais
injustement oublis. Cest le cas de Pierre mile Ratez, mais aussi de
Ren de Boisdeffre (n Vesoul en 1838 et mort Vzelise (Lorraine) en 1906).
Il a tudi la musique auprs de Charles Wagner, la composition avec
Auguste Barbereau. Le Prix Chartier, obtenu en 1883, atteste sa prdilection
pour la musique de chambre. Son uvre noromantique
se situe quelque peu dans le sillage
de Charles Gounod, Jules Massenet ou
encore douard Lalo et Camille Saint-Sans, install Paris en 1843. Jan A.
Jarnicki a dtect un grand nombre de
ses uvres dans diffrentes
Collections et Maisons ddition ;
il en a copi certaines et trouv les interprtes adquats, soucieux de diffuser ces productions tombes dans
loubli. Cest Jakub Tchorzewski, pianiste phnomnal et musicien de
chambre talentueux qui la encourag
dans ce projet quil a ralis avec le violoniste serbe exceptionnel , Bogdanovich Dejan.
Cette ralisation comporte, dune
part la Deuxime Sonate (op. 50) et
Deux Idylles (op. 75) pour piano et violon ;
et, dautre part : pour violon avec accompagnement de piano : la
Suite orientale (op. 42), aux titres vocateurs : Sous les palmiers-Rverie ; Chanson arabe, Danse orientale, ainsi que la
Suite potique (op. 19), en 6 mouvements : Prlude, Mditation, Berceuse,
lgie, Srnade mystrieuse et Pastorale. La Sonate n2 (op. 50) met dabord le violon en valeur, puis le piano,
aboutissant un dialogue entre les deux ; la deuxime partie est de
caractre joyeux et lger, parfois agit ; la troisime, lente et expressive, force sur le lyrisme, et la dernire est plus brillante. Dans ce remarquable duo, chacun sait
seffacer au profit de lautre ou se mettre en vedette lorsque
la partition lexige. Jan A. Jarnicki, comme
les interprtes, ont russi communiquer leur enthousiasme pour ce musicien typiquement franais, sensible et lyrique.
dith Weber.
Franz LISZT : Concerts live Radio
France. Sylvie Carbone, piano. 1CD SKARBO (
"http://www.skarbo.fr/"www.skarbo.fr ) : DSK4164.
TT : 7422.
La pianiste Sylvie Carbonel, lve de Pierre Sancan
au CNSMDP, Laurate, entre autres, du Concours Georges Enesco (Bucarest) et de
la Julliard School (New York) et titulaire du Prix international Olivier
Messiaen, a t invite par de nombreux Orchestres en France et
lՎtranger et a particip des Festivals internationaux (France,
Autriche, tats-Unis, Canada). Aprs avoir t professeur au CNSMDP, elle
assure actuellement des Masterclasses pour professionnels et amateurs clairs.
Ce CD reproduit quatre enregistrements live (Radio
France) duvres de Franz Liszt (1811-1886). En 1979, elle a interprt avec le Nouvel orchestre
Philharmonique de Radio France, plac
sous la direction de Mark Starr la Danse des Morts (Totentanz),
Paraphrase sur la squence du Dies irae (cre par son ddicataire, Hans von
Blow, en 1865), pour piano et orchestre, faisant appel la technique de la
variation. Ce vrai concerto exige une matrise pianistique hors normes pour en
restituer le caractre vif, la structure
solide et le paysage sonore. Le thme est nonc au piano, soutenu par les
timbales avec plusieurs rptitions jusquՈ la 1re Variation o intervient
le basson provoquant pour renforcer leffet du motif qui devient plus volubile dans la 2e
Variation ; la 3e, Molto vivace est suivie du Lento, plus calme, crit en
canon. Enfin, la 5e, certainement la
plus complte, avec un fugato rapide expos au piano qui toutefois ne masque
pas au loin la rminiscence du Dies irae. Aprs la longue cadence du soliste, lAllegro animato se termine de faon
clatante avec, entre autres, des glissendi aux deux mains.
En soliste et vraie spcialiste, elle interprte (1976) la redoutable Sonate en si mineur (ddie Robert Schumann), simpose par ses attaques prcises, la mise en valeur des thmes et lalternance entre passages dynamiques et mditatifs, un Cantabile particulirement expressif, son sens de la construction dans la fugue et latmosphre typiquement romantique. Cet enregistrement se termine par deux autres extraits des Harmonies potiques et religieuses : Bndiction de Dieu dans la solitude (1980) o se mlent dvotion et sentimentalit, mysticisme et contemplation, sonnerie de cloches et rverie, un peu la manire de Lamartine. Quant Funrailles (enregistr la mme anne), de facture plus classique (A B A, avec introduction et coda), cest une dploration baignant dans le pathtique, typique du langage lisztien. Sylvie Carbonel avait dcidment sign une magnifique Dfense et illustration de la musique de Franz Liszt.
dith Weber.
Rock & Roll Christmas . 1CD JADE ( "http://www.jade-music.net/") : CD 699 884-2. TT.: 4431.
Sous ce titre quelque peu
inattendu et vintage, les ditions JADE proposent en quelque sorte une synthse
des thmes lis aux temps de lAvent et de Nol, avec leur symbolique et
imagerie. Aux tats-Unis, les festivits sont annonces le 4e jeudi de novembre, avec la clbre dinde du Thanks Giving Day, puis, le samedi suivant, avec la parade du
Pre Nol (Father Christmas). Dans les pays germaniques et en Belgique notamment, cette Fte commence par la Saint Nicolas (Santa
Claus), le 6 dcembre, o les enfants attendent un cadeau (Saint Nicolas en
pain dՎpices, en chocolat ou autres) dpos devant la chemine. Ce temps
voque aussi lhiver, le froid et la neige qui accompagnent gnralement le
Nol chrtien et la fte plus populaire.
Dans les annes 1950, le RocknRoll sest aussi inspir de cette tradition
multisculaire et de cette fte de lenfance. La compilation commence avec
Rockin Around The Christmas Tree (clbrant larbre de Nol) de Brenda Lee, au
rythme chaloup. Elvis Presley est notamment reprsent par Santa Bring My Baby
Back To Me (plage 2), Santa Claus Is Back in Town (pl. 10) pour chur et
instruments. En 1958, Marlene Paul voulait passer Nol avec Elvis : I
Wanna Spend Chrismas With Elvis. Chuck Berry figure, entre autres, avec son
incontournable chef-duvre : Merry Christmas Baby (pl. 3), o il
saccompagne la guitare et fait preuve dun rare sens du rythme, et Run,
Rudolf, Run (pl. 12). Boogie Woogie Santa Claus (Mabel Scott & Maxwell
Davies, pl. 7) est chant sur un fond de fanfare (Band) clatant et trs
scand.
Ces 19 pices brves (2 3
minutes) clbrent lArbre de Nol, Santa Claus, lEnfant, mais aussi les
cloches, le bonhomme de neige (Snowman), le froid. Elle se termine videmment
en souhaitant une heureuse anne (A Happy New Year) lEnfant. Il sagit
vraiment de tubes et de chants de Nol succs. Cette compilation de Christmas
Rocks intressera jeunes et moins jeunes.
dith Weber.
Symphonic
Christmas . VivaVoce. Philharmonie de chambre de Saint Petersbourg, dir.
Enrique Ugarte. 1CD RONDEAU PRODUCTION (
"http://www.rondeau.de/") : ROP6136.
TT : 5312.
Voici encore un disque
dcapant pour le temps de Nol. LA cappella Band russe, VivaVoce (fond en
1998) comportant 5 chanteurs de tempraments diffrents associ La
Philharmonie de chambre de Saint Petersbourg (cre en 1990) et dirigs par
Enrique Ugarte, proposent un tout nouvel habillage quelque peu
droutant de chants de Nol (Weihnachtslieder) classiques. Parmi les thmes
habituels, figurent : la crche, la naissance de lEnfant, la bndiction
du soir, mais aussi les cloches, le bonhomme de neige glac, le paysage blanc (comme dans le CD Rock & Roll
Christmas).
Le programme souvre sur le
nol allemand voquant la crche : Ich steh an deiner Krippen hier, daprs le
texte de Paul Gerhard et un arrangement vocal et instrumental trs vivant, et
se poursuit avec Maria durch ein Dornwald ging de Gnther Raphael (1903-1960)
dans ladaptation vocale de David Lugert, et instrumentale du chef, Enrique
Ugarte. Les textes anglais comportent des arrangements de De [The] King is born
today (pl. 2) et Jingle Bells
(pl. 6) de James Lord pont. Parmi les 12 Nols, se trouve galement un Nol russe (Au milieu de la nuit calme). Tout en clbrant
Nol, ces interprtes sՎrigent contre le consumrisme et la folie
des cadeaux (cf. le chant Wir schenken uns nix Nous ne nous offrons rien). Symphonic Christmas made in
Russia : un mlange de tradition et de dpaysement.
dith Weber.
Music from the Motion
Pictures . Veriko Tchumburidze, violon, Anastasia Voltchok, piano.
Orchestre dՃtat de Brandebourg (Francfort), dir. Howard Griffith. 1CD KLANGLOGO
("http://www.klanglogo.de/"www.klanglogo.de
) : KL 1518. TT : 62 28.
Le Label allemand KLANGLOGO,
lOrchestre dՃtat de Brandebourg (Francfort), avec le concours de Veriko
Tchumburidze (violon) et dAnastasia Voltchok (piano) placs sous la direction
de Howard Griffiths, proposent un programme de musiques de films ayant connu un
succs retentissant.
Les amateurs de cinma et de
tubes du XXe sicle retrouveront avec plaisir ces rsonances
sonores particulires qui leur remettront sans doute en mmoire le contexte visuel.
commencer par la 20th Century Fox Fanfare (Alfred Newman, 1901-1970), puis Dangerous Moonlight (Richard Addinsell,
1904-1977), en passant par Ludwig van Beethoven (1770-1827) illustrant
Zardoz Knowing & The Kings Speech, ou
encore Vertigo (Bernard Hermann, 1911-1975), Richard Wagner (1813-1883)
pour Apocalypse Now, pour aboutir aux
Pirates of The Caribbean (John Williams, n en 1932) et James Bond (John Barry, 1933-2011) et, bien entendu,
lincontournable Guerre des toiles (Star Wars), galement de John Williams.
Voici un condens de 15
films et leurs musiques entranantes, trs
rythmes, envotantes, exubrantes ou mlancoliques, au service dinfaillibles
associations dides musicales et visuelles. Elles sont recres et suggres
avec tant dautorit par Howard Griffiths et son Orchestre : ils sy
donnent cur joie . manant du Festival de Zurich, cette
ralisation permet le passage de la salle de
cinma au domicile des amateurs de musique de film. Voyage immobile
garanti.
dith Weber.
I 7 Peccati
Capitali . Claudio MONTEVERDI : extraits
de Orfeo, LIncoronazione di Poppea, l ritorno dUlisse in patria.
Libri dei Madriagali III, IV & VIII. Selva Morale e spirituale. Mariana Flores, Francesca Aspromonte,
Francesca Boncompagni, sopranos, Christopher Lowrey, contre tnor, Emiliano Gonzalez-Toro,
Mathias Vidal, tnors, Gianluca Buratto, Philippe Favette, basses. Cappella
Mediterranea, dir. Leonardo Garcia Alarcn. 1CD Alpha : Alpha 249. TT . :7224.
Partant de la constatation que passions et
motions humaines sont au cur de luvre de Monteverdi, linfatigable Leonardo
Garcia Alarcn a eu lide de construire un programme sur les sept pchs
capitaux quil met en abme avec sept vertus. En puisant aussi bien dans les
trois opras, et en particulier dans les intrigues dites secondaires, que dans
les Livres de madrigaux ou dans La Selva morale e spirituale. Et dindiquer que
ce programme est une catharsis thtrale et madrigalesque au sens grec
de purification. Lintrt en est autant musicologique puisque mettant en
lumire ce quest la seconda pratica, que didactique, ouvrant la voie au
rapprochement ou la confrontation entre
morceaux illustrant les vanits humaines. Aprs lEsprance (duo de Poppe et
dArnalta du Couronnement de Poppe),
et la Prodigalit (Quattro scherzo delle rose vaghezze, 1624), vient la
Paresse, illustre par un extrait du dialogue des deux soldats du Couronnement de Poppe. Puis lEnvie, avec le quatuor de la scne 4 de lacte I du
Retour dUlysse dans sa patrie, la Chastet (VIII me Livre des Madrigaux). LOrgueil est illustr par le duo paroxystique entre Nron et
Snque du Couronnement de Poppe, et lAvarice par celui entre Nron et Lucain
du mme opra. Quant lHumilit, cest un extrait de la Selva morale qui la
reprsente. A la Gourmandise (duo entre
Iro et Eumte du Retour dUlysse), est oppose la Temprance (air de
Mercurio du Retour dUlysse, crit par Garca Alarcn sur le seul texte
restant). La Luxure (IV me Livre des Madrigaux),
est oppose la Charit (extrait dOrfeo
: aria Orfeo io son ). Enfin la Colre (III me livre des
Madrigaux), plus rentre que dmonstrative, chante cinq voix, fait suite, et
pour conclure ce parcours, le Courage
(VIII me Livre de Madrigaux). Les voix, deux sopranos, deux tnors, un contre
tnor et deux basses, sont rompues ce dlicat exercice tant de lopra et de
ses modes expressifs plus ou moins outrs que de la musique sacre et de la
virtuosit quelle exige. Le petit ensemble
instrumental constitu de deux violons, une viole de gambe, une basse de
violon, un thorbe, un archiluth, une harpe et lorgue, contribue donner de
ces pices une lecture vivante et pntrante et leur confrer dans leur
succession originale une force nouvelle et tout fait singulire. Un bel
hommage rendu au 450 anniversaire de la naissance de Claudio Monteverdi en
1567.
Jean-Pierre Robert.
Serpent & Fire . Extraits dopras de Henri PURCELL : Dido & Eneas.
Christopher GRAUPNER : Dido, Knigin von
Karthago. Antonio SARTORIO : Giulio Cesare in Egitto. Daniele DA CASTROVILLARI
: La Cleopatra. George Frideric HANDEL : Giulio Cesare
in Egitto. Johann Adolf HASSE : Didone abbandonata, Marc Antonio e
Cleopatra. Francesco CAVALLI : Didone.
Anna Prohaska, soprano. Il Giardino Armonico, dir. Giovanni Antonini. 1CD Alpha
: Alpha 250. TT.: 7010.
Autre CD thme chez le
mme diteur : la mise en miroir des deux
reines dAfrique que sont Didon et Cloptre
travers quelques compositeurs du Baroque clbres et moins connus. Un
passionnant florilge imagin par Anna Prohaska pour inaugurer sa nouvelle
signature avec le label. La reine de Carthage est illustre dabord par Henry
Purcell dans son Dido & Eneas, avec plusieurs extraits dont Ah! Belinda,
I am pressd with torment , puis Remember me ou encore le
grand lamento final Thy hand, Belinda.... Cest l le triomphe de
lՎconomie de moyens. Il en va bien autrement de la Didone de Francesco Cavalli
(1641), sur un livret de Busenello, prototype de lopra
vnitien et un des premiers tre reprsent
dans la cit des doges : musique colore,
chatoyante presque comme dans laria finale de lhrone donne ici.
Elle lest aussi par la Dido, Knigin von Karthago de lallemand Christopher Graupner
(1683-1760), dont deux arias montrent une femme autoritaire. Johann Adolf Hasse (1699-1783) a lui aussi crit une Didone abbandonata en 1743 sur un livret
de Metastasio. La voluptueuse Cloptre face Csar a t peinte en musique
par plusieurs musiciens dont au premier chef Haendel dans son Giulio Cesare in
Egitto. On connait les diverses arias acrobatiques quil lui rserve. Anna Prohaska a choisi de la potique Se pieta . Elle
a fait choix encore dune aria du Gulio Cesare dAntonio Sartorio (1630-1680),
une musique attractive pour dcrire toute lespiglerie de celle qui veut
rgner sur le cur du romain. Autre vision de ce personnage fascinant, celle que trace dans La Cleopatra, le
compositeur vnitien Daniele de Castrovillari (c.1613-1678) avec des accents
pathtiques. Raret encore, pour
illustrer cette fois les amours de Cloptre et de Marc Antoine, le
MarcAntonio e Cleoaptra
de
Hasse (1725), avec une aria hroque, plus que dcide, compose pour le
castrat Farinelli. La fraicheur de la voix dAnna Prohaska, les diverses
facettes de son talent de comdienne, la spontanit avec laquelle elle adapte
le chant aux exigences des diverses styles abords, en un mot son aisance, tout
cela fait de cette galerie darias dirrsistibles portraits de femmes au
destin hors norme. Le disque est entrecoup de squences instrumentales
empruntes Matthew Locke (The Tempest, 1667), Purcell (The fairy
Queen), Luigi Rossi ou Dario Castello que Giovanni Antonini et son ensemble
Il Giardino Armonico abordent avec la mme perspicacit que celle quils
prodiguent dans laccompagnement du chant.
Jean-Pierre Robert.
Charles
DOLL: Trois Suites pour viole de gambe avec la basse continue de la
Deuxime uvre. Robin Pharo, Ronald Martin Alonso, viole de gambe, Thibaut
Roussel, thorbe et guitare baroque, Loris Barrucand, orgue, Ronan Khalil,
clavecin. 1CD Paraty : 416145. TT. : 7006.
Voici
un ovni musical! Charles Doll (ca.1710- ca.1755) est si peu connu quil en est
tomb dans loubli. Il neut pas la chance dappartenir une famille de
musiciens clbres et dՐtre le fils de son pre, comme ses contemporains
Roland Marais, fils de Marin Marais, et Jean-Baptiste Forqueray, fils dAntoine
Forqueray. Il neut pas non plus le privilge dobtenir un poste officiel de
musicien du roi. Il se limitera enseigner son instrument, la basse de viole,
et composer quelques uvres marquantes dans la tradition des deux grands
matres prcits un moment o la musique franaise pour viole de gambe
amorait son dclin. Mais comme le remarque Robin Pharo, la musique de
Doll dploie un univers expressif extrmement riche, aussi mlodique que celle
de Marin Marais, aussi virtuose que celle dAntoine Forqueray, aussi cisele
que celle de Franois Couperin . Sa Deuxime uvre pour basse de viole
de gambe avec la basse continue, publie Paris en 1737, est constitue de
trois Suites, chacune compose dun prlude et de sept danses, toutes fort
varies et trs ornementes. Lagencement des diverses squences cr
dagrables contrastes voire des effets de surprise. Ainsi remarque-t-on dans
la Premire Suite en sol majeur le troisime morceau intitul Le Tendre
Engagement , presque lascif, un vif Rondeau le Gruer
(n4), ou une Fugue trs imaginative avec une sorte de cadence
(n6) ou encore une Musette La Favorite proposant un lgant
dialogue entre viole de gambe et clavecin. La Deuxime Suite en do mineur, qui
fait intervenir lorgue positif ds le Prlude, se distingue par une
Allemande La fire extrmement dcide (n2), une
Sarabande ample et trs expressive (n5) et surtout, en septime
position, une pice beaucoup plus dveloppe titre Tombeau de Marais le
Pre . Conu comme un hommage au grand musicien, peut-tre un matre
par son lve. Le morceau inhabituellement long souvre par une introduction de
la seule viole de gambe et enchane une srie de cinq variations jouant sur la
dynamique de linstrument soliste et son pouvoir hautement expressif notamment
dans le registre aigu. De la Troisime Suite en la majeur se dtachent un
Tambourin , ostinato dans le style de danse populaire (n3), une
Musette avec refrain lancinant comme si joue par une vielle
(n5) et un Carillon trs rythm dans ses accords points (n8).
Dans ces pices mettant en valeur linstrument, le jeune Robin Pharo (*1990),
form lՎcole, entre autres, de Christophe Coin et de Sigiswald Kuijken, est
plus que didactique, anim dune passion sincre pour une musique quil dfend
bec et ongle. Ses quatre partenaires prodiguent laccompagnement idoine. A
dcouvrir.
Jean-Pierre Robert.
Wolfgang
Amad MOZART : Le Nozze di Figaro. Opera buffa
en quatre actes. Livret de Lorenzo Da Ponte. Thomas Hampson, Sonya Yoncheva,
Luca Pisaroni, Christiane Karg, Angela Brower, Anne Sofie von Otter, Rolando
Villazn,
Maurizio Muraro, Jean-Paul Fouchcourt, Regula Mhlemann. Vocalensemble
Rastatt. Chamber Orchestra of Europe, dir. Yannick Nzet-Sguin. 3 CDs DG : 479
5945. TT.: 6111+7211+4012.
Cette
nouvelle version des Noces de Figaro sinscrit dans le cadre de
lintgrale en cours dirige par Yannick Nzet-Sguin et enregistre live lors
de concerts au Festspielhaus de Baden-Baden, cette fois en juillet 2015. Et
cense offrir le nec plus ultra de linterprtation mozartienne actuelle. Ce
qui la distingue certainement est la direction du chef canadien qui, la tte
du Chamber Orchestra of Europe, bnficie dune phalange rompue pareil
exercice : souplesse du phras, soyeux des cordes, brio et charme des vents et
surtout un rendu sonore dune verve qui ne se dment aucun moment. Passe une
ouverture prestissime nantie dune coda mene train denfer, elle offre une
lecture trs architecture et dune rare sensibilit pour le chant que ce soit
dans laccompagnement des rcitatifs (avec le continuo du pianoforte) et des
arias ou quant lagencement des ensembles. Dans les premires, on se dlecte
du soin apport aux bois, clarinette et autres dans Porgi amor ou
Voi que sapete et de la fluidit du discours. Pour ce qui est des
seconds, les diffrences de perspective sont mnages avec un sens inn de la
scne. Ainsi du finale de lacte II et de ses ruptures de rythmes ou encore de
la fin de lacte IV. A ce propos, on remarque aussi une volont de mise en
scne sonore fort imaginative mnageant habilement les moments dapart. La
prise de son mnage un excellent quilibre orchestre-chant, ce qui est fort
mritoire, compte-tenu des contingences du direct. L o lexercice en studio
peut paratre sophistiqu, on gagne ici en spontanit comme en immdiatet, ce
sens de lՎvnement qui donne limpression de la scne.
La
distribution, malgr quelques changements de dernire heure (Sonya Yoncheva
pour Diana Damrau, Thomas Hampson en lieu et place de Bryn Terfel), est de haut
niveau. Elle est domine par le personnage titre : le Figaro de Luca Pisaroni
est de la trempe des grands. Comme la montre son interprtation du Conte,
lՎt dernier Salzbourg, cet artiste a atteint dsormais le top pour incarner
les grands rles de barytons mozartiens : vraie italianit du timbre, engagement,
esprit, bagout, on le dirait sur le plateau de quelque production. L'air
Se vuol ballare , avec appogiatures, est brillant, le Non
piu andrai grandiose, surtout avec laccompagnement flamboyant de
Nzet-Sguin, et lair du IV me acte mordant souhait. Sa Susanna, Christine
Karg, manifeste pareil investissement : enjoue, bien dans sa peau, et dote
dun beau soprano. Les duos avec Figaro, avec La Contessa ou avec Cherubino (le
court change saccad avant la fuite de ce dernier par le balcon) sonnent
''vrais''. Et la concurrence ici n'est pas mince. L'air des
marronniers couronne une interprtation de classe. Le Cherubino dAngela
Brower est jeune et parfaitement crdible : un Non so piu
haletant, la dernire squence rflchie sans affectation inutile, et un
Voi que sapete aussi sincre quՎmouvant. Sil na plus la
stamina dantan, qui fit flores dans son Don Giovanni Salzbourg, Thomas
Hampson offre un Comte de stature, autoritaire en diable, mais ayant tendance
surjouer le personnage. LՎchange avec Susanna Crudel perche
finora est un peu appuy et le grand air du dbut du III me acte assn
pleine voix. La Contessa de Sonya Yoncheva est magistralement chante : la
voix large, crmeuse, produit un Porgi amor dun fin legato et
justement mlancolique, et Dove sono est impeccable. Mais la
vision est plus proche du style bel cantiste que de la pure ligne mozartienne.
Comme dans les prcdents volumes de la srie (Don Giovanni, Cos fan tutte, Die Entfhrung aus dem Serail), on a soign
les autres rles en faisant appel de jeunes pousses (Regula Mhlemann,
attrayante Barbarina, Maurizio Muraro, sonore Bartholo) comme des stars
maison : Anne Sofie von Otter, Marcellina, qui tire son pingle du jeu dans
lair vocalises du dernier acte, et montre une science consomme de la scne
(duo avec Susanna au Ier acte), Rolando Villazn, histrion Basilio, qui insiste sur le ct comique
du personnage et en fait dcidment beaucoup, la voix large oblige souvent de
passer en force, quoique curieusement, lair du IV le montre plus sage. JusquՈ
Jean-Paul Fouchcourt pour un Don Curzio amusant et parfaitement en situation.
Au total, sans doute pas la version moderne idale . Mais est-ce
ralisable ? Et aucunement apte dtrner les grandes versions du pass (comme
celle de Karl Bhm chez le mme diteur, par exemple). Mais une interprtation
qui vaut dՐtre coute, par son indniable zest, largement d lՎlan imprim
par le chef.
Jean-Pierre Robert.
Unknown classical Clarinet Sonatas .
Xavier LEFEVRE : Sonate N 3 op. 12. Samuel Friedrich HEINE : Sonate. Franois
BAISSIERE : Sonate op. 3 N1. Paul Friedrich STRUCK : Gran Duo op. 7. Carl
ARNOLD : Sonate op. 7. Luigi Magistrelli, clarinette, Chiara Nicola, piano,
Elisabetta Soresina, violoncelle. 1CD Gallo : 1476. TT.: 7826.
Ce
disque regroupe cinq pices pour clarinette de compositeurs quasiment inconnus
; qui s' ils ne sont pas de chefs duvres, mritent considration pour
leur criture originale et idiomatique , souligne linterprte Luigi
Magistrelli. Tmoin du rle important que prend linstrument la priode
classique. Xavier Lefevre (1763-1829), musicien franco-suisse, auteur dune
mthode de clarinette (1801), a crit une quinzaine de sonates pour clarinette
et basse continue. La sonate N 3 de lop. 12 est dans un style lyrique, en
particulier ladagio. La sonate de Samuel Friedrich Heine (1764-1821),
fltiste et compositeur prolixe, offre un allegro consquent par dune
floraison de thmes et un finale scherzando clatant dans des unissons bien
sonnants. Franois Baissire, actif dans les premires dcades du XIX me,
clarinettiste et professeur Reims, a crit six sonates pour clarinette op. 3
dont la premire, joue ici avec continuo, se distingue par un allegro
dclamatoire et un andante variations. Paul Friedrich Struck (1776-1820) a
compos, entre autres, un Grand Duo op. 7, en fait une sonate quatre
mouvements qui sort du lot : un mlodieux premier mouvement bien enlev avec
une pointe de dramatisme, un adagio inventif, un Aria con
variationi , sorte dallegretto bel cantiste, et un rondo final alla
Polacca concluant sur une note dansante. Enfin Carl Arnold (1794-1873),
pianiste norvgien, offre dans sa sonate op. 7 de 1814 une partie de piano plus
dveloppe et labore. Celle de clarinette nest pas moins brillante, ce qui
se mesure dans lallegro o les deux instruments jouent part gale. Le
Minuetto semble laisser la clarinette une place plus enviable. Le finale qui
dbute par une courte squence adagio con espressione avec une lgre citation
du Concerto pour clarinette de Mozart, enchaine un allegro trs allant o le
clavier tresse un crin rutilant la clarinette. Le milanais Luigi Magistrelli
apporte ces pices toute sa conviction et une technique infaillible.
Jean-Pierre Robert.
Robert
SCHUMANN : Concerto pour piano et orchestre op.
54. Ludwig van BEETHOVEN : Concerto pour piano N 2
op. 19. Annie Fischer, piano, Philharmonia Orchestra, dir. Carlo Maria Giulini
(Schumann). Lon Fleisher, piano, Orchestre suisse du Festival de Lucerne, dir.
George Szell (Beethoven). 1CD Audite : 95.643. TT.: 6001.
Voici
encore deux interprtations exemplaires tires des archives sonores du Festival
de Lucerne : le rapprochement singulier de deux pianistes de lgende et de
chefs non moins prestigieux. Le Concerto pour piano op. 54 de Robert
Schumann, cr par Clara Schumann en 1841, a souvent t associ une
interprte fminine (Martha Argerich, Maria Joao pires, pour ne citer que des
contemporaines) et la hongroise Annie Fischer (1914-1995) ne fait pas exception
cette rgle. La grande dame du pianoforte , selon Sviatoslav
Richter, laurate du concours international de piano Franz Liszt en 1933, a
men une carrire soigneusement rflchie qui ne la vit qu'une seule fois se
produire Lucerne, ce 3 septembre 1960. Le jeu solide, presque rude avec
lequel elle aborde le premier mouvement, dj lanc avec brillance par Giulini,
se pare vite dune expressivit extrme pour diffrentier lyrisme et puissance,
jusqu' une coda preste, lgre. Le dbut de l'intermezzo est empli de quelque
mystre par la manire retenue du chef italien, et la cantilne de violoncelle
chante comme un air d'opra pour introduire le discours hautement potique de
la soliste. Le finale vivace respire une grande joie. Pas de virtuosit inutile
ici, une grande probit avec juste ce qu'il faut d'acclration pour dynamiser
le dveloppement alors que la coda retrouve le formidable allant du premier
mouvement. Un beau partenariat et une excution de grande classe. L'amricain
Lon Fleisher (*1928) que Pierre Monteux n'hsita pas titrer de
dcouverte pianistique du sicle , connut une premire partie de
carrire fulgurante jusqu' ce qu'une maladie invalidante appele dystonie
focale, en 1963, ne le contraigne ne plus jouer que de la main gauche. Il
fera un tonnant come back en 2008, Lucerne prcisment, aprs avoir recouvr
l'usage de la main droite. Le prsent concert, du 29 aot 1962, le trouve au
sommet de ses moyens dans le Deuxime concerto op. 19 de Beethoven,
accompagn par George Szell, autre grand de la baguette. Leur interprtation
est originale, le soliste ne partageant pas ncessairement la vision muscle du
chef et pour tout dire ''romantique''. En effet, l'allegro con brio, trs
articul ct orchestre, tranche avec le jeu perl du soliste, cisel dans le
dveloppement que le chef mne une allure trs soutenue. On ne trouve aucune
virilit exacerbe dans le jeu de Fleisher, en particulier la cadence qui
volue avec un grand naturel. L'adagio est entam trs large par Szell, mais le
soliste impose vite sa fine cantilne, plus stylistiquement en phase avec ce
Beethoven de la premire priode. Le rondo allegro molto dveloppe une nergie
bondissante chez Fleisher et on a le sentiment qu'enfin les deux musiciens
s'accordent sur une mme ide, mme si le tempo est enlev presque haletant. Un
intressant tmoignage du pianisme de l'amricain.
Jean-Pierre Robert.
Gustav
MAHLER : Lieder eines fahrenden Gesellen. Rckert Lieder. Der Abschied
(ext. De Das Lied von der Erde). Barbara Hendricks. Swedish Chamber
Ensemble, piano et dir. : Love Derwinger. 1CD Arte Verum: ARV014. TT.: 6348.
Ce
programme consacr des Lieder de Gustav Mahler est intressant puisque
juxtaposant deux des grands cycles et une pice plus rare, du moins telle que
tire de son contexte : le dernier Lied du Chant de la terre. Les
Lieder eines fahrenden Gesellen, composs en 1884-1885 sur des textes du
musicien lui-mme, ont une origine autobiographique puisque ddie la
cantatrice Johanna Richter avec laquelle il avait eu une exprience
sentimentale malheureuse. Leurs quatre morceaux reprennent le thme de
lerrance, comme Schubert dans son Winterreise : celle dun jeune homme
poursuivant le souvenir de la bien aime. Le cycle conu avec accompagnement de
piano, a t orchestr en 1896. Le timbre de Barbara Hendricks surprend ici
dans des pices associes celui plus large de mezzo (ou de baryton chez les
messieurs). Et si le soprano a pris plus dampleur au fil des ans, le couleur
nest pas assez sombre pour traduire ce cheminement tragique. Reste que cette
interprtation prsente lavantage de donner entendre larrangement pour orchestre
de chambre ralis par Arnold Schoenberg. Et ici soigneusement dfendu par
lEnsemble de chambre de Sude et Love Darwinger. Les Rckert Lieder
(1901-1902) forment un cycle de 5 pices relativement courtes, lexception
des deux dernires, et empreintes de la posie raffine de Friedrich Rckert.
La suprme mlodie mahlrienne est ici son meilleur, en particulier dans le
1er Lied Ich atmet einen linden Duft (je respire un doux parfum
de tilleul), dune posie presque immatrielle, ou lavant dernier Ich
bin der Welt abhanden gekommen (je suis perdu pour le monde), dune
profondeur poignante par son recueillement, et au cinquime, Um
Mitternacht (A minuit), dun dpouillement total, un sommet de la
musique vocale du musicien. L aussi, et peut-tre plus encore, alors
quaccompagne par le seul piano, la chanteuse est taxe par des pices
requrant un registre grave dvelopp. On sent par trop le mtier et
lintonation est parfois curieuse, nantie dun large vibrato. Le disque
comprend encore Der Abschied (ladieu), sixime et dernier Lied
du Chant de la terre et le plus dvelopp puisquՈ lui seul dune dure
quivalente aux cinq autres. L encore dans la version de chambre ralise par
Schoenberg. Double originalit que dentendre ce chef duvre hors de son
contexte et dans cette excution rarfie du point de vue sonore. Mais l
encore Schoenberg a parfaitement recr latmosphre, en particulier dans
lintermde instrumental mdian. Barbara Hendricks en droule les divers squences
avec got mais de nouveau on est frustr par un dfaut de grave qui te ces
pages leur souveraine ampleur, en particulier sur le mot Ewig
rpt satit. Pour les fans de la grande chanteuse.
Jean-Pierre Robert.
Benjamin
BRITTEN : A Ceremony of Carols, op. 28. Missa Brevis, op. 63.Three
Carols for Upper Voices. Three Two-Part Songs.
Friday afternoon, op. 7. Janna Hovhannisyan,
harpe, Anna Bakunts, orgue, Marine Margaryan, piano. Little Singers of Armenia
Choir, dir. Tigran Hekekyan. 1CD Gallo : CD -1452 B. TT.: 7318.
Le
Chur des Petits chanteurs dArmnie, fond en 1992, constitu dune
quarantaine de jeunes de 11 18 ans, a acquis un niveau exceptionnel sur le
plan international pour tre invit aussi bien en Europe quaux tats-Unis, au
Moyen Orient ou en Extrme Orient. Il a dj t reconnu comme Chur de
lUnion Europenne et dsign Ambassadeur auprs de la Fdration
Europenne de Churs en 2001. Leur nouveau disque est consacr luvre pour
churs denfants de Benjamin Britten. Le grand compositeur anglais a trs tt
crit pour ce type de formation. Les Three Carols for Upper Voices sont
constitus de trois pices disparates crites, respectivement, en 1929, 1931 et
1967 et publies telles quelles cette dernire anne. Three Two-Part Songs,
de 1932, sur des pomes de Walter De la Mare, est la premire composition
publie de Britten. Friday Afternoon (1933-1935) op.7 est crit pour
chur damateurs et piano. Il sagit de douze comptines pour enfants, dauteurs
divers dont plusieurs anonymes, et dune grande sobrit dՎcriture. Y
alternent des morceaux amusants ou de petits drames, mettant en valeur la
douceur des voix denfants. Luvre la plus clbre est sans doute A
Ceremony of Carols op. 28, de 1943, pour harpe et churs denfants. Luvre
est constitue de douze numros dont une introduction a cappella
( Procession ) sur lhymne grgorien Hodie Christus natus
est , lequel est repris dans le postlude ( Recession ), ce
qui confre une unit lensemble. Les textes sont inspirs de pomes de Nol
anciens dont certains datant du Moyen Age. Britten use dune musique modale
pure et de dlicieux archasmes. Un interlude pour harpe solo aussi thr
que frique partage l'uvre en son milieu. Laccompagnement de harpe participe
du climat anglique de ces pices o lon rencontre tour tour la tendresse,
lapaisement, la joie, la sobre dploration ou une fire allgresse. La
combinaison de deux paramtres aux couleurs singulires, les voix aigus et la
harpe, contribue aussi au grand dpouillement. A noter que le prsent
enregistrement utilise une version pour churs denfants et deux voix de
femmes, soprano et mezzo-soprano. Enfin, la Missa Brevis op. 63 (1959) a
t crite lattention de George Malcolm et du chur de garons de la
Cathdrale de Westminster quil dirigeait alors, aprs les avoir entendus
interprter A Ceremony of Carols prcisment. Cette uvre dune dizaine
de minutes, pour orgue et churs denfants, dploie un art rayonnant,
jubilatoire et une criture contrapuntique trs complexe (Sanctus), sur de
curieux accords dissonants de lorgue (Agnus Dei). Au fils de toutes ces pices
trs exigeantes techniquement, les Petits Chanteurs dArmnie font montre dune
fraicheur, dune spontanit tonnantes, sans parler dune diction anglaise
irrprochable.
Jean-Pierre Robert.
Serge
PROKOFIEV : Concertos pour violon et orchestre N 1, op. 19
& N 2, op. 63. Sonate pour violon seul, op. 115. Vadim Gluzman,
violon. Estonian National Symphony Orchestra, dir. Neeme Jrvi. 1CD Bis : 2142.
TT.: 60'21.
Trente
ans sparent les diverses compositions de ce programme : les deux concertos de
violon, composs respectivement en 1917 et en 1935, et la sonate pour violon
seul de 1947. Riche ide de les runir. Serge Prokofiev crit son Premier
concerto de violon op. 19 au mme moment que sa premire symphonie dite
classique . Il est hautement exigeant pour le soliste dont toutes
les possibilits techniques sont sollicites, l'image du premier mouvement
andantino qui associe volubilit et diffrences de rythmes et de climats, du
rveur au dcid. Le scherzo vivacissimo est d'une folle alacrit, laissant
apparatre une danse macabre grotesque pare des crins crins du violon sur un
accompagnement motorique. Quant au finale moderato, le soliste y trace sa
mlodie envotante sur un orchestre saccad s'amplifiant dans un dveloppement
qui va connatre comme une apothose gradue, pour enfin un retour du thme
rveur qui ouvrait l'uvre. Vadim Gluzman offre une maitrise confondante se
jouant des asprits que le compositeur a accumules l'envi, magnifie par la
sonorit lumineuse de son strad ex-Leopold Auer de 1690. Il en va
de mme du Deuxime concerto op. 63 dont l'criture pour tre moins
complexe que dans la pice prcdente, est tout aussi svre pour le soliste.
Le langage est d'un lyrisme encore plus flamboyant et on remarque une plus
grande transparence dans l'criture orchestrale, ce qui n'tonne pas d'une
uvre contemporaine du ballet Romo et Juliette. La belle phrase qui
l'ouvre prlude un premier mouvement d'un lyrisme vibrant mais o les
accidents de parcours sont bien prsents. La fascinante cantilne du violon qui
entame l'andante assai, d'une grande srnit, fait vite place, l aussi,
d'incessants changements de rythmes. Mais la couleur nocturne domine comme aux
ultimes mesures joues pizzicato au violon. Le finale introduit une manire
percussive chez le soliste pour un dveloppement trs motorique avec moult
avatars rythmiques. L'interprtation de Gluzman est blouissante de verve.
Enfin la Sonate pour violon seul op. 115, si peu connue, bnficie aussi
d'une interprtation de haut vol. Cette courte pice, l'origine conue pour
plusieurs violons jouant l'unisson, a t cre dans sa version pour un seul
violon, titre posthume en 1959 par Ruggiero Ricci. Elle se compose de trois
mouvements dont le deuxime, andante dolce, thme et variations, est un
concentr de techniques violonistiques diverses et varies, pourtant au-del du
pur exercice. Neeme Jrvi conduit l'Orchestre symphonique national d'Estonie
dont il dont est actuellement le chef permanent, avec autorit et un vrai sens
des couleurs. Un bien beau disque de violon, au surplus magistralement
enregistr.
Jean-Pierre Robert.
Dimitri CHOSTAKOVICH : Trios pour piano, violon et violoncelle N1 op. 8 et N 2 op. 67. Sonate pour alto et
piano op. 147. Vladimir Ashkenazy,
piano, Zsolt-Tihamr Visontay, violon, Mats Lidstrm, violoncelle, Ada Meinich,
alto. 1CD Decca : 478 9382 TT.: 71'44.
Ce CD prsente trois uvres de musique de
chambre de Chostakovitch bien moins clbres que ses quatuors cordes. Et qui
pourtant mritent plus que le dtour. Il clbre aussi les liens d'amiti qui
unissaient le grand musicien et le pianiste Vladimir Ashkenazy. Le Trio pour
piano op. 8, de 1923, compte parmi les premires pices chambristes de son
auteur et a t compos peu avant la Premire Symphonie. En un seul
mouvement, il offre une certaine srnit et une grande richesse thmatique. Le
Deuxime Trio op. 67 est autrement plus consquent. crit en 1944, il
est contemporain de la Huitime Symphonie dont il forme un pendant,
certes plus concentr, mais tout aussi tragique au fil de ses quatre
mouvements. Il est ddi un ami cher, Ivan Sollertinski, historien d'art,
rcemment disparu, mais tout autant aux dsastres de la guerre. Le sombre
andante s'ouvre par une phrase du violoncelle dans l'aigu du registre, rejoint
par le violon lui aussi suraigu puis le piano qui va tresser un contrepoint
svre. Cela s'anime et s'enfonce dans le tragique. L'allegro con brio suivant
est un court intermde anim de quelques traits grotesques aux cordes. Le largo
s'ouvre par une manire de glas du piano sur lequel les cordes tissent une
mlodie d'une tristesse dchirante, comme une lamentation. Le finale qui
s'enchane, contraste par une sorte de danse macabre dsinvolte, vite martele
au piano sur des pizzicatos des cordes. Le dveloppement se corse dans un
climat l encore d'une extrme tristesse. L'criture se signale de nouveau par
un got prononc pour le registre aigu des deux cordes. La pice se conclut
dans un calme qui en dit long sur la tragdie voque. De cette uvre complexe,
Vladimir Ashkenazy qu'on a plaisir retrouver son cher piano, et ses deux
collgues donnent une excution superbement maitrise et poignante.
Le disque comprend une autre autre raret,
la Sonate pour alto et piano de juillet 1975, dernire uvre de musique
de chambre du matre et son ultime opus achev. Malade, Chostakovitch l'a
pourtant rapidement mene bien pour honorer son ddicataire, Feodor
Droujinine, l'altiste du Quatuor Beethoven. Elle est construite sur le schma
lent-vif-lent. L'andantino, sous titr Nouvelle , d'un calme
apparent, dissimule mal une dtresse profonde dans le jeu solide du piano et
une belle loquence de l'alto. L'allegretto, Scherzo , bti sur
des fragments d'un air de l'opra inachev Les Joueurs , est
allant, nanti d'une rythmique mcanique dans la meilleure veine de l'auteur,
mettant avantageusement en valeur la partie d'alto. L'uvre atteint son apoge
avec l'adagio, vaste morceau (d'une dure presque quivalente aux deux
mouvements prcdents), d'un lyrisme fervent, comme un regard rtrospectif sur
une vie de bonheur et de dsillusions. Des bribes de thmes du premier
mouvement de la sonate Clair de lune de Beethoven surgissent,
comme d'autres citations fugaces de musiciens russes, voire d'auto citations.
On y a vu une parent avec le 15 me quatuor op. 144, de l'anne prcdente.
L'apparente simplicit de l'criture du piano tranche avec la sinuosit de la
partie d'alto. Une sorte de cadence de celui-ci renforce le tragique et le
mouvement s'achve sur une conclusion d'une insondable rsignation. Cette pice
intense, Vladimir Ashkenazy et sa consur Ada Meinich la portent bout de bras
dans une interprtation fusionnelle qui peut se comparer celle que gravrent
nagure Yuri Bashmet et Sviatoslav Richter, c'est peut dire.
Jean-Pierre Robert.
Giovanni BASSANO : Ricercare per strumenti
insieme. La Guilde
des Mercenaires. 1 CD Encelade : ECL 1501. TT : 6603.
Giovanni
Bassano (1558-1617) est un acteur musical important de la Renaissance
italienne, facteur dinstruments, virtuose du cornet, collaborateur de Claudio
Monteverdi la Basilique Saint Marc de Venise, charg de diriger diffrents
effectifs piffari (instruments vents) compositeur reconnu du Seicento. Ce
superbe disque prsente un florilge de ses uvres ( Suzanne un jour, Caro dolce ben moi, Tota pulchra es, Frais et
gaillard, Ancol che col partire, Oncques amour, Ung gay bergier, Benedicta es,
La Rose, Ricercata prima, secunda, terza, quarta, quinta, sesta, settima et
ottava, Fantaisies 18, 17, 20, 11, 8 et 5 ) centr sur les huit ricercars
pour instruments solo dits en 1585, auxquels viennent sajouter avec
dlice plusieurs ensembles
instrumentaux regroups autour du cornet ( bouquin ou muet) ainsi que des
chansons ornes par Bassano caractristiques de lart de la diminution dont
taient capables les musiciens de cette poque, diminution savante susceptible
de passer de la polyphonie la plus complexe une vritable sonate
instrumentale. Un disque superbe o la vocalit (sans voix) reste primordiale.
Les musiciens de cette priode tant tout la fois, chanteurs,
instrumentistes, compositeur loin de la polytomie moderne rductrice laquelle
nous sommes habitus. Un superbe album magistralement interprt dans lesprit
comme dans la note qui ravira assurment tous les amateurs de musique ancienne,
dinstruments vent et bien dautres encore Encore une belle russite du
label Encelade !
Patrice
Imbaud.
Ludwig van BEETHOVEN : Intgrale des Sonates pour piano et violon. Pierre
Fouchenneret, violin. Romain Descharmes, piano. 3 CDs APARTE : AP129.
TT : 8223 + 7153 + 8246.
Ce
qui frappe lauditeur ds la premire coute de cette intgrale des sonates
pour violon et piano de Beethoven parue chez Aparte, interprte par Pierre
Fouchenneret et Romain Descharmes, cest indiscutablement lextrme varit des
couleurs et la justesse de ton de cette interprtation toute entire tourne
vers lexpressivit du discours. Souplesse du phras, subtilit des
transitions, clart des articulations, richesse des nuances, dlicatesse,
lyrisme, posie, cohsion, quilibre, virtuosit sans thtralit, pertinence
des tempi assurant une dynamique convaincante sans prcipitation, autant
de qualits qui jamais ne se
dmentiront tout au long de cette magistrale interprtation que lon peut
couter dun seul jet sans jamais se lasser une seule seconde. norme corpus de
10 sonates crites par Beethoven entre 1798 et 1812, emblmatiques du
romantisme par leur loquence, ces compositions refltent galement un fragment
de vie du matre de Bonn, passant de lhrosme la mditation, de la
dsillusion au renoncement. Les trois premires sonates de lopus 12 droutrent un peu
lՎpoque par leur ardeur. Suivent les deux sonates de lopus 23 et 24, et notamment Le Printemps qui sduit demble par sa
fraicheur enchanteresse laissant apparaitre dans ses quatre mouvements le
premier scherzo du corpus. L'opus 30
comprend trois sonates contemporaines du testament dHeiligenstadt, plus
sombres bien que teintes dironie. L'opus
47 se limite la Sonate Kreutzer,
la plus clbre, vritable combat entre les deux instruments. Elle tranche avec
la dernire sonate de lopus 96 qui
volue dans un climat plus fataliste et plus pur. Une intgrale, enregistre
en Live , avec une trs belle prise de son, au cours de trois
concerts donns au Trident de Cherbourg-en-Cotentin, qui constitue, nen pas
douter, une nouvelle version de rfrence. Magnifique !
Patrice
Imbaud.
Ermend BONNAL :
Media Vita. Paysages euskariens. Lgende. Improvisation. Aprs la tourmente. Vincent
Grappy, orgue. Christophe Giovaninetti, violon. 1 CD Hortus : HORTUS 132.
TT : 7119.
Ermend
Bonnal (1880-1944) fait partie de cette myriade de compositeurs du dbut du XXe
sicle, un peu oublis, crass par les statures musicales internationales de
Debussy et Ravel. Compositeur clectique (musique de chambre, musique de danse,
musique de film) il fut un excellent organiste, lve de Widor et Tournemire,
condisciple de Durufl, en mme temps quun pdagogue apprci. Ses uvres
prsentes ici, qui seront pour beaucoup une agrable dcouverte, et tout
particulirement les deux cycles dorgue comptent parmi ses compositions
majeures. Si les Paysages euskariens
(1930) signent, dans un climat impressionniste, la redcouverte dun folklore
franais, lui aussi un peu oubli, la Symphonie
(1932) daprs Media Vita se veut
dune toute autre ampleur spirituelle et musicale, relevant de la paraphrase
grgorienne. Media Vita est un rpons mdival, en trois parties, chant lors
des processions du temps de la Septuagsime prcdant le Carme. Sy ajoutent
trois pices pour violon et orgue (Lgendes,
Improvisation et Aprs la tourmente)
l encore bien diffrentes des prcdentes par leur caractre lyrique et
concertant, o laccompagnement lorgue (transcription de loriginal pour
piano) prend une dimension orchestrale surprenante. La trs belle
interprtation de Vincent Grappy et Christophe Giovaninetti fait de ce disque
une dcouverte originale ne pas manquer.
Patrice
Imbaud.
La
Bonne Chanson .
Mlodies
de Gabriel FAUR, Charles KOECHLIN, Nadia BOULANGER, mile NAOUMOFF. David
Lefort, tnor, Simon Zaoui, piano. 1CD Hortus : HORTUS 137. TT :
7243.
Aprs
leurs nombreux succs au disque (Gounod et Poulenc) dans le domaine de la
mlodie franaise, voici le nouvel opus discographique du tandem Lefort /
Zaoui, centr cette fois sur La Bonne Chanson, quatrime recueil
potique de Paul Verlaine, publi en 1870. Ce recueil, comme un hymne
lamour, comprend 21 pomes adresss Mathide Maut de Fleurville que le pote
pousa la mme anne. Ces textes assez simples, sadressant une jeune fille
de 16 ans, sans atteindre la complexit des Ftes Galantes ou des Pomes
Saturniens, nen inspirrent pas moins nombre de compositeurs, tout
particulirement Gabriel Faur (1845-1924) et ses lves Charles Kchlin
(1867-1950), Nadia Boulanger (1887-1979) et plus rcemment Emile Naoumoff
(*1962). On ne sՎtonnera pas, bien sr, de constater les diffrents
traitements musicaux employs par ces compositeurs lՎgard des textes de
Verlaine. Gabriel Faur, inspir par sa passion pour Emma Bardac, y utilise un
langage complexe fait de grandes varits mtriques, dune prosodie difficile
intense et bouillonnante, tandis que Charles Koechlin sait se montrer plus
tendre et plus rserv dans son approche, usant dune vocalit plus aise.
Nadia Boulanger et mile Naoumoff apportent encore un nouvel clairage ces fianailles du verbe et
du son, soulignant lintemporalit de cette posie. Si les compositeurs
changent, lexcellence vocale de David Lefort demeure, quant elle, constante
par la souplesse du chant, par sa facilit atteignant toutefois ses limites
dans laigu, par son implication et
par la qualit de la diction. Plus quun savant accompagnateur, Simon Zaoui,
que lon retrouve dans cet enregistrement en solo dans deux Nocturnes de Faur (n 6 & n 7) composs
en 1892-1894, contemporains du cycle vocal, se rvle un vrai partenaire tenant
sa partie avec maestria, virtuosit et pertinence dans une symbiose totale avec
David Lefort. Un trs beau disque qui rend un superbe hommage la mlodie
franaise.
Patrice
Imbaud.
Erik SATIE. Les Mmoires dun amnsique.
Stphane Blet, piano & Daniel Prvost, narrateur. 1 CD Calliope : CAL
1631. TT : 7236.
Voici
un disque surprenant et original comme le compositeur qui il est consacr,
Erik Satie (1866-1925). Compositeur inclassable dont Stphane Blet dans ce
florilge duvres (Gnossiennes,
Gymnopdies, Valses) nous donne entendre les diffrentes facettes, tour
tour, potique, mystique, cabaretire, parodique ou pdagogique, entrecoupes
de brves savoureuses nonces par lhumoriste Daniel Prvost. Un
disque o une fois encore le pianiste Stphane Blet confirme, avec brio, ses
troites affinits avec le Maitre dArcueil. Un piano dune superbe sonorit
dlicat, potique, comme un juste hommage un compositeur mal aim, un
enregistrement qui nous convainc
demble.
Patrice
Imbaud.
Dispersion . Erwin
SCHULHOFF. Paul HINDEMITH. Alfredo CASELLA. Raymond MOULAERT. Louis VIERNE.
Steven Vanhauwaert, piano. 1CD Hortus. Collection Les Musiciens et la
Grande Guerre. Vol XIX . HORTUS 719. TT : 7328.
Un
album qui porte bien son nom Dispersion attestant ainsi de la
varit des diffrents courants esthtiques musicaux coexistant en cette priode trouble de
la Grande Guerre o le conflit mondial majore sans doute la cration artistique
et la multiplicit des tmoignages. Certains compositeurs utiliseront un
langage regardant, avec nostalgie, vers les temps plus anciens, dautres
useront dun discours rsolument moderne tourn, avec espoir, vers lavenir.
Certaines uvres nayant finalement que peu de rapport avec la guerre, dautres
linverse portant un vibrant aveu de dtresse exprim par des musiciens
touchs dans leur chair comme Louis Vierne. Vritable mosaque qui parle de lhomme face au conflit, ce
disque regroupe cinq compositeurs. Erwin Schulhoff (1894-1942) dont les Fnf Grotesken (1917) se prsentent
comme un court manifeste anti-romantique crit par un compositeur profondment
engag dans la modernit musicale et politique. Paul Hindemith (1895-1963)
compose ses Trume und Erlebnisse au
lendemain de larmistice et tente, ici, dՎtablir un nouveau cadre cratif,
orientation que son uvre venir confirmera plus tard avec clat. Alfredo
Casella (1883-1947) crit le petit triptyque Inezie en 1918, portant des stigmates ravliens tout en tmoignant
de ses importantes recherches entames avant guerre. Raymond Moulaert
(1875-1962) est une dcouverte, sa Sonate
semble hors du temps, charmante comme oublieuse de la guerre. Saint-Sans,
Faur, Debussy y apparaissent en filigrane. A linverse Le Glas de Louis Vierne (1870-1937) exprime toute la souffrance du
deuil et la dploration dun homme marqu au plus profond de sa chair par la
mort de son fils au front. Encore un bel album de cette intressante collection
qui lon doit nombre de dcouvertes et curiosits, comme toujours
magnifiquement interprtes : Steven Vanhauwaert ne droge pas, ici, la rgle.
A dcouvrir absolument !
Patrice
Imbaud.
French
Masterworks for bassoon and piano de Roger BOUTRY, Henri
DUTILLEUX, Gabriel PIERN, Jacques IBERT, Claude DEBUSSY, Gabriel FAUR,
Jean-Michel DAMASE, Paul VIDAL. Laura Bennett Cameron, basson. Roger Boutry,
piano. 1CD Indsens : INDE083. TT : 4243.
Voici
un disque original qui prsente un double intrt, celui de faire plus
amplement connaissance avec luvre de Roger Boutry, et celui de pouvoir apprcier la sonorit
particulire du basson, en instrument soliste, ce qui narrive pas si souvent,
habitus que nous sommes remarquer sa silhouette filiforme et sa sonorit grave souvent
perdues au sein de la petite
harmonie Roger Boutry est un compositeur franais (*1932) pianiste, chef
dorchestre et pdagogue dont luvre est largement consacre lՎcriture pour
vents. Ses compositions tendent un pont entre tradition et modernit, rsumes
dans le titre ouvrant cet album Dans
lesprit dune berceuse dantan toutes imprgnes dun charme o se
mlent influences du pass et regards vers lavenir. Cest donc avec pertinence
quil se trouve associ sur ce disque avec Debussy (Gnral Lavine eccentric extrait du 2e
livre des Prludes pour piano), Faur (Capriccio,
Improvisation, Pice), Ibert (Carignane),
Piern (Solo de concert), Dutilleux (Sarabande et Cortge), Damase (Automne) et Vidal (Adagio et Saltarelle). Un ensemble de courtes pices originales, ou
adaptes pour basson, reprsentatives du lien unissant tous ces compositeurs
franais du XXe sicle. Langage harmonieux et concertant, posie, humour,
virtuosit, lgance qui raviront tous les amateurs dinstruments vents,
bassonistes et autres curieux. Un bel album.
Patrice
Imbaud.
20 th
Century Piano . Pices de Boris PIGOVAT, William BAINES, Arthur
LOURI, Boris LYATOSHYNSKY, Samuel FEINBERG. Jessye Mebounou, piano. 1CD
Calliope : CAL1630. TT : 5540.
Voici
un disque coup de cur dont le double intrt est, dune part de dcouvrir une
compilation duvres de compositeurs peu connus et, dautre part de faire plus
amplement connaissance avec cette talentueuse jeune pianiste, Jessye Mebounou,
spcialiste du rpertoire russe et ukrainien. On est demble frapp ds la premire
coute de cet enregistrement par le climat sombre et pesant tout entier habit
dune lumineuse noirceur parfaitement rendue par le jeu de Jessye Mebounou, en totale adquation avec le
texte, succession de grands accords plaqus, de notes parses parfois abruptes
et tranchantes, parfois mditatives, tmoignant dune musique charge de sens
et de douleur, une musique sans concession do jaillit de temps autres la
fulgurance dun clair despoir Une musique qui nest pas sans rappeler les
tableaux de Soulages, outre noir charg dune lumire intrieure et fluctuante.
La magnifique Sonate Repentance
(1988) de Boris Pigovat (*1953) compositeur juif ukrainien donne immdiatement
le ton, sorte de manifeste douloureux et obstin dpeignant avec un ralisme
saisissant lacharnement du rgime contre le pouvoir de l'glise. The Lone Wreck (1920) de William Baines
(1899-1922) est un nocturne esquissant le destin dune drive, dune
bouleversante simplicit. Arthur Louri (1892-1966) est un compositeur juif,
contraint de fuir sa ville natale de Saint Ptersbourg en 1922, pour
sinstaller Berlin, puis Paris, avant de sexiler dfinitivement aux tats-Unis.
Il composa The Phoenix Park Nocturne en
1936, courte pice utilisant un langage quasi minimaliste obsdant. Le plus
connu de tous, Boris Lyatoshynsky (1895-1968) est un compositeur ukrainien
contemporain de Chostakovitch dont luvre sort, aujourdhui, peu peu de
lombre. Ses Cinq Prludes (1943)
emprunts au folklore slaves sont porteurs dune gravit simple et pesante. En
revanche la Sonate n 2 (1915) de
Samuel Feinberg (1890-1962) parait vhiculer moins de pass douloureux. Son
criture virtuose porte les influences de Scriabine, Medtner ou Busoni laissant
plus de place la mlodie. Un trs beau disque.
Patrice Imbaud.
The
art of the percussions . Transcriptions de pices de Maurice
RAVEL. Claude DEBUSSY. Pablo de SARASATE. Jean-Marie MACHADO. Franck TORTILLER.
Astor PIAZZOLLA. ric SAMMUT. Matthias SCHMITT. Georges GERSHWIN. Jean-Franois Durez, percussions. 1 CD
Indsens : INDE085. TT :
5312.
Voici
une vraie curiosit quil serait dommage, voire coupable, de ne pas couter
tant les transcriptions savantes pour percussions (vibraphone, marimba,
xylophone, piano) des uvres de Ravel (Ma
mre lOye) et Debussy (Arabesques)
sont originales, vritables no orchestrations, apportant un clairage
totalement nouveau par la multiplicit des timbres simulant une sorte de
spatialisation tonnante du son. Un album surprenant par son
clectisme, par loriginalit de
son programme qui nhsite pas aborder jazz, musique sud amricaine, compositions
contemporaines, par sa qualit musicale et par la virtuosit exceptionnelle de
Jean-Franois Durez. Vritable voyage commenc avec Ravel et Debussy, se
poursuivant par Bras Achille dEric
Sammut, Pistacos Spices de Jean-Marie
Machado, Zapateado de Pablo de
Sarasate, 22 Juillet de Franck
Tortiller, Ghanaia de Matthias
Schmitt et I love you Porgy de
Gershwin avant de terminer par le clbre Oblivion
de Piazzolla dans une magnifique version pour vibraphone et accordon. Un premier
disque de Jean-Franois Durez qui nous transporte depuis le monde ravlien de
lenfance jusquՈ limmense nostalgie du tango porteno, un monde qui pleure,
qui swingue, qui danseUn monde charg dՎmotion qui vous enchantera !
Superbe !
Patrice
Imbaud.
Pentagramme . Edouard
Ferlet & Paul Beynet, pianos. 1 CD Collection 1001 Notes : 1001NOTES
08. TT : 5206.
Quand
un pianiste de jazz, Edouard Ferlet et un pianiste classique, Paul Beynet, se
rencontrent autour duvres de compositeurs russes (Moussorgski,
Khatchatourian, Prokofiev, Rimski-Korsakov, Tchakovski, Rachmaninoff) avec la
ferme intention douvrir une troisime voie au-del des clivages simplistes,
daborder un autre monde musical, cela donne cet album, intitul Pentagramme.
Un disque surprenant, des arrangements et improvisations non dnus de charme
qui apportent la preuve que finalement la Musique est plurielleUn album
consensuel. A vous de juger !
Patrice
Imbaud.
Frdric
CHOPIN : 4 Ballades. Mazurkas Op. 17, Op. 68, Op. 67. Valses Op. 64, Op. 69. Largo Op. Posthume. Polonaises Op. 44.
Jean Muller, piano. 1CD FONDAMENTA (www.fondamenta.fr) : FON 1005008. TT 62'55.
Un
enregistrement d'uvres de Chopin, compte tenu de la varit de leur style,
constitue une carte de visite idale pour les pianistes qui
souhaitent manifester leur talent sur la scne musicale. Mais la concurrence
est rude. D'abord entre ceux qui sont candidats pour se faire une place :
c'tait le cas de Jean Muller en 2010, date d'enregistrement de ce CD, puis
entre ces candidats et les pianistes bien prsents sur la scne musicale et qui
ont mri leur interprtation des Polonaises, Mazurkas, Ballades, Valses .Tant
d'enregistrements sont marquants ! Alors c'est avec circonspection que
l'on accueille cet enregistrement qui aborde une grande partie des genres mis
en valeur par Chopin. En fait c'est une occasion de cerner les divers facettes
du talent de Jean Muller. Toutefois on peut regretter que ce CD nous parvienne
6 ans aprs sa ralisation car depuis, nul doute que le pianiste ait mri pour
nous offrir des interprtations diffrentes. Mais dj ce rcital laisse
entrevoir un musicien accompli. N en 1979 au Luxembourg, Jean Muller y fit une
partie de ses tudes ainsi qu' Riga en 1995, sa formation le conduisant
ensuite aussi bien Bruxelles, Paris ou Munich jusqu'en 2006. C'est un
pianiste qui ne recule pas devant les dfis, comme en tmoigne un
enregistrement de l'intgrale des sonates de Beethoven publi ds 2010 chez le
label Bella Musica ainsi qu'un DVD chez Fondamenta la mme anne qui runit
l'opus 109 de Beethoven, la Sonate de Liszt et les Variations Goldberg de Bach.
C'est
dire combien ce rcital Chopin mrite le dtour car il rend compte du talent
d'un pianiste aux moyens techniques indiscutables auxquels il manque peu de
choses pour tre au service d'une musicalit qui ne demande qu' s'panouir. Si
la seconde Ballade est propose avec des changements de climat trop brutaux, la
troisime donne l'occasion Jean Muller de dlivrer un discours trs vari.
Les Mazurkas sont races avec pourtant un certain manque de mystre, reproche
que l'on pourra appliquer aussi la Valse op 64 n1. En revanche la Valse
op.69 n1 est lgante avec des changements d'atmosphres parfaitement
conduits. Un beau moment ensuite retenir : le Largo Opus Posthume en mi bmol
majeur, dcouvert seulement en 1939, pice particulirement brve (2 minutes)
mais d'une grande densit, qui fait dire au pianiste qu'elle n'est pas
sans rappeler la marche funbre de la deuxime sonate d'autant plus
qu'elle a t compose la mme anne (1837 ). On peut aussi relever
qu'elle a des accents beethovniens mis en vidence sous les doigts de Jean
Muller. La Polonaise Opus 44 ne laisse pas assez transparatre sa dimension
mlancolique et les moments de puissance voulus par Chopin sont rendus avec
trop de brutalit. Mais c'est la ranon d'un rel engagement d'un jeune
pianiste qui nous donne entendre du beau piano. Jean Muller ose se confronter
une rude concurrence ; il en sort vainqueur car il laisse entrevoir
travers une virtuosit vidente une belle musicalit qui ne demande qu' se
dvelopper.
A
noter que le coffret contient deux versions audio : l'une adapte pour les
installations Haute Fidlit (Fidelity CD), l'autre pour les ordinateurs ou
lecteurs de voitures (Mobility CD).
Gilles Ribardire.
Dimitri
CHOSTAKOVITCH : Concerto pour violoncelle n1,
op. 107. Symphonie n5. op. 47. Xavier Philips,
violoncelle. Les Dissonances. 2CDs : TT.: 75'34.
Avant
l'coute de ce nouvel enregistrement des Dissonances, il convient de lire le
texte remarquable de Xavier Phillips qui accompagne le disque, sinon on risque
d'mettre une apprciation errone sur sa faon d'aborder le 1er concerto
pour violoncelle. En effet elle diffre de ce que propose un certain nombre
de ses collgues : L o on peut s'attendre une amorce des 4 notes
introductives rageuse, muscle, et estimer que c'est bien l l'intention du
compositeur, le soliste les attaque d'une faon assez douce conforme en fait
aux indications de Chostakovitch. Xavier Phillips les voque en ces termes:
Il voulait qu'on dise ces notes en miroir, en adquation avec le son et
l'attaque du cor qui reprend ce motif plus d'une fois dans la partition. Il
souhaitait que ces notes ne soient ni piques ni lies, mais entre les
deux . Ces indications sont tires d'une lettre de Chostakovitch
Mtislav Rostropovitch avec lequel justement Xavier Phillips a travaill. On
peut mme affirmer que le violoncelliste franais est l'hritier de
Slava . On en a confirmation la lecture de l'ensemble du texte
trs mouvant que Xavier Phillips a rdig l'occasion de cet enregistrement
ainsi qu' l'coute de son interprtation. Ces quatre notes introductives sont
donc essentielles comme l'est quelques mesures plus loin l'intervention des
fltes, acides souhait et qui donne le ton la suite de l'interprtation
dont le dramatisme sera rendu de manire poignante dans le troisime mouvement,
confi au seul violoncelle. La fin est absolument prenante, avec une vritable
course l'abme qui se termine par un retour aux premires notes du dbut,
mais reprises dans le mme tempo par les fltes avec pour point final les
timbales. L'osmose entre soliste et orchestre est parfaite, ce qui n'est gure
surprenant. En effet, Xavier Phillips fait sien ce conseil de Rostropovitch,
savoir jouer en ayant en tte toute la partition, avoir autrement dit
conscience de toutes les voix de l'orchestre, comme les musiciens des
Dissonances doivent aussi l'avoir entre eux, leur travail tant fond sur le
partage. Nous avons donc avec cet enregistrement pris sur le vif du concerto
une interprtation marquante d'une uvre crite 6 ans aprs la mort de Staline,
en 1959, autrement dit dans des circonstances moins dramatiques que la 5me
symphonie ; mais elle a nanmoins une dimension dramatique parfaitement
rendue par les interprtes.
La
5me symphonie a t compose en 1937, en pleine terreur stalinienne.
Quelques annes plus tt, en 1934, l'opra Lady Macbeth du district de Mtsensk avait t
condamn par le rgime et la 4me symphonie termine en 1936, pour des raisons
plus ou moins obscures n'tait pas prsente au public....elle ne
le fut qu'au dbut des annes 60 ! Chostakovitch doit donc faire semblant
de se plier aux diktats esthtiques, sa vie en dpend. Ainsi la symphonie
peut-elle sembler d'un abord simple, et du reste elle reoit un accueil
triomphal aussi bien du public que des critiques au service du rgime. Et
pourtant le largo par exemple, ne dissimule-t-il pas l'expression de la plus
intime motion, traduction d'une profonde angoisse, ce qui risque de ne pas
satisfaire les censeurs ? En tout cas les Dissonances savent transmettre
les intentions les plus secrtes que Chostakovitch a mises dans ce largo.
L'interprtation de l'ensemble de la symphonie pntre au plus intime de l'me
en en dvoilant tous ses tourments. Si on peut trouver le tout dbut un soupon
trop prudent, la monte en puissance vers la conclusion du premier mouvement
est impressionnante. Le second est une succession de figures caricaturales bien
dans le style voulu par le compositeur ; on notera la perfection de
l'intervention soliste du violon de David Grimal, occasion d'affirmer ici
l'excellence de tous les instrumentistes totalement engags. Cet engagement se
vrifie dans le dernier mouvement dont les premires mesures explosent
littralement ; leur succde une squence faussement apaise pour se
terminer par une violence traduisant en fait le climat de crainte qui dominait
dans le pays l'poque o fut compose et interprte l'uvre comme en
tmoigne le chef Kurt Sanderling l'occasion de la premire de la symphonie
dirige Lningrad par Ievgueni Mravinski : l'assistance
comprenait trs bien le message. Nous nous jetions des regards
significatifs : serions nous arrts aprs l'audition, rien que pour avoir
cout cette uvre ? Que l'on puisse percevoir grce aux Dissonances
ces aspects tragiques de la 5me symphonie montre bien que nous sommes en
prsence d'une interprtation placer au mme rang que celles conduites par
des chefs aguerris. Les Dissonances proposent dcidment des interprtations
qui comptent, ce coffret Chostakovitch le prouve.
Gilles Ribardire.
Romances franaises, French Songs,
1795-1815 de
Franois-Joseph Naderman, Louis-Emmanuel Jadin, Franois-Adrien Boieldieu,
Sophie Gail, Georges-Joseph-Laurent Lambert, Henri Romagnesi, Pierre-Jean
Garat, Jean-Dominique-Fabry Garat, Henri Domnich. Sylvie Nicphor, soprano,
Etsuko Shoji, harpe. 1CD Calliope : 3 760039 836007. TT.: 57'48.
Jean-Jacques
Rousseau la dfinissait ainsi dans son Dictionnaire de Musique de
1767 : Romance : air sur lequel on chante un petit pome du
mme nom, divis en couplets, duquel le sujet est pour lordinaire quelque
histoire amoureuse et souvent tragique. Comme la romance doit tre crite dun
style simple, touchant, et dun got un peu antique, lair doit rpondre au
caractre des paroles ; point dornements, rien de manir, une mlodie
douce, naturelle, champtre, et qui produise son effet par elle-mme,
indpendamment de la manire de la chanter. Il nest pas ncessaire que le
chant soit piquant, il suffit quil soit naf, quil noffusque point la
parole, quil la fasse bien entendre et quil nexige pas une grande tendue de
voix (). Cest une exprience certaine que tout accompagnement dinstrument
affaiblit cette impression. Il ne faut, pour le chant de la romance, quune
voix juste et nette, qui prononce bien et qui chante simplement . Trs pris
par les amateurs (auteurs, compositeurs comme interprtes), ce genre musical
devait pouvoir tre chant par eux dans les salons. Il reste trs li la
musique de chambre : il pouvait tre accompagn par un trio, un quatuor,
voire un petit orchestre. La romance est un pome simple mis en musique pour
voix seule et accompagnement. Apparu dans la seconde moiti du XVIIIme sicle,
en particulier, il aborde souvent des sujets amoureux sur une musique brve et
familire. L'accompagnement est confi gnralement au clavecin et, surtout, au
pianoforte. Parfois, un instrument oblig est destin donner
une couleur particulire la pice : flte, guitare, violon, cor. Sylvie
Nicphor a choisi dans cet son enregistrement des uvres accompagnes de la
harpe.
Le
genre connat son ge d'or pendant la Rvolution et lEmpire, dclinant
lentement sous la Restauration et tout au long du sicle, jusquau sicle
dernier durant lequel la romance est dtrne par la mlodie. Dans les pays
germaniques, le Lied simpose alors sans partage. Dj trs la mode
sous lAncien Rgime (Marie-Antoinette en compose et en chante) puis pendant la
Rvolution, la romance connat son ge dor aprs la Terreur et la chute de
Robespierre. Le genre sՎpanouit alors et adopte volontiers le style mdival
en vogue alors, dit troubadour .
Comme
le rappelle Sylvie Nicphor dans le livret trs document de son disque, de
nombreux compositeurs de premier plan composent des romances : Cherubini,
Gossec, Le Sueur, Grtry, Auber... La soprano choisit des compositeurs, part
Boieldieu (trois airs sont chants ici) et Jadin (poignant Mort de
Werther ), moins connus. Ainsi on dcouvre des perles rares. Ns dans le
second XVIIIme sicle, les compositeurs rassembls dans cet enregistrement
sont trs jeunes sous la Rvolution, et feront carrire au dbut ou au cours de
la premire moiti du sicle suivant : Franois-Joseph Naderman (1781-1835),
Louis-Emmanuel Jadin (1768-1853), Franois-Adrien Boieldieu (1775-1834), Sophie
Gail (1775-1819), Georges-Joseph-Laurent Lambert (1779-1852), Henri Romagnesi
(1781-1850), Pierre-Jean Garat (1764-1823), Jean-Dominique-Fabry Garat
(1764-1823), Henri Domnich (1767-1844).
Sylvie
Nicphor, soprano, pianiste et musicologue, diplme du CNSM de Paris de
lUniversit Paris-Sorbonne, nous fait redcouvrir la romance avec un bonheur
runissant les conditions pour nous en restituer tout le charme :
justesse, diction, fracheur, simplicit et musicalit de la phrase, avec
laccompagnement discret, raffin et subtil de la harpiste japonaise, Etsuko
Shoji, diplme de lUniversit des Arts de Tokyo, de l'cole Normale de
Musique de Paris et prime de grands concours internationaux. Pour cet
enregistrement, elle accompagne Sylvie Nicphor sur une harpe Erard de 1810.
Lensemble est parfaitement quilibr et jubilatoire : ce voyage au
tournant des XVIIIme et XIXme sicles est formidable. A couter et rcouter.
Jrme Bloch.
Hugues
DUFOURT : Burning
Bright. Les Percussions de Strasbourg. 1CD PDS 116BB AD3696C. TT.:
65'.
Burning Bright a t crite pour le cinquantime anniversaire des
Percussions de Strasbourg. Le titre reprend la dernire partie du premier vers
du pome The Tyger (1794) de William
Blake, qui dbute ainsi : Tyger, Tyger, burning bright / In the
forests of the night, / What immortal hand or eye, / Could frame thy fearful
symmetry ? Par cette uvre, Dufourt opre un retour aux sources en
convoquant six instrumentistes comme dans Erewhon
(1976), autre grande pice pour percussions, qui fut cre par les mmes
interprtes et assura au compositeur une vritable notorit. Retour galement
une source thmatique, celle de l'espace li l'origine, puisque Erewhon est l'anagramme de nowhere et que Burning Bright est traduit ton clair luit (
dans les forts de la nuit ) par Alain Suied (la version donne
dans le livret) et brlant clair par Anne-Marie et Philippe
Soupault. Burning Bright est voir
comme la traverse du continent sonore , selon l'heureuse formule
d'un commentateur. voir, en effet, puisque tout ici se rapporte la spatialit :
le titre de l'uvre, celui des diffrents mouvements Vertical
1 , Suspendu 1 , Tourbillons 1 ,
Densification , Espaces pulss , Lointains
1 ... et bien sr la musique elle-mme, qui joue en permanence sur la
profondeur du son, sa rsonance, l'loignement ou le rapprochement subits de la
source sonore et les effets de crescendo. Ce sont ainsi des nappes qui,
battements ou frottements, semblent littralement arriver, qu'elles soient
isoles ou agrges. Crpitements et dflagrations traversent brusquement et
fugitivement le silence comme s'il tait le noir infini de l'espace cosmique.
Le dchirent. Les mtaux dominent, parmi lesquels on reconnat les gongs, les
grelots, le steel drum, le tam, le flexatone, etc. Esthtique de la fragmentation,
certes, mais qui n'exclut pas l'unit acoustique et psychologique qui se dgage
de tout ce magma chaotique au sens premier. Burning
Bright, c'est un certain climat. Aussi l'auditeur sent-il que cette matire
phonique en perptuelles marche et mtamorphose fait uvre et qu'il existe une
pense suprieure, un geste d'artiste en amont de ce que son oreille enregistre
comme une longue succession de bruits apparents.
Hugues
Dufourt serait-il un romantique attard ? Au-del de la simple provocation,
la question voudrait pointer le paradoxe d'un musicien qui prsente son travail
en termes purement techniques exploration du spectre et jeu formel sur les
seuils , les oscillations , les
interfrences et les processus orients et qui lui
donne avec Burning Bright une
dimension mtaphysique, la vie intrieure du son devenant alors l'illustration
de l'errance humaine dans un vaste cosmos lui-mme muet. Dans ce drame
sans rcit ni anecdote , le son dbouche toujours sur le silence. Et le
vertige que provoque cette vision potique se double, par sa
rfrence au pome de William Blake, de la nostalgie d'un temps humain orient,
celui d'avant le tic-tac des horloges. Ainsi, le compositeur, dmiurge,
roriente le temps musical qui serait LE temps humain en l'inscrivant dans
une dynamique continue, c'est--dire infinie. Il n'y a d'ailleurs pas de final
dans Burning Bright, ni d'ide de
fin : un moment, la mcanique s'puise, comme s'teint une chandelle. Les
Percussions de Strasbourg sont les artisans prodigieux de ce voyage de quelque
60 minutes.
Patrick Jzquel.
MUSIQUE ET CINEMA
ENTRETIEN
Diane Kurys :
L'motion d'un film passe par la musique
DR
Actrice,
puis ralisatrice, elle a ralis dans les annes 70, daprs son roman
autobiographique, Diabolo
Menthe , une histoire qui se passe en 1963. Ce film a t un
vritable phnomne de socit. Suivront une douzaine de films qui auront plus
ou moins des succs, mais seront des films toujours faits avec beaucoup de
sincrit et avec trs souvent des personnages attachants. Elle changera
frquemment de compositeurs et cest en cela que nous nous sommes intress
ses choix.
Lorsque lon regarde votre carrire de
ralisatrice, on est tonn par la diversit des compositeurs avec qui vous
avez travaill ; tait-ce un choix dlibr ?
Je
nai jamais dՈ priori. Un film, cest chaque fois une aventure diffrente et
de la mme faon, lorsque jՎcris, ce nest jamais pour un acteur. Ce sont les
personnages qui mintressent au dpart, ensuite le casting simpose, comme
pour lՎquipe et aussi pour le musicien. Le compositeur, cest le seul
collaborateur o vous navez aucune influence relle : je veux dire quun
acteur, vous pouvez le diriger, ventuellement, sil est dirigeable ; le
compositeur, cest un autre crateur qui peut vous apporter lunivers dont vous
avez rv et qui peut aussi partir dans une autre direction qui peut tre la
plupart du temps profitable. Jai rarement eu des regrets. Chaque film a sa
musique. Ce sont des films de moi mais avec des sujets diffrents. Jai fait
des films dՎpoque, des contemporains, un film sur George Sand et Musset, sur
Franoise Sagan, sur mes parents, sur ma famille, sur mes racines, sur mon
enfance. Jai fait des films personnels qui me ressemblent et je nai jamais eu
envie davoir toujours le mme compositeur.
Si vous le voulez bien, on va regarder
vos films travers les diffrents compositeurs. Yves Simon a
t le premier et vous avez travaill plusieurs fois avec lui. Il tait trs
la mode lorsque vous avez fait Diabolo
Menthe .
CՎtait
la personnalit la plus connue de tout le casting et de tout le film. Il tait
bien plus connu que moi, cՎtait une vedette.
Vous tes all le rechercher quinze ans plus tard!
Il
a fait mes deux premiers films, Diabolo
Menthe et Cocktail
Molotov puis ensuite Aprs
lAmour o cՎtait la premire fois que jabordais lՎpoque
contemporaine. En fait je ne suis pas all le rechercher, on est rest trs ami
et il se trouve que lorsque jai fait Coup de Foudre , mon troisime film, jai engag Luis
Bacalov.
Comment lavez-vous connu ?
Un
ami mavait parl de lui, et ma dit quil tait formidable, quil avait un
univers passionnant.
Il venait de faire La Cit des Femmes de Fellini, car Rota tait dcd...
Cest
exact et je trouvais que la couleur de sa musique correspondait ce que je
cherchais, ce film dՎpoque qui racontait les annes 40-50. Il est
russe-juif-argentin, vit en Italie et il a russi trouver cette couleur juive
de lEst.
Cest un beau film et il vous a compos une trs belle
musique !
Cest
un film que jaime beaucoup et notre collaboration a t formidable. Jai
retravaill avec lui sur Les
Enfants du Sicle en 1999. Je suis quand mme assez fidle. Je le voyais
plus dans des films dՎpoque que dans des films contemporains.
Et juste aprs vous avez demand
Georges Delerue de faire Un Homme Amoureux
Pour
un film damour, les musiques de
Delerue sont souvent trs motionnelles, trs mlodiques et pour ce film l qui
se tournait en Italie, film romantique, je pensais quil tait le compositeur
idal. Cela a t une rencontre formidable, je suis all le voir Los Angeles,
il ma jou des thmes au piano. Cest toujours angoissant lorsquun metteur en
scne montre ses images un compositeur. Il y a cette rencontre, mme si on
sest vu avant, et cest ce moment quil vous dit : voil ce que mont
inspir vos images.
A lՎpoque vous nentendiez quun piano
alors quaujourdhui on fait des maquettes. Aviez-vous une culture
musicale ?
Je
ne suis quune amatrice de musique, jaime la musique de film. Yves Simon pour
Diabolo Menthe mavait
fait couter quelques notes au piano, on est touch ou pas. Lorsquon ne lest
pas, cest plus compliqu dexprimer ce que lon voudrait et dans quelle
direction on aimerait aller.
Cest plus facile de dire non que oui ?
Pas
du tout, cest toujours trs angoissant face au compositeur de faire le bon
choix. Il y a souvent des moments o la maquette est la rfrence, on a mont
avec et puis lorsque la musique enregistre avec grand orchestre arrive, on se
trouve quelquefois prfrer la maquette ! Cest terrible pour le
compositeur !
Mettez-vous des musiques provisoires au montage ?
Je
ne le faisais pas dans mes premiers films, mais maintenant les monteurs ont
tendance le faire, ils vous vendent mieux le montage quand il y a une
musique. Vers le septime film je le faisais, puis je suis revenue sur cette
ide car cest hyper dangereux, on shabitue des grandes chansons, des
grands tubes. Je lai fait pour Sagan
et cՎtait terrible car lorsquArmand Amar est arriv, je mՎtais habitue
Alberto Iglsias, Badalamenti et jadorais mes thmes. Du coup il a fallu se
dmarquer. Il ma dit que je lavais engag pour faire une musique originale.
Les compositeurs naiment pas cela. Ce que lon fait avec la monteuse, avec qui
je travaille depuis quelques annes : on prend des musiques du compositeur
choisi, on a au moins sa couleur, mais la musique est toujours trs complique.
Comment en tes-vous venu travailler avec
Amar ?
On
ma parl de lui, javais cout quelques musiques de lui. Il a fait beaucoup
de films, il est charmant, a du talent et il sadapte ce que vous lui
demandez, il va vite. JՎtais trs contente de la musique de Sagan .
Vous navez pas pu vous offrir Iglsias ?
Question
de budget ! Il est trs cher comme beaucoup de grands compositeurs. Je ne
dis pas quArman Amar nest pas cherCes compositeurs internationaux sont trs
occups et pour trouver un compositeur Paris, accessible, et qui entre dans
le budget, ce nest pas simple. Jai eu la chance quArman ait pu faire une
musique superbe. La musique de Sagan
est sans arrt pille la radio, la tlvision.
Et Nyman, cest cause de La Leon de Piano quil avait
fait peu de temps avant votre film A
La Folie ?
Non, je voulais une musique
un peu obsessionnelle
Rptitive ?
Rptitive,
obsdante, le contraire de La
Leon de Piano . Une musique enttante, forte. On sest rencontr seulement
sur ce film parce que je nai pas fait dautre film dans ce genre l.
Comment avez-vous trouv Paolo
Buonvino ? A cause de Romanzo Criminale ?
Il
avait fait un film qui sappelle Juste
un Baiser - en italien Lultimo
Baccio - de Muccino.
Cest un grand compositeur dorigine sicilienne. Cest en coutant la musique
de ce film que jai craqu ! Il a fait beaucoup de musiques, il peut
crire des musiques mouvantes, tristes, et des musiques de comdies. Je Reste est une commande que
jai faite avec Sophie Marceau et comme cՎtait une comdie pure, il fallait
que je trouve un musicien de comdie. Il est dans la ligne de Rota mais ne
fait pas de la copie. Il est hystrique sur le mixage, les orchestrations. Il
va mettre trois semaines mixer une musique de film ! Il a le souci du
dtail. La qualit des instruments quil emploie est impressionnante, il va
chercher des instruments rares. Je viens de retravailler avec lui parce quil a
compos une musique pour mon dernier film avec un autre compositeur Hugo
Gonzalez Pioli, un protg dArman Amar, trs jeune. Je n'avais pas le budget
pour la musique et Amar tait trs occup. Hugo est un petit gnie. Je trouve
que cest trs compliqu de faire une musique de comdie et il a trouv un ton
un peu grinant. Javais besoin dune musique dՎmotion et du coup Paolo est
venu la composer. Javais donc deux compositeurs et tous les deux ont accept.
Paolo a fait la musique distance - il tait Rome - cest lavantage des
temps modernes de linternet. Jai trs envie de retravailler avec Paolo, cest
un type charmant et avec beaucoup de talent !
Lorsque vous tiez jeune, vous ne
pensiez pas devenir ralisatrice. coutiez-vous de la musique de film ?
Jallais
normment au cinma, donc jՎtais imprgne des musiques de ces films et on
sait que lՎmotion dun film passe par la musique. JՎtais plus attire par la
musique de mon poque. Jai commenc avec Cliff Richard, les Anglais, puis les
Amricains, Living Doll cest le dbut de Diabolo Menthe ; javais treize ans !
Vous avez fait un film avec Sarde, cest assez
tonnant ?
Oui
pour La Baule les Pins .
Dans la carrire dun ralisateur ne pas avoir fait un film avec Philippe Sarde
a manque. Il a fait de jolies musiques. Cest un personnage hors du commun qui
a un vrai amour du cinma, il est dment, fou, drle, cultiv, il a plein de
qualits avec quelques dfauts. Il a fait des films magnifiques. Je pense que
Sautet lui doit beaucoup. Non pas que Sautet navait pas de talent mais le mariage
entre les deux cest formidable. Ce sont des musiques qui nous restent. Mais je
ne sais plus pourquoi je me suis tourne vers lui. Il y a des moments que
jaime moins dans la musique quil ma crite mais la musique de La Baule les Pins est une
jolie musique, trs touchante et Roda-Gil a crit une magnifique chanson la
fin du film sur la musique de Philippe. Cette rencontre avec Roda-Gil, cՎtait
formidable.
Et en ce moment vous tes sur un projet de film ?
Oui
cest une comdie, une sorte de Road Movie avec une mre compltement folle qui
se retrouve sur les routes avec son fils de 25 ans. Il se passe en Belgique et
en Hollande et je pense que je vais appeler Paolo !
Une dernire question, peut-tre vous
allez me dire joker : vous navez jamais pens travailler avec
Serge Franklin ?
Non
pas joker, jaime beaucoup Serge, il a fait de superbes musiques Arcady mais
je le laisse Alexandre. CՎtait un vrai couple, Le Coup de Sirocco , Le Grand Pardon , ce sont des musiques qui ont marqu. Je
laime beaucoup dans la vie mais je nai jamais eu envie
De passer la porte dՈ ct ? Chacun son
bureau !
Chacun
son bureau ! Il doit tre un peu triste de a peut-tre. Je laime
beaucoup et aussi comme musicien.
Il doit y avoir un regret quand mme ?
Oui
bien sr, mais quand on connat trop les gens, on a peur de travailler avec eux
et de se fcher. On peut perdre lamiti. Avec des gens quon ne connat pas on
na pas dՎtat dՉme pour leur dire quon aime pas ce quils ont crit pour
vous.
Merci pour ces moments de vrit.
https://www.youtube.com/watch?v=mfxfM1nrK2c
https://www.youtube.com/watch?v=7DpYziWv6XE
Propos recueillis par Stphane
Loison.
ANNONCES
Metropolis de Fritz Lang / DR
Mardi
8 novembre 2016 20H, au Grand Rex, VIDEO GAMES LIVE Paris Musique de jeux
vido Concert symphonique avec chur Vido Games Live. Cest lՎvnement
musical de la rentre pour les fans de jeux vido ! Pour la premire fois.
Mercredi
9 novembre 2016 20H, au Grand Rex, JOHN CARPENTER LIVE. Le clbre
ralisateur / compositeur jouera les classiques de son rpertoire et des
nouveauts, le tout soutenu par des projections.
Samedi
26 novembre 20H, la Maison de la Radio : Prix France Musique Sacem de la
Musique de Film, avec l'Orchestre Philharmonique de Radio France.
Lundi
28 novembre novembre 20h, la Maison de la Radio : Cin concert avec Metropolis
de Fritz Lang (1927) et Thierry Escaich l'orgue.
BO en CDs
SNOWDEN.
Ralisateur : Oliver Stone. Compositeur : Graig Armstrong et Adam
Peters. Deutsche Grammophon CD & download 00028947967026
Patriote
idaliste et enthousiaste, le jeune Edward Snowden semble raliser son rve
quand il rejoint les quipes de la CIA puis de la NSA. Il dcouvre alors au
cur des Services de Renseignements amricains lampleur insouponne de la
cyber-surveillance. Violant la Constitution, soutenue par de grandes
entreprises, la NSA collecte des montagnes de donnes et piste toutes les
formes de tlcommunications un niveau plantaire. Choqu par cette intrusion
systmatique dans nos vies prives, Snowden dcide de rassembler des preuves et
de tout divulguer. Devenu lanceur dalerte, il sacrifiera sa libert et sa vie
prive. En juin 2013, deux journalistes prennent le risque de le rencontrer
dans une chambre dhtel Hong Kong. Une course contre la montre sengage pour
analyser les preuves irrfutables prsentes par Snowden avant leur
publication. Les rvlations qui vont tre faites dans cette pice seront au
cur du plus grand scandale despionnage de lhistoire des tats-Unis.
Cest
la troisime collaboration de Graig Armstrong avec Olivier Stone ( Wall Street largent ne dort jamais ,
World Trade Center ). Il
est l'origine de la musique des films de Baz Luhrmann ( Romo+Juliette , Moulin Rouge , Gatsby le Magnifique ). Il a
surtout crit une trs belle musique pour Loin de la Foule Dchane du film acadmique de Thomas
Vinterberg. Il a le talent de se couler dans diffrents univers dauteurs trs
diffrents. Sa musique est ici entre le thriller, le drame, lenqute avec de
beaux passages romantiques comme il sait les crire. Tout nest pas parfait,
loin de l. La prsence dAdam Peters qui avait travaill sur linsupportable
Savages , apporte la note lectronique. Ursine Vulpine
reprend le Saints Go Marching, le morceau pour les funrailles la Nouvelle
Orlans. Dans ce genre de film Oliver Stone est plus laise que dans de pures
fictions. La musique se laisse couter en CD.
https://www.youtube.com/watch?v=fL2xKFZYqOU&list=PLkLimRXN6NKyVWACAE3nSDlxRrTlWop_8&index=11
NAGASAKI
MEMORIES OF MY SON. Ralisateur : Yoji Yamada. Compositeur :
Ryuichi Sakamoto. 1CD Milanrecords : 39852-2.
En
2015 Ryuichi Sakamoto a compos cette musique pour Yoji Yamada, un des derniers
et lgendaire ralisateur avec plus de 80 films, de la gnration des Kurosawa,
Mizoguchi ou Ozu. Le film raconte lhistoire de Nobuko Fukuhara, une mre qui a
perdu son fils durant la tragdie nuclaire de Nagasaki. Ryuichi Sakamoto a
crit une de ses plus belles musiques de film, empreinte de tristesse, de
mlancolie, une musique dramatique et romantique la fois, un hommage aussi
ces musiques de lՉge dor du cinma japonais. Milan offre enfin la BO du film
sur CD. On ne prsente plus Ryuichi Sakamoto, compositeur protiforme qui avec
Le Dernier Empereur
avait obtenu un oscar. Et sa musique pour Furyo est dans toutes les mmoires. Il a fait dernirement
une belle musique pour The
Revenant . Entendre larchive des voix des pilotes du B29 au dbut du
CD nous met dans lambiance du film et de sa musique. Un CD pour les fans de ce
compositeur et pour ceux qui aiment entendre une belle partition.
https://www.youtube.com/watch?v=VuSlXGHa-ec
BRIDGET
JONES BABY. Ralisateur : Sharon Maguire. Compositeur : Graig
Armstrong. 1CD Universal Music.
Le
CD contient juste deux thmes romantiques du compositeur, le reste nest que
des chansons tendres et douces dont Still Falling For You ,
chante pour le film par Ellie Goulding, le fameux Walk On By de
Diane Warwick, et le tube de Marvin Gaye I Heard It Through The
Grapevine . Quel est lintrt dun tel disque ? Se rappeler cette
bluette n3 sympathique et bien formate. Le prochain, le n4, cest maman
Bridget dans les couches
https://www.youtube.com/watch?v=pvP_OwVSFpk&list=PLfaZeIWtqNKOmE7VrT04e7DAe1IR6wEEh
MISS
PEREGRINE ET LES ENFANTS PARTICULIERS. Ralisateur : Tim Burton.
Compositeur: Mike Higham et
Matthew Margeson. 1CD La-La Land Records.
Jake
Portman est un adolescent de 16 ans vivant en Floride en 2016. Lorsque son
grand-pre Abe dcde, il dcouvre que toutes les histoires qu'il lui racontait
enfant taient vraies. Jake et son pre se rendent alors sur la mystrieuse le
de Cairnholm, au Pays de Galles. Jake y dcouvre les ruines d'un orphelinat qui
appartenait une certaine mystrieuse Miss Peregrine et qui abritait dans les
annes 1940 des enfants particuliers . Le livre do est tir le
film est surprenant dans le sens o lon pense que Ransom Riggs la crit
spcialement pour Tim Burton. On retrouve tous les thmes de prdilection du
ralisateur et grce aux effets numriques daujourdhui, Burton sen donne
cur joie pour dlirer. Pour la premire fois ce nest pas Danny Elfman qui a
compos la musique ! Cest le tandem Mike Higham et Matthew Margeson. Le
couple Burton/Elfman aurait-il divorc ? Elfman tait-il ''too busy'',
comme on le prtend ? Cest aprs Ed Wood et Sweeney
Todd quil lui fait des infidlits. Margeson avait crit Kingsman et Eddie The Eagle , deux bons
scores, mme sil fait partie de lՎcurie Zimmer. Mike Higham avait travaill
avec Elfman et crit des musiques additionnelles pour Sweeney
Todd et Big Eyes . Le climat de Burton
nest quand mme pas le mme. La musique est trop prsente, envahissante,
la mode. Florence and the Machine a sign pour le film la
chanson Wish That You Were Here . Sur le disque on a le
fameux In The Mood de Glen Miller et lallegro du Premier
Concerto de Tchakovski. Le rsultat final, malgr quelques rserves musicales,
est fantastique, aux premier et second degr ! On a l du Burton grand
cru ! Sur le CD il y a du bon et du moins bon.
https://www.youtube.com/watch?v=Cm3fgIKqbOQ&list=RDCm3fgIKqbOQ#t=17
A
MONSTER CALL (Quelques Minutes aprs Minuit). Ralisateur : Juan Antonio
Bayona. Compositeur : Fernando Velsquez. 1CD Quartet Records.
Pour
chapper son quotidien se partageant entre la maladie de sa mre et les
humiliations rptes de ses camarades de classe, un jeune garon se rfugie
dans un monde imaginaire digne des contes de fes, o il est question de
courage, de perte et de foi. Juan Antonio Bayona sest fait connatre avec
Orphelinat , un film
dangoisse total o la musique est de l'excellent compositeur Fernando
Velasquez. Ils ont collabor sur le suivant au sujet du tsunami en Thalande,
The Impossible . Cest
leur troisime collaboration et on peut dire quils ont beaucoup de
talent ! Fernando Velsquez a abondamment crit pour des courts-mtrages
et de nombreux longs espagnols. Il enchane film sur film ! Sa musique est
empreinte de lyrisme et les orchestrations sont trs travailles. Il sait trs
bien dcrire les univers fantastiques, mme angoissants. Mama d Andrs Muschietti est un
modle du genre. Le CD est magnifique ! Tear Up This Town de
Keane est sur le disque.
https://www.youtube.com/watch?v=AoJLR4AoxkM
LA FILLE DU TRAIN. Ralisateur
: Tate Taylor. Compositeur : Danny Elfman. 1CD Sony Classical n88985375612.
Rachel
prend tous les jours le mme train et passe tous les jours devant la mme
maison. Dvaste par son divorce, elle fantasme sur le couple qui y vit et leur
imagine une vie parfaite jusquau jour o elle est le tmoin dun vnement
extrmement choquant et se retrouve malgr elle troitement mle un
angoissant mystre. Pour ce thriller, Danny Elfman compose pour la premire
fois pour Tate Taylor ( The Help
et Get on Up ). Ici, il
offre une texture musicale avec des sons lectroniques, des percussions et juste
un thme minimaliste au piano accompagn par un violoncelle, des stridences
orchestrales inoues, pour instaurer le climat de tension qui correspond ce
genre de film. Sa musique nous surprend, comme le film, on ne reconnat pas sa
patte, cest magnifique. Un beau CD.
https://www.youtube.com/watch?v=ujrW__T08y8
https://www.youtube.com/watch?v=ujrW__T08y8
SING STREET. Ralisateur : John Carney. Compositeur : compilation.
Dublin,
annes 80, Conor, un lycen dont les parents sont au bord du divorce, est
oblig contrecur de rejoindre les bancs de lՎcole publique dont les rgles
dՎducation diffrent de celles de lՎcole prive quil avait lhabitude de
frquenter. Afin de sՎchapper de cet univers violent, il na quun objectif :
impressionner la plus jolie fille du quartier, la mystrieuse Raphina. Il
dcide alors de monter un groupe et de se lancer dans la musique, univers dans lequel
il ne connait rien ni personne, part les vinyles de sa chambre dadolescent.
Afin de la conqurir, il lui propose de jouer dans son futur clip. Voil un
film musical comme on les aime. Dj avec son prcdent film New York Melody , il entranait le
public dans une vire musicale dans New York. Ici cest le monde de
ladolescence dans une petite ville avec des jeunes qui montent leur groupe et
qui sont influencs par les groupes la mode (Cure, Duran Duran, The Clash,The
Jam, Ah Ah ). Cest un film totalement irrsistible avec une nergie
communicative et de la musique, de la musique, de la musique ! Cest un
trs bon film qui a reu une multitude de prix. La compilation des musiques sur
CD nest peut-tre pas indispensable mais il faut voir lemploi quen fait John
Carney. Bien sr on a la chanson du film, comme le prcdent, chante par le
leader de Maroon Five, Adam Levine. Un film voir et revoir
pour donner la pche !
https://www.youtube.com/watch?v=xIY_b10iehY
ELLE.
Ralisateur : Paul Verhoeven. Compositrice : Anne Dudley. 1CD Sony Classical.
La
compositrice anglaise Anne Dudley retrouve Paul Verhoeven aprs Black
Book . Clbre pour son groupe Art of Noise, elle a particip de
nombreux arrangements pour des groupes et chanteurs clbres. Neil Jordan
lavait engage pour The Crying Game et a reu un oscar pour
Full Monty . Mais on se rappelle plutt des morceaux de
soul que de sa musique proprement parler. Paul Verhoeven a eu deux trs
grands compositeurs sur ses films. On se souvient de la musique de Basil
Poledouris pour Robocop et Starship Troopers
et celle de Basic Instinc de limmense Jerry Goldsmith qui
a t trs souvent copie, imite par des compositeurs connus. La composition
dAnne Duddley est difficilement comparable, on nest pas dans la mme
configuration. Elle a crit une musique simple, mlancolique, sans grande
motion, assez distancie comme le personnage dElle. Les morceaux dagression
sont assez classiques dans leurs conceptions, mais cest une musique qui
fonctionne. Aprs, couter le CD, cest un peu ennuyeux. Mais le film est du
grand Verhoeven.
https://www.youtube.com/watch?v=xhf5LdnAm0g
LES
7 MERCENAIRES. Ralisateur : Antoine Fuqua. Compositeur : James
Horner. 1CD Sony Classical n88985346202.
Aprs
La Rage au Ventre du mme Antoine Fuqua, avec une musique
mconnaissable, plus lectronique (influence de Franglen), James Horner sՎtait
attaqu ce western mais na pu le finir pour cause de dcs. Cest Simon
Franglen, son arrangeur, qui a pris la relve et qui est crdit pour la
premire fois comme compositeur. On retrouve le style de Horner, donc de larrangeur
depuis Avatar . Lambiance est assez sombre. Les
arrangements sont assez tonnants, avec des mlanges dinstruments qui crent
des univers originaux. Quant au film il vaut mieux oublier Les Septs
Samourais et Mercenaires dantan pour regarder
ce film au casting bien plat. A la fin du CD on aura aussi droit au superbe
thme de Bernstein ! En souvenir de Horner, un CD possder.
CEZANNE
ET MOI. Ralisatrice :Danile Thompson. Compositeur : ric Neveux. 1CD Quartet
Records.
Cest
l'histoire de l'amiti et de la rivalit entre Paul Czanne et mile Zola, tous
deux natifs dAix-en-Provence. Le premier, peintre, fils de banquier, qui
n'obtiendra qu'une reconnaissance relative de son vivant alors qu'il devient
l'un des pres fondateurs de l'art moderne. Le deuxime, crivain, orphelin de
pre immigr et de milieu modeste, qui devient chef de file du mouvement
naturaliste dans la France tourmente de la deuxime moiti du XIXe sicle. Ce film est comme beaucoup de
biopic une illustration et manque de point de vue. Alors que peut faire la
musique pour contrebalancer cette suite dillustration ennuyeuse ? ric Neveu
qui est un bon compositeur va fond dans une musique romantique avec un thme
et variation assez banal, musique dsute dans les arrangements. Bref une
musique et un film en total accord : ennuyeux.
Stphane Loison.
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Ce livre, que le compositeur souhaitait publier dans sa maison d’édition à Kürten, se propose de présenter les orientations principales de la recherche de Karlheinz Stockhausen (1928-2007) à travers ses œuvres, couvrant sa vie et ouvrant un accès direct à ses écrits. Divers domaines investis par le plus grand inventeur de musique de la seconde moitié du xxe siècle sont abordés : composition de soi à travers les matériaux nouveaux ; découvertes formelles et structures du temps ; musique spatiale ; métaphore lumineuse ; musique scénique ; l’hommage au féminin de l’opéra Montag aus Licht ; Wagner, Stockhausen et le Gesamtkunstwerk, œuvre d’art total. Les témoignages des femmes qui l’ont accompagné dressent un portrait vif et saisissant de l’homme, artiste génial qui aimait plus que tout la musique et la recherche compositionnelle au nom du progrès de l’être humain...(suite)
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BACH Cantate BWV 104 Actus tragicus : Gérard Denizeau Toccata ré mineur : Jean Maillard Cantate BWV 4: Isabelle Rouard Passacaille et fugue : Jean-Jacques Prévost Passion saint Matthieu : Janine Delahaye Phœbus et Pan : Marianne Massin Concerto 4 clavecins : Jean-Marie Thil La Grand Messe : Philippe A. Autexier Les Magnificat : Jean Sichler Variations Goldberg : Laetitia Trouvé Plan Offrande Musicale : Jacques Chailley
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Pour la première fois, le Tchèque Leoš Janácek (1854-1928), le Finlandais Jean Sibelius (1865-1957) et l'Anglais Ralph Vaughan Williams (1872-1958) sont mis en perspective dans le même ouvrage. En effet, ces trois compositeurs - chacun avec sa personnalité bien affirmée - ont tissé des liens avec les sources orales du chant entonné par le peuple. L'étude commune et conjointe de leurs itinéraires s'est avérée stimulante tant les répertoires mélodiques de leurs mondes sonores est d'une richesse émouvante. Les trois hommes ont vécu pratiquement à la même époque.
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||
5. LA RECHERCHE HYMNOLOGIQUE | ||
En plein essor à l'étranger, particulièrement en Allemagne, l'hymnologie n'a pourtant pas encore acquis ses titres de noblesse en France. |
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6. JOHANN SEBASTIAN BACH - CHORALS | ||
Ce guide s’adresse aux musicologues, hymnologues, organistes, chefs de chœur, discophiles, mélomanes ainsi qu’aux théologiens et aux prédicateurs, soucieux de retourner aux sources des textes poétiques et des mélodies de chorals, si largement exploités par Jean-Sébastien Bach, afin de les situer dans leurs divers contextes historique, psychologique, religieux, sociologique et surtout théologique. |
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7. LES 43 CHANTS DE MARTIN LUTHER | ||
Cet ouvrage regroupe pour la première fois les 43 chorals de Martin Luther accompagnés de leurs paraphrases françaises strophiques, vérifiées. Ces textes, enfin en accord avec les intentions de Luther, sont chantables sur les mélodies traditionnelles bien connues. |
||
8. LES AVATARS DU PIANO | ||
Mozart aurait-il été heureux de disposer d'un Steinway de 2010 ? L'aurait-il préféré à ses pianofortes ? Et Chopin, entre un piano ro- mantique et un piano moderne, qu'aurait-il choisi ?
Entre la puissance du piano d'aujourd'hui et les nuances perdues des pianos d'hier, où irait le cœur des uns et des autres ?
Personne ne le saura jamais. Mais une chose est sûre : ni Mozart, ni les autres compositeurs du passé n'auraient composé leurs œuvres de la même façon si leur instrument avait été différent, s'il avait été celui d'aujourd'hui.
Mais en quoi était-il si différent ? En quoi influence-t-il l'écriture du compositeur ? Le piano moderne standardisé, comporte-t-il les qualités de tous les pianos anciens ? Est-ce un bien ? Est-ce un mal ? Qui a raison, des tenants des uns et des tenants des autres ? Et est-ce que ces questions ont un sens ?
Un voyage à travers les âges du piano, à travers ses qualités gagnées et perdues, à travers ses métamorphoses, voilà à quoi convie ce livre polémique conçu par un des fervents amoureux de cet instrument magique. |
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9. CHARLES DICKENS, LA MUSIQUE ET LA VIE ARTISTIQUE A LONDRES A L'EPOQUE VICTORIENNE | ||
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Au travers du récit que James Lyon nous fait de l’existence de Dickens, il apparaît bien vite que l’écrivain se doublait d’un précieux défenseur des arts et de la musique. Rares sont pourtant ses écrits musicographiques ; c’est au travers des références musicales qui entrent dans ses livres que l’on constate la grande culture musicale de l’écrivain. Il se profilera d’ailleurs de plus en plus comme le défenseur d’une musique authentiquement anglaise, forte de cette tradition évoquée plus haut. Et s’il ne fallait qu’un seul témoignage enthousiaste pour décrire la grandeur musicale de l’Angleterre, il suffit de lire le témoignage de Berlioz (suite). |
Les analyses musicales de L'Education Musicale